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 Tour 10 – Les Tourne-Casaques, les Fiers, et les Prudents - Année 2 - Mois 6 - Semaine 3

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MessageSujet: Tour 10 – Les Tourne-Casaques, les Fiers, et les Prudents - Année 2 - Mois 6 - Semaine 3   Tour 10 – Les Tourne-Casaques, les Fiers, et les Prudents - Année 2 - Mois 6 - Semaine 3 EmptyMar 4 Juil - 17:08

Les Tourne-Casaques, les Fiers, et les Prudents
Orage Fédéré



Ca a commencé dans les camps entourant Wensington. La Reine de l’Orage, Argella Durrandon, débattait avec le Roi Manfred et la Reine Eren du Bief. L’objectif de l’entrevue entre la captive et les Hightower était de donner un futur à son pays vaincu, foulé du pied par l’Ost Royal du Bief. Déjà, dans les rangs de son armée épuisée par plus de deux ans d’intenses combats, germaient les graines de la dissension. De la sédition, même. Les débats furent âpres, mais les agents d’Eren Hightower étaient partout, et déjà en train de proposer à chacun des seigneurs ou nobles combattants de l’Orage une alternative à la prison ou au bûcher des hérétiques. Le terrain était propice aux pourparlers séparés…

Certains de ces chefs étaient déjà vulnérables depuis des années aux messages et à la propagande d’Harren le Noir ; l’unification de Westeros sous une seule bannière, et l’imposition par la force d’un avenir commun. L’Empire a un temps répondu à cet idéal, mais il était était assailli de toutes parts depuis des mois. Beaucoup d’autres seigneurs avaient suivi des années durant Argilac Durrandon, en Essos, dans le Val, dans la Néra et dans le Bief, à Dorne aussi. Ils étaient fatigués par des décennies de guerre. D’autres avaient vu leur Foi les rejeter, les déclarer hérétiques parce qu’ils rejoignaient un ensemble fédéré où la liberté de culte était érigée en dogme. Certains allaient même jusqu’à le regretter, admirant l’outil politique réprouvant la contrainte sociale et culturelle d’un blason Braenaryon lourd à soutenir. Les derniers étaient aussi directement menacés. Leurs terres occupées, leurs hommes au bord de la rupture. Et puis, il y avait les promesses. Et les ambitions. Nourries, flattées.

On promit un titre de Protecteur de l’Orage, libéré de l’Empire. Des terres arables, riches en ressources, livrées au détriment de ceux qui se fourvoieraient dans l’hérésie, l’allégement des mesures d’occupation, dont la livraison d’otages…

Certains hésitèrent. D’autres se déclarèrent sans tarder.

Lord Morrigen, de Nids de Corbeaux, fut le premier à plier le genou devant Manfred et Eren, au pied de leur trône, sous témoignage de centaines de soldats et nobles du Bief et de l’Orage rassemblés. Aussitôt, les chuchotements, et le poids de la rumeur : Stannis Morrigen était-il innocent du sort de l’armée de réserve Braenaryon, détruite par les armées du Bief sous les murs de sa ville ?  Lui qui fut officier dans l’armée royale, pris ici, à la suite du siège de Wensington… Et les jours passants, d’autres seigneurs se rallièrent de la sorte. L’un des jeunes frères Caron. Messires Bolling et Lonbec de Lestival, qui monnaya son ralliement contre la reconstruction de sa cité. Tignac plia aussi le genou, tout comme les seigneurs vassaux de Morrigen ; Mertyns, qui remit les clefs de Bois-Brumeaux au Bief, ainsi que Staedmon qui livrait la place forte de Grande-Arche.

Plus que tout, c’est contrit, en haillons, blessé de ses propres flagellations, que le pieux Roi Consort Adrian Wensington, seigneur de la ville déchu et époux de la Reine Argella, se présenta aux pieds des souverains du Bief, en larmes, le regard fou. Entouré de septons qui le veillaient depuis des jours. En proie à la fièvre. Il déclama que les dieux l’avaient visité, dans ses songes. Que les prières qu’il faisait nuit et jour avaient éclairé sa voie ; il avait passé trop de temps sur les chemins de l’hérésie. Il dénonçait la Reine Argella, coupable selon lui des maux et des péchés qui gonflaient les rumeurs depuis des annés ; infidélités, concupiscence, adorations païennes et édits hérétiques. Il rejetait l’enfant qu’elle portait, fruit de son goût immodéré pour les hommes. Il rejetait le mariage, demandait l’absolution… Et déclara, en guise de conclusion, rejoindre les Fils du Guerrier pour la rédemption de son âme corrompue, implorant les dieux de pardonner les errements que lui auront infligé ses serments de loyauté. L’homme avait-il été touché par la grâce divine, par le regret, la peur pour sa vie ou manipulé par les septons du Roi Manfred, usant de sa Foi contre lui ? Personne ne le savait, mais plus que tout autre ralliement, celui-ci provoqua effarement et écœurement chez les soutiens de la Reine.

La scène fut rapportée à la Reine Argella. Elle, qui venait justement de perdre son enfant d’une fausse couche, sans doute dûe aux privations subies durant le siège, aux angoisses de sa captivité et de l’état du pays… Du chariot aux fenêtres protégées par des grilles de fer où elle était retenue, elle vit les seigneurs félons ranger leurs troupes et des volontaires de sa propre armée aux côtés des forces du Bief.

Sans doute accablée par la dureté du moment, elle vit aussi les multitudes de ses soldats qui refusaient le marché de dupes qui leur était proposé. Menaces et armes tendues n’eurent nullement raison de la volonté de toute l’armée royale capturée. Les hérauts de la Reine Eren étaient passés dans les rangs proposer une double-solde pour les volontaires à rejoindre les rangs de l’armée du Bief ou de la croisade. Les hésitants furent copieusement conspués. Des bagarres éclatèrent et les gardes manquant de se faire submerger donnent de la hampe ou de la matraque pour tenter de calmer les esprits. Près du tiers de ce qu’il restait de l’armée avait déjà rejoint le Bief volontairement, avec leur seigneur ou non… Mais quand des capitaines bieffois vinrent relayer les ordres de la Reine Eren, impliquant la mobilisation forcée du reste, ce fut un véritable souffle de révolte qui se diffusa de campement en campement. Des gardes furent pris, des barricades dressées et l’armée du Bief dû former des compagnies entières pour marcher sus aux milliers d’émeutiers. Le calme revint, après que la fièvre eut causé quelques morts et de nombreux blessés. Les nobles restés loyaux à la Reine Argella avaient vu que leurs hommes n’avaient aucune chance, car le Roi Manfred avait déjà mis en alerte des centaines de chevaliers et de cavaliers lourds pour écraser les hommes désarmés… Ils appelèrent leurs troupes au calme, réduits qu’ils étaient à l’impuissance d’avoir été désarmés lors de la reddition suite à la bataille perdue de Wensington.

Ces nobles se présentèrent alors en délégation au couple souverain du Bief. Parmi eux les Lords Selmy, Swann, Dondarrion et Estremont, suivis des moins grands Thorne, Tolland, Torth, Grandison, Hollard, Bar Emmon, Trant… Et dirent que jamais ils ne tourneraient casaque, et pour toujours resteraient loyaux à leur Reine, à l’Orage et à l’Empire. Plusieurs émirent, mûs d’un esprit chevaleresque, qu’ils étaient prêts à rester otages du Bief et garants de leurs hommes, pourvus que ceux-ci soient démobilisés et rentrent enfin chez eux. Cette proposition n’était pas partagée par les plus féroces soutiens de la Reine, dont le jeune Lord Selmy, passé pour être un proche de la Reine.

« Les vrais défenseurs de l’Orage ne se rendent pas. Disposez de nous comme bon vous semble, mais laissez-nous partager le destin de notre Reine, défendant son honneur par notre sang s’il le faut. »

Et il y avait Accalmie. Tenue par Lord Connington, proche de la Reine et héritier présomptif en cas de chute de la Reine sans descendance, ainsi que par Drazenko Vhassar et sa compagnie de mercenaires. Il y avait là aussi des nordiens, rescapés d’une division de réserve envoyée soutenir le front sud. Et un fort débat pour animer la relation entre Connington et le chef mercenaire ; que faire ? Les débats firent rage un temps. Connington ne semblait pas si fermé que ça à l’idée d’une reddition, car s’il savait que l’Empire arrivait, il ne savait pas où, ni quand, ni combien. Et le Bief était déjà à leurs portes… Rassénéré par la confiance affichée par Vhassar, Connington décida que sa position était assez forte. Et alors que les armées de Lord Stackhouse commençaient à aménager des positions de siège autour de la ville et envoyaient des parlementaires négocier la reddition de la ville, Connington répondit simplement que son honneur lui commandait de tenir la place.

L’Orage était plus que jamais divisé. Une partie de ses forces et de sa noblesse ainsi que des places fortes des marches ou du cœur du pays, avaient rejoint l’envahisseur. Sa Reine capturée, rejetée par son consort et par le père de son enfant qu’elle venait de perdre. Ses armées, détruites, ou en partie retournées par l’ennemi.

Mais il restait, en pleine tempête, quelques fragiles lueurs d’espoir, rallumées par l’honneur des derniers défenseurs de l’Orage.


Le Cyvosse
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