Quel étonnant constat que celui du fait que nous étions capables de posséder des opinions similaires sur certaines questions ! Moi qui me figurais que seul l'affrontement était susceptible d'émerger de nos discussions. Cela ne s'avérait pas désagréable en fin de compte d'être capable de délibérations apaisées face à la capitaine du Fendeur des Mers. A dire vrai bien que naturellement querelleur comme un truand des bas quartiers d'une cité marchande, j'appréciais de temps en temps un brin de paix. “Un véritable miracle des Sept !” Le vin Volantain représentait une source de cocasserie fort réjouissante et ainsi mettant de coté mon caractère profondément ombrageux, je me laissai aller dans une manifestation de mon gout passionné pour les plaisantes épopées verbeuses. Comment ne point se gausser devant la perspective de me voir réduit au rang de vulgaire sac à patate sur l'épaule d'une capitaine Valyrienne ? 

Bien entendu, cela ne se produirait jamais car à moins d'ètre accompagné d'une bonne vingtaine de gentilshommes de ma maison m'étant tous tellement loyaux qu'ils pourraient se trancher un doigt si je le leur ordonnais je ne me laisserai jamais aller à une position de faiblesse pouvant m'entrainer dans des ennuis fort douloureux et cela pis encore sur un continent étranger et certainement hostile. Mais, ne souhaitant point souiller l'ambiance tendant à la réconciliation je m'abstiens et tourne ma langue acérée dans ma bouche. 

Mon rire s'élevant joyeusement dans l'atmosphère brulante des appartements particuliers d'Ellayna. “Il faut savoir jouir des plaisirs de l'existence convenablement. En tant que Dornien j'adhère à l'hédonisme le plus raffiné. Cependant, la mesure est également source d'appréciation comme vous le dites.” Le hochement de tète qu'elle m'offrit suite à ma remarque sur son second confirma mon propos. “Je comprends mieux le lien vous unissant en ce cas.” Son expression interloquée suite à mon observation quant à son équipage devait bien valoir son pesant d'or mais elle fut bien vite apaisée par un rire sincère. “J'ai mésestimé les choses. Vous ètes d'une discipline sans égale. Je sous entendais lors de vos sorties et de vos permissions comme vous évoquiez les tavernes à l'instant. Une véritable famille en effet...” Attendant patiemment la réaction de la veuve à la légende de ma maison, je la contemple d'un air énigmatique sans dire un mot. Pour une personne ayant affirmée croire aux spectres, je la trouvais bien peu bavarde. 

Jusqu'à ce qu'elle fasse ce qui s'apparentait certainement à un geste protecteur dans les croyances Valyriennes. Ah tout de mème ! Arc de cercle sur mes lippes. “Il était tout cela et bien plus que cela. En effet, il fallait posséder une bravoure sans égale ainsi qu'une confiance aveugle dans ces spectres pour agir ainsi. Mais, les spectres l'ayant sauvé je pense qu'il a voulu leur rendre hommage en agissant de la sorte. Demander plus alors que ce dernier avait fait batir toute une cité et une forteresse en leur nom...” La réalité était éventuellement moins mystique et digne de frissons. La montagne était tapissée de tunnels troglodytes secrets. Des tribus barbares insoumises avaient certainement vécu en son sein. Les fameux spectres auraient pu ètre des guerriers ayant eu pitié d'un homme aux portes de la mort mais pas des rustres s'imaginant pouvoir violer leur sanctuaire. Mais cela serait bien moins intéressant et romanesque. “Et vous capitaine ? Ne souhaitez vous pas me conter les origines de votre maison ?” 

Sa remarque sur les Sept me paraissait aussi présomptueuse qu'un ruffian venant de commettre un impair de haut vol qui tenterait de s'enfuir au nez et à la barbe d'une patrouille d'alguazils. Car en dépit du fond de vérité puisant racine dans le caractère caustique de la tournure de notre entrevue, je ne saurais me montrer aussi catégorique quant à un sujet aussi épineux. Disons que je ne me considérais guère compétent pour affirmer incarner l'opinion de tout un chacun. Je doutais sérieusement de la possibilité d'une entente cordiale dans les cœurs des villageois ayant vu leurs villages raser pour quelques jours de délai en trop dans le paiement de la gabelle des conquérants. M'enfin, inutile de ternir la sublime pacification de cette vaste pièce. "Seuls les Dieux sont au fait de la volonté des Dieux. Gloire à eux !" Gloire pour leur omniscience omnipotente ainsi que leur indécrottable éternité. L'on n'offrait pas de santé aux Sept qui étaient, sont et resteraient à jamais. Les Dieux n'étaient point des compagnons de beuverie pour les vulgaires mortels que nous étions. 

Je levais néanmoins à mon tour ma coupe afin de suivre son mouvement. "Vous avez bien raison capitaine. La mesure est ce qui permet de jouir de l'existence de manière optimale. Se réfréner en deca de la limite afin de pouvoir de nouveau plonger dans les dits délices plus tard. Sage réflexe." L'hédonisme était semble t'il inhérent à la philosophie Dornienne cependant nous n'étions point non plus d'immondes débauchés sans foi ni loi n'aspirant qu'à profiter de tout. Le caractère hostile de notre environnement naturel était le responsable de ce gout du raffinement mais également son limitateur. Encore une fois, nous étions le fruit de notre contrée. Inutile de se demander pourquoi nous lui étions si loyaux. "Il est vrai que je ne me fie uniquement qu'aux apparences en l'état." Son expression changea du tout au tout sur la question de son navire et de l'ambiance folle que j'y avais associé de prime abord au vu de son intérèt pour les chants et les danses... 

"Merci d'avoir clarifié les choses dame Cellarys. En effet, vous ètes la marine militaire de l'empire. De la mème manière qu'en tant que chef de guerre, j'attends de mes soldats qu'ils respectent certaines directives. Vous avez néanmoins raison voir ses hommes de bonne humeur est plus agréable que les contempler bougonner dans leurs barbes." La crainte manifeste dans son attitude suite à mon récit relatif aux origines de ma maison et de notre légendaire forteresse m'arrachait un regard amusé. Ainsi, même les terribles Valyriens pouvaient craindre la mort et ses enfants. "Un spectre se nourrit bien plus d'âmes que de sang car c'est une créature immatérielle de l'entre deux monde. Je connais ces légendes. Elles donnent matière à réfléchir en effet. Quoi qu'il en soit, les spectres avaient mon ancêtre à la bonne." Son interrogation me fit me rendre compte que je m'étais quelque peu embrouillé car j'avais compté entendre les origines de sa maison natale. D'un haussement d'épaules nonchalant, je répondis. "Pourquoi pas les deux capitaine ? Ma curiosité n'a point de limite." 

Mon instinct me souffle non sans une pointe d'ironie cocasse que la relation de la veuve capitaine avec les Dieux quels qu'ils soient n'était guère une belle histoire d'amour mutuel. Quelque chose dans son ton lorsque nous abordions le sujet m'amenait à penser qu'elle ressentait bien de l'amertume envers la divinité. Bien entendu, il ne s'agissait que d'une modeste impression personnelle aussi je pouvais tout aussi bien me fourvoyer dans les grandes largeurs. Cependant, mon sixième sens ne me trompait que bien rarement depuis ma plus tendre enfance. D'autant plus lorsque ce dernier était renforcé d'années passées à observer les membres de la cour à la capitale. 

Quoi qu'il en soit, les pointes d'humour plus ou moins appréciables et plus ou moins naturelles émaillant nos échanges de pauses bienvenues entre deux piques voilées coulaient avec la vivacité d'un torrent de montagne dans un fleuve. La cocasserie s'était invitée sans crier gare dans notre entrevue et je me rendis compte que ce n'était guère le point fort de la Valyrienne. Fort heureusement, j'étais suffisamment bin public pour me gausser avec elle et non d'elle. "Ah les cheveux ! On a tendance à négliger les effets destructeurs d'une douleur aux cheveux à l'issue d'une cuite brutale. Oh mais ce n'est pas la seule chose que vous avez de féminin je vous rassure." Portant ma coupe d'eau fraiche à mes lippes, je la jaugeais avec l'attention d'un faucon offert en présent à la femme tributaire de tout mon amour passionné. 

Elle ne souhaitait guère s'étendre sur certains points. Ambiance apaisée mais limites nettes ! Nous ne perdions point de vue que nous n'étions pas à proprement parler dans le même camp mais dans deux camps alliés par l'occasion et la fortune. Un sourire en coin étira ma bouche en un plissement goguenard. "Cela va de soit. Vous restez des soldats avant d'être des marins..." Je repris mon repas avec appétit alors qu'elle me livrait de fort généreuse manière la légende de sa maison de naissance. "Oh mais ne mésestimez pas de votre légende familiale. Il ne s'agit en rien d'une compétition. Et puis je dois dire que les spectres sont assez communs à mes yeux. Mais des hommes capables de voler par leurs propres moyens voilà quelque chose qui défie l'entendement. Vous avez donc abandonné les sommets pour les rivages. Merci pour ce récit. Il y a des montagnes et des rivages à Dorne. Si vous souhaitez vous reposer dame Cellarys. Dites le moi et je m'éclipserais. Je gage que vous devez être épuisée..." 

La réflexion sur les cheveux pour somme toute anodine qu'elle s'avère en dévoile quelque peu sur la veuve. En effet, en l'occurrence les guerrières avaient tendance à se couper les cheveux afin de singer les hommes pour se faire plus aisément accepter de ses derniers ainsi que tout simplement pour combattre avec plus de facilité. Car perdre un duel à mort en raison d'une prise offerte à l'ennemi en raison d'une tendance à la coquetterie serait aussi humiliant que pathétique. Imaginez un peu l'épithète posthume. Ci git la plus redoutable guerrière du monde connu. Icelle a périe en raison de la manifestation la plus explicite de sa féminité. Cocasse ou tragique c'est selon... 

Enfin, la veuve hausse un sourcil de surprise face à ma remarque relative aux autres manifestations de sa féminité pourtant masquée sous une armure. Il fallait dire que je ne l'avais point contemplé en armure mais dans une tunique aussi vulgaire que simpliste qui ne masquait en rien la partie évoquée. “Certes, mais je n'ai guère eu le loisir de vous découvrir ainsi harnachée pour le combat.” Nous passons rapidement au sujet voisin qu'est son équipage. Un sujet l'intéressant et la passionnant bien davantage que sa poitrine pour des raisons évidentes. En tant que soldate elle devait la considérer comme une gène plus qu'autre chose. Son mari n'avait point du partagé son avis pratique. 

“Des légions des mers dites vous. Cela m'a l'air impressionnant. Il faut confesser que la réputation de la marine Valyrienne terrifie les marins d'Ibbn à Asshai les Ombres en passant par les eaux Westerosis. Mais, nous autres hommes de l'ouest sommes bien trop belliqueux pour connaitre la peur.” Un sourire amusé effleure le bord de mes lippes résolumment bavardes en cette fin de journée tandis que je me figure une bataille navale entre l'empire Braenaryon et la terrible machine de guerre océane. Quelle perspective alléchante que celle de voir deux ensembles voués à l'hégémonie s'entre déchirer permettant aux peuples de se libérer des suites d'un anéantissement mutuel. “Mèmes les meilleurs soldats ont besoin de se laisser aller de temps en temps. Votre élite des mers ne fait pas exception à la règle. Une bride trop serrée a tendance à empecher le cheval de faire preuve de toute sa puissance.” Pour l'instant, le seul capitaine de la flotte Valtigar que je connaissais se limitait à la célébrissime et redoutée Jentys de la maison Cellarys. 

Et je n'avais pas spécialement le désir d'étendre mes connaissances en la matière. Elle était quant à elle intéressante sous bien des angles. “En effet, ils ont su faire preuve d'un sens de l'adaptation sans égal. Je les admire énormément. Tout le monde n'en est point capable.” Tandis qu'elle se remit à picorer dans son assiette je continuais d'engloutir ma part avec un raffinement certain ce qui tenait de la gageure. “Eh bien si vous n'avez point sommeil alors je gage que nous avons encore de longues heures devant nous. C'est le lot de bien des soldats que de ne point jouir d'un sommeil étendu.” Servant une nouvelle coupe d'eau parfumée à mon invitée face à l'ardeur de sa soif. Je m'exécute avec une célérité prévenante. “La lune un immense oeuf de dragon ? Intéressant bien qu'hasardeux. Nul dragonnier n'a semble t'il tenté d'aller vérifier cette théorie ? Si cet oeuf éclot un jour cela signifiera la fin de toute vie. Vous suivez donc la lune ? Cela a t'il un rapport avec les marées ?”

Le voeu pieu de la capitaine Cellarys quant à son espoir de me faire découvrir un jour prochain son attirail guerrier m'arrache un sourire de connivence. Il fallait dire qu'elle était consciente de ma curiosité envers l'exception qu'elle représentait dans ce monde résolument masculin. Aussi, la perspective de la contempler bardée d'acier et de métal s'avérait bien alléchante pour moi. Non point pour de mauvaises pensées mais réellement afin d'élargir ma culture générale histoire que je puis dire. Que nenni il y a bel et bien des guerrières de part le monde et de bien redoutables qui plus est. “Espérons que ce jour soit proche en ce cas.” Je ne pouvais décemment estimer ce délai tant je ne connaissais pas l'état de son harnois martial ni sa qualité et encore moins celui de la guérison de ses terribles fractures de sous le bassin. Il s'agissait donc par conséquent d'un vœu particulièrement pieu. Seuls les Dieux pouvaient savoir s'il se réaliserait ou non. 

Mais, nous l'espérions tous deux. Après tout nous nous étions engagés à nous offrir un duel mémorable. “En effet tous les hommes connaissant la peur capitaine seulement ceux rompus à s'entredéchirer avec plus d'entrain que des fauves en viennent souvent à se laisser dominer par d'autres émotions telles que la haine et la rancœur. Elle ne devient qu'une des variables parmi tant d'autres. Et de ce coté du détroit, nous ne sommes point comme vos nombreuses cités. Nous avons la guerre dans les veines.” Nous nous rejoignons finalement de nouveau sur la question de la bride à lâcher aux hommes de guerre sous nos ordres. Trop de discipline nuisait au final à la discipline car elle venait à créer des frustrations et des manques qui ne pouvaient que s'avérer néfastes à son maintien. “Exactement dame Cellarys ! La loyauté s'acquiert par la présence et davantage lors des évènements critiques.” 

Je me rends finalement compte que certaines réponses de Jentys ne sont en rien liées à une maitrise imparfaite du Westerosi mais bien à un manque de talent dans l'art oratoire ce qui me surprend quelque peu car une capitaine se devait d'harranguer ses troupes avant l'assaut. Cependant, faire hurler de rage des soudards s'avérait néanmoins différent d'un discours argumentatif et fluide doublé d'une aisance à raconter tout et n'importe quoi. “Les Valyriens sont des magiciens ayant su se tailler un empire depuis leurs modestes montagnes. Ils sont capables de bien plus que de l'adaptation. Tout à fait capitaine. Nous pourrons discourir jusqu'au matin ou à votre sommeil.” 

Je ressens une bouffée de compassion envers la veuve suite à ce constat. Car, en tant que seigneur j'avais été habitué à ressentir cet élan envers ceux se trouvant en dessous de moi que ce soit en terme d'érudition, de compétence, de naissance ou de richesse. “Une expédition sans retour pour prouver une théorie étonnante... Quelle bravoure ! Il est vrai que cela fait parfaitement sens. Les marées sont guidées par la lune. C'est très certainement pour cela. Parlez moi des étoiles d'Essos. Je souhaite les imaginer. Vous me donnez envie de posséder ma propre flotte dame Cellarys rien que pour contempler les étoiles depuis un pont de navire.” 

"Il n'y aura aucune complication ne vous en faites pas. Vous ètes robuste, solide, forte. Votre corps se remettra rapidement avec les soins adéquats et vous ètes entre les mains de l'un des meilleurs guérisseurs de Dorne. Mais ne lui répétez jamais cela s'il vous plait. Deux mois de répit pour les ennemis de la maison Valtigar en ce cas." En réalité, je ne pouvais point me prononcer car je n'avais que de bien vagues connaissances sur le domaine mais si Meros lui avait affirmé que deux mois seraient suffisants c'était que deux mois seraient suffisants. Le vieux roublard était bien des choses mais incompétent n'en faisait nullement partie. Le sujet suivant fut un brin moins compassionné car il s'agissait de nos capacités naturelles et instinctives pour le versement du sang d'autrui. "Je pense aussi que cela se situe dans les gènes. Tout le monde n'a pas cet instinct de férocité." Cet instinct était ce qui séparait les moutons des loups. Les guerriers des pacifiques civils. Cet instinct était la base de l'ambition. Le ferment de la conquête. Le ciment de la gloire. "En effet, les meilleurs troupes sont celles dans lesquels une fraternité existe. Les autres ne sont que des amalgames de tueurs." J'esquisse un sourire face à sa remarque relative à la survie. "Personne n'est fondamentalement là pour mourir. Cependant, il faut bien confesser que certains ne sont pas très doués pour cela." Les légendes des Valyriens sont particulièrement fascinantes n'en déplaise à ma rancœur envers ce peuple. Elles sont toutes empreintes de majesté et de mystère. Elles font rêver. Mais son nécessairement toutes associées à la magie ou aux dragons. "J'aimerais vraiment pouvoir les observer à présent. Cela représente un spectacle méritant que l'on s'y attarde. Quelle classe de navire me conseillerez vous ? Quel est le plus rapide ? Le plus confortable ? Quel nom me conseilleriez vous ?"

"Il est vrai que ce cher Meros est d'une efficacité redoutable dans l'art de soigner les hommes. J'en sais quelque chose. Bien entendu, si vous allez devoir déserter les champs de bataille ce n'est point le cas de vos compagnons. Nos ennemis ont bien du souci à se faire. Nous tacherons de nous montrer à la hauteur de votre exemple capitaine." Sa remarque sur les ennemis me rappelle que les Valyriens qui avaient conquis Dorne ou du moins sa partie la plus attenante au détroit à coups de menaces de dragons et de légions de fer souhaitaient faire passer cette conquête pour une alliance de bonne et due forme. Alors que quand bien même, mon chevalier n'aurait point accepté d'unir l'une de ses filles au prince Valtigar nous n'aurions toujours eu d'autres choix que de les suivre. J'imagine qu'il fallait savoir apprécier cette volonté apparente car nous aurions tout aussi pu être réduits en esclavage n'est ce pas ? "L'éducation et les épreuve en effet mais il convient de le posséder en soi en premier lieu car l'on ne peut guère bâtir une forteresse sur du sable." 

La veuve détourne le regard pour observer ses mains et il ne fait aucun doute qu'elle se souvient de certains évènements inhérents à ce dont nous discourrons. Pour ma part, je l'avais eu chevillé au corps depuis mes premiers pas mais cela n'avait rien d'étonnant car premièrement j'étais Dornien, deuxièmement j'étais le fils de Mors Toland le Sombre et d'Asharra Dalt la rose de l'est et enfin j'étais trop hargneux envers certaines choses pour ne pas ètre doté d'un instinct de survie digne d'un chacal du désert. "Si vous n'étiez pas né à Dorne. Vous n'auriez de toute manière point eu le choix que de les aimer. Chez nous, vous auriez pu laisser libre court à vos penchants guerriers dans une certaine mesure." Quant à la question des troupes et de l'esprit de fraternité dans laquelle il fallait nécessairement les faire baigner afin de s'assurer d'une efficacité supérieure et d'une loyauté infaillible, nous nous rejoignons naturellement sur ce point. 

Je me sentis soudain mal à l'aise face à la lueur de nouveau décelable dans les yeux améthystes de la Valyrienne. Quelque chose de vaguement dérangeant. Je ne parviens point à mettre un sens sur cette impression. "Les deux je dirais capitaine." Me rendant compte que je l'avais littéralement bombardé de questions dans une langue qu'elle maitrisait à peine suite à son silence de réflexion, je m'excuse en bredouillant dans ma barbe. "Mille excuses dame Cellarys. Eh bien un navire pour la vitesse afin de ne pas passer trop de temps en mer car je n'ai guère le pied marin. Mais suffisamment confortable pour que je puisse en apprécier la vie. Le nom du navire en question. Le Spectre de Dorne me parait adapté. Un spectre est foncièrement rapide et surprend toujours... Faites le entrer je vous prie. Jaositsos ?" Conclus-je avec un sourcil interrogateur.

Sa remarque sur l'alliance entre les Valyriens et les Dorniens expressément tournée vers votre humble serviteur et son ressentiment inavoué pour sa participation dans la chute de sa maison suzeraine me pousse à imaginer le futur. Ma haine de la Allyrion et de son amas de parjures lui servant de fidèles dépassait elle celle que j'éprouvais secrètement pour les Volantains s'imaginant que Dorne représentait leur base privilégiée d'accès à Westeros ? Un débat bien compliqué que celui ci. Mais si je devais tuer d'autres Dorniens que j'execrais pour leur trahison pour un maitre étranger... Je le ferais bien évidemment. Aussi, je laissais un sourire énigmatique se peindre sur mes lippes avant de répondre. "J'ai le combat dans le sang et pas la moindre once d'affection pour ce ramassis de parjures se prétendant légitimes." Les épreuves de l'existence façonnaient les hommes en fonction de leur gravité, leur dureté et de leur intensité mais révélaient également la valeur des hommes selon leurs réactions. Les miennes m'avaient endurci mais c'était le lot de tout les affrontements violents vous occasionnant sa gamme de désillusion sur la nature humaine ainsi qu'une plongée instantanée dans les mers du cynisme. 

"Nous sommes tous différents en effet." Lorsqu'elle évoque ce qu'eut été son existence de ce coté du détroit, je sens un sourire un brin plus sincère tendre le bas de mon visage. "En effet dame Cellarys, j'ai bien peur que vous auriez été mal vue qu'importe vos origines. Ce monde n'est pas encore prèt à accepter des femmes combattantes... Hélas." L'échange de regard dura bien trop longtemps et me permit de constater des vérités déplaisantes dans ses prunelles améthystes. Je craignis de comprendre ce que j'y avais remarqué. Aussi, ce fut avec un entrain précipité que je me mis à dégoiser comme une poissonnière de place marchande au sujet des navires. Un sujet qui devrait à n'en point douter la libérer du poids de son âme. "Un jonc de Yiti ? J'en ai vu une image dans un ouvrage fort ancien. Un style particulièrement oriental. A choisir, je préférerais largement un navire des Iles d'Eté. Les Cygnes des mers. Eux aussi sont réputés rapides mais certainement moins confortable. C'est décidé en ce cas. Je dois acquérir le Spectre de Dorne !" 

L'arrivée soudaine d'un jeune Valyrien vint interrompre notre discussion enflammée. Je notai avec satisfaction que le mousse était particulièrement bien éduqué pour un marin. Mais cela n'avait rien d'étonnant au vu de son phénotype Valyrien. La jeunesse se lisait sur ses traits enfantins. Pourtant, je ne doutais point de sa férocité en raison de son appartenance à l'équipage de ma convalescente. Un signe de tète en sa direction avant que celui ci ne s'agenouille devant sa capitaine. Un sourire amusé apparut au coin de mes lèvres. "Enchanté Sealros. Votre maitrise de l'étiquette est impressionnante jeune homme. Qui ne serait point fier d'appartenir à l'équipage le plus redouté de la marine impériale ? Racontez moi donc votre première bataille mon garçon. Souhaitez vous devenir capitaine dans un avenir lointain ?" 

Post effacé suite à une erreur dans le post du dernier message du sujet. 

Impossible de déceler la moindre connivence sur les traits de mon interlocutrice tant le visage de la Cellarys reste aussi impassible qu'un bloc de marbre. Une qualité certaine pour une seigneure de guerre à n'en point douter car nous nous devions d'apparaitre comme des créatures quasiment mythiques afin d'effacer les craintes et les terreurs des cœurs et des esprits de nos subordonnés. Tel était le dur lot des meneurs. "La monotonie est l'ennemi de la passion et une vie dénuée de passion n'est pas une vie digne d'être vécue." Cette fois par contre, je remarque un brin d'exaspération dans son regard suite à mon propos sur les Dieux. Une fugace révélation concordant avec l'impression latente de l'absence de piété frontale et farouche de la Valyrienne. Un mauvais point en sa faveur car si j'étais un homme possédant de nombreux défauts et de nombreuses aspirations pécheresses je n'en demeurais pas moins un véritable bigot de mon culte. De ce coté ci du détroit, la Foi qu'importe la religion était essentielle à la vie de la majorité. Si même un homme sulfureux comme moi accordait autant d'importance à la religion alors je lui laissais imaginer les âmes plus vertueuses. Aucune croisade en Essos tandis qu'elles étaient légions par chez nous. 

"Nul n'est intime des Dieux même pas leurs représentants proclamés. Ils sont bien loin de nous mais sans eux nous ne sommes rien." Visiblement mon projet de construction d'un navire personnel ne semblait guère une potentialité réaliste à ses yeux. Je laissai un sourire en coin étirer la chair du bas de mon visage. Tout le monde sous estimait l'étendue de ma fortune. Sans être vénal, j'appréciais le luxe et le raffinement. Et un statut de sang privilégié n'était point suffisant pour en, jouir pleinement. Cependant, je ne vois en aucune mesure la nécessité de détromper les à priori sur la question. "J'espère pouvoir voir cela arriver capitaine." Mon interrogatoire mu par une curiosité bien réelle à l'égard du jeune mousse du Fendeur des Mers me permit de découvrir que ce dernier était un esprit vif, éclairé, précocement élevé, respectueux et sincère. Une combinaison que l'on s'attendrait davantage à trouver chez un héritier d'une grande maison que chez un simple fils de soldat impérial. Un sourire franc vint accueillir le propos du garçon. 

"La bravoure n'est nullement l'absence de peur mon cher ami. C'est la capacité à la dépasser pour accomplir son devoir. Or c'est précisément ce que tu avais fait. La fraternité est la plus belle des choses liées au métier des armes. L'entrainement et l'habitude fait de vous les rouages d'une seule et unique machine. L'on ne joue pas lorsque la mort est dans l'équation. Votre capitaine est une guerrière d'exception et une officier compétente aussi je ne suis guère surpris. Ah tu es donc le seul marin de la famille. Les autres ont comme moi davantage d'affection pour le plancher des vaches." Portant ma coupe d'eau à mes lippes, je chassais la soif de quelques gorgées rafraichissantes avant de reprendre. "Ton pater doit être très fier de toi Sealros. Essos ne te manque point ? As tu remarqué une jolie Dornienne dans les environs ? Souhaites tu une sucrerie ?" 

"Il est vrai que vous voyiez toujours le même paysage à perte de vue. Des flots sempiternels et identiques. La routine de la vie à bord doit s'avérer parfois redondante. Mais toute vie est empreinte de monotonie par essence. Au moins, l'aventure de la navigation vient tempérer cela je suppose ?" Espérant qu'elle me parle davantage de navires et de la vie de marin quand bien même je n'avais absolument guère le pied naval, je tendis une oreille curieuse dans sa direction non sans la couver d'un regard amical. Il semblait que son estomac était encore trop sensible à la quantité excessive ingurgitée car elle ne se mit point à reprendre les hostilités avec son généreux plat. Je m'interrogeais un instant au sujet des Valyriens. Etaient ils tous des païens dénués de fibre religieuse ? Ou mon interlocutrice unique en son genre était elle néanmoins une exception attisant ainsi encore davantage le caractère remarquable de son identité ? 

Avant que je ne me sois trop engoncé dans mes réflexions tortueuses la dame de la maison Cellarys me surprit avec une demande incongrue au regard du manque de piété affichée jusque là. "Oh mais il est normal que vous ne soyez point au fait de nos pratiques religieuses. Vous n'êtes ici que depuis peu à dire vrai. Alors nous avons sept figures tutélaires qui sont les sept facettes d'une seule divinité. La mère, la jouvencelle, le père, le guerrier, l'aïeule, le ferrant et l'étranger. Je pourrais vous en dire davantage sur ma religion mais cela nous occuperait toute la soirée voire la nuit entière. Je prie le plus souvent le guerrier, le père et l'étranger." Mon instinct me souffla que la capitaine du Fendeur des Mers se moquait comme d'une guigne de ma Foi mais je me devais de tenter de l'y conduire en tant que fidèle dévot des Sept. Le sujet de la construction navale nous conduisit sur une question moins polémique et au sujet de laquelle elle ne pouvait que se sentir bien plus à l'aise. 

"Vous avez raison. Il serait terriblement dommage que mon navire personnel soit coulé avant mème que je ne puisse en profiter. J'attendrais donc que la guerre soit terminée." Après avoir écouté les réponses admirables du jeune homme plein de discipline, de rigueur et de sérieux martial je me tourne de nouveau vers Jentys afin de comprendre pourquoi le mousse était venu. Souhaitait il vérifier que sa capitaine se trouvait bien en sécurité entre les pattes de l'horrible Dornien que j'étais. Mais, les mots ne passèrent point mes lippes. Aussi, je reportai mon attention sur Sealros. "Vos hommes ont visiblement déjà mangé en effet. Et ils sont bien trop disciplinés pour se laisser aller à un écart alimentaire en notre compagnie. Avez vous beaucoup de fils de légionnaires dans vos rangs ? Les légionnaires sont ils tous des descendants de Valyria ?"

Le sujet de la monotonie s'avérait franchement intéressant car il me semblait bien à moi cabotin seigneur d'un fief mi montagnard mi côtier mais dénué du moindre attrait pour les flots les plus prévisibles ou imprévisibles qui soient que ce mode de vie était fondé sur une répétition certaine. Or ce caractère sempiternel ne serait en rien pour m'agréer. Le plancher des vaches évoluait constamment que ce soit par les effets de la nature ou des saisons ou même les activités des hommes. Là ou les océans restaient inlassablement immuables. "Cela pour s'avérer reposant. Il faut avoir le pied marin pour le penser. Ce roulis interminable aurait rapidement tendance à éreinter mes nerfs. Mais, contempler le même paysage peut produire cet effet j'imagine. Je vois c'est vous qui créez les conditions de l'aventure bien davantage que l'aventure qui vient à vous. En même temps vous n'avez rien de vulgaires forbans laissant au Destin le soin de les guider au gré de ses caprices. Vous êtes des soldats obéissant aux ordres. Ah les tempêtes, le fléau des marins... 

Etrangement, j'aimerais en vivre une en mer afin de ressentir l'adrénaline de ces instants meurtriers." La posture nonchalante de la capitaine lors de sa quête d'informations relatives à ma Foi tranchait quelque peu avec la gravité du sujet dans mes yeux de fidèle. Malgré, cela j'appréciais sa curiosité un brin caustique avec sincérité car tout véritable croyant ne pouvait que se réjouir de tenter d'attirer une âme perdue dans le giron de la lumière des Sept. "Ne vous excusez point et je vous remercie de votre intérêt pour ma religion. Je pourrais vous en parler durant des heures cela dit. Non pas tout à fait l'étranger représente bien cela mais bien plus. Il s'agit de la personnification de l'incertitude, de la crainte de l'inconnu, de la figure de la mort qui vient réclamer son du. L'Etranger représente en quelque sorte le contrecoup des autres figures plus lumineuses." 

Concernant l'impossibilité de voir mon désir se concrétiser vis à vis de mon propre gréement je masquai admirablement bien à mon gout la déception lacunaire que m'inspira son analyse pertinente quant à la sécurité insuffisante des mers. Si, je le faisais construire sur la terre et abrité dans un hangar avant de le mettre à flot une fois les mers plus paisibles... Enfin, je me rendis à la vérité de l'experte et cessai donc de me trifouiller les neurones à ce sujet. L'on n'avait pas toujours ce que l'on souhaitait en ce bas monde. "De nombreux paramètres entrent en jeu j'en ai bien conscience capitaine. Patience est mère de vertu. J'attendrais..." Le jeune fils de légionnaire devenu un véritable mousse émérite sous l'égide du commandement rigoureux de dame Cellarys acheva de dévoiler les raisons de sa présence en ces lieux intimistes en accomplissant son devoir envers sa capitaine. Détournant le regard afin de ne point m'immiscer dans ce qui ne me concernait nullement, je le reportai fatalement sur Sealros lorsque ce dernier nous fit ses au revoirs de manière fort courtoise.

J'aimais bien ce jeune homme. Il avait de l'éducation, une posture droite, de la rigueur morale... "Je vous remercie jeune Sealros. Saluez le second du capitaine de ma part. 

Et dites lui bien qu'elle se trouve entre de bonnes mains ici. Nul besoin de s'inquiéter outre mesure." Une fois le membre du Fendeur hors de la pièce, j'esquissai un sourire de connivence face à celui de la veuve suite à son explication du terme Valyrien qu'elle associait au nom du garçon. "J'ai moi même eu une expérience similaire. Daemon Sand le fils de mon premier protecteur ser Lyonnel. Je l'ai élevé comme un père. Oh nous n'avons que huit ans d'écart mais c'est moi qui ai assumé cette tache. En tant qu'ainé de ma fratrie j'avais d'ores et déjà l'habitude de m'occuper d'enfants plus jeunes que moi. Il me considère comme son père. Le qualifier de chiot eut été lui manquer de respect. Lionceau serait plus adapté. Mon cousin est devenu un bretteur redoutable, dangereux, efficace et implacable. C'est en quelque sorte mon ainé."