Si j’appréciais grandement mes visites au sein du domaine de Lord Grafton pour ses nombreuses leçons sur la navigation et les batailles navales et pour sa chaleureuse hospitalité – l’homme me considérait comme ce fils qu’il n’avait jamais eu –, j’étais bien heureux de retourner aux Eyrié. En vérité, suite à l’annonce de l’arrivée de ma fiancée, Nymeria Lannister, aux Eyrié, mon impatience grandissait chaque jour passé loin d’elle. Malheureusement, je ne pouvais pas quitter de sitôt Goëville suite aux promesses faites aux Seigneurs voisins, qui s’étaient donnés un mal considérable à se déplacer jusqu’à moi pour me rencontrer afin de présenter leurs fils ou leurs filles ou partager certains projets qu’ils nourrissaient.

Lorsque le départ s’annonce enfin, je vois le sourire amusé de Lord Grafton, ainsi que celui des hommes qui m’accompagnaient et qui devaient assurer ma sécurité. Ils savaient exactement pourquoi j’étais si pressé de quitter ce domaine, devenu comme une seconde maison. Les subtiles remarques taquines lancées par ces hommes me gênaient autant qu’elles flattaient mon égo. Dans quelques semaines, j’allais épouser la plus belle et la plus brillante demoiselle de Westeros ! Elle allait devenir la Reine du Val et de la Montagne, et elle allait m’assister dans la direction de ce puissant et glorieux Royaume ! Plus que jamais, l’avenir me semblait heureux et serein.

Pourtant, une ombre venait assombrir ce charmant tableau : la famille Lannister. Mère avait indiqué dans l’un de ses courriers que la famille de l’Ouest ne comptait pas se déplacer pour le mariage de leur dernière enfant. Je dois avouer que j’avais été assez colère à cette nouvelle, considérant cette décision comme déplacée et d’un manque de respect à l’égard de la maison Arryn. On ne mariait pas une quelconque dame à une quelconque maison : c’était le mariage d’une Lannister et d’un Arryn, deux nobles maisons, et l’avènement d’une Reine ! Soit, s’ils ne désiraient pas fouler davantage le sol du Val, j’allais redoubler d’efforts pour m’assurer que la future Reine considère cette nouvelle terre comme seule et unique maison, et qu’elle ne soit pas trop attristée par l’absence de ses siens.

Mon désir de surprendre la Princesse Nymeria était peine perdue, évidemment. Il était rare que je revienne aux Eyrié sans que la nouvelle n’arrive à Mère bien plus tôt – souvent dès mon départ. Bien des Seigneurs aimaient écrire aussitôt à la Reine douairière pour complimenter, pour échanger ou pour assurer qu’ils avaient accompli leurs devoirs. Lord Grafton faisait preuve davantage de diligence, non pour plaire, mais par inquiétude sincère à l’égard de ma sécurité et de mon bien-être. J’avais donc à surprendre ma future épouse autrement, notamment avec un présent convenable. Le Val était connu pour ses étoffes de grande qualité, pour son agriculture ou encore pour ses montagnes. Le choix de présent pour une dame était donc vaste et j’avais pris grand soin de passer les commandes convenables aux bons marchands en amont de l’arrivée de la Princesse. Peu habitué à ce genre de présents, mon dévolu se porte sur un collier et un miroir d’excellente facture et d’exceptionnelle ouvrage.  

- Mon Roi, nous serons aux Eyriés pour demain midi, m’annonça un homme. Demain midi, cela me semblait déjà bien trop long. Malheureusement, je ne pouvais pas forcer davantage le pas et épuiser cette troupe sur un caprice. J’avais à prendre mon mal en patience. Le matin laissa place à midi, qui devint la nuit. Et la journée suivante se succéda de même. Nous avons été retardés en raison d’un grand arbre déraciné qui barrait notre unique chemin. Entre les multiples décisions – prendre un autre chemin, ou faire appel aux hommes pour soulever cette force de la nature – et l’action, la nuit était bien avancée lorsque les Eyrié furent enfin visible au loin – d’avantage une ombre qui semblait prête à transpercer le demi-croissant de lune. Je doutais fortement que la Princesse que ce Palais abritait à cet instant soit encore debout. Ma patience allait être éprouvée encore un peu.

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

Nymeria était arrivée depuis quelques jours à présents aux Eyrié, et même si elle était contente d'en avoir enfin terminé avec ce long voyage qui l'avait poussé à traverser Westeros d'Ouest en Est, elle n'était pas pour autant la jeune fille la plus heureuse qui vivait actuellement. Certes, il aurait été fort déplacé qu'elle vienne à se plaindre de quoi que ce soit, elle avait été dignement reçue dans son nouveau pays d'adoption, les appartements où on l'avait installé dans la forteresse avaient été décorés avec goût, il embaumait un doux parfum de fleurs fraîchement coupés et tout le monde était au petit soin pour elle. Ce qui était bien évidemment des plus agréables, elle devait le reconnaître. Pour autant, il y avait une chose ou plutôt quelqu'un qui lui manquait cruellement et ce n'était clairement facile de le remplacer. Si elle était venue ici aux Eyrié, ce n'était pas seulement pour pouvoir rendre service à deux royaumes en étant l'objet d'un mariage royal, si cela avait été le cas ça ne serait pas elle qui serait actuellement sur le point de se marier, ni de devenir reine, mais sa sœur Megara. Sa sœur qui était si belle, si parfaite, qui était douée pour la couture, pour la conversation, pour choisir ses toilettes et ses coiffures. Une femme à tout point exceptionnel qui aurait été un soutien essentiel pour son époux et pour le royaume qui allait être le sien dans quelques semaines. Pour autant, ce n'était pas Megara qui était venue aux Eyrié, mais bien Nymeria, elle et tous les défauts qu'elle avait, elle tout aussi imparfaite qu'elle était. Il était certain qu'on lui avait fait confiance, mais il était certain également que si la décision avait été prise la concernant, c'est parce qu'elle avait montré des sentiments réels à l'égard de Ronnel, et cela depuis de nombreuses années déjà. Elle n'aurait clairement pas pu supporter qu'une autre personne, et même sa sœur, ne vienne à lui prendre sa place aux côtés du roi du Val. Oui, elle était amoureuse, désespéramment amoureuse et elle n'avait nullement envie de se défaire de ce sentiment qu'elle ressentait pour lui et elle voulait faire tout ce qu'elle pouvait pour que ce mariage réussisse pour le royaume mais également pour lui et pour elle.

Pour autant, il était certain qu'elle avait clairement un vague à l'âme important, une légère mélancolie dont elle n'arrivait pas à se débarrasser depuis qu'elle avait foulé le sol de la capitale du Val. Tout ça parce que son fiancé n'était pas présent à cet endroit. La Reine, Sharra, avait été certes très avenante avec elle, bien qu'elle venait à l'impressionner sincèrement. Elle semblait plus douce et plus prompt au compliment et à la rassurer que ce que Jordane n'avait jamais fait avec elle. Après tout, ce n'était pas sa mère dont elle était proche, mais de son père. Il avait toujours veillé sur elle depuis qu'elle était enfant, lui laissant beaucoup plus de liberté que ce qu'il n'autorisait à Lyman ou à Megara. Jordane venait à aimer ses enfants, avec une manière bien à elle de le faire. Sharra Arryn semblait être bien plus démonstrative, et c'était réconfortant. Mais Ronnel n'était pas là, et aucun autre membre de sa famille n'était présente non plus pour l'événement le plus important de sa vie, celui de son mariage. Pas même une simple cousine qui s'était déplacée. Certes, les tensions étaient de plus en plus grandes au cœur de Westeros mais elle avait besoin de quelqu'un à ses côtés, de quelqu'un qui ne faisait pas partie de la délégation étrangère, mais bien quelqu'un de chez elle. Elle avait eu tous les mots d'amour qu'il était possible d'avoir de la part de ses proches, elle avait amené avec elle, le petit chaton que sa sœur lui avait offert juste avant son départ, pour qu'elles puissent toujours rester liées l'une à l'autre par la pensée et par la douceur de cette petite boule de poil. Ce n'était pas suffisant, tant qu'il ne serait pas là à ses côtés, cela ne serait jamais parfait. On l'avait annoncé en début de soirée, le souverain n'était plus qu'à quelques lieues de là. Cependant il n'arriverait pas avant le lendemain midi, le temps que lui et ses hommes fassent la fin du voyage. Nymeria se mit alors à tourner en rond dans sa chambre avant qu'elle ne se décide finalement à mettre son idée à exécution. Elle pouvait faire le voyage jusqu'à lui. Elle fit donc le nécessaire pour qu'on puisse lui atteler un cheval, avec quelques gardes avec elle et elle entreprit de rejoindre Ronnel au plus vite, demandant à ce qu'elle puisse voir ce dernier jusqu'au moment où elle mettrait le pied à terre. Elle ne se voyait pas attendre un instant de plus pour le retrouver.

Un homme de ma Maison ne tarde pas à venir à notre rencontre, pour s’enquérir à la fois de ma santé ainsi que celle de la Princesse si peu habituée à nos montagnes et à nos climats. J’arque le sourcil, lançant un regard à la fois interrogateur et à la fois impatient à l’homme : que racontait-il par tous les Dieux ? La Princesse Nymeria Lannister n’avait aucune raison de gambader hors de la Forteresse à une telle heure. Elle ne pouvait qu’être aux Eyrié, auprès des miens et entourée par des nobles valoises désireuses de faire partie de sa cour et de sa suite.

Je suis instruit par le message : la Princesse aurait pris l’initiative de venir me rencontrer, avec de bonnes gardes évidemment. L’impatience ne prend plus source dans l’agacement et la fatigue – deux sentiments qui avaient disparu aussitôt – mais dans le plaisir de revoir son doux visage. J’ordonne aussitôt, et qu’importe ce que Mère pourrait bien penser, pour que la compagnie rentre et qu’une poignée d’hommes reste avec moi pour aller retrouver la belle Lannister et son escorte.

Nous nous étions manqués mais ce n’était guère surprenants. Les Eyrié, comme les Portes Sanglantes, étaient entourés de hautes montagnes et les sentiers – petits ou grands – étaient nombreux, parcourant le Royaume, formant un complexe ensemble. Nous pouvions débuter d’un même point, et aller vers la même destination, mais il existait mille et une alternative. Le terrain était à la fois un avantage, et un désavantage, pour nos armées.

Par contre, c’était un plaisir constant en temps de paix, et pour une petite compagnie chevauchant de solides bêtes entre ces arbres et ces tournants. La garde qui m’accompagne et moi-même connaissons très bien les différents sentiers, à force d’y chasser, d’arpenter et de l’étudier, et devinions assez aisément la position de la future Reine du Val et de la Montagne. Il existait un chemin très fréquenté, qui plaisait pour sa larguer et pour le peu de pillage causé par les Clans. Nous aurions pu l’emprunter, si je n’avais pas désiré opter pour un chemin plus court, plus rapide mais également plus propice aux imprévus, surtout aux lendemains de fortes pluies.

Nos prédictions furent bien justes car je voyais au loin une belle chevelure blonde accompagnée d’hommes aux armes de la Maison Arryn. Je lance le cheval au galop pour barrer aussitôt la route de la Princesse tant attendue, et tant rêvée. Si les hommes qui accompagnent la belle se montrent méfiants, prêts à tirer l’épée, ils affichent bien vite une mine déconfite et gênée en me reconnaissant.

- Au repos, soldats. C’est votre Roi qui vous barre la route, dis-je, reportant presqu’aussitôt mon attention sur un doux visage pour lequel je me languissais depuis quelques jours.

J’avais imaginé cette rencontre à maintes reprises, ainsi que toutes les choses que je pourrais lui dire, mais je restais pantois. La gêne me gagne lorsque je sens les regards silencieux des hommes qui nous accompagnent, et je fais un signe de main pour leur signaler de s’éloigner et de nous offrir un semblant d’intimités. Aussi loin que je me souvienne, il n’avait jamais été question d’entrevue ou de rencontre où nous n’étions que deux : nous étions constamment entourés d’hommes de nos maisons respectifs. Aujourd’hui, la difficulté était moindre : ces hommes étaient de la maison Arryn, et tous avaient pour devoir de m’obéir. Dans quelques mois, Nymeria aura autant de droit que moi, en qualité de Reine.

J’étais heureux, et orgueilleux. Nous avions réussi à convaincre nos deux parents à l’idée de nous marier, abandonnant leur projet initial de m’unir à l’aînée de la fratrie, Megara Lannister. Si les deux sœurs étaient belles, Nymeria avait un charme qui me happait comme au premier jour, éclipsant la beauté de toutes les autres. Une dame qui m’avait convaincu de faire face à Mère et de lui exprimer une volonté propre, et égoïste. Elle avait cédé, plus ou moins facilement : l’instinct maternel avait pris le pas sur la personne royale. Il semblerait que Nymeria avait réussi à faire de même avec sa propre Mère, la terrible Jordane Lannister.

- Je suis heureux de te voir, Nymeria. Est-ce que le voyage a été confortable ? Et est-ce que tu es à ton aise dans tes appartements, au sein des Eyrié ? demandais-je, retrouvant subitement l’usage de la parole. Je suis bien désolé de venir si tardivement, mais j’avais des obligations auprès du Seigneur Grafton, un grand ami, un grand allié et surtout l’Amiral de la flotte valoise. Je ne pouvais pas différer cet entretien davantage … Dis-moi comment je peux te rendre heureuse ?

Je saute du coq à l’âne, et je me rends compte. Je préfère me taire, et laisser enfin la parole à la Belle.

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

L'Ouest lui semblait si loin, et si elle savait qu'elle serait le destin qu'elle allait embrasser en quitter Castral Roc pour le Val, elle était néanmoins triste de quitter les lieux où elle avait grandis en compagnie des siens. Cette réaction était sans doute bien sotte pour une princesse née dans la noble maison des Lannister. Elle devait se comporter en lionne, et elle avait toujours été bien moins mesurée que Lyman ou que Megara, au grand désespoir de sa mère Jordane. La petite princesse était la dernière du couple, la plus jeune des trois enfants qu'ils avaient eu, et même si on attendait d'elle à ce qu'elle se comporte à la mesure de son rang, il était certain qu'elle avait pu profiter de certaines largesses de la part principalement de son père, mais aussi de sa sœur qui l'avait toujours protégé avec amour et bienveillance, ne manquant pas de la sermonner quand elle jugeait qu'elle était allée trop loin dans ses frasques mais venant pour autant à rire des bêtises qu'elle pouvait faire, et surtout des soucis qu'elle ne manquait de provoquer auprès de la Septa qui était en charge d'elle. Nymeria avait connaissance de toute la chance qu'elle pouvait avoir d'avoir eu une enfance si facile, où tout lui était offert. Elle n'avait jamais été une enfant capricieuse, et si elle profitait naturellement des bonnes choses qu'on mettait à sa disposition, elle vivait d'un rien, se moquant de savoir si sa dernière toilette était ou non à la mode dans la Cour de Castral Roc, elle trouvait bien plus le corset comme quelque chose d'encombrant qui ne lui permettait pas de se mouvoir aussi aisément qu'elle le désirait. Elle appréciait la musique et la danse, mais il n'était pas pour autant acceptable qu'elle vienne à chanter ou à jouer d'un instrument, quant à la couture, alors là c'était sans doute le domaine qu'elle détestait le plus, malgré la pression qu'on lui mettait dans l'art du crochet. Pour autant, elle adorait les longues balades à cheval en compagnie de son père ou de son frère et elle ne se voyait pas un jour occuper un quelconque rôle plus important, qui la mettrait au-dessus de sa sœur, et à égalité au niveau de sa mère. Elle n'était pas destinée à cela, Megara si. Et pourtant, elle était tombée amoureuse de ce jeune homme qu'elle avait rencontré il y a bien longtemps, l'affection aurait pu finir par disparaître, mais elle n'avait fait que de se renforcer depuis lors et elle n'avait eu de cesse de penser à lui, et de se rêver à ces côtés sans penser un seul instant qu'elle viendrait à obtenir satisfaction du seul caprice qu'elle avait peut-être fait un jour.

Elle était nostalgique de cette vie dans l'Ouest, mais ce sentiment était forcément renforcé par le fait qu'elle n'avait pas vu son futur mari depuis qu'elle était arrivée aux Eyrié. Elle était consciente qu'elle avait normalement toute la vie devant elle pour pouvoir profiter de ce dernier, mais elle se sentait seule dans ces lieux, elle ne connaissait personne ici, ou cela remontait à si longtemps maintenant qu'elle n'avait plus grand souvenir de son voyage dans le Val en compagnie de son père, mais tout ce qu'elle s'était remémoré pendant toutes ces années, c'était le baiser qu'elle avait partagé à l'époque avec le prince. Elle se languissait de lui depuis tellement longtemps qu'elle attendait avec une impatience difficilement mesurable de pouvoir le retrouver, de pouvoir discuter avec lui, mais également de pouvoir se blottir dans ses bras, profiter juste un instant d'être avec lui et de ne pas penser au reste. Après tout, ils seraient bientôt mariés, les préparatifs avançaient bien, ce n'était plus qu'une question de quelques semaines. Elle voyait mal la reine-mère prendre la décision de la répudier, et elle comptait surtout sur les sentiments de Ronnel à son égard pour qu'il puisse la protéger s'il venait à se passer quoique ce soit contre elle. Elle voulait juste être heureuse à ses côtés, et même si elle n'était pas la plus parfaite des princesses, elle voulait être une véritable souveraine aux côtés de son époux, être un soutien pour lui dans les mauvais moments, et qu'il veuille partager avec elle les moments de joie. C'était tout ce qu'elle demandait. Alors pour l'instant, elle ne jouait pas le rôle de la reine, et gardait celui de la princesse un peu rebelle, n'hésitant pas un seul instant à prendre son cheval à la nuit tombée pour pouvoir rejoindre celui qu'elle aimait. Un frisson vint à lui parcourir le corps alors qu'il avait pris la décision de la rejoindre et elle se sentit alors rougir en entendant sa voix s'élever. Elle se rapprocha de lui quand les soldats s'éloignèrent pour leur laisser autant d'intimité que la situation le permettait. « Le voyage a été un véritable cauchemar, Castral Roc est tellement éloigné des Eyrié … Il faut plusieurs semaines pour pouvoir arriver jusqu'ici, mais je crois pouvoir dire que cela valait le coup de venir jusqu'ici. » Elle se mit à rire doucement en l'entendant parler. « Mes appartements me vont à ravir, mais j'avoue que je m'y sentais bien seule alors … Tu me manquais, j'étais pressée de te voir. J'espère que tu ne m'en veux  » Elle s'était donc fait plus douce et plus réservée soudainement, elle ne voulait pas qu'il prenne mal le fait qu'elle soit venue le retrouver alors que la sécurité n'était pas maximum à cet instant.

La plus jolie dame de tout Westeros venait d’avouer qu’elle avait été fort impatiente de me revoir. Le compliment me flatta tant que je remerciais les Sept qu’il faisait bien tard, et que la nuit cachait cet étrange sentiment qui mêlait gêne et fierté. Comme un paon, et malgré moi, je me fis que plus droit sur ma selle, et je plantais mon regard brillant dans celui de Nymeria. De son vivant, Père aimait dire à mon frère et à moi que les femmes pouvaient être aussi terrifiantes qu’un guerrier aguerri. Elles pouvaient vous désarmer d’un regard, d’une parole ou d’un geste. Si je n’avais pas saisi la métaphore à cette époque-ci, elle faisait pleinement sens en cette belle soirée suite à l’aveu de la belle Princesse, et Reine en devenir.

Autant dire, si j’étais bien heureux, Nymeria m’avait réduit au silence inconsciemment. Que pouvais-je donc répondre, en retour ? Les nombreuses et longues leçons sur les codes de la bienséance, de la courtoisie et de la galanterie me semblaient subitement désuets de sens et inopportun. Il était question de ma fiancée, de ma future épouse, d’une amie et surtout d’une compagne d’une vie commune, longue et assurément heureuse ! Cette dernière pensée me suffit, pour être aussitôt inspirée.

- La route entre Goëville et les Eyrié n’est qu’une affaire de jour et pourtant, jamais elle n’avait paru aussi longue. Je n’avais qu’une hâte : te revoir, et reparler sans d’agaçants chaperons ou gardes, répondis-je, affichant enfin un sourire soulagé et heureux à la fois.

Si la Princesse de l’Ouest était intrépide et un brin aventureux, elle n’en était pas moins la fille de Jordane Lannister. Et si j’étais Roi, j’étais avant tout le fils de la Reine Régente Sharra Arryn. Si nos positions supposaient une garde rapprochée, l’affaire était encore plus méticuleusement suivie et supervisée par deux Mères qui se valaient en termes de férocité quand il était question de sa progéniture. Du moins, c’était ma conclusion suite aux quelques descriptions données par Nymeria.

- Je n’ai plus de raisons de quitter les Eyrié. Je te promets que je te ferais découvrir les plus belles beautés, promis-je. J’évitais de ternir nos retrouvailles, en rappelant implicitement que mon temps pourrait être limité et donc que ces balades promises se feront avec le temps, et selon les aléas du destin et de la politique. Qu’importe, en vérité. Nous étions jeunes et en bonne santé. Qui sait, peut-être pousserions-nous notre hardiesse jusqu’à visiter de nouveaux Royaumes et contrées ! Je ne peux pas t’en vouloir, Nymeria. Par ta seule présence, j’en oublie déjà la fatigue et je retrouve mes forces. Et tu éclaires déjà cette nuit avec tes cheveux d’or,dis-je en aventurant une main sur une mèche de cheveux un brin rebelle, et qui s'était perdue dans cette masse avec la chevauchée et le vent.

Je ne savais pas si j’étais doué dans ces affaires d’amour, mais je préférais dire ce qu’elle m’inspirait que de m’empêtrait dans de stupides formules apprises dans quelques romans ou poésies. On dit que les femmes aimaient bien ce que les bardes chantaient, mais j’avoue qu’hormis les chants de guerre et d’aventures, je n’avais pas fait attention aux passions amoureuses. Je regrettais un tantinet, aujourd’hui. Je me promettais d’y tendre davantage l’oreille, pour grapiller quelques mots ou conseils sur comment maintenir cette flamme dans le cœur de ma future épouse.

- Si tu le veux bien, baladons-nous encore un peu. Si nous rentrons trop vite au château, je crains que nous ne goutions à un tel instant, dans un futur proche. Il serait fort dommage qu'on écourte trop vite notre première victoire commune.

Nos échanges avaient été aussi discrets que possibles, et les mots choisis avec attention au cas où la correspondance tombait entre les mains des uns et des autres. Cependant, dans chacune, il n’avait pas été rare que je déplore la distance ou alors les rencontres trop protocolaires ou sous le regard tantôt sévère, tantôt amusé, de chaperons ou de gardes. Aujourd’hui, les choses étaient différentes et un tout nouveau monde et avenir s’ouvraient à nous. Et je préférais inaugurer celle-ci avec une balade au clair de lune, qu’entre quatre murs du château et une tripotée de domestiques.

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

Nymeria avait joué les impulsives comme toujours. Elle ne pouvait s'empêcher d'être ainsi, cela faisait parti de sa nature profonde, elle avait toujours été ainsi et elle n'avait guère envie de changer, même pour son époux. Pourquoi ? Parce qu'elle était certaine que c'était aussi cela qui avait plu au jeune souverain du Val et de la Montagne et qu'elle ne voulait pas devenir quelqu'un de profondément différent parce qu'elle allait l'épouser, parce qu'elle allait régner à ses côtés. Il était nullement question ici qu'elle fasse néanmoins quoique ce soit de déplaisant pour la couronne, elle ne voulait nullement offenser la maison qui l'accueillait aujourd'hui, et elle ne voulait pas plus attirer les foudres de la maison qui l'avait envoyé. Il était certain que Jordane Lannister, comme Sharra Arryn étaient deux femmes, de reines de poigne, de caractère, qui avaient pris leur place face à leur royal époux et elles ne s'étaient pas laissées faire malgré les épreuves de la vie. Sa mère était un roc, un roc parfois difficile à atteindre, surtout pour Nymeria qui ne correspondait que peu à l'idée que ce faisait la lionne d'une future souveraine. Parfois, la princesse de l'Ouest venait sincèrement à se questionner sur la raison profonde de cette décision ou de l'acceptation de cette décision de mariage avec Ronnel du côté de sa mère. Elle était parfaitement consciente que cela n'avait guère été un problème pour son père qui avait toujours été plus proche d'elle que de son frère et de sa sœur aînés. Ce n'était pas qu'il ne les aimait pas, loin de là, il avait toujours été présent pour eux, mais il se permettait sans doute plus de choses avec sa petite dernière au caractère plus franc et plus affranchis surtout qu'avec son héritier d'un côté, et sa douce fille, sa douce princesse, qui correspondait si parfaitement à ce qu'on attendait d'une jeune femme de la bonne société. Jordane n'avait sans doute pas été au courant de la majorité des choses que Loren avait laissé faire à Nymeria, et c'était sans doute une bonne chose pour l'un comme pour l'autre, car la lionne pouvait être terrible avec ses lionceaux et ceux qui pouvaient les détourner du droit chemin qu'elle avait tracé pour eux.

Sharra Arryn lui avait donné la même impression la première fois qu'elle l'avait vu. C'était une de ces femmes qui était aussi belle qu'elle pouvait être ténébreuse quand il le fallait. On ne contrariait pas aisément la reine mère qui assurait la régence du royaume depuis de nombreuses années à présent, mais néanmoins, elle distinguait quelque chose de plus doux, de plus maternant chez cette femme qu'auprès de sa propre mère. Pour autant, elle était certaine qu'elle ne manquerait pas de lui rappeler les bonnes manières une fois qu'elle serait au courant pour son escapade nocturne, même si elle n'avait nullement pris le risque de partir sans escorte, ce dont elle aurait été sans doute capable si elle avait été encore sur les terres de l'Ouest ; mais elle connaissait par cœur les environs du château de Castral Roc, alors qu'ici elle ne connaissait rien, et d'une certaine façon, même pas son futur époux, puisqu'il se trouvait bien loin des Eyrié quand elle avait fait son entrée à la Cour du Val. Elle savait que le pouvoir ne pourrait sans doute pas lui laisser tout le loisir qu'elle voudrait pour voir Ronnel et passer du temps avec lui, elle aurait aussi ses propres activités, ses propres devoirs en tant que reine, mais elle espérait sincèrement pouvoir partager des moments avec lui, ne serait-ce qu'un par jour au moins. Nymeria regardait Ronnel avec tendresse, et à chacun des mots qu'il prononçait, son sourire n'avait de cesse de s'agrandir, son cœur se faisait plus léger, et elle sentait de petits fourmillements dans son ventre, alors que ses joues prenaient une teinte de plus en plus rosée et qu'elle était heureuse que la nuit puisse d'une certaine façon caché son trouble. « Je sais bien que ton devoir passe avant le reste Ronnel, tu es le roi de ce royaume, et il va bien falloir que j'accepte de te partager avec tes sujets. Quant à moi je dois m'atteler à finir les préparatifs de notre mariage avec ta mère, je dois aussi en apprendre plus sur l'histoire de ton royaume, de notre royaume, sur les coutumes, sur les membres de la noblesse. Je vais avoir un emploi du temps chargé au cours des prochains jours, mais ce soir je voulais te rejoindre et être juste avec toi, avant que tout cela ne nous tombe dessus et que nous nous perdions sous les charges qui nous attendent. » Elle frissonna un peu plus en sentant sa main dans ses cheveux, et elle finit donc par se pencher pour pouvoir lui voler un délicat baiser. Elle hocha la tête. « Oui ça me ferait très plaisir … Je te suis. » Elle souriait autant que possible.

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

A bien des égards ce soir, la jeune princesse de l'Ouest ne manquait pas de se jouer des convenances et de la bienséance, mais elle ne pouvait pour autant réprimer les mois et les années qu'elle avait passé à attendre son prince. De patienter face à la joie, et à l'envie de plus en plus démesurée qu'elle pouvait avoir de le retrouver. Et maintenant qu'il était si près d'elle, qu'elle pouvait le toucher rien qu'en tendant le bras, elle n'avait pas envie de se priver d'un tel contact. Même si elle était clairement allée plus loin que ce qui était autorisé entre deux fiancés et qu'elle l'avait tendrement embrassé quelques secondes auparavant, elle n'en avait aucunement honte, elle avait un besoin vitale de lui à cet instant, parce qu'elle avait fait tout ce trajet pour lui et rien que pour lui, parce qu'elle avait abandonné tout ce qu'elle aimait pour pouvoir être à ses côtés à cet instant et que les choses n'étaient pas faciles pour elle. Tant que Ronnel ne serait pas à ses côtés, elle serait d'une certaine façon définitivement perdue. On lui avait fait le meilleur accueil possible aux Eyrié et elle ne venait en aucun cas remettre les choses en considération, cela aurait été vraiment mal vu et elle n'avait aucune raison de se plaindre bien loin de là. Mais ce n'est pas en se retrouvant seule avec sa future belle-mère et les domestiques de la forteresse royale qu'elle allait retrouver du réconfort face aux différents chamboulements suite à son changement de royaume et de vie tout simplement. Elle n'avait pas peur des responsabilités de la couronne, certes, elle n'était pas autant préparée que sa sœur pour devenir un jour souveraine d'un royaume, mais elle n'avait pas non plus oubliée tout ce qu'on lui avait enseigné au cours des dernières années et elle ne voulait nullement faire déshonneur à Ronnel, une fois montée sur le trône à ses côtés. Cependant, si ça n'avait tenu qu'à elle, elle n'aurait pas manqué de l'embrasser à nouveau sur le champ, juste par pur plaisir de le faire.

« De commencer la leçon tout de suite ? Et bien si sa Majesté le désire je ne peux en aucun cas lui dire non, cela serait bien mal venu de ma part. Vous savez bien que je vous suivrais jusqu'au bout du monde s'il le fallait. J'ai sincèrement hâte de découvrir un peu plus de vos beaux territoires, et un peu plus de vous également. » Elle lui souriait grandement, ayant pleinement confiance en lui. Elle l'écouta donc dans les paroles qu'il se mit à prononcer, jouant alors le rôle de précepteur, mais laissant flotter sur son visage un sourire plein de malice à son égard. Elle reprit un air sérieux, bien droite sur son cheval tout en le regardant droit dans les yeux. « Première leçon retenue, je ne bougerai donc qu'en votre présence, puisque vous êtes mon Roi, et donc que vous êtes le plus apte à assurer ma sécurité, de jour comme de nuit. » Elle lui fit un petit clin d'oeil avant de se taire à nouveau puisque le jeune homme n'avait toujours pas fini de discuter. « Malgré le fait que vous avez deux résidences différentes, laquelle vous plaît le plus à vous car c'est bien là le plus important pour pouvoir dignement nous y installer ? » Elle lui sourit doucement. « Et bien soit alors nous ferons tout autant la visite des Eyrié que celle de votre résidence à la Porte Sanglante. Cela me ravira de pouvoir passer ce temps-là en votre compagnie. » Elle finit par arrêter son cheval à quelques mètres du cours d'eau et elle descendit de celui-ci, avant de l'amener jusqu'au liquide, pour pouvoir faire boire sa monture et la rafraîchir un peu après la folle cavalcade qu'elle l'avait poussé à faire.

Trois ans d’attente, d’espoir et de frustration qui prenaient fin en cette belle soirée. Sa voix ne serait plus un lointain écho, elle allait teinter mélodieusement de jour comme de nuit à mes oreilles. Sa chaleur ne serait plus un simple rêve, elle allait m’envelopper avec douceur et force. Sa douce odeur aux notes ouestriennes ne serait plus étrangère, et elle allait imprégner où elle mettrait pied et où elle se reposerait. Elle allait être là ce soir, demain et les jours, semaines et mois suivants.

Elle parle, je m’abreuve de ses paroles.
Elle joue, je m’émerveille de ses traits.
Elle sourit, je suis charmé.

Lorsque nous arrêtons nos montures, pour qu’elles se rafraichissent, je l’observe à nouveau, admirant toutes ses belles qualités que je savais déjà, et celles que j’avais oublié avec cette distance et le temps. Chaque détail me surprenait, m’amusait ou me rendait que plus amoureux d’elle. J’étais sûrement le plus heureux des Rois en cet instant. Et j’avais besoin de l’exprimer, franchement, sincèrement et sans retenu.

- Qu'importe les Eyrié, la Porte Sanglante ou ailleurs. Tant que tu es à mes côtés, et heureuse, cela me suffit, dis-je, persuadé que tous les mauvais souvenirs que je pouvais avoir de la Forteresse la Porte Sanglante allaient être adoucies par tous les bons souvenirs que j'allais construire et partager avec elle. Si elle-même avait une préférence pour une des deux résidences, alors nous prendrons les dispositions nécessaires pour l'aménager convenablement et selon ses goûts.

Je profite que nous avons retrouvé la terre ferme pour me saisir de ses mains, entrelacer nos doigts et plonger mon regard dans le sien. Je pose mon front sur le sien, et je lui souffle ces quelques mots qui me viennent du fond du cœur. Subitement, tous les bons conseils d’un Prince Dornien, et d’un Chevalier Bieffois me semblaient vains et futiles.

- Je suis ton Roi, mais tu es ma Reine. Tu peux être la Reine de tous, mais saches que tu es déjà la Reine de mon cœur, aujourd’hui et à tout jamais. Je t’ai aimé dès notre première rencontre, je t’ai aimé chaque jour qui s’est suivi, je t’aime toujours et davantage à cet instant et je t’aimerai jusqu’à mon dernier souffle. Je te le jure, Nymeria, belle et intrépide Reine de mon cœur.

« La Reine de mon Cœur », voilà comment j’allais l’appeler dans l’intimité de nos appartements, ou de notre famille. Celle qui avait emprise sur tout mon cœur, et pour qui je soulèverai mont et montagne pour simplement la complaire et lui arracher quelques joies ou sourires. La simple idée qu’elle puisse souffrir ou être malheureuse m’était intolérable. Une de mes mains se glisse instinctivement sur sa joue rosée par notre chevauchée, rapprochant davantage mes lèvres des siennes, lui laissant encore et toujours le choix de prendre cette dernière décision. Je m’étais promis, bien avant son arrivée, que je ne lui imposerai rien. Et je savais que je pouvais lui faire confiance pour faire preuve de la même sagesse et attention à mon égard.

Je profite de cet instant pour pleinement m’enivrer de son parfum, pour apprécier ce petit corps contre le mien ou pour me perdre dans ce regard plein de vie et de malice. Il n’était pas question d’un baiser fugace, volé ou arraché entre deux inattentions de nos chaperons, mais d’un baiser que deux amants attendaient avec impatience et dont ils avaient dû rêver à quelques reprises. Je ne savais pas pour ma douce, mais cela avait été le cas pour moi. Aucune noble, aucune courtisane, aucune femme du peuple n’avaient eu sa grâce, son charme ou sa beauté. Aucune n’avait réussi à me faire oublier ma Lionne.

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

Nymeria n'avait jamais oublié le voyage qu'elle avait fait en compagnie de son père, de son frère ainsi que de sa sœur aînée, quelques années auparavant. Elle s'était rendue dans le Val et elle avait fait la rencontre de Ronnel Arryn, un futur roi qui avait à peu près son âge et avec qui le courant était immédiatement bien passé. Pour autant, Ronnel était beaucoup plus calme que la Lionne, beaucoup plus discret également que la plus jeune des princesses de la maison Lannister ne le serait jamais. On ne pouvait pas dire que l'un était la glace et l'autre était le feu, ça aurait été bien mal décrire le prince héritier, mais il n'en restait pas moins qu'elle, elle était une véritable tourbillon. C'était la petite dernière de la famille, la fille à son père comme on s'amusait à le dire, elle n'était pas faite pour hériter du royaume de l'Ouest, charge qui pesait sur les épaules de Lyman, son aîné. Elle n'était pas non plus aussi belle et douce que sa sœur, Megara, qui était si bien et si correcte sous tout rapport, elle faisait la fierté de leur mère, une princesse dans toute la splendeur de l'art subtil de la bienséance et dont tous les pores de sa peau semblaient transpirer la noblesse d'âme et de cœur. Il n'y avait qu'un mot pour la décrire, Megara était parfaite en tout point, et il était tout simplement impossible pour quiconque de réussir à rivaliser avec elle. C'est pourquoi Nymeria n'avait pas un seul instant cherché à lui ressembler, après tout sa mère avait décidé qu'elle les comparerait à chaque étape de leur existence. Sa sœur avait été une enfant si agréable à vivre, si facile à modeler à l'image que voulait créer Jordane, que la seconde ne pouvait qu'être moins bonne que la première. Alors, la petite princesse avait décidé de vivre majoritairement comme elle l'entendait, contre l'avis de sa mère et avec le soutien de son père.

Et quand elle avait rencontré Ronnel, elle avait compris que son âme était reliée à la sienne, et quand ils s'étaient tous les deux embrassés avant qu'elle ne reparte dans l'Ouest, il avait tout simplement capturé son cœur et elle n'avait jamais pensé à un autre époux que lui. Et ils allaient enfin arriver à ce moment qu'elle attendait depuis des années et elle n'avait plus l'impression d'avoir les pieds sur terre, tellement elle était sur son petit nuage. Elle se mit à rougir un peu plus en entendant les mots qu'il prononça à son égard, elle sentait son cœur tambouriner si fort dans sa poitrine qu'elle était presque certaine que ce dernier allait en sortir. Elle se fit alors un peu plus malicieuse, un peu plus charmeuse aussi, alors qu'elle se laissait aller à agir en suivant ce que son cœur lui disait. « Je n'ai besoin de rien d'autre, rien d'autre à part toi mon Roi. » Elle lui sourit chaleureusement, alors qu'il venait à joindre ses doigts aux siens, qu'il se rapprochait d'elle, et qu'il venait à poser son front contre le sien. Elle ne put que ressentir une vague de chaleur s'emparer d'elle alors que les mots de Ronnel venait à enflammer son sang dans ses veines, elle brûlait d'amour pour lui, un amour qui pourrait tout surmonter tant qu'elle était avec lui, tant qu'il viendrait à l'aimer avec autant de sincérité qu'à cet instant. « Ne doute pas un seul jour de l'amour que j'ai pour toi, mon cœur, mon corps et mon âme sont tous à toi, depuis le premier jour où nos chemins se sont croisés, et bien au-delà de la mort, quand celle-ci décidera de nous séparer, qu'à rien d'autre n'y parviendra. » Elle frissonna en sentant sa main se poser sur sa joue, et elle n'attendit que quelques secondes pour profiter de cette sensation avant de venir capturer ses lèvres des siennes, l'embrassant avec amour, mais aussi avec passion, elle avait tant attendu ce moment, et elle ne voulait plus jamais relâcher sa bouche ou quitter le creux de ses bras.

La mort … rions donc ! Nous étions jeunes, nous avions beaucoup à vivre ensemble, avant qu’Elle ne nous sépare. Ma véritable crainte était qu’elle ne soit point heureuse au sein de son nouveau Royaume et qu’elle rêve ou se languisse de ses terres natales. Des craintes qui s’éclipsent dès l’instant où elle accepte cette invitation implicite à nous embrasser non comme deux gamins effrayés mais comme deux amants qui avaient attendu cet instant depuis bien longtemps. Le baiser pouvait avoir duré quelques secondes ou une éternité, je serais bien incapable de le dire. Le temps n’avait plus d’emprise sur moi et rien ne m’importait plus que ce baiser ou nos deux corps collés l’un à l’autre. Lorsque l’on était aussi heureux, il était assez difficile de maîtriser cette hardiesse ou cette impatiente qui vous gagnent. Je ne désirais nullement l’effrayer ou de commettre une stupide impaire. Heureusement, ou malheureusement, le souffle manque, m’obligeant à briser cet instant.

Jamais je n’avais été aussi joyeux, et voilà que je ris. Et voilà que je rêve d’un autre baiser, et de multiples autres. Subitement, j’en viens à regretter que la date de ce maudit mariage soit si éloignée, que des conventions doivent être respectées ou tout simplement que nous étions de sangs royaux. Entre les gardes, les chaperons, les domestiques, les dames de compagnie et les conseillers, allons-nous avoir droit à une autre nuit comme celle-ci jusqu’à ce que nous nous liions devant les Sept ? Un court instant, j’enviais les simples gens. Pouvaient-ils s’aimer franchement et pleinement, sans s’inquiéter des lendemains, des conséquences ou de toutes ces conventions ?

- Prends garde, ma Reine. Tu fais des grandes promesses à un Roi. Je pourrais exiger que tu m e montres cet amour tous les jours, dis-je avec davantage de confiance. Je n’imaginais pas, un seul instant, me séparer de sa personne, de céder, comme feu mon père, aux atours d’autres dames ou de me fatiguer de ces baisers, de cet esprit, de ce corps ou de cette odeur enivrante. Saches que moi, je n’y manquerai pas.

Je m’empare encore de ses lèvres, avec plus de courage et d’ardeur. Elle allait être mienne. J’allais être sienne. Que pouvais-je demander de plus, aux Sept ? Nous étions bénis, récompensés pour notre patience. Notre entourage respectif ne pouvait pas s’empêcher de nous encenser, de nous acclamer, de nous taquiner ou de nous souhaiter le meilleur. Tout le monde semblait heureux. Nous l’étions, en tout cas.

- Profitons de cette nuit, jusqu’à ce que nous soyons fatigués et las, dis-je, ne sachant pas exactement ce que nous allions faire ou quand nous allions retourner.

Était-ce si important ? Nullement. Nous avions une garde, les Eyrié avaient déjà dû être prévenu, et j’avais devant moi celle que je désirais voir plus que tout et pour qui j’avais fait grands efforts pour quitter au plus vite Goëville. Je n’avais donc aucune raison, ou impatiente, de retourner au sein de cette vieille forteresse de marbres blancs, le joyau architectural du Val disait-on. J’avais, sous les yeux, le véritable joyau de mon Royaume, sa future Reine, la petite Lionne de la Maison Lannister, cette malicieuse à la belle chevelure blonde.

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

Nymeria n'avait jamais pensé à l'amour, n'avait jamais véritablement pensé au mariage et bien sûr, à l'évidence qu'un jour elle serait obligée de devenir mère à son tour. Elle était peut-être princesse, tout comme l'était sa sœur aînée, mais elles étaient aussi différentes l'une de l'autre, que le jour et la nuit. Elle était dotée d'un esprit bien plus libre, bien moins tempérée et elle ne restait pas facilement en place. Sa présence d'ailleurs ici aux côtés de Ronnel alors que la nuit était tombée depuis bien longtemps déjà, montrait un peu de quoi était capable la future souveraine du Val et de la Montagne. Si elle en avait la volonté, elle pouvait faire beaucoup de choses, ce n'était pas pour contrarier son entourage, mais parce que finalement elle ne savait véritablement agir autrement. Bien sûr, elle avait tout appris de ce qu'une jeune femme de bonne famille, de ce qu'une jeune femme à la plus haute place de l'aristocratie devait savoir faire, et surtout savoir dire, mais Loren Lannister avait été le complice dans de nombreuses aventures et il avait donné la possibilité à Nymeria de rêver, et il était difficile alors d'empêcher l'esprit de la jeune fille de vagabonder. Mais l'amour était une chose bien étrange, une aventure qu'elle n'avait pas prévu. Elle s'était toujours moquée de ce que Megara pouvait dire ou faire envers la gente masculine, elle avait toujours observé l'attrait grandissant de sa sœur pour l'autre sexe. Elle n'aurait pu dire si cette dernière se laissait séduire par une vision romantique de la chose ou si finalement, c'était le pouvoir du corps qui venait à lui faire bonne impression mais elles avaient toutes les deux une vision différente des choses et rien ne pouvaient finalement les faire changer.

Puis la petite princesse de l'Ouest avait rencontré le prince héritier du Val et alors, son cœur avait semblé manquer d'air et elle s'était sentie toute chose face à lui. Il n'y avait jamais eu quelqu'un d'autre dans son cœur et dans sa tête depuis lors, et elle aurait été dévastée s'il avait dû en épouser une autre. S'il avait dû épouser sa sœur, plutôt qu'elle. Et elle se perdait dans son regard, elle glissait ses doigts dans sa nuque, dans ses cheveux, elle se collait à lui, elle l'attirait à elle. Elle aurait pu se blottir contre lui pour le restant de ses jours, il n'y avait pas d'autre place où elle désirait être le plus au monde, mais elle savait également qu'elle ne pouvait faire n'importe quoi, pour ne pas déshonorer sa famille en premier lieu, pour ne pas mettre Ronnel dans une situation compliquée et surtout qu'on vienne à lui reprocher le comportement de sa fiancée. Cela ne pourrait manquer de faire tâche juste avant les noces. « Si les Sept m'en donnent la possibilité, je le ferai chaque jour, et chaque nuit durant, jusqu'à ce que la mort vienne à nous séparer. Je n'ai pas honte de mes sentiments, je n'ai pas honte de dire que je t'aime mon amour. Il m'a tellement tardé de te rejoindre, j'ai cru devenir folle et en ne te voyant pas aux Eyrié à mon arrivée, j'ai eu si peur … Si peur que finalement tu ne veuilles plus de moi … Mais je ne crois pas que les gens nous laisseront véritablement tranquille et que nous pourrons aussi facilement et discrètement nous rejoindre une fois de retour en ta capitale. En tout cas, il sera bien difficile de faire cela avant que nos vœux de mariage ne soient prononcés. Je crois qu'autant ta mère, que la mienne, ne nous pardonnerons pas un écart. »

Je n’avais jamais été friand des balades romantiques que les bardes offraient à quelques banquets, pour arracher quelques soupirs aux dames et des sourires malicieux aux hommes. D’une part, il était toujours question d’émotions incontrôlables, et d’autre part, d’un amour indestructible. Or, au sein de la Maison Arryn, ces choses-là semblaient bien improbables. En tant que membre d’une maison royale, le maintien était toujours exigé et le devoir passait avant les émotions et les sentiments – un mariage politique était la base de toute union, qu’importe les affinités. Enfin, et plus important, lorsqu’un père préfère la compagnie de ses maîtresses bien vulgaires et insolentes à celle de sa belle et fidèle épouse, on conclut qu’une affinité – si elle existait bien – entre deux personnes était destinée à s’effriter avec le temps. Or, Nymeria avait bouleversé mon monde et toutes ces croyances que j’avais nourri et accepté inconsciemment. Chaque jour, je ne l’aimais que davantage. Chaque rencontre, j’étais avide d’en apprendre plus sur sa personne, sur ses rêves, sur ses aspirations. Absente ou présente, elle me hantait dans mes rêves et dans mes pensées, de jour et de nuit. Maintenant que l’Impossible, une union avec elle, était devenue une Possibilité, je ne pouvais pas envisager un autre avenir qu’avec elle à mes côtés. Le temps d'un instant, je regrette de ne pas connaître quelques chants d'amour ... Je ne connaissais que quelques vers, de récits de guerres.

Son odeur m’enivre, plus que tous ces vins et ces bières que certains amis m’avaient invité à boire jusqu’au petit matin – sous le regard à la fois protecteur et amusé de mon Oncle, et de la garde, et à de très rares occasions. Ses doigts sur ma nuque m’arrachèrent un frisson des plus agréables. Son corps contre le mien était une tentation dangereuse, contre laquelle j’avais un grand mal à résister. Et ses paroles, prononcées de cette voix ensorcelante, furent le coup de grâce. Par les Sept, j’allais l’embrasser, jusqu’à ce nous manquions de souffles, ou que nous soyons lassés. A n’en point douter, je serais un tantinet maladroit. Elle était peut-être la seconde demoiselle que j’embrassais, mais elle était la première à mes yeux – et à mon cœur – et celle dont le bonheur et le plaisir m’importaient. Alors, je fis attention autant que possible, prenant grand soin de ne pas me hâter et de me maitriser. Voilà une tâche difficile car plus les secondes s’écoulaient, et plus j’avais d’appétit pour elle. J’en avais oublié tout, que ce soit les conventions, les obligations, le temps, l’heure ou le lieu. Mes bonnes résolutions se dissolvaient avec une telle aisance face à elle : je devrais en avoir peur et, pourtant, je m’en fichais. J’étais heureux, et je chérissais ce bonheur égoïste plus que tout le reste.

Lorsque le souffle manque, que la séparation s’impose, encore, j’en profite pour plonger mon regard dans le sien.

- Je te jure par les Sept que tu seras la seule que j’aimerai, promis-je. Ce n’était pas la parole donnée par un Roi, si aisée à critiquer et si prompt à trahir par devoir, mais celle d’un homme amoureux, n’ayant nul devoir si ce n’est envers son amante. Si nous ne portions pas le nom de nos Maisons, je ne patienterai pas une seule seconde, et ce soir même, je réveillerai un Septon pour un mariage. A quoi bon attendre, lorsque nous savons que nous nous sommes trouvés, n'est-ce pas ?  

La patiente était mise à mal, mais j'avais à me ronger le frein.
La soirée se passa ainsi, où je tentais de ne pas céder totalement à cette folle tentation, à regretter à la fois que le temps passe bien vite - et donc à quitter ma douce - et bien lentement - le mariage étant encore un tantinet loin.

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

Il y avait des promesses qu'on espérait pouvoir tenir tout au long de notre vie, des serments qui dépassaient tout ce qu'on n'avait jamais osé prononcer, des déclarations d'amour qui viendraient à aller au-delà de la mort et de cette obligation de séparer les deux amants un jour ou l'autre, quand l'un viendrait à pousser son dernier soupir. Cependant, ce soir aux côtés de Ronnel, elle se sentait forte, plus forte que les destins et que les barrières que ce dernier pourraient mettre sur son chemin. Elle se sentait invincible, elle se voyait immortelle. Ils étaient tous les deux jeunes, et alors qu'ils avaient eu le coup de foudre si tôt dans leur existence, elle était heureuse de pouvoir se dire que maintenant, elle avait toute la vie pour pouvoir être avec le Roi du Val et de la Montagne, et qu'elle pourrait l'aimer, le soutenir et l'accompagner dans les bons comme dans les mauvais moments. Elle était si certaine de cela qu'elle venait à en ressentir une profonde sérénité, qui se renforçait à chaque regard, à chaque caresse de la main de son fiancé, et encore plus quand leurs lèvres venaient à se sceller ensemble. Se rendait-il vraiment compte du temps qu'elle avait passé à l'attendre ? Et qu'elle avait enfin atteint son but aujourd'hui pour être avec lui, bien que pour cela, elle avait dû renoncer à tout ce qu'elle avait et tout ce qu'elle aimait dans l'Ouest pour espérer vivre heureuse en sa compagnie. Il était son étoile dans la nuit la plus profonde et elle se laissait guider sur le chemin, tant qu'elle pouvait arriver jusqu'à lui. Elle ne se souciait pas à cet instant de ce que pourrait dire les gens, de ce qu'on pourrait murmurer à la Cour, car ils étaient ensemble et c'était tout ce qui importait. Et au moins, avaient-ils l'excuse de l'innocence pour qu'on leur pardonne cette folie. « Qui a dit que mes rêves doivent rester juste des rêves ? » Murmura-t-elle pour elle-même alors qu'elle était toujours dans les bras et qu'elle ne voulait pas les quitter, même pour tout l'or du monde.

Malgré tout l'amour et l'empressement que les deux jeunes fiancés avaient l'un pour l'autre, il avait fallu attendre le jour de la cérémonie officielle pour pouvoir unir leurs deux maisons, et unir leurs deux destins. Nymeria avait été baigné à la fois dans la plus grande félicité d'arriver enfin à un tel moment en compagnie de son époux qu'elle avait tant espéré, qu'elle avait tant aimé, mais elle ne manquait pas d'avoir une certaine mélancolie face à la réalité, et surtout à l'absence de sa famille pour ses noces. Personne de son entourage le plus proche n'avait fait le déplacement pour l'occasion et elle devait avouer qu'elle vivait mal la chose alors qu'elle aurait aimé pouvoir partager son bonheur avec les siens et pas seulement par lettres interposées qui mettraient plusieurs jours à arriver à la bonne destination. Néanmoins Ronnel était à ses côtés et cela était certainement la chose la plus importante à ses yeux. La cérémonie était maintenant terminée, et elle n'avait pas manqué à verser quelques larmes de joie alors qu'elle venait à échanger son premier baiser en tant qu'épouse. L'heure était maintenant aux festivités, les plats avaient été servis à table, la musique faisait son œuvre et même quelques invités commençaient à se lever pour aller danser, alors que le vin était servi dans la joie et l'allégresse. Elle vint doucement à capturer la main de Ronnel sous la table d'honneur et elle se pencha doucement vers lui, un délicat sourire aux lèvres. « Êtes-vous heureux mon bien-aimé ? »

Nymeria Lannister

Nymeria Lannister a enfin quitté l'Ouest pour pouvoir rejoindre le Val et son futur époux, le roi Ronnel Arryn. Arrivée aux Eyrié sans membre de sa famille pour l'événement le plus important de sa vie, son mariage, elle affronte l'absence de son futur époux et tente tant bien que mal de s'adapter à la vie à la Cour valoise, espérant faire bonne impression à tous et être la nouvelle souveraine qu'on attend d'elle.

Nymeria était sur son petit nuage de bonheur, et rien, ni personne n'aurait pu gâcher cela à ce moment précis. Certes, elle n'était pas totalement sereine à l'approche de la nuit de noces et de ce qu'il se passera une fois la porte de leur chambre conjugal fermée. C'était une autre de ses angoisses qu'elle aurait aimé partager avec sa mère, ou plutôt avec sa sœur, avec qui le contact était bien plus facile. Jordane avait une conception bien à elle de la maternité, et maintenant que la Lannister avait fait la connaissance de sa belle-mère, elle se rendait compte de la différence qui pouvait exister. On pouvait être une reine et n'en rester pas moins une mère aimante pour autant, car Sharra aimait profondément ses enfants, elle avait su le lui montrer dès le début et même si la première approche n'avait pas forcément été évidente pour l'une comme pour l'autre, elle avait compris qu'elle était heureuse que son fils se marie par amour, tant que le devoir restait néanmoins une de ses priorités et que Nymeria soit également à la hauteur de son rôle en tant que reine et il était clair que de succéder à Sharra Arryn ne serait pas une mince affaire. Tellement de choses passaient à cet instant précis dans son esprit, et si elle n'avait pas la main dans celle de Ronnel, si elle ne le savait pas à ses côtés, elle n'aurait pas manqué de se laisser submerger par l'émotion, un mélange subtil de joie débordante et d'angoisse montante.

Heureusement pour elle, il ne manquait plus que Leto pour pouvoir mettre une pointe d'humour durant les festivités. Elle ne connaissait encore que très peu celui qui se présentait comme le meilleur ami de son époux, mais on pouvait au moins dire qu'il était loin d'avoir la langue dans sa poche et quand il dériva vers des paroles plus graveleuses, Nymeria se mit à rougir face à l'audace. Elle détourna le regard jusqu'à la fin du petit discours de ce dernier, et ne le releva pour regarder les hommes et les femmes présents aujourd'hui que quand ce fut Ronnel qui reprit la parole. Elle hocha doucement la tête. « Je sais que je suis chez moi, et même si c'est accueil de la part du peuple du Val est extrêmement plaisant, je serai chez moi là où toi tu seras. Ce n'est pas pour la couronne que je suis venue, et même si je suis heureuse de devenir la Reine de ces gens que tu chéris tant, j'ai fait tout cela uniquement pour toi mon amour. »

Les festivités se lancèrent alors, la musique venant à s'entendre dans la pièce, le vin versé dans les coupes et les estomacs se remplissant. Elle n'avait pas réellement faim, mais elle se prêtait facilement au jeu, remerciant les personnes qui se présentaient à elle. Les quelques mots de Ronnel ne manqua pas à lui faire gonfler la poitrine de bonheur et surtout d'amour. Elle s'accrocha un peu plus à lui quand il l'embrassa et finalement, elle avait hâte de se retrouver avec lui ce soir. « Personne n'aurait eu la possibilité de s'emparer de moi comme vous dîtes, car je n'aurai supporter un autre époux que vous, mon bien-aimé. » Elle leva alors son verre et trinqua avec lui avant de boire une gorgée de sa coupe. « Je suis heureuse mon amour, mais je le serai encore plus si vous m'invitiez à danser. » Elle lui fit un clin d'œil malicieux alors qu'elle se levait déjà de son siège.

La bière me montait à la tête, apportant quelques changements discrets à mon humeur. J’amusais ma famille et mes amis avec mes joues rosies, mes rires incontrôlées ou ces impulsions d’amours. Le gamin sombre, préoccupé et pressé avait disparu au profit d’un homme heureux, énergique, assuré et confiant.

Mon orgueil grossissait davantage, lorsqu’elle disait que personne – hormis moi – n’aurait pu s’emparer d’elle. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Aurait-elle fui jusqu’aux Eyrié ? Ah, elle serait bien capable ! Et je l’aurais accueilli avec joie, et je l’aurais honoré selon ses souhaits, soit en respectant une distance, soit en occupant son lit de jour comme de nuit en tant qu’époux – si j’étais célibataire, libre de me marier –, ou en tant qu’amant – si j’avais déjà scellé mon destin par un mariage politique. Au contraire, serait-elle restée à Castral-Roc, en s’enfermant dans quelques pièces ? Alors, je lui aurais apporté mon soutien, de mes propres mains, pour la libérer d’un terrible joug. Par quels moyens ? Je ne saurais dire, mais je ne serais pas mesuré. Elle était la seule et l’unique à commander mon cœur, pour qui je donnerai tout, pour qui je me battrai contre tous. Nulle parole vaniteuse, mais sincère. Quant il est question de Nymeria, mes peurs et mes hésitations s’envolaient.

- Nymeria Arryn, Reine du Val et de la Montagne, mon Epouse chérie et Reine de mon Cœur, je vous invite à danser avec moi, lui dis-je.

Je m’étais levé, tendu une main, et demi-plié une jambe. Dès que je sens sa main dans la mienne, je la recouvre de mes doigts. Aussitôt, je traine la lionne, avec une impatiente à peine cachée, au centre de la pièce. Nous nous lançons, au rythme de la chanson. Et puis, le monde disparaît. Le monde ne se résumait plus qu’à Nymeria. Est-ce qu’il y avait des hommes et des femmes autour de nous ? Je ne voyais plus qu’elle, son sourire, ses traits et sa chevelure. Est-ce qu’il y avait une chanson ? Je n’entendais plus que les battements de cœur ou les rires guillerets de ma bien-aimée. Est-ce qu’il y avait des mets et de l’alcool à foison ? Seule son odeur m’enivrait !

Nous dansons, même si nos pieds font mal, nos têtes tournent ou que nos gorges s’assèchent. Nous aurions pu continuer, encore bien longtemps, si nous n’avons pas été interrompu par mon oncle. Il nous glisse quelques mots. Il dit que nous devons nous asseoir, que les seigneurs souhaitent offrir leurs présents, qu’ils patientent tant bien que mal sur leurs chaises, qu’ils se retiennent d’apprécier pleinement le festin afin d’être encore bien lucide et sobre lorsque leur présent sera présenté. Enfin, tous les invités ne contenaient plus leur curiosité vis-à-vis des présents reçus de l’Ouest, au nom de la Maison Lannister et de leurs vassaux. J’étais tenté d’être sourd aux sous-entendus, celui d’enfiler la tenue de Roi et non d’époux, mais je me ravise.

Aujourd’hui, nous étions Roi et Reine du Val et de la Montagne.
Aujourd’hui, nous avions des responsabilités.

Un sourire se dessine sur mes lèvres, malgré l’ampleur de la tâche et des nombreuses difficultés qui nous attendaient. Tout me semblait limpide, et rien n’était plus infranchissable. Tant qu’elle sera à mes côtés, je soulèverai bien des montagnes. Tant qu’elle me couvrira de son doux regard, j’accomplirai l’impensable. Enfin, tant qu’elle me gratifie de sa chaleur, je serais simplement heureux.

J’étais heureux. J’avais enfin mon roc, ma lionne, et surtout mon Reine de Cœur