Le Roi Jon Stark était revenu depuis quelques semaines dans le Nord. Bien tardivement au regard de l’âpreté de la campagne dans le Conflans, et de l’avancée de l’hiver, mais celui-ci était si froid et si virulent qu’il était compliqué d’envisager que le printemps puisse revenir de sitôt.

Le Jeune Loup avait donc aussitôt entrepris, malgré la neige et le vent, d’organiser officiellement son couronnement. Il avait conscience d’être encore jeune, et même s’il était expérimenté, il était le premier Stark depuis bien longtemps à avoir succédé à un père qui était encore en vie. Appelé à d’autres responsabilité, Torrhen Stark avait abandonné titre et patronyme pour fonder une nouvelle maison, ce qui laissait son fils avec un encadrement noble et guerrier encore très proche de son prédécesseur. Mettant à profit son retour à Winterfell et sa prise de possession des lieux en tant que nouveau Roi, le jeune homme organisa alors malgré une météo difficile une succession d’événements visant à le faire connaître de toute la cour, et de célébrer les victoires dans le sud. Les nordiens avaient en effet payé un lourd tribut dans ce conflit et de nombreuses maisons étaient endeuillés des sacrifices consentis, des victoires de Paege, de Wayfarer ou d’Eysines, ou des défaites comme Buron, Pouce-Flinte ou Castel Oyster.

Le Roi du Nord commença par assembler sa cour et ses généraux en vue d’une cérémonie dans le Bois Sacré pour commémorer devant les Anciens Dieux les milliers de morts de l’été et de l’automne précédents. Une longue procession royale, puis de la noblesse, alla donc prier dans le Bois Sacré.

La fête était d’abord éminemment religieuse et solennelle, ce qui était cohérent avec l’atmosphère lourde et pesante qui régnait à Winterfell. L’idée du Roi fut bien accueillie, rencontrer la suite riveraine de la Reine Eléanor ravit tout le monde comme le fait de retrouver des héros de guerre comme Bowen Glover ou Lyam Mormont… Mais la Reine était au plus mal ; elle était essentiellement alitée et risquait à chaque instant de perdre l’enfant qu’elle portait dans la douleur et dans le sang.

Dans le Bois Sacré, on pria donc pour son sort et celui du futur héritier du trône, on pria aussi pour le Nord et pour sa protection. Les célébrations autour de l’Arbre-Coeur durèrent tout le jour, et une bonne partie de la nuit.

Au second jour des festivités voulues par le Jeune Loup, l’ambiance se voulait plus détendue, plus festive, et lorsque Jon Stark entra dans la Grande Salle, son Sénéchal Lord Glover tira son épée et acclama le Roi du Nord. Le rappel des victoires du printemps et du renversement de la plus importante force de Westeros fait se lever encore plus d’épées et de cris ; on présente traditionnellement les bannières prises à l’ennemi, on rappelle le nombre de places fortes conquises ou libérées. On s’émeut des comptes-rendus de pertes de la campagne contre les sauvageons, de celle pour défendre le Nord dans une succession de défaites et de combats difficiles contre les fer-nés, avant de rappeler Eysines, et le rôle central qu’a eu l’Armée de Loups du Nord dans la victoire contre le Noir.

Le banquet qui s’ensuit fait oublier pour quelques heures les pertes qui ont endeuillé toutes les familles, nobles ou roturières, et l’alcool coule à flots au milieu des odeurs de venaison grillée. Il se dit que beaucoup d’amours d’un soir se nouent entre les jeunes fils du Nord qui se préparent déjà pour la campagne de Printemps et les jeunes femmes de Winterfell, et que bientôt l’armée devra repartir. Tous profitent du temps qu’il leur reste, jusqu’au bout de la nuit glacée de la forteresse de l’hiver.

Au troisième jour eut lieu un tournoi d’archerie. On s’y illustra, en particulier les hommes des clans du nord-est, qui remportèrent tous les lots en vivres, en honneurs comme en espèces sonnantes et trébuchantes, et ravirent aux seigneurs la palme du succès. La mêlée quant à elle, parodie de bataille et bon entraînement pour tous les jeunes loups qui voulaient se mesurer à une certaine adversité avant la reprise de la guerre, rassembla énormément de gueules avinées de la veille. On s’y écharpa à coups de lames émoussées dans un grand spectacle de neige, de boue, de plaies et de bosses, jusqu’à ce qu’une division victorieuse soit déterminée ; celle de Pouce-Flint, des Roches et des Rus.

Le Roi put alors conclure les festivités, et l’on félicita les héros du jour à grand renfort de cornes de bière et de chants nordiens.

Godets tendus, voix graves et airs entraînants ne masquaient à personne que le dégel était déjà annoncé au sud, et dans son sillage, la guerre.