Ce nouveau monde où j'entendis des dames sur les toits (An 1, mois 6) [Tour XI - Terminé]

Comment faisait les gens du commun s'ils étaient aveugle ? Une réponse assez simple en soit.

" Ils sont soit morts soit mendiants. Mort si c'est depuis la naissance car ils sont un poids pour la famille. Surtout si c'est une fille. Mendiants si c'est un accident je dirais. "

Ce n'était normalement pas à elle que je devrais expliquer que le monde était noir, obscure et pleins de terreur. Et que la différence était aussi bien vu qu'une épée dans un flanc. Je pouvais aussi le savoir.

" Et pour tout te dire, j'ai déjà entendu des serviteurs dirent qu'ils préféreraient noyer leur bébé que d'en avoir un aveugle comme moi. "

Un poids. Ça je l'avais assez entendu quand je me cachais. Peut être était-ce vrai. Et elle se mit à parler des chevaux et de la liberté. Lune en tout cas marchait tranquillement à mes côtés sans broncher. J'eus un sourire amusé pour Lyanna.

" Lune a du mal à t'accepter sur ton dos. Ca doit être la seule qui ne t'aime pas beaucoup ! Je vais finir par croire que c'est une deuxième Jenny ! Quoi que non. Elle est trop douce et gentille pour cela ! "

J'écoutais paisiblement ce que me disait Lyanna. Certes servir de monture n'était sans doute pas leur rêve. Mais ce n'était pas de cela qu'elle voulait le parler mais bien de notre place dans ce monde. J'eus un soupir triste. Je comprenais ce qu'elle voulait dire. Je secouais légèrement la tête.

" Ta nature n'est pas celle d'un cheval. Mais celle d'une prédatrice. C'est une grande différence entre toi et un cheval. Entre cela et le fait que tu sois humaine et que tu parles. Mais ne crois pas que je sois une idiote pour ne pas comprendre ce que tu dis. Tu étouffes car on essaie de te mettre dans un rôle qui n'est pas fait pour toi. Les chaînes dont tu parles sont liées aux devoirs qu'on nous impose. Toi plus qu'à d'autre car tu es princesse. Nous sommes femmes dans un monde fait pour les hommes. Certaines ne voient pas ces chaînes parce qu'il s'agit de quelque chose de naturel pour elles. Cependant tu es éprise de liberté et de combat. Je pense que tu peux briser ces chaînes. Tu ne serais ni la première ni la dernière tu as l'Imperatrice en excellent exemple. Même si tu n'as pas de dragon. Mais n'applique pas cette vision aux proies. Leur nature profonde est la fuite et la peur face au danger. Ils passent plus de temps à brouter qu'à galoper réellement. Du moins je le pense. Tu serais plus celle leur sautant sur la croupe pour les dévorer. Donc, je vois aussi étrange que cela puisse paraître, ce que tu veux dire et je le comprends. Sauf que j'ignore comment t'aider à briser tes chaînes. "

Je le sentis le Barral. Sans même que Lyanna ne me le dise. Je lâchais son bras pour m'en approcher, retirant au passage un de mes gants pour poser ma main nue sur l'écorce, je percevais presque la sève battre sous son armure de bois.

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A toutes ses paroles, je ne dis rien, et la laisse parler de A à Z jusqu’à ce que finalement elle s’approche d'elle-même du Barral, attiré simplement par ses sens décuplés. Elle venait de lâcher mon bras pour s’en approcher seule. Sans que personne ne lui dise rien. Elle le touche du bout de ses mains nue afin de profiter de son contact si particulier. Voilà ce que j’attendais de sa part pour lui répondre.

“Tu captes des choses que je suis incapable de ressentir par vrai ? Tu as senti la présence du Barral sans le voir. Tu es peut être aveugle mais ta condition a créé chez toi des capacités que toi seul a...”

Je m’approche pour la rejoindre et pour finalement répondre à tout ce qu’elle avait dit.

“Le monde est noir, il est vrai, et bon nombre finisse mendiant, mais parmis eux, certain dévellope un dons et voit des choses que personne n’est en mesure de voir. On dit même que certains sont capables de rivaliser au combat à l’arme blanche. Ta cécité n'est pas une tare, elle est ta nature. Tous ceux qui ont osé dire ces horribles choses dans ton dos ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. Malheureusement, à trop les écouter, tu les crois. Cesse, et écoutes moi désormais, tu es bien plus forte que ce qu’ils pensent. Cela te demandera du temps mais avec de l’entrainement, tu peux tout aussi bien que moi voir ce monde à ta façon.”

Je touche alors sa main qui tient l'écorce.

“En réalité, tu le vois déjà.”

Je me retire alors d’elle, persuadée que si je la gifle une cinquantaine de fois d'affilée elle finira par éviter la cinquante et unième de mes tentatives. C’est ce que l’on appelle l’instinct. L’aveuglement ne l’en a pas privé.

“Crois tu que je cesserais de parler de ma condition de femme enchainé si l’on me coupait la langue ?” Lui fais-je remarquer pour exemple avec humour. Sûrement pas ! Pas, tant que j’aurais un souffle de vie en moi je ne cesserai mon combat. Je crierais des bruits incompréhensibles, je gesticulerais des mains, j’écrirais sur les murs, peut être même que je taillerais l’écorce du barral mais mon message sera entendu.

“Laisse-moi t'entraîner à devenir indépendante, Khayley. Cela me ferait tellement plaisir.”

Toucher le Barral c'était comme sentir une puissance endormie profondément. Bon pas endormie. Une puissance qui coulait goutte a goutte sous une armure de bois. Quelque chose de terriblement dangereux et que pourtant je refusais de ne pas toucher. C'était presque comme-ci au fond de moi il y avait un souvenir de cette puissance que je cherchais à garder. À réveiller. Alors je caressais l'écorce du bout des doigts en silence après un long monologue. J'aimerais être aussi puissante qu'un Barral un jour... Est-ce que c'était possible ? Lyanna brisa l'instant de grâce. Ressentir des choses.

" Le Barral a une odeur et un son différents dans le vent. C'est tout. "

C'était la seule réponse que je pouvais lui donner. Sans paraître pour une illuminé qui sentait la présence des dieux ici. J'otais mon deuxième gant pour poser ma main nue aux côtés de la seconde. Comme ci je pouvais me fondre dans l'arbre. Je l'écoutais à peine, concentrée sur la sève que je sentais battre sous mes doigts, ce pouvoir et cette puissance. ô Barral qu'as-tu à me raconter ? Qu'as-tu à me dire ? J'aimerais que tu me contes tout cela. Je sentis la main de Lyanna se poser sur la mienne. Certains réussissant à être autre chose que de simples aveugles. Oublier tout ce qu'on disait. Je fermais les yeux comme ci cela pouvait me permettre de me fondre dans cette écorce.

" Tu n'as jamais eu besoin d'une langue pour parler. "

Fis-je simplement en m'approchant encore de l'arbre. Qu'est-ce que tu veux me dire s'il plaît ? Parle moi ? Devenir indépendante...

" Je veux bien essayer. Cela peut être bien. Est-ce que tu la sens ? La sève sous le bois ? Elle doit transporter tant de savoir et d'histoires... J'aimerais les entendre... "

Je posais mon front contre l'écorce, l'odeur de la sève était plus forte. Sans doute étais-je proche des yeux sanglants de l'arbre. Je laissais mon esprit dériver dans ce lent battement de coeur que je ressentais comme le mien propre.

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Khayley avait un comportement étrange avec le Barral, elle était comme éprise d’un amant qu’elle n’avait pas vu depuis des siècles. Mes paroles sur l’indépendance furent bien accueillies, et je l’aiderais donc à faire cela, mais pour l’heure, je me contentais de la fixer à toucher l’arbre principal du bois sacré. Je m’interrogeais sur le fait que le caresser de la sorte était autorisé, mais ne l’empêcha pas d’être celle qu’elle était. Je ne suis pas ce genre de personne à défendre les lieux sacrés au péril de la liberté et de la nature de chacun.

A la place, elle m’informe qu’elle ressent des choses en cet être magique, une sève sous le bois ?

“Si tu parles du sang sacré qui coule sur tes doigts, il n’est pas sous le bois. Je peux te l’assurer.”

Je venais de lui faire une farce, j’étais persuadé qu' en une fraction de seconde, elle allait se retirer de ce lien qu’elle créait avec l’arbre sacré, car ce que je venais de lui dire signifiait qu’elle avait commis un blasphème. Bien entendu, il n’en était rien, elle n’avait rien touché de la sorte, mais bon, cela m'amusait de la taquiner. Avant qu’elle ne fasse un mouvement de recul, je retire ma main et place l’autre contre son dos sans le toucher afin qu’elle percute dessus, histoire d’enchaîner ma plaisanterie au maximum.

Une fois ma blague faite, je dépose un baiser sur son front afin de me faire pardonner de m’être joué à ses dépends, je ne lui veux aucun mal au font. Tout cela est bon enfant, mais je demeure pas complètement idiote.

“Je ne ressens rien, mais toi si, pas vrai ? Et si tu me racontais… ? Comment est-ce que cela se manifeste en toi ?”

Je ne pouvais expliquer pourquoi, mais à son comportement avec le Barral, je me doutais qu’elle avait une capacité que je n’avais pas, un sixième sens. L'avait-elle développé en perdant celui de la vue ? En avait-elle seulement conscience ?

Je m’éloigne d’elle afin d’entendre son explication à ce sujet, tout en m'asseyant au pied de l’arbre.

La sève qui me coulait sur les doigts ? Oh… Lyanna, j’étais aveugle, pas stupide, mes doigts ne collaient pas du tout ! ET l’odeur n’était pas assez forte, mais je reculai d’un pas pour sentir Lyanna dans mon dos. J’inclinai légèrement la tête vers elle avec un mince sourire amusé.

« S’il y avait de la sève sacrée sur mes doigts, elle me collerait aux doigts. Ce n’est pas le cas. »

Je la laissai m’embrasser le front avant de revenir vers le Barral. Involontairement, ma respiration ralentit alors que je laissai mes sens s’enfoncer dans la contemplation du rythme du cœur de l’arbre, mon propre cœur essayant de s’aligner dessus. C’était comme un murmure grave, profond, quelque chose venant d’un autre monde… C’était comme-ci mentalement je me tenais sur le bord de la falaise, d’une falaise. Et en contre-bas un gouffre profond… si profond que je ne voyais pas sa fin… Et pourtant, loin de me terrifier, c’était comme un appel, puissant… J’entendis, comme un faible écho, la voix de Lyanna. Comme-ci elle essayait de me maintenir dans la réalité alors que je n’avais qu’une envie, me laisser tomber dans le gouffre…

« C’est comme un lent battement de cœur… C’est comme-ci mon cœur et celui du barral étaient à l’unisson. Quand je me laisse aller… j’ai l’impression d’être sur le bord d’une falaise avec un grand gouffre sous mes pieds. Mais il n’est pas terrifiant, il est fascinant… c’était comme-ci je devais absolument plonger… Je n’ai pas peur et pourtant je devrais… Mais… non. »

Je fermais à nouveau les yeux plus fort en inspirant profondément. Est-ce que je devais plonger ? J’avais très envie de plonger et je sentis mon esprit vaciller sur le bord du gouffre, comme une hésitation à plonger. Mais en même temps…

« Mais si je plonge… je sais que je ne saurais rien de plus… »

Pour l’instant ! Fit la petite voix dans ma tête. Qu’est-ce qu’il se passerait si je plongeai sur le long terme ? Qu’est-ce qu’il allait se passer ? Qu’est-ce qu’il se passait ? Je posais à nouveau mon front contre l’écorce, comme pour me connecter à l’arbre.

« Qu’est-ce qu’il va se passer si je plonge Lyanna ? »

Je doutais qu’elle le sache… Mais autant lui poser la question ! Pas vrai ? Mais qu’importe, ma respiration ralentit encore plus. Le gouffre m’appelait de plus en plus, j’avais tellement envie de céder…

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J’avais raison, elle ressent des choses qui me dépassent et que je ne peux comprendre même si elle se met à me l’expliquer avec ses mots.
Nul moi l’idée de la prendre pour une folle, je crois même tous ce qu’elle me dit alors que en réalité dans mon esprit, tout cela n’a ni queue ni tête. Peut être qu’elle est folle et que je passe mon temps à parler avec une illuminé mais pour moi elle est juste, enfin elle. Au naturel, privée de ces chaînes que je vois en permanence noué à son être.

Elle me demande ce qui va se passer si elle se met à plonger dans… dans quoi d’ailleurs ? Une chose me vient à l’esprit pourtant comme une évidence.

“La liberté d’être ce que tu es.”

Je ne l'empêchait nullement à être ce qu’elle est bien au contraire, je l’invitais à l’être au ton de ma voie. Je n’avais pas conscience que cela pouvait provoquer l’une de ses fameuses crises que Jenny redoute tant.

Bien entendu, si elle se laisse aller et qu’elle s’écroule de tout son être même assise, j'aurais le réflexe de me jeter sous son corps qui choit sans prévenir afin de la réceptionner.

Il faut bien que mes réflexes acérés servent enfin à quelque chose. J’ai juré dans mon esprit de la protéger, et il ne lui arrivera nul mal en ma présence. C’est certain et garanti. elle ne finira pas sur une racine la tête explosée par sa chute.

Je serais son bouclier quoi qu’il arrive. En cet instant, je la fixe comme si tout mon être se préparait à un tel dénouement. Une sorte d’instinct de guerrier m’envahit alors, comme si un danger immédiat s'approchait de mon ami. Seconde après seconde que cette sensation s’installe en moi et que rien n’arrive. Je me relève, toujours sur la défensive.

J’ai même une envie irrépressible de sortir mon arme pourtant, le danger d’une chute ne justifie pas un tel acte. Ma main est sur le pommeau, mes sens en alerte. Pourquoi ?

La liberté d’être qui je suis ? J’eus un sourire amusé en inspirant profondément. Mon sang semblait même ralentir dans mes veines. Dans mon esprit, c’était comme-ci le gouffre s’élevait, devenant comme une mer qui montait lentement le long de mes jambes. Je n’avais pas peur. Je laissai le bruit de la sève me guider alors que dans mon esprit l’eau me recouvrait le visage. Je ne sentis pas mon corps ployer lentement les genoux, glissant le long du tronc pour finir à genoux entre les racines. Je respirais lentement… la mer noire m’avait avalé, mais je n’avais pas peur. Je la sentais épaisse… collante… Devant mes yeux, je vis, autant que cela puisse être étrange, les rêves que j’avais déjà faits, encore et encore. Comme une litanie visuelle. Seules des images que je connaissais que j’avais déjà vu et qui me terrorisaient purement et simplement.

Je ressortis brusquement de l’eau et le monde redevient obscure autour de moi. Je sentais les larmes couler sur mon visage. J’inspirais profondément en essayant de me calmer alors que mon cœur battait avec violence. J’ôtais mes mains qui… étaient moites. J’essuyai mes joues d’un geste très lent avant de tourner la tête autour de moi…

« Lyanna ? »

J’avais une petite voix, comme une enfant après un cauchemar. Je ne savais pas ce qu’il s’était passé, mais je ne voulais plus rester là… Le calme avait cédé sa place à la peur… Je voulais rentrer et il y avait quelque chose d’étrange sans que je ne sache ce que c’était. C’était juste… Terrifiant… C’était quelque chose… Je ne savais pas, je voulais juste rentrer maintenant…

« Je veux rentrer… s’il te plaît… »

Je voulais juste… retourner à l’intérieur, à l’abri. Je ne savais pas ce qu’il allait se passer et je crois que je ne voulais pas savoir, bien que… avec ces images… Non, cela ne voulait rien dire. C’était faux ! C’était faux ! Ce n’était que des cauchemars…

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Ce nouveau monde où j'entendis des dames sur les toits

Tout ce qu’elle vivait ne dura qu’un instant pour moi, rien de plus, je ne pouvais donc imaginer son voyage. En tout cas, je ressens sa détresse à l’appel de mon prénom.
“Je suis là.”
Pendant que j’analysais ce qui pouvait la mettre dans un état pareil, je fixais instinctivement le barral sans pour autant faire un lien de cause à effet. Mes interrogations demeureront sans réponse car mon ami quémande avec hâte de rentrer à Winterfell.

“Bien entendu, si c’est ta volonté, je ne te priverais jamais de tes libertés.”

Le mot de la fin de ce chapitre de nos vies venait d’être lancé, comme un appel à l'aide dans une bouteille que l'océan allait avalé. Une page allait être tournée. Je la reverrai avant son départ bien sûr, mais c’est la dernière fois que nous aurons eu le temps de prendre autant de temps l’une pour l’autre avant sa capture.

Quand j’apprendrais çà, je n’aurais qu’une envie, voler à son secours mais les chaînes de ma condition son fermement cloué à mes chevilles. Je ne pourrais pas aider mon ami et étrangement, elle ne pouvait pas m'aider non plus dans mes tourments.

Seul ce Barral le pourra désormais pour elle… Peut-être que le lien qu’elle venait de tisser avec lui serait un jour la clef de sa liberté ? En tout cas, à cela je n’avais point conscience. La seule chose que je saurais, c'est ma totale inutilité dans tous les déboires à venir de mon amie.

Progressivement j’allais entrer dans une phase dépressive et quelque temps plus tard, mes premières scarifications commenceront… Personne ne voyait alors ma détresse, tout le monde me voyait heureuse de mes aventures, en réalité, je me sentais bien seule dans ce château que je fuyais à la première occasion…

Mais pas cette fois, pour l’heure je la ramenais indemne à sa précieuse Jenny… Et moi je retourne à mon quotidien morose et sans saveur...Que la vie est belle, vous ne croyez pas … ?

Fin

» Les larmes sont-elles l'armure des Dames ? | Semaine 4 mois 11 an 1 | [Tour VIII - Terminé]
» À nouveau malade ? - Mois 11, semaine 4 [Tour VIII - Terminé]
» Rien dans ce monde n'arrive par hasard (An 2 - Mois 6 - Semaine 3) [Tour XI - Terminé]
» Tout le monde a un prix ( Pv Azhana ) [Tour VII - Terminé]
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