Sybelle se sentait surexcitée et pour toutes les raisons possibles.

Elle avait hâte de pouvoir observer les joutes, elles seraient très amusantes et divertissantes. Elle avait hâte de revoir Nymeria et Megara, car les princesses étaient de bonnes amies, de bonnes vivantes, qu’elle ne voyait que très rarement. Finalement, elle avait hâte de retrouver Castral Roc. Contrairement à plusieurs, Sybelle appréciait l’aspect austère de l’endroit, car il lui rappelait la majorité des châteaux dont on parlait dans les livres et dans les histoires de chevalier qu’elles avaient l’habitude de lire, avec Althea. Pour l’adolescente, la traversée fut un enfer. De Belle île au continent, cela devait prendre deux ou trois jours dépendant des conditions et de l’état de la mer. Cette fois, l’excitation de l’insulaire l’avait rendu malade. Sa mère n’avait pas arrêté de lui dire de s’assoir, de se calmer, que l’excitation la ferait se sentir nauséeuse. Elle n’avait pas eu tort.

Presque tout de suite après leur départ, la demoiselle ne s’était pas sentie bien, et ce, jusqu’à ce qu’elle pose le pied sur la terre ferme. Sybelle s’était excusée auprès de ses parents, se rendant bien compte de son état et de ce que cela avait produit comme effet sur la traversée : sa mère, constamment à son chevet, son père inquiet de la voir tomber malade pendant leurs quelques jours en mer, loin de tout et des mestres. Elle leur promit de mieux se comporter à l’avenir et de bien se tenir tout au long de leur visite au Roc. Néanmoins, à peine avaient-ils commencé la route vers Castral Roc, à partir de Port Lannis, qu’elle sentait déjà son cœur tambouriner dans sa poitrine. Elle savait qu’ils ne mettraient pas plus de quelques heures pour faire la route entre les deux, alors elle tenta de se calmer le plus possible. Cela fonctionna et lorsqu’elle mit le pied à terre près de la demeure des lions, elle se sentait plus sereine.

Sybelle suivit ses parents en silence alors qu’ils étaient accueillis par le grand intendant de la maison Lannister. Ils furent rapidement guidés vers l’endroit où ils allaient loger. La jeune adolescente ne s’éloigna pas de sa famille d’un centimètre, il était hors de question qu’on puisse le lui reprocher lorsque, dans quelques minutes, elle demanderait à ses parents de pouvoir aller rejoindre les princesses. Sa valise était à peine posée, qu’elle leva un regard suppliant en direction de sa mère, sourire aux lèvres.

« Maman ? Est-ce que je peux aller voir si Nymeria est disponible pour me recevoir ? »

Anya tourna la tête en direction de son mari, qui hocha une fois la tête, avant de reprendre ce qu’il était en train de faire. Sybelle n’écouta la recommandation de sa mère à propos de déranger les princesses, de devoir, de responsabilité que d’une oreille avant de s’élancer dans les couloirs du château. Sa robe flottait derrière elle, ses enjambées étaient rapides et dans une direction bien précise. Elle connaissait les endroits préférés de la plus jeune des princesses sur le bout des doigts, elle saurait la retrouver, sans le moindre doute. Elle commença par le premier, sans qu’elle y soit. Sybelle n’abandonna pas pour autant, il y avait beaucoup d’endroits que Nymeria affectionnait. Rapide, elle ne regardait qu’à peine les gens qu’elle croisait, l’excitation des retrouvailles courrait sur sa peau, dans son cœur et dans son corps. Puis d’un coup, elle se figea totalement, immobile en plein centre du couloir, les sourcils froncés.

« Lyman… ? »

Il avait changé. Ou peut-être était-ce qu’aujourd’hui, elle le voyait différemment ? Elle l’observa, sans bouger et sans parler pendant quelques secondes, se demandant ce qui avait changé chez lui. Elle se mordit légèrement la lèvre en plissant les yeux, puis un sourire apparut sur les lèvres de l’insulaire.

« Tu… Tu es en beauté, aujourd’hui. Contrairement à d’habitude. » Une petite pique pas trop méchante, car elle avait l’habitude de s’amuser à ses dépens avec ses petites sœurs, mais toujours sans dépasser les limites. Sybelle ne voulait pas le blesser, seulement l’agacer, un peu.

Sybelle traversait les couloirs, presque en courant, avec un grand sourire aux lèvres. Sa longue robe bleu pâle volait derrière elle tandis qu’elle bifurquait entre les gens et tournait les coins de mur au plus près possible. Elle tâchait d’éviter de bousculer, sans toutefois penser à ralentir le pas, l’excitation prenant le dessus sur le reste. Jusqu’à ce qu’une tête blonde ressorte du lot, flamboyant comme elle ne l’avait jamais vu auparavant. Son sourire la fit légèrement rougir, il avait l’air très heureux de la revoir. À sa dernière visite, l’insulaire n’avait pas vraiment porté attention au lionceau, trop jeune, trop masculin. Elle avait eu tant à faire avec ses cousines que son cousin était légèrement passé à la trappe, sous son radar. À ce jour, les choses lui semblaient légèrement différente : ils avaient vieilli, il avait grandi. Il était beau. Sybelle se mordit la lèvre inférieure lorsqu’il lui dit qu’elle n’était pas mal, elle aussi.

Le contact de ses lèvres contre la peau de sa main la fit rougir plus violemment qu’elle ne l’aurait voulu. Elle le laissa faire, avec un léger sourire, comprenant qu’il forçait les manières afin de lui être sympathique après leur petite pique. Lyman était trop gentil, probablement, il ne cherchait pas à la blesser volontairement. Il l’agaçait, mais sans plus.

« Tu plaisantes… » dit-elle en frottant légèrement ses joues, afin d’éviter qu’il remarque le changement qu’elle s’évertuait à cacher. « J’ai passé la moitié du voyage écroulée, malade. Je n’ai même pas pu pleinement profiter des vagues et de l’odeur de l’océan. » avoua-t-elle, déçue du voyage.

Sybelle avait toujours apprécié ces traversées, elle ressentait le balancement du bateau comme une berceuse rassurante, malgré les tempêtes possibles, malgré les bruits, malgré les risques. Elle avait toujours apprécié les balades en bateau, les déplacements étaient moins agréables à cause du nombre de gens, du fait qu’ils aient une direction précise, l’angoisse de se tromper ou de finalement pas se rendre au bon endroit. Mais bon.

Finalement, elle s’était rendue et elle se sentait beaucoup mieux depuis qu’elle avait posé ses pieds sur la tête ferme. La preuve étant qu’elle s’était élancée, à peine quelques minutes plus tard, dans les couloirs du roc.

Sybelle fit une mine triste en apprenant que ses cousines n’étaient pas encore là. Elle lâcha un léger soupire, puis se mit à réfléchir à ce qu’elle pourrait faire en attendant pour passer le temps. Il ne lui vint pas à l’esprit de demander à Lyman de rester avec elle, même si – une fois l’idée proposé par le jeune homme – l’insulaire se prit à sourire.

« Bien sûr. J’adorerais faire une visite en ta compagnie, mais seulement si on passe par la cuisine pour que tu y voles un petit quelque chose pour moi. » dit-elle avec un sourire espiègle.

La jeune femme savait très bien qu’il ne s’agissait pas réellement d’un vol, le prince pouvait faire ce qu’il souhaitait, mais l’idée qu’il puisse faire quelque chose de « dangereux » pour elle la faisait encore plus sourire. Elle tendit son bras vers lui, tel un automatisme, puis se rendit compte qu’elle ne faisait pas cela avant. Elle se demandait pourquoi aujourd’hui tout était si… étrange et différent. Elle garda, néanmoins, le bras tendu dans sa direction.