{Flashback} Dame de compagnie ▪(An 1, Mois 10.) [Tour XI - Terminé]

An 1, Mois 10.

Sybelle Farman & Alys Kenning

« L’âme en feu, Sybelle fait la route entre Belcastel et Castral Roc afin de devenir Dame de Compagnie, un rôle dont elle connait bien peu de chose. Elle est effrayée et excitée. »

Sybelle ne savait pas trop pourquoi, mais cette fois, la route entre Castral Roc et Belcastel lui semblait interminable. Elle essayait autant que possible d’occuper ses pensées, mais tout ce qu’elle arrivait à tourner en boucle dans sa tête lui rappelait sans cesse ce qu’elle laissait derrière elle. Bien qu’elle eût choisi de partir pour épauler la Princesse Megara, une partie de son cœur restait sur Belle Ile avec les siens.

La demoiselle ferma les yeux en concentrant son énergie sur sa respiration. Elle devait prendre sur elle, même si en y pensant bien, elle n’avait pas eu le loisir d’hésiter lorsque la Princesse lui avait proposé de devenir sa Dame de Compagnie. Elle avait accepté, d’un coup, comme poussée par une énergie soudaine ; l’envie du changement. Sybelle ne regrettait pas réellement cette décision, c’est simplement qu’en y pensant bien, elle avait l’impression d’abandonner sa petite sœur pour ses propres désirs : ce qu’elle n’avait jamais vraiment fait. Depuis la naissance d’Althea, ses pensées s’étaient souvent tournées vers sa cadette lorsqu’il lui revenait de prendre des décisions et de faire des choix pour son avenir. Cette fois, elle n’y avait pas pensé du tout face à la détresse de Megara. Comment aurait-elle pu même penser à refuser alors que la Princesse vivait dans un tourment lié au deuil de son père, mais aussi de sa récente maternité ?

Sybelle pouvait le faire, elle pouvait se concentrer sur son rôle de Dame de Compagnie, ne plus penser à ce pincement pour sa sœur, se tourner vers son avenir à elle. Sa mère n’avait cessé de lui répéter qu’un jour, elle partirait, qu’elle aurait à découvrir une partie du monde, à se marier, à jouer un rôle encore plus important que celui de grande sœur. Bien sûr qu’elle l’avait cru, mais elle n’avait pas pensé que ce serait de cette manière.

Au bout d’un certain temps, la route avait calmé son âme. Sybelle se sentait mieux. Elle n’avait plus envie de tourner son regard vers le passé, mais bien vers le présent. Althea était grande maintenant, elle saurait prendre soin d’elle et de leur mère. Et plus tard, dans quelques années, elle pourrait mieux comprendre sa décision. Un léger sourire s’étira sur ses lèvres lorsqu’elle pensa aux bambins dont elle devrait s’occuper. Tybalt et Cadwyn étaient les jumeaux de la Princesse Megara et en tant que Dame de Compagnie, elle pourrait lui donner un coup de main avec les enfants. Cette idée lui faisait particulièrement plaisir, car elle avait toujours beaucoup aimé s’occuper d’enfant.

Lorsque Castral Roc se dessina devant elle, la jeune femme passa ses mains dans ses cheveux, replaça le haut de sa robe et acquiesça en silence à sa propre apparence. Elle jouerait son rôle parfaitement. Du moins, si l’on attend d’une Dame de Compagnie franchise, perfectionnisme et un brin d’esprit. L’angoisse entra doucement dans son corps et l’habitat quelques instants, tandis qu’elle se demandait ce qu’étaient réellement les fonctions qui l’attendaient.

Elle déposa finalement les pieds devant Castral Roc et ces murs qui l’avaient jadis amusée et soignée lui paraissaient bien plus imposants et importants en ce jour. Elle regardait l’immensité du Roc comme une montagne qu’il lui fallait gravir ; elle le ferait, la tête haute, mais pas sans peur. Elle prit quelques instants, dos au château, pour observer les paysages qui s’offraient à elle. Sybelle plaqua un sourire sur ses lèvres et même si aujourd’hui, il était forcé, elle savait qu’avec le temps, elle pourrait faire de cet endroit sa demeure et peut-être se sentirait-elle assez confortable pour être véritablement heureuse.

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« On mesure l’union d’une famille à sa capacité à traverser ensemble les étapes difficiles. » – Clément Auray

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Dame de compagnie

Alys Kenning & Sybelle Farman

Depuis un peu plus d'un mois, le Roc était en effervescence. La mort du roi Loren Lannister, suivi de près par le couronnement de Lyman avaient été des événements qui avaient fait trembler les murs immémoriaux de la forteresse ouestrienne. Alys avait trouvé à s'occuper, propulsée de simple dame de compagnie de la princesse Jeyne à dame d'atour de la reine de l'Ouest. Elle qui n'avait jamais imaginé pareil scénario se retrouvait soudain sur le devant de la scène, ses faits et gestes devenant un intérêt soudain pour la cour. Tout comme ceux de Jeyne. Les deux jeunes femmes se connaissaient maintenant depuis quelques mois. Alys était arrivée au Roc sous conseil de son frère Gareth, après l'épidémie dévastatrice de Kayce. Elle en faisait toujours des cauchemars, d'ailleurs. Ses parents avaient perdu la vie, et plein d'autres. En Jeyne, elle avait trouvé une épaule pour pleurer, et des oreilles pour écouter. Elle aussi avait vécu de terribles moments. Alors, ce n'était pas un concours, mais les deux jeunes femmes avaient appris à vivre comme elles le pouvaient et à se soutenir mutuellement.

Tous les jours, Alys prenait soin d'elle et passait beaucoup de temps aux côtés de sa reine. Ce matin-là, elle avait décidé d'aller prendre l'air dans la cour d'entrée du Roc. L'agitation était palpable en ce jour de marché. La préparation des stands étaient en cours, pour être ravitaillés plus bas, vers Port-Lannis. Des personnes courraient dans tous les sens, et d'autres discutaient avec plus ou moins d'emphase ou d'empressement. Un timide soleil était là, mais la température était plutôt basse en ce mois 10. Alys avait revêtu un manteau de fourrure qu'elle appréciait beaucoup, surtout lorsqu'elle voyait le souffle de sa respiration créer de petites volutes de fumées puis disparaitre dans l'air. Une personne malgré tout semblait bien seule, au milieu de ce brouhaha. Une jeune femme, d'après ce qu'elle voyait à distance, les cheveux blonds comme les blés, une capuche recouvrant une partie de sa tête. Alys remarqua ses bagages, posés au sol, ainsi qu'un bout de tissu, sans doute un châle ou une cape, négligemment oublié par terre. A pas aussi légers que possible avec le poids de son manteau, elle s'approcha d'elle, se baissant pour ramasser le vêtement, puis l'interpella.

« Ma Dame, il me semble que vous avez fait tomber ceci. »

Elle était jolie, et jeune. Alys n'aurait pas su deviner son âge avec certitude - elle était nulle à ce jeu là, mais elle imaginait qu'elles avaient à peu près le même âge. Son air ému, attendri presque, de se trouver dans l'enceinte du Roc lui rappela sa propre arrivée, quelques mois auparavant. Elle lui sourit.

« Venez-vous d'arriver en ces lieux ? Je peux peut-être vous aider. »

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The night is long and the path is dark. Look to the sky for one day soon, the dawn will come. Bare your blade and raise it high. Stand your ground. For one day soon, the dawn will come.

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Embrumée par sa nostalgie, Sybelle ne remarquait même pas le brouhaha qui l’entourait, elle observait, mais ne regardait pas vraiment. Pouvait-elle voir Belle Ile à partir du château ? Peut-être d’une place plus haute, car l’île n’était pas si près de la terre, mais elle n’était pas assez loin pour ne point la voir. Elle se mit en tête de trouver cet endroit où elle pourrait voir l’endroit d’où elle venait, pour se tourner finalement vers l’avenir qu’elle tentait de se tracer avec une certaine incertitude dans les pas, il lui fallait pourtant avancer et tourner la page sur le passé, sans pour autant l’oublier. Lorsqu’Alys entra dans son champ de vision, elle ne la vit pas vraiment, mais sa voix lui fit revenir les idées en place. Sybelle commença graduellement à se réveiller, elle se sentait empâtée, comme si elle avait été absente de son propre corps quelques minutes. Elle fit un grand sourire à la demoiselle, celui-ci n’était pas forcé.

« Oh ! Merci… Je n’avais pas remarqué. »

Elle déchargea la jeune femme de son vêtement et le déposa sur son propre bras, probablement l’endroit d’où il était tombé quelques minutes avant. À cet instant, elle se rendit compte du mouvement des gens autour d’elle, de cette cacophonie que ses pensées avaient camouflée jusqu’au moindre son. Elle tourna la tête un peu dans tous les sens, comme pour s’ancrer dans le moment présent, réaliser ce qu’il se passait et cela devait lui donner l’air encore plus perdu qu’elle ne l’était réellement. Elle connaissait le château, elle n’avait pas peur de s’y aventurer, elle connaissait les grands couloirs, les quartiers royaux, etc.

« Oui. Enfin, non. Ce n’est pas la première fois que je viens, mais… c’est la première fois que je vais y rester pour un moment. »

Elle se tourna finalement face à Alys pour lui accorder toute son attention, faisant fit du reste.

« Je m’appelle Sybelle. Je suis venue à Castral Roc afin d’épauler la Princesse Megara. Elle m’a proposé le rôle de Dame de Compagnie. Et vous, vous êtes ? »

Sybelle connaissait son visage, il lui semblait qu’elle l’avait déjà croisée, probablement dans des événements précis dont elle perdait le souvenir. La jeune femme en face d’elle, en la regardant un peu, lui ressemblait : dans ses manières d’agir, dans sa posture, dans sa tenue. Elle ne saurait dire si son instinct lui mentait, mais c’était rarement arrivé. Elle aurait pu mettre sa main au feu qu’elle avait affaire à quelqu’un d’à peu près le même rang qu’elle. La jeune femme cessa d’analyser l’autre, jugeant que de toute manière, tous les scénarios qu’elle pouvait se faire ne sauraient valoir la vérité.

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Dame de compagnie

Alys Kenning & Sybelle Farman

Bien élevée, il était dans la nature d'Alys de se montrer avenante et d'essayer d'aider si besoin. Plus encore que sa propension à vouloir aider, elle se souvenait de ses premiers jours au Roc. La différence de taille entre Kayce qu'elle avait quasiment toujours connu, et le Roc l'avait impressionnée. Elle y était déjà venue avant de venir y habiter, car elle y avait souvent rendu visite à son frère aîné Gareth. Mais c'était une toute autre sensation de savoir qu'on allait y habiter, et elle avait reconsidéré l'immense forteresse lorsqu'elle y était revenue pour y poser ses valises, pour de bon. Maintenant, plus d'un an plus tard, c'était beaucoup plus simple pour elle. Elle s'y sentait comme chez elle. Jeyne, Megara, Gareth... Tous avaient été accueillants et l'avaient fait se sentir comme chez elle.

Le deuil de ses parents était passé. Mais elle gardait toujours en elle un souvenir vivace de ces moments passés avec eux, et des derniers. Les voir allongés sur ce lit... Elle garderait cette image ancrée en elle pour toujours, elle en était persuadée. Alors, toujours, c'était long, certes. Mais elle le sentait. L'épidémie avait été un moment fondateur de la nouvelle Alys, et en ce sens, il l'accompagnerait où qu'elle aille.

La jeune femme semblait perdue dans ses pensées, et Alys craignit de l'avoir dérangée. Elle lui sourit avec gentillesse, ne souhaitant pas la brusquer. Elle venait de reprendre le vêtement lorsqu'elle la remercia. Alys en profita pour la détailler un peu plus : jeune, oui, avec de longs cheveux blonds qui lui tombaient en cascade sur les épaules en boucles harmonieuses. La Kenning s'en sentirait presque jalouse, elle qui n'avait malheureusement que quelques cheveux légèrement ondulés encadrant le reste, assez plats mine de rien. Ses yeux s'écarquillèrent lorsque l'inconnue lui confia être déjà venue :

« Oh, je vois exactement quelle sensation cela vous fait ! Je me suis sentie pareil, un peu dépassée par les événements mais en même temps avide de commencer cette nouvelle vie. » lui lâcha-t-elle avec entrain, parlant beaucoup plus que nécessaire sans doute.

Elle se présenta, permettant à Alys de pouvoir mettre un nom sur son doux visage. Sybelle ! Elle mentionna Megara. Sa dame de compagnie ? Le hasard faisait bien les choses finalement.

« Enchantée de vous rencontrer, lady Sybelle. Nous allons nous revoir, puisque je suis la dame de compagnie de la reine Jeyne Lannister. Alys Kenning. Votre dame est l'épouse de mon frère aîné, Gareth Kenning. »

Elle inclina doucement la tête pour la saluer, puis se baissa pour prendre un bagage qu'elle avait avec elle.

« Laissez-moi vous aider, vous savez où sont vos appartements ? Ce n'est pas grave, on peut aller demander à l'intendant, il aura sans doute tout organisé. »

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Sybelle Farman & Alys Kenning

« L’âme en feu, Sybelle fait la route entre Belcastel et Castral Roc afin de devenir Dame de Compagnie, un rôle dont elle connait bien peu de chose. Elle est effrayée et excitée. »

En le disant à haute voix, Sybelle réalisa vraiment l’ampleur de cette décision : elle ne rentrerait probablement jamais à Belcastel. Elle s’en sentit effrayée et curieuse, car il s’offrait à elle toutes ces nouvelles possibilités. Bien qu’elle soit venue à Castral Roc assez fréquemment, c’était la première fois qu’elle le faisait sans le regard réprobateur de ses parents, leur air sévère, leur connaissance des us et coutumes de la Cour. Une partie d’elle avait peur d’être elle-même et de décevoir, elle se rendait compte maintenant que les libertés prises sur Belle Ile n’étaient pas toutes appropriées entre les murs du Roc : il lui fallait faire bonne figure, au moins le temps de prendre ses repères. Il lui fallait être le parfait outil de la société qu’elle représentait : jolie, polie, droite et courtoise. Jamais un mot de travers. Pour une jeune femme qui n’avait pas la langue dans sa poche, ce ne serait pas une partie de plaisir… du moins, au début.

« Lady Alys… Bien sûr. » dit-elle en acquiesçant à ses propres constatations. « Je me souvenais de votre visage, mais je n’avais plus souvenir de vous avoir rencontré. Vous êtes la plus jeune de la famille Kenning, est-ce bien cela ? » ajouta-t-elle avec un certain sourire, amusée.

Sybelle observa la jeune Kenning avec bienveillance, elle lui rappela rapidement sa petite sœur : elles devaient avoir sensiblement le même âge. La blonde passa sous silence, volontairement, mais sans laisser paraître, le fait qu’elle accompagnait la reine Jeyne. Les deux femmes n’avaient pas développé de relation depuis le mariage de cette dernière avec son ami de longue date, elles ne se connaissaient pas… mais peut-être que son arrivée dans ce château pourrait tout changer.

« Je n’ai absolument aucune idée d’où je vais. » dit-elle en riant. « L’intendant saura probablement plus que moi. »

La demoiselle prit la valise qui reposait à ses pieds et alla pour prendre celle qu’Alys venait de prendre, pour la décharger de son fardeau, mais cette dernière avança légèrement ce qui lui fit manquer la poignée de quelques centimètres. Elle sourit légèrement et emboîta le pas de la plus jeune à l’intérieur des murs du château. Il paraissait plus imposant encore qu’à ses dernières visites.

« Si vous m’accompagnez, vous n’avez pas le choix de m’expliquer des détails de la vie d’une Dame de Compagnie. Vous avez plus d’expérience que moi en la matière et je ne voudrais pas décevoir la Princesse. »

Sybelle était sincère. Elle voulait être parfaite aux yeux de sa cousine. Elle avait besoin de jouer son rôle à la perfection, car lorsqu’elle décidait qu’elle faisait quelque chose, elle n’y allait pas de main morte.

Finalement, ses appartements n’étaient pas si difficiles à trouver lorsque l’intendant leur eu indiqué le chemin : tout près de celles de Megara, bien évidemment. Elle aurait probablement pu réussir à s’y rendre par elle-même, mais la compagnie d’Alys lui plaisait et elle n’avait pas envie d’être seule pour le moment.

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Dame de compagnie

Alys Kenning & Sybelle Farman

Alys lui sourit, avec sincérité. Elle avait la sensation de se revoir, quelques mois plus tôt, à l'aube d'une nouvelle vie, qui avait commencé par la pire des sensations, celle de la mort et du deuil. Elle acquiesça à la question de la jeune Farman, hochant la tête avec entrain :

« Oui ! Je suis la dernière de la fratrie. Vous connaissez peut-être Tybolt, le chef de notre maison maintenant, ou bien Robert, notre responsable commercial. Ou encore Gareth, époux de la princesse Megara et Grand Maitre de l'Ouest. Si vous ne le connaissez pas encore, ce sera bientôt le cas, je pense. »

Elle sonda sa mémoire, tentant de se remémorer si elle connaissait ou non la jeune femme. Elle avait du la croiser à des événements officiels, par exemple à un mariage ou à un couronnement. Elle rit un moment, lorsque Sybelle lui confia être perdue par rapport à la localisation de ses appartements. Elle lui toucha le bras, en guise d'amitié, lui offrant un soutien dont elle savait qu'elle avait besoin, au vu de son arrivée toute récente :

« Ne vous en faites pas, nous allons trouver. »

Avant qu'elle n'ait pu protester, Alys s'était emparée de la poignée de son bagage et avait entamé le déplacement jusqu'au bureau de l'intendant. Une fois devant, elle frappa à la porte, puis se tourna vers Sybelle, qui venait de lui demander de l'aide sur son rôle de dame de compagnie.

« Oh, je vois... Je n'ai pas énormément d'expérience en la matière, je le crains. »

Elle réfléchit, rassemblant mentalement quelques conseils qu'elle aurait aimé avoir en arrivant.

« Il faut être là avant qu'elle se lève, le matin, et après qu'elle se couche, le soir. Votre rôle est de faire en sorte qu'elle puisse faire le sien. Toutes les préoccupations triviales ne doivent pas encombrer son esprit. Vous êtes là pour les alléger, le plus possible. »

Cela suffirait-il à la calmer ? Rien n'était moins sûr. Son excitation lui rappelait la sienne, propre à l'arrivée dans un nouvel environnement et à une mission que l'on voulait réussir.

« Mais je connais Megara. Elle est calme, et gentille. Je suis sûre qu'elle voudra bien vous expliquer ce qu'elle attend exactement. Vous pourrez aussi peut-être vous occuper de mes neveux, Tybalt et Cadwin. Ils sont encore tout jeunes, mais apparemment ils donnent du fil à retordre à ma belle-soeur ! »

Les deux enfants avaient à peine trois mois, et si Alys devait bien être reconnaissante d'une chose, c'était celle de pouvoir les voir grandir, en étant au Roc. Elle aurait sans doute eu moins cette chance, si elle était restée à Kayce. Une pensée alla jusqu'à Tybolt, puis une autre jusqu'à William, son fiancé. Son destin l'enverrait plutôt du côté de Godric's Hall. Reverrait-elle un jour Kayce, pourrait-elle un jour s'y sentir à nouveau comme chez elle ?

Une fois dans les appartements, Alys posa la valise au sol, puis se dirigea vers les rideaux pour les ouvrir. Ils donnaient sur la petite cour où elles s'étaient rencontrées. Elle ouvrit la fenêtre, puis se retourna vers Sybelle.

« Et vous voilà prête à vous installer. »

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Sybelle Farman & Alys Kenning

« L’âme en feu, Sybelle fait la route entre Belcastel et Castral Roc afin de devenir Dame de Compagnie, un rôle dont elle connait bien peu de chose. Elle est effrayée et excitée. »

Pendant qu’elles marchaient jusqu’au bureau de l’intendant, Alys confirma ses dires par rapport à sa position dans la famille Kenning. La jeune blonde acquiesça lorsqu’elle évoqua les autres membres de sa fratrie et elle lui fit un plus grand sourire lorsqu’elle parla de Megara et Gareth. Évidemment, elle serait bientôt amenée à le rencontrer assez régulièrement et elle n’était pas contre avoir de bonnes relations avec les gens qu’elle pensait côtoyer souvent. Sybelle ne se souvenait pas de toutes les personnes évoquées par la jeune Kenning, mais elle pouvait mettre un visage sur certains prénoms. Ils avaient dû assister à nombre d’événements en commun. Si elle se souvenait bien de ses apprentissages, la famille d’Alys était aussi – voir peut-être même plus – importante dans la Cour de l’Ouest que la sienne ; c’était probablement pour cette raison que les prénoms de ces membres lui étaient familiers.

Arrivées au bureau de l’intendant, il leur indiqua la direction à prendre et même si elle s’était aventurée quelques fois dans les couloirs du château, Sybelle n’était pas mécontente d’avoir de la compagnie et, accessoirement, un guide à suivre dans les instants de doutes. Elle profita de cette progression à travers le château pour poser quelques questions à Alys, puisqu’elles seraient amenées à occuper des fonctions similaires. Sybelle ne voulait pas décevoir Megara et même si elles se connaissaient depuis assez longtemps pour être en mesure de se parler sans filtre, elle ne voulait pas que la princesse soit obligée de constamment la guider sur les différentes tâches à accomplir. Elle ne voulait pas être un boulet pour la jeune mère alors qu’elle était venue afin de la soulager d’un certain poids. La jeune femme sourit en écoutant les paroles plutôt sages de l’autre demoiselle. Elle prit quelques secondes pour analyser son interlocutrice, très jeune, puis se demanda comment avait-elle acquis cette maturité à son âge.

« Espérons alors que notre Princesse ne se lève pas trop tôt. » dit-elle sur le ton de la farce, en souriant et déposant sa main sur le bras d’Alys. « Je ne nourris guère les mêmes espoirs pour ses jeunes enfants. Je suis grande sœur d’un petit trouble-fête et je sais qu’ils peuvent se lever très très… tôt. »

Sybelle rit silencieusement à ses propres plaisanteries, car elle sait que les enfants n’ont que très peu d’attentions envers les heures de sommeil de leurs parents. Si elle peut aider Megara avec cela, elle s’en fera un plaisir évident. Du plus loin qu’elle puisse se souvenir, elle a toujours eu hâte d’avoir ses propres enfants. Être mère était un rêve qu’elle se voyait réaliser dans quelques années, à condition de trouver un mari, un homme qui lui plairait réellement et qu’elle pourrait aimer.

« C’est probablement du fait de leur jeune âge qu’ils lui causent autant de soucis. Ne vous en faites pas, plus ils vieilliront, plus elle regrettera d’avoir souhaité que cela arrive. Le temps passe si vite… et c’est encore plus vrai lorsqu’il s’agir de jeunes enfants. Parfois, lorsque je regarde Dastan, j’ai l’impression qu’il n’est né que la veille… et cela fait presque trois ans, maintenant. Déjà… »

La jeune femme ajouta le dernier mot dans un soupir. Elle se souvenait encore du jour de la naissance de son petit frère, le bonheur de la famille entière, mais aussi cette cassure chez elle. Un mélange entre joie et tristesse, une certaine nostalgie d’un rôle qu’elle n’aurait plus à accomplir, d’un fardeau qui – à partir de ce moment – ne reposait plus sur ses épaules. Une liberté nouvelle dont elle n’avait que gouté les premières gouttes avant de sombrer : elle perdait aussi certains privilèges, dont celui d’accompagner son père, de l’assister, d’apprendre certaines choses et un certain titre prestigieux. Maintenant, elle devait revoir son futur et… Si d’abord, cela l’avait rendu fébrile, aujourd’hui, elle se sentait inquiète face au vide qu’était l’avenir.

En entrant dans les appartements, un sourire flottait sur les lèvres de l’insulaire. C’était joli.

« C’est très gentil de votre part de m’avoir accompagnée jusqu’ici. Je me serais forcément perdue si j’avais dû faire le chemin toute seule. » avoua-t-elle en ricanant.

La valise qu’elle tenait alla rejoindre celle précédemment déposée par Alys. Elle prit une grande inspiration, ferma les yeux quelques secondes et lorsqu’elle les ouvrit, le soleil entrait maintenant dans la pièce et il la faisait sembler encore plus belle qu’avant.

« Je ne sais pas si… »

Sybelle arrêta sa phrase et secoua la tête en direction d’Alys. Si elle avait compris quelque chose dans ce que la demoiselle venait de lui expliquer, c’était que les dames de compagnie étaient généralement assez occupées et elle ne voulait pas accaparer son attention plus que nécessaire. Elle ne voulait pas non plus que la jeune femme se retrouve dans une situation délicate par rapport à la reine et comme elle ne connaissait pas encore les habitudes à adopter dans ce nouveau rôle, elle se sentit obligée de libérer Alys de son rôle de guide.

« Laissez tomber… Je vous remercie pour mon bagage et le temps que vous m'avez accordé. »

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Dame de compagnie

Alys Kenning & Sybelle Farman

Les bruits d'agitation du dehors leur parvenaient distinctement, depuis la fenêtre ouverte sur l'extérieur. Le vent venait jouer sur sa peau et ses cheveux, laissant une agréable et douce caresse demeurer une fois le courant d'air passé. Alys sentait que la jeune femme prendrait ses marques facilement, après tout, elle avait su capter son attention dès son arrivée. Et puis, la jeune Kenning ne la laisserait jamais seule pour se débrouiller. Elle se souvenait de ses propres débuts, quelques mois auparavant, et elle reconnaissait avoir eu de la chance de tomber sur Jeyne, et qu'elle soit aussi compréhensive. Car même avec elle, le poids de la solitude et du deuil de sa famille était parfois trop lourd à porter.

Alys se mit à rire à la réponse de Sybelle concernant ses neveux. Puis lui répondit, croisant les bras :

« Oh, c'est certain que mes neveux sont sans doute ceux qui vous donneront le plus de mal ! Ils sont si jeunes, et pourtant si plein d'énergie. Même si j'avoue ne pas toujours comprendre pourquoi ils crient ou pleurent... J'imagine que Megara doit les comprendre d'un seul coup d'oeil, elle. »

Alys s'arrêta, pensive. Elle se demandait si c'était un trait qui se développait lorsque l'on devenait mère. Est-ce qu'il était vraiment possible de comprendre ses enfants d'un seul regard, indépendamment de l'épuisement, de l'inhabitude ? Elle essayait de se souvenir de sa propre mère et comment elle se comportait avec elle. Mais les souvenirs de la petite enfance étaient difficiles à se rappeler, ils semblaient parfois se dissiper tels les nuages d'une journée de mauvais temps. Et puis, elle était la dernière de sa fratrie, alors elle n'avait pu observer sa mère élever un frère ou une sœur cadette après elle. En cet instant, sa mère lui manqua terriblement et elle regretta de ne pas avoir pris le temps de poser toutes ces questions de son vivant. Sans doute n'était-elle pas assez mature. Oui, c'était certainement ça. Ce n'était pas le bon moment, avant. Ca l'était maintenant, mais elle n'était plus là. Alys devrait se débrouiller seule.

« Dastan ? C'est un joli prénom. Est-il resté à Belcastel, d'où vous venez ? »

Elle imaginait le chérubin de trois ans à peine avec un fin sourire sur ses lèvres.

« Mon frère Gareth a quitté notre domicile familial alors que je n'avais qu'un an. C'était assez dur, au début, mais on finit par s'y faire. Et puis, on se voyait assez régulièrement de toute façon, soit il revenait à Kayce, soit je passais à Castral Roc. Je pense que cet éloignement a forgé mon caractère d'une certaine façon... et le sien. Avez-vous prévu de lui rendre visite parfois ? »

C'était peut-être assez prétentieux de parler du Grand Maître de l'Ouest en ces termes, Alys en avait conscience. Elle en avait le droit puisqu'elle était sa petite soeur. Et si elle ne pouvait pas en parler ainsi, alors personne ne le pourrait. Et elle en était bien fière. Sybelle sembla fermer les yeux un instant, prendre conscience de la pièce qui l'entourait. Alys joignit ses mains, sans bruit, pour la laisser en profiter et elle ne la dérangea pas. Elle sembla hésiter, après avoir déposa sa valise. Puis se ravisa.

« Mais je vous en prie, c'est tout naturel. Nous devons nous serrer les coudes, entre dames de compagnie. Je vous laisse vous installer. Mes quartiers ne sont pas très loin des vôtres, à l'autre bout de l'aile. Je suis sûre que nous nous reverrons bien vite. »

La jeune Kenning se déplaça jusqu'à la porte par laquelle elles étaient précédemment entrées. Posa une main sur la poignée, et s'arrêta. Avant de faire volte-face, saisissant peut-être un peu tard la perche tendue.

« Sauf si vous avez encore besoin de moi ? Ma journée n'est pas si chargée, aujourd'hui. »

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Sybelle Farman & Alys Kenning

Sybelle eut un léger sourire.

« Les mères ont ce talent. Celui de comprendre le moindre grognement de leur enfant. Je ne saurais dire s’il se développe durant la grossesse ou si les femmes ont toutes cette faculté enfouie quelque part près du cœur. »

La jeune femme avait vu sa mère s’occuper de sa petite sœur en premier, mais elle était tellement jeune qu’elle n’avait pas porté attention. Tout ce qu’elle désirait de ce poupon, c’était qu’elle apprenne à marcher au plus vite afin de partager ses jeux et son imaginaire : ce qu’elle avait fait, quelques années après la naissance d’Althea. Pour Dastan, c’était différent. Sybelle avait l’âge de comprendre et d’analyser lorsque son petit frère est né. Elle était d’ailleurs déjà femme, elle aurait presque pu être mère. Elle avait vu, regardé et observé chaque geste de sa mère pendant sa grossesse, puis à la naissance de son fils, puis finalement, l’éducation que Dastan avait reçue. Elle s’était vite rendu compte que sa mère savait extrêmement mieux s’y prendre qu’elle, malgré tout, avec son nouveau-né. Quand bien même Sybelle avait une facilité étonnante avec l’enfant, elle n’avait pas l’aisance d’Anya lorsqu’il s’agissait du garçon. Sa mère savait toujours ce qu’il fallait au bébé, en toute circonstance, là ou parfois, Sybelle avait des doutes, Anya n’en avait pas. C’était peut-être dû au fait que c’était son troisième enfant, les connaissances à ce sujet s’accumulaient dans la tête de sa mère, mais l’insulaire ne pouvait être certaine. Elle préférait, et de loin, s’imaginer qu’il existait en chaque femme ce don magique qui lui permettait de comprendre, dès la naissance, les besoins de ses enfants.

« Dastan ? Oui. Il est resté auprès de nos parents. Il est le premier fils de la lignée. Il aura un rôle considérable à accomplir. »

Elle se rendit compte en prononçant les mots qu’ils étaient durs, trop lourds pour reposer sur les épaules d’un petit énergumène de seulement trois ans.

« Il y a ma petite sœur aussi, à Belcastel… »

Sybelle avait toujours été proche d’Althéa et, lorsqu’elle y pensait à cet instant, elle sentit à nouveau son cœur se remplir de remords. Comme si elle l’abandonnait. Même si Alys avait raison, qu’elle pourrait aller la voir et, à l’inverse, Althéa pourrait venir à la Cour, elle sentait une certaine culpabilité du à son départ de l’île.

« Oui, vous avez raison. J’ai bien l’intention de leur rendre visite à tous les deux, le plus souvent qu’il me sera possible de le faire. Et j’espère que, comme vous, ils pourront grandir et se forger des personnalités au-delà de mes espérances. » Sybelle prit quelques secondes, respirant l’air frais qui entrait par la fenêtre. « Enfin, je crois qu’ils seront bien quand même. », dit-elle, tentant de se libérer de ce poids.

Elle n’avait plus la possibilité de les protéger, de les avoir sous son aile, et… c’était son rôle en tant que grande sœur de veiller à leur bien-être. Elle le ferait à distance, autant que faire se peut. Sybelle retint que les quartiers d’Alys n’étaient pas loin des siens et, même si elle était déjà venue séjourner à Castral Roc à quelques reprises, elle ne se souvenait pas avec certitudes de tous les chemins à emprunter. C’était que… le château était tellement grand. Sybelle remercia encore une fois la demoiselle pour son aide, se promettant à elle-même de ne pas trop la déranger par ses questions, jusqu’à ce que la brunette se tourne vers elle, la main encore posée sur la poignée de porte. Elle fut surprise de la proposition, soulagée même, alors elle fit un grand sourire à l’autre demoiselle en hochant la tête avec plus de vigueur qu’elle ne l’aurait voulu.

« J’aimerais beaucoup continuer de discuter avec vous, j’ai tant à apprendre. Et… à vrai dire, même si ce n’est pas un besoin à proprement parler… J’aimerais un peu de compagnie, c’est une journée difficile à tellement d’égard… », avoua-t-elle avec une certaine gêne.

Sybelle se disait qu’il y avait tellement de situations plus difficiles que celle-là, mais elle ne pouvait s’empêcher de ressentir ce petit pincement au cœur.

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« On mesure l’union d’une famille à sa capacité à traverser ensemble les étapes difficiles. » – Clément Auray

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Dame de compagnie

Alys Kenning & Sybelle Farman

Alys était ravie. Elle avait toujours aimé rendre service et se sentir utile, mais là c'était un peu différent. Non seulement elle pouvait prêter main forte, mais en plus il s'agissait d'une dame de compagnie aussi ! Et pour être honnête, cela lui plaisait également de pouvoir prétendre être la plus expérimentée dans un domaine. Elle avait plutôt l'habitude de se retrouver de l'autre côté de la barrière, là où sa jeunesse et sa candeur lui permettaient d'apprendre et d'essayer. Mais pouvoir enseigner, donner les ficelles du métier semblait lui plaire beaucoup, même si ce n'était que le début. Pour l'instant.

Elle hocha la tête distraitement aux paroles de la Farman. Elle avait remarqué cela également chez les mères. Enfin, surtout chez Megara, sa belle-soeur, puisque sa propre mère était morte à Kayce, quelques mois auparavant. A cette pensée, le cœur d'Alys se serra. Que dirait-elle, si elle la voyait ? Serait-elle pleine d'espoir ? Ou au contraire désespérée ? Fière, peut-être, de la jeune femme qu'elle était devenue malgré leur absence ? Alys ne le savait pas. La jeune fille aimait s'interroger, passer des heures à réfléchir à ce que serait sa vie, si la tragédie de Kayce n'avait pas eu lieu. Mais parfois, son esprit l'arrêtait rapidement, quand elle se souvenait que la vraie vie n'était pas celle des songes ou des fantasmes, mais bien celle qui se déroulait devant ses yeux. Et la dure réalité la rattrapait, aussi. Ses parents étaient morts.

« Oui, je crois que vous faites bien. Le temps passe vite, et on en vient souvent à regretter les moments que l'on a pas pu passer avec nos proches, croyez-moi. J'en ai fait l'expérience. »

Elle n'en dit pas plus, ne souhaitant pas s'étendre sur le sujet pour ne pas l'ennuyer, et parce que c'était encore trop récent pour qu'elle puisse vraiment en parler avec détachement. Elle doutait d'ailleurs d'y parvenir un jour.

« Vous, Dastan et votre petite sœur, alors ? J'avoue que j'ai du mal à imaginer, être trois seulement. Chez les Kenning, nous sommes six, rendez-vous compte ! Il y a mon frère aîné, Tybolt, le seigneur de Kayce, notre maison, puis Robert, Alysanne, Maryssa, Gareth et moi. »

La demande de la jeune Sybelle émut Alys. Elle revint vers elle avec fluidité et lui attrapa le bras avec douceur.

« Oh mais bien sûr ! J'ai quartier libre pour le reste de la journée, et je serais ravie de vous aider. Souhaitez-vous vous promener un peu ? Oh, je sais ! Nous pouvons aller jeter un œil aux écuries ! J'ai toujours bien aimé y aller. Parfois, on me laisse même nourrir les chevaux ! »

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Kenning Family:

Il était difficile pour la demoiselle de complètement laisser derrière les proches qu’elle abandonnait sur son île. Il lui semblait, dans l’instant, qu’elle n’arriverait jamais à penser à autre chose qu’à eux, qu’au sentiment d’abandon qu’elle ressentait à leur place, envers elle-même. Sans doute était-ce parce que Sybelle se mettait beaucoup de poids sur les épaules, alors qu’il n’en était rien : tous ses proches avaient été heureux pour elle, de cette opportunité que la princesse lui offrait. Néanmoins, en écoutant le récit d’Alys, il lui venait en tête que ses frères et sœurs pourraient aisément s’en sortir sans elle, qu’elle leur permettait même de se développer peut-être plus aisément que sous son aile protectrice. Elle sourit tristement en entendant la demoiselle parler de sa propre expérience, elle se souvenait de l’histoire des Kenning : la famille avait été éprouvée par un long épisode de maladie qui avait emporté les parents de la grande fratrie. L’insulaire ne pouvait pas se mettre à la place de la demoiselle, car elle ne savait pas comment elle aurait réagi si cet effroyable événement était survenu sur Belle île. Elle n’osa pas demander de précision à la plus jeune, sachant déjà les grandes lignes. Sybelle voyait aussi dans les yeux de la Kenning qu’elle ne souhaitait pas s’épancher sur le sujet, il semblait à l’insulaire que c’était un sujet beaucoup trop difficile pour poser une quelconque question à son propos. Elle se contenta de sourire, à nouveau, plus heureusement à Alys en jetant un œil à ses minces bagages. Elle n’avait pas porté grand-chose avec elle, mais ce serait amplement suffisant.

« Vous avez une grande famille, Lady Alys. J’ai été longtemps seule avec ma petite sœur, Dastan n’ayant que trois ans. Évidemment, en étant la plus jeune de la fratrie, vous vous évitez le malheur d’avoir des plus petits qui sont constamment dans vos pattes. » dit-elle en souriant largement.

Sybelle n’avait jamais réellement eu besoin de se plaindre, Dastan était l’adorable petit turbulent qu’elle aimait, tandis qu’Althea avait toujours été sa partenaire de jeu. D’un certain côté, elle aurait préféré avoir un grand-frère ou une grande-sœur pour veiller sur elle. Puis d’un autre, elle avait été bien heureuse de pouvoir diriger tout ce beau petit monde, ce qu’elle n’aurait pu faire avec un frère ou sœur plus âgé.

« J’aimerais énormément découvrir ce château qui me semble bien étranger depuis que j’y ai posé mes valises. » dit-elle avec un rire, passant son bras sous celui qu’Alys lui avait proposé. « Je parie que vous avez beaucoup à me dire sur tous les secrets du château. » ajouta-t-elle. « Direction les écuries, alors ! »

Sybelle commença a guider la demoiselle, puis au bout de quelques tournants de couloir, elle s’avoua vaincue. Elle ne se souvenait pas si bien des directions à emprunter pour se rendre à peu près partout. Elle fit un sourire désolé à Alys en mordant légèrement sa lèvre inférieure.

« Je croyais me souvenir, mais il faut croire que ma mémoire a complètement oublié comment se repérer ici. » Elle ralentit le pas afin de laisser la plus jeune les guider. « Parlez-moi. Parlez-moi de vous, de ce que vous aimez faire au sein du château ou ailleurs... À quoi passez-vous votre temps ? » demanda-t-elle en tournant la tête vers la Kenning.

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Alys Kenning & Sybelle Farman

Alys avait toujours été très satisfaite de sa famille. Les familles nombreuses ne l'effrayaient pas, c'était même tout ce qu'elle avait jamais connu. Il lui paraissait presque bizarre d'imaginer les familles des autres personnes qu'elle connaissait : un ou deux enfants, tout au plus. Comment faire quand on se retournait et qu'on ne voyait pas un frère ou une soeur ? De nombreux souvenirs joyeux restaient bien ancrés dans sa mémoire de son enfance à Kayce. Une enfant heureuse, où sa place de petite dernière ne la privait d'aucune marque d'affection ou cadeau. Elle avait eu la chance d'être aimée, choyée. Et elle avait grandi en compagnie de ses frères et sœurs, même si Gareth avait souvent manqué à l'appel, du à son départ pour le Roc, lorsqu'elle n'avait qu'une toute petite année.

Alys sourit avec gentillesse à la jeune fille :

« Je suppose que vous avez raison. Mais cela ne m'aurais pas gênée, d'avoir encore des frères et sœurs, en vérité. Je suis très tournée vers ma famille, et je ferais tout pour eux. Mais j'imagine qu'il doit y avoir d'autres avantages à être l'ainée de sa famille, n'est-ce pas ? Je n'ai jamais vraiment demandé à Tybolt, mais cela semble presque futile, maintenant. »

Ils n'avaient pas vraiment eu l'occasion de parler, à cœur ouvert, depuis son départ de Kayce. La dernière fois qu'elle l'avait serré dans ses bras, leurs parents venaient de mourir. Et il héritait tout juste de leur domaine. Et ensuite, William lui avait demandé sa main, ce que Gareth avait accepté, suppléant Tybolt... Alys ignorait son état d'esprit, mais elle l'imaginait assez bien. Ils étaient en bons termes, mais l'âge et les responsabilités les avaient sans doute un peu éloignés. Et elle ne savait pas si il lui en voulait ou non, de ne pas lui avoir demandé l'autorisation. Peut-être qu'un jour, elle le saurait.

« Par là, lady Sybelle. Mais c'était presque ça, je suis impressionnée ! Je suis persuadée que vous réussirez rapidement à vous orienter. Et si ce n'était pas le cas, sachez que je ne suis jamais très loin. »

Sa question la laissa pensive. Elle y répondit après une seconde de réflexion :

« J'aime me promener à Port-Lannis, au marché. Je peux y passer des heures, et acheter toutes sortes de tissus. Je fais également de la broderie, si j'ai le temps, mais ce n'est pas mon activité préférée. Je lis plutôt, souvent. Toutes sortes d'histoires, racontant souvent quelques contes et légendes. »

Elle sourit, distraitement, serrant le bras de la jeune femme contre elle.

« Je me suis toujours demandée quel rôle je pourrais jouer, dans une histoire de ce type. Serais-je la précieuse jeune fille qui attend son prince charmant, ou bien la jeune épouse résolue et mature, suffisamment solide pour ne pas frémir face aux défis auxquels elle devrait faire face. Je ne le sais toujours pas, mais cela viendra peut-être. »

Elle se râcla la gorge, consciente de livrer des choses très personnelles à la jeune Sybelle. Les deux jeunes femmes marchèrent un peu encore jusqu'à arriver aux larges portes de l'écurie. Avec un sourire, Alys la lâcha et les ouvrit, se retournant ensuite vers elle pour lui annoncer fièrement :

« Voici l'écurie ! »

En grinçant, la porte s'ouvrit sur plusieurs box remplis de paille qui dépassait sous les portillons. Elle s'approcha, sincèrement heureuse de se trouver là. Et commença à se présenter les chevaux un par un :

« Voici Tornade. Il adore les pommes, mais ça le rend malade, souvent, alors il ne faut pas trop lui en donner. On a aussi Lueur, cette belle jument grise. Et son petit poulain, Nougat, né il y a tout juste quelques mois. Il a très souvent envie de sortir mais semble avoir une santé fragile. »

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Kenning Family:

Sybelle, écoutant attentivement les paroles de la jeune Alys, se rendit compte d’une certaine tristesse dans ses paroles. Elle comprenait la tragédie de la famille Kenning, et du même coup, la tristesse de la jeune femme. Il lui semblait, cependant, qu’il y avait une douleur différente en dessous de cette tristesse d’avoir perdu ses parents. Peut-être incombait-elle, justement, aux fratries nombreuses, le déchirement interne, l’éloignement de ses membres par l’âge.

« Évidemment, il y a de nombreux avantages à être l’aînée. Notamment, le pouvoir de décider pour les autres. Plus sentimental, je dirais qu’il y a une certaine satisfaction dans le fait de voir ses frères et sœurs grandir, changer et apprendre… Je n’étais qu’une enfant lorsqu’Althea est née, mais je me souviens – vaguement, je dois l’avouer – de ses premiers accomplissements… » Sybelle prit une pause, se remémorant ces doux souvenirs et reporta son attention sur la plus jeune. « J’avais tellement hâte qu’elle commence à marcher que lorsqu’elle l’a fait, j’ai pleuré. » L’insulaire rit légèrement.

La jeune femme enlaça le bras d’Alys dans le sien et commença à avancer en direction des écuries. Elle se trompa de chemin, mais elles en rirent un peu et Alys prit le relais. Sybelle aimait l’énergie que dégageait la jeune femme, elle était pétillante et souriante, malgré les sujets sensibles qu’elles avaient abordés en quelques heures seulement. Elle ressentait le besoin d’en connaître un peu plus sur sa guide, de manière, peut-être, à s’en faire une amie sur qui compter dans les moments de doute. Après tout, elles partageaient déjà quelque chose : leur rôle de dame de compagnie, au sein du même château. Si elles pouvaient s’aider, alors c’était tant mieux.

« Oh. » dit-elle, un sourire aux lèvres. « Je ne suis pas très… couture. Les aiguilles ne cessent de trouver le chemin vers ma peau et… je n’ai pas la patience nécessaire pour cela. Cependant ! » Sybelle leva un doigt dans les airs, regardant Alys. « J’adore la lecture. Et… À mon avis, le plus important n’est pas le rôle que l’on possède. Je crois qu’il faut simplement rester nous-même et apprécier chacun des aspects de notre vie, car il est difficile de porter un masque en tout temps pour rester fidèle au rôle que l’on s’est imposé. Il vaut mieux rester soi-même. »

Sybelle acquiesça à son propre discours en serrant doucement le bras d’Alys. Elles étaient si jeunes et pourtant, leur tête était déjà pleine de plans qu’elles ne verraient probablement jamais mis en œuvre. Cela rendait l’insulaire un peu triste, mais elle laissa cette tristesse futile derrière elle au moment où ses yeux se posèrent finalement sur l’écurie. C’était vraiment un endroit que la plus jeune appréciait, cela se voyait. C’était une place très jolie qui illumina, en un instant, le regard et le visage d’Alys. Sybelle remarqua le changement et elle sourit aussi. L’insulaire suivit Alys à travers l’écurie, box par box, écoutant les explications de l’habituée.

« Vous semblez… si passionnée. » Ce n’était pas un reproche, seulement une constatation qui faisait sourire Sybelle. « Vous devez y passer beaucoup de temps pour réussir à mémoriser le nom de chacun des chevaux, en plus de leurs habitudes de vie et de santé. »

Sybelle rit légèrement. Elle s'arrêta net devant un box, sous le charme. La jeune femme approcha doucement la main vers l’une des bêtes. Elle ne s’imposa pas, laissa le cheval venir jusqu’à sa main et lorsqu’elle l’eu sentie, elle s’autorisa à passer doucement la main dans le pelage de l’animal. Un sourire distrait apparût sur ses lèvres, elle n’écoutait plus vraiment, se contentant d’apprécier le moment présent.

« Elle est magnifique. » dit-elle, dans un murmure.

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Alys Kenning & Sybelle Farman

La jeune Alys se sentait bien, au Roc. Cela n'avait pas toujours été le cas. Elle se souvenait très clairement des premiers jours et mois dans cette enceinte de pierre qu'elle trouvait si impersonnelle et si froide. L'exact opposé de Kayce, en fait, dans laquelle elle s'était toujours sentie choyée et protégée. Son arrivée dans la capitale lui vait fait l'effet d'une douche froide : brutalement déracinée à une Kayce endeuillée, sans sa famille, ni ses parents, elle avait du réussir à trouver ses marques, seule. Cela avait été difficile, oui, mais pas impossible. Même si c'était ce qu'elle avait ressenti, en essayant.

Alors elle était juste contente de pouvoir aider la prochaine jeune femme à prendre ses fonctions en étant plus aidée qu'elle-même ne l'avait été. C'était ce qu'elle pouvait rendre, à son échelle, à cette structure qui lui avait finalement tant apporté. Elle y avait rencontré Jeyne, et même si les débuts avaient là aussi été difficiles, elles se soutenaient, maintenant. Elle y avait rencontré William, aussi, qui était maintenant devenu son fiancé. Ses perspectives s'étaient améliorées, d'un coup. Et elle devait remercier les Sept, pour cela. D'avoir amené un peu de positif dans sa vie, après le pire drame qu'elle ait vécu.

La jeune Kenning caressait doucement l'encolure des chevaux, pensive quant aux mots de la Farman. La place du rôle et de son vrai tempérament... Alys avait été relativement protégée des apparences de la cour de l'Ouest. Les temps de trouble n'aidaient sans doute pas à maintenir un masque en toute circonstances. Pour autant, elle était entièrement d'accord avec Sybelle.

« Ne pas être soi-même, ça doit être épuisant. Mais je comprends, je crois, pourquoi certaines personnes n'ont pas le choix de jouer un rôle. Il y a parfois beaucoup en jeu. »

Elle sourit, une fois le silence brisé, et reporta son attention sur la jeune femme qui semblait s'épanouir au contact des bêtes.

« Pendant mes premières semaines au Roc, je venais tous les jours. C'était apaisant. A Kayce déjà, j'adorais être en compagnie des chevaux. Leur silence me calme et me permet de réfléchir. Ils ne jugent pas, et écoutent. »

Ca pouvait sembler stupide, mais elle n'avait pas honte de le dire. Elle se tourna vers la jeune femme, gardant une main sur l'encolure de Tornade.

« Vous semblez à l'aise, vous aussi. Et Lueur vous a acceptée. C'est plutôt bon signe, si vous voulez mon avis, elle a tendance parfois à se méfier un peu des étrangers. »

Alys la quitta une seconde pour récupérer deux brosses et en tendit une à la jeune femme. Elle pivota pour ouvrir le petit box et proposa à Sybelle de la rejoindre.

« Vous voulez la brosser avec moi ? Je sais, le moment n'est pas très opportun, mais nous avons la journée devant nous, et personne ne nous cherchera ici. Qu'en pensez-vous ? »

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Kenning Family:

L’écurie était un endroit qu’elle n’avait jamais visité durant ses quelques séjours à Castral roc. Ce n’était ni par manque d’intérêt ni par manque de temps, elle n’y avait simplement jamais pensé. Sybelle était une jeune femme qui affectionnait la marche, elle lui permettait de découvrir de nouveaux lieux, de nouveaux animaux, une nouvelle faune. Les balades à cheval ne lui permettaient pas cela, le paysage passait trop rapidement. Par contre, elle n’avait jamais envisagé aller passer un peu de temps en compagnie des bêtes. Contrairement à Alys, qui semblait s’en être fait une seconde demeure. Sybelle s’amusait de la voir aussi joyeuse, elle découvrait chez elle ce petit côté simplet qui lui plaisait énormément. Aussi, lorsqu’elle commença à songer aux histoires qu’elle avait lues, sur les rôles qu’elle aurait voulu intégrer, elle se mit à réfléchir à comment ça serait difficile pour elle de s’adapter au jeu de la Cour. Elle connaissait ses limites, ses qualités et ses défauts… sa grande franchise ne jouerait probablement jamais de son côté pendant le temps qu’elle serait au château des Lannister.

« Les rôles sont difficiles à tenir, je pense, parce qu’il ne faut jamais lâcher… J’ai l’impression que ce sera difficile pour moi de me tenir à la perfection aux côtés de la princesse. » dit-elle, songeuse. Elle se demandait même pourquoi est-ce qu’elle l’avait choisie pour l’épauler. « Je sais qu’elle me connait déjà et qu’elle sait comment je suis, mais je… Je n’arrive pas à m’enlever de la tête que je lui causerai des problèmes, tôt ou tard. » avoua-t-elle en baissant légèrement les yeux vers le sol.

Sybelle s’arrêta et prit du temps pour apprécier l’endroit. Ses ressentiments pourraient disparaître si elle restait assez longtemps au contact des animaux. Peut-être devrait-elle songer à changer son opinion sur les balades à cheval. Elle sourit, lui flatta doucement la tête du cheval qui l’autorisa. L’insulaire concentra toute son attention sur la bête, la regardant de temps en temps droit dans ses grands yeux noirs. Il y avait quelque chose de puissant dans ce regard, qu’elle peinait à comprendre.

« Je comprends mieux pourquoi. » dit-elle simplement.

Elle avait d’abord été réticente, les chevaux, la fougue, la saleté. Elle venait à peine de mettre les pieds au château, elle aurait dû être en mesure de rester propre plus de dix minutes.

« J’aimerais comprendre ce qu’elle tente de me dire avec ce regard. Savez-vous ? » demanda-t-elle à l’autre jeune femme, se doutant que la réponse serait plutôt négative.

Elle sourit, laissant distraitement ses doigts passer dans le pelage de l’animal, écoutant les paroles de la plus jeune. Lueur, c’était un joli nom. Lorsqu’Alys revint vers elle avec une brosse tendue dans sa direction, elle lui fit un large sourire.

« Avec plaisir ! Il est vrai que j’aimerais profiter de cet instant de calme un peu plus longtemps. Il faudra cependant me montrer comment m’y prendre. Je ne veux pas blesser Lueur. » dit-elle avec un sourire sincère.

Sybelle se sentait moins anxieuse depuis qu’elles avaient quitté les couloirs bondés du château, elle avait l’impression de mieux respirer, de se sentir plus légère.

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Dame de compagnie

Alys Kenning & Sybelle Farman

Alys sourit à la jeune Sybelle. Sur bien des aspects, elle lui rappelait elle, à son arrivée. Alys était ravie de pouvoir lui montrer les coins qu'elle aimait et lui donner quelques conseils avisés sur son temps à Castral Roc. C'était déstabilisant pour tout le monde, de changer brusquement d'environnement ainsi. Elle haussa les épaules avec une moue amusée cependant à la crainte de la jeune fille sur sa propre posture face à celle de la princesse.

« Oh, j'aurais bien quelques récits à vous raconter sur la princesse, si vous voulez relativiser un peu. Vraiment, croyez-moi, elle est en fait très accessible et pas du tout hautaine. »

Et enchaîna, l'observant avec intérêt.

« Oui, vous ferez des erreurs. Nous en faisons toutes et tous. L'important c'est d'apprendre de celles-ci et de ne pas les reproduire. Elle comprendra, j'en suis sûre. »

Pour autant, elle se ferait sans doute réprimander. Mais avec le temps, tout cela passerait, c'était certain. A la question de la jeune femme, Alys eut un léger rire. Elle observa Lueur, tentant de décrypter son regard. Puis inventa une histoire, basée sur sa connaissance de l'animal et de ce qu'elle pouvait lire dans ses yeux :

« Un peu de crainte, puisqu'elle ne vous connait pas. Mais aussi de la curiosité, et un peu d'espoir. »

Affabulait-elle ? Sans doute un peu, mais c'était rigolo de prétendre connaître les chevaux. Elle pouffa, en profitant pour caresser le chanfrein de la bête.

« Je ne sais pas, en vérité. Mais il n'y a pas d'agressivité, regardez sa posture, et ses oreilles. Elle n'est pas sur la défensive, c'est bon signe. »

Elle lui sourit, pour l'encourager. Alys se pencha pour récupérer une brosse à poils durs et entama quelques mouvements sur le flanc de l'animal pour montrer à la jeune Farman comment faire.

« Il suffit de faire des mouvements amples, sans trop appuyer, on ne veut pas lui faire mal. L'objectif est de démêler les poils et enlever les poussières. »

Elle lui montra un petit peu, mais s'arrêta pour lui tendre la brosse.

« A votre tour ! J'ai la chance d'avoir eu des grands frères pour m'expliquer tout ça, je ne suis donc pas vraiment intimidée. Faites-moi confiance. »

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Kenning Family:

Megara la connaissait et elle connaissait Megara. Durant des instants où elles étaient complices, sur la même longueur d’onde. Dans les moments où leurs volontés s’alignaient à la perfection. Elle ne connaissait pas Megara dans ses caprices, dans ses envies, dans ses besoins. Chaque fois qu’elle était venue, pour des durées diverses, elle n’avait pas vu en sa cousine la princesse de l’Ouest… simplement une jeune fille, une jeune femme qui avait envie de jouer, de se divertir, de discuter. En ces instants, Sybelle se rendait compte que leur relation allait changer. Forcément. En bien ou en mal, mais elle allait changer. Et cela l’inquiétait. Elles avaient toujours pu compter sur le soutien l’une de l’autre, mais si cette proximité – cette relation de dame de compagnie et princesse – venait altérer cette amitié, cette camaraderie… L’insulaire ne pouvait s’y résoudre.

Elle réfléchissait à tout cela pendant qu’elle observait les différents chevaux autour d’elles. Alys lui donnait l’impression que le rôle était facile à endosser, qu’il ne fallait pas trop y réfléchir et simplement faire ce que l’on avait l’impression d’être le mieux. Il faut faire des erreurs pour apprendre, certes, mais Sybelle ne souhaitait pas mettre sa cousine dans l’embarras. Enfin, pas un trop gros embarras.

« Je comprends… Vous avez probablement raison, elle me pardonnera quelques bavures par-ci par-là. Nous sommes humaines après tout. »

Lorsqu’Alys traduisit les paroles du cheval à son intention, le regard de la jeune femme devint curieux. Sybelle se demandait où est-ce qu’elle pouvait lire ceci dans ce que dégageait l’animal, car elle, elle ne voyait rien. Elle allait lui poser la question lorsque la plus jeune lui avoua qu’elle ne le savait pas vraiment. Un sourire s’étira sur les lèvres de l’insulaire. Elle s’était fait avoir en beauté. Elle se trouva ridicule, mais toujours avec un sourire. Comment avait-elle pu croire, ne serait-ce qu’une seconde, que la jeune femme pouvait vraiment connaitre les pensées de l’animal ? L’analyse qu’elle en fit, cependant, elle, fut très convaincante.

« Vous m’avez bien eu. » dit-elle en prenant la brosse entre ses doigts.

Sybelle toucha d’abord les poils du bout des doigts, constatant leur texture et la dureté de chacun d’eux. Elle se demanda s’ils pouvaient blesser l’animal, ou si, au contraire, il n’y avait que de cette manière qu’ils pouvaient démêler les poils. Sybelle écouta en silence les indications de sa cadette, puis entreprit de démêler doucement les poils.

« C’est souvent difficile d’être le plus vieux, car il faut tout découvrir par soi-même, se faire des expériences. Parfois, c’est dangereux. » dit-elle, pensive. Elle leva le regard vers Alys. « Même les chevaux sont dangereux à leur manière. »

L’insulaire brossa gentiment le corps de la bête, jusqu’à ce qu’elle en ait eu terminée.

« Je suis heureuse d’avoir fait votre rencontre, lady Alys. Je commence cependant à ressentir la fatigue liée au voyage. Je vais retourner à ma chambre. » dit-elle en déposant la brosse à l’endroit où la Kenning l’avait prise. Sybelle leva une main dans les airs afin d’interrompre la plus jeune : « Ne nous en faites pas, je retrouverai mon chemin. »

HRP :hearts::

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