La route n'avait pas été très longue depuis la côte du Conflans. Partie de Vieilles-Pierres, l'armée riveraine avait mis une grosse semaine à rejoindre Vivesaigues. Lyham avait fait en sorte que ses hommes avancent vite mais pas de manière désorganisée. Il était important qu'il se rende maître du terrain et il savait que les forces de l'Ouest ne seraient pas là à son arrivée. Le temps n'étant pas exceptionnel malgré la saison, il était peu probable que les lions ne débarquent avant encore une ou deux semaines. Arrivé chez lui, le roi des Collines et des Rivières avait donné l'ordre à ses hommes de monter le camp devant le fort. Si l'ennemi approchait, alors il les ferait s'abriter au sein de Vivesaigues, mais pas avant. Les portes de la cité resteraient bien sûr ouvertes, ne serait-ce que pour faciliter les directives qui avaient été données par Lyham à son héritier. Demain, tout ce beau monde serait mis au travail, en attendant, le Tully était fatigué. Après avoir salué sa famille, il prit congé de son écuyer et de son ami Alester pour se rendre dans ses appartements.


Il se sentait sale d'avoir tant voyagé, et tout cela pour rien. Son expédition au nord s'était soldée par un cuisant échec, une fois encore. Le roi avait l'impression d'être maudit par les dieux. Pourquoi avait-il à ce point peu de chance ? Tout cela sans parler des malheurs qui n'avaient également de cesse de le frapper de manière personnelle. La mort d'Alysanne, la fausse couche de Shaera. S'il avait été plus pieu, il aurait fait pénitence, mais il savait que la fureur divine n'avait rien à voir là dedans. C'était simplement la vie, la vie et ses soucis, la vie et ses drames. Il était à une période charnière de son existence, assailli de toutes parts et accablé par le chagrin. Comment surmonterait-il tout cela ? Telle était la question que l'univers lui posait.


Dans les couloirs du donjon de la forteresse de Vivesaigues, Lyham avançait lentement. Sur son passage, ses serviteurs le saluaient avec respect. Malgré sa fatigue et sa relative envie d'avoir un peu de calme, il leur répondait poliment d'un signe de la tête. Bientôt, la majorité d'entre eux s'en iraient pour la cité non lointaine de Bonru, là où le roi Jon ne tarderait pas à arriver. Finalement parvenu à ses quartiers, il ouvrit la porte pour se rendre compte qu'il n'était pas seul. Bien qu'il pensa d’abord devoir congédier une servante qui se tenait à son service, il comprit très rapidement qu'il en était tout autre. Devant lui, à quelques mètres à peine, se trouvait la femme qui hantait ses jours et ses nuits depuis quelques mois.


« Shaera ? Qu'est-ce que... ? » demanda-t-il à demis mots.


Choqué de revoir si vite la prêtresse, Lyham ne parvint pas à terminer sa phrase. Que faisait-elle ici ? Bien vite, le monarque se souvint qu'il l'avait lui même convié. N'ayant pas reçu de réponse, il pensait qu'elle avait choisi de demeurer à Fort-Darion, ce qui aurait été le plus sûr au vu de la situation. Muet, il avança lentement vers elle. Qu'importent les raisons, il était heureux de la revoir. Creusant l'écart qui les séparait en un instant, il posa délicatement la paume de sa main droite sur son ventre. Son regard se plongea alors dans celui violet de sa dulcinée d'une manière suffisamment lourde de sens. Les mots étaient superflus et n'auraient de toute façon pas été en mesure de dire à quel point le Tully était dévasté.

Le voyage de retour à Vivesaigues a été bien plus rapide que l'aller. Il faut dire, cette fois, Shaera a le diable au corps, et le feu aux fesses. Ou peu s'en faut. Recevoir la missive de Lyham l'a beaucoup ébranlée. Elle connaît l'homme digne, et réservé. Qu'il lui demande son aide est déjà un fait surprenant en soi, mais qu'il prenne le risque de correspondre avec elle ainsi, au risque que le corbeau soit intercepté, dénote surtout de la gravité de la situation. Peut-être se fourvoie-t-elle et ne voit-elle que ce qu'elle veut bien voir, mais elle a le sentiment que son roi est confus, perdu, désemparé. Dès réception de son message, donc, la prêtresse a pris congé des instances de Fort-Darion (au grand soulagement de ces derniers, à n'en pas douter), et a repris la route de Vivesaigues. Finalement, son séjour en terres impériales aura été de courte durée, et la rencontre avec le couple Braenaryon peu concluante. Il faut dire, Shaera s'attendait à beaucoup de choses, mais certainement pas à se faire épingler par l'Impératrice pour des "on dit", quand les "on dit" sont encore bien plus cruels avec elle...

La courbette de la prêtresse rouge était loin d'être nécessaire. Le roi des Collines était si heureux de la voir qu'il se moquait bien du protocole, encore plus qu'à l'habitude, ce qui n'était pas peur dire. Shaera ne refusa ensuite pas la proximité amorcée par le souverain. La peine commune qui les reliait était grande. Avant que Lyham n'ait le temps d'enchaîner, la femme s'approcha plus encore pour les relier dans une forte étreinte. Le parfum de la native de Volantis vint chatouiller les narines du Tully tandis qu'elle serrait son corps de toutes ses forces. Le cœur en peine, il lui rendit la pareille en posant ses mains dans son dos. Si cela avait été possible, il aurait souhaité que cela dure des heures, des jours même. Pour l'heure, il n'avait envie de rien d'autre que d'être en sa présence. Malgré leur souffrance mutuelle, elle l’apaisait. Avec Shaera, il oubliait les affres de la guerre et les innombrables combats à venir. Le poids de ses responsabilité semblait peser bien moins lourd quand la prêtresse était là pour le soutenir.


Quelle ne fut pas alors la surprise de l'homme de voir sa dulcinée s'écarter soudainement. Ses traits était durs et elle semblait terrifiée. Troublé, Lyham l'écouta lui parler de l'arrivée prochaine des forces de l'Ouest. Ses sourcils se levèrent alors qu'il se demandait comment elle pouvait être au courant d'une telle chose. Bien vite, il se souvint évidemment de ses dons que son Dieu unique lui offrait. Cela l’impressionnait et le terrifiait à la fois. Pris de court, Tully jeta un regard d'incompréhension à la prêtresse avant de s'écarte d'un pas et de regarder autours de lui pendant que son cerveau tournait à plein régime.


« L'Ouest attaquera donc bien Vivesaigues... Oui, cela semblait évident, nous avons appris il y a quelques jours qu'ils avaient déjà pris le Fort de la Dent d'Or. »


Cela n'était vraiment pas une bonne nouvelle. Certes, Lyham supposait que sa capitale serait une cible de premier choix, mais il espérait que les ouestriens soient plus lents. Le roi Jon n'était pas encore arrivé à Bonru, du moins de ce qu'il savait pour le moment. Il allait falloir tenir bon.


« Ne t'en fais pas, mes hommes auront mis le camp devant la cité avant la fin de la journée et j'ai donné l'ordre à mon fils de saboter les villages alentours pour nuire aux ouestriens s'ils posent le siège. Tout ira bien. Il semblerait que j'ai eu un peu d'avance sur ton Dieu cette fois. »


La situation ne s'y prêtait pas vraiment mais Lyham tenta un léger trait d'humour pour détendre l'atmosphère. Malgré les dispositions prises en amont, il était loin d'être serein quant à la suite des événements. Sans Jon, il serait perdu. Il était donc primordial que sa venue ne tarde pas trop et que les deux roi fédérés puissent foncer ensemble sur l'ennemi venu de l'Ouest.  

Elle se souvient, Shaera, de la première fois qu’elle est arrivée, paniquée par une vision, prévenir Lyham. C’était au milieu de la nuit, le souverain était occupé à discuter stratégie avec ses généraux, quand elle a exigé une audience, débarquant en tenue de nuit devant tous ces messieurs. Elle avait espéré, ce jour-là, que sa vision pourrait leur donner une longueur d’avance. Elle se souvient des regards moqueurs, ou choqués, voire les deux, des généraux quittant la tente royale. Elle se souvient de la façon, pragmatique, flegmatique, même, de prendre la nouvelle. Ce soir, son sentiment n’est pas différent. Elle espérait toujours avoir amené une pièce importante au puzzle de défense de Lyham, pour le Conflans… Et, de nouveau, le roi prend son annonce avec ce même flegme… Secoué, certes, mais pas autant qu’elle aurait pu croire qu’il le serait. Sauf que, ce soir, il lui explique la raison… Et la prêtresse ne peut retenir un profond soupir de soulagement. Il savait. Immédiatement, un poids s’envole de ses épaules, même s’il demeure évident que le plus dur restait à venir.

C’est au tour de la femme aux cheveux couleur de lune de rester plus stoïque, à l’évocation de la prise de la Dent d’Or. Si elle se doute que la nouvelle est mauvaise, elle est incapable de comprendre à quel point, ignorant l’importance stratégique de l’endroit. Son arrivée à Westeros est encore trop récente. Elle garde donc le silence sur la question, mais goûte, quand même, la plaisanterie de Lyham concernant le Maître. Un sourire en coin fleurit sur les lèvres rosées de Shaera. « C’est heureux, crois moi… » Le trait d’humour flotte dans l’air, un moment, avant que la gravité de la situation ne les rattrape et ne retombe sur les épaules des deux amants comme une chape de plomb. Hésitante, la femme en rouge vient chercher les doigts du roi du Conflans pour les serrer dans les siens. Ce qu’elle a à dire n’a rien de facile, et, chose qu’elle pensait impossible, a le pouvoir de lui déchirer le cœur. « Lyham, il n’y a pas que pour t’avertir que je me suis introduite ici… » Inquiets, les iris violines de Shaera se lèvent pour chercher ceux, bleus comme les rivières de son pays, du roi. « Je voulais aussi que tu puisses me dire comment tu souhaites gérer notre situation… Je connais les troubles qui agitent les tiens, je peux comprendre que ton pays ait besoin d’unité, et que mon statut te dessert fortement… Dis-moi, Lyham… Qu’est-ce que je dois faire ? » Comment doit-elle se comporter ? S’adresser à lui ? Ce qu’elle peut attendre de lui ou non ? Ce qu’il attend d’elle ? Ici, à Westeros, les choses sont bien plus compliquées qu’à Volantis, où chacun est libre de convoler avec qui lui chante. La prêtresse savait, depuis même avant son départ, qu’il en irait autrement ici. Elle l’a accepté, sauf que, jusqu’à présent, elle n’aurait jamais cru que ce genre de situation pourrait lui poser problème… Ici, si elle n’a pas la moindre peine à jongler entre ses émotions, cloisonnant aisément l’affect qu’elle peut avoir pour l’homme et la loyauté qu’elle concède au roi, elle a besoin que celui-ci redessine des cloisons qui, chez elle, n’ont jamais eu à être élevées. Shaera n’est pas inquiète, elle sait, que, quoiqu’il arrive, elle saura tenir son rôle. Après tout, le but de sa présence ici la dépasse, ou en tous cas, elle aime à penser qu’elle la dépasse. Cette pensée l’aide, en général, à être une bonne personne. Néanmoins, le fait qu’elle soit prête à sacrifier ses propres rares bonheur dans l’idée de servir un destin plus grand qu’elle n’empêche pas qu’elle appréhende pleinement d’avoir à le faire…

Lyham Tully

Le Conflans étant en proie à de multiples conflits dont religieux, et le nouveau Roi étant veuf que depuis peu, la présence de Shaera intimide, effraie ou attise la curiosité. De surcroît, l'on dit que que Lyham aurait une aventure avec cette femme, alors que son épouse est morte que depuis peu. Il est temps que le Roi et la prêtresse rouge se rencontrent pour faire le point sur la position de cette dernière au sein de la Cour, et son rôle par conséquent.

La guerre était partout et le Conflans semblait être le couloir privilégié de toutes les forces ennemis pour venir chercher querelle auprès des Royaumes Fédérés de l'Empire. Il n'était pas toujours évident de se mettre à la place de l'ennemi, mais dans ce cas précis, il n'était pas compliqué de comprendre que Vivesaigues serait une prise conséquente pour celui-ci. Quoi qu'il puisse se passer, quelle que soit la guerre en question, la conquête et la soumission d'une capitale était un fait important et un moyen parfait pour décrédibiliser le souverain autant que pour causer la défection d'une partie de la population, si le seigneur et maître n'était pas capable de défendre le cœur même de son pouvoir. Alors, il avait fait en sorte de prendre de nouvelles dispositions pour son armée alors que la Dent D'or était tombée contre les forces de l'Ouest, essayant un repli stratégique vers le point central du royaume des Rivières et des Collines, et espérant pouvoir être en mesure de défendre sa place forte aussi longtemps que possible en espérant que les forces du Nord, sous l'égide du Roi Jon Stark, ne tardent pas trop. La confirmation de Shaera concernant l'attaque prochaine était donc moins violente, mais n'en restait pas moins préoccupante. Il était heureux de savoir qu'elle serait là à ses côtés quand le temps virerait définitivement à l'orage et en même temps, il culpabilisait grandement de pouvoir lui faire courir le moindre risque. Il était conscient qu'avec son don hérité de son Dieu, elle serait sans doute un atout pour lui, sur le plan stratégique, autant que sur le plan personnel, mais elle pouvait perdre sa vie, si les forces de l'Ouest venaient à les dépasser.

Il essaya un petit trait d'humour qui eut l'effet escompté, alors qu'il put observer un sourire léger se dessiner sur les lèvres de la belle prêtresse, illuminant son visage en une fraction de seconde. Le contact de ses doigts entremêlés aux siens, était bénéfique pour l'apaisement du souverain, et il plongea un instant son regard vers leurs mains liés, se rappelant certains moments de leur intimité. Alors qu'elle se met à parler, il redresse son visage et croise alors le regard de la prêtresse, et ce qu'il y voit, l'emplit à son tour d'inquiétude. Il savait depuis longtemps qu'une telle conversation devait nécessairement arrivée, mais il devait avouer qu'il aurait préféré retarder l'échéance. Il resserra un peu plus ses mains autour des siennes, mais malheureusement il n'arriva pas à tenir le regard, alors qu'elle se dévoilait avec sincérité face à lui. Deux hommes s'opposaient à cet instant dans son esprit, entre le Roi et l'homme désireux de continuer cette histoire avec cette femme enivrante. « Je vais être honnête avec toi, je ne sais pas … Et de cela, j'en suis profondément désolé. » Il soupira doucement, défaisant leurs mains liées pour poser ses dernières sur les joues de la jeune femme et venant alors à coller son front contre le sien. « Ce qu'il s'est passé, a eu de nombreux échos, bien au-delà des frontières du Conflans. Des rumeurs ont commencé à circuler, des choses ont été dites, et beaucoup ont été entendues et écoutées. Jusque dans le Nord, où même mon gendre m'a envoyé une missive qui était équivoque à ce propos et me mettait en garde avec plus ou moins de subtilité. Le Roi connaît les risques et doute de la réponse à te donner, l'homme reconnaît l'importance que tu as pour lui et redoute de te perdre. Le compromis me semble bien difficile à faire. » Son Dieu ne pouvait pas avoir une réponse à leur donner, après tout, il était prêt à se plier à la volonté divine si c'était ainsi que les choses étaient décidées.

Pour la première fois de sa vie, Shaera sent son coeur se briser, et ça lui fait tout drôle... ça lui fait mal. Sa gorge se noue, et elle a envie de pleurer... Mais elle est bien trop dure au mal pour cela, quelque part, bien trop impitoyable sous son tempérament ouvert et bienveillant. Entendre Lyham lui dire qu'il ignore quelle conduite elle doit adopter lui donne l'impression de sentir la terre s'ouvrir ses pieds, et l'engloutir toute entière. Elle aurait aimé ne pas être celle qui doit se montrer raisonnable, elle aurait aimé ne pas être celle à élever les des barrières qu'elle ne comprend qu'à peine. Elle aurait aimé que le roi lui dise clairement ce qu'il attend d'elle... Mais sans doute était-ce beaucoup trop lui demander, dans l'immédiat. Son pays, sa capitale, la vie de ses enfants et la sienne menacée... Shaera doit être le cadet de ses soucis.

Front à front, la prêtresse aux cheveux couleur de lune ferme ses yeux améthyste, profitant des caresses, qui, elle l'imagine, brilleront par leur absence dès qu'elle sortira de cette pièce. Ses doigts trouvent les poignets du monarque, et s'y appuient avec douceur. « Personne n'approuve ce que nous vivons... » Ce n'est pas une surprise, et Shaera n'aurait pas été aussi amère si les conséquences de cette désapprobation n'étaient pas si dangereuse pour le statut de Lyham... Pourtant, ne pas s'amouracher des têtes couronnées et la première des leçons qu'on apprend aux prêtres et prêtresses rouges... « L'homme peut se rassurer, cela dit. Tant que son cœur sera à la bonne place, il ne me perdra pas. » ça, c'est une vérité absolue, et l'annoncer à voix haute fait sourire la femme aux cheveux couleur de lune. Chez Lyham, c'est bien l'homme et sa discrète fragilité, sa façon de la respecter, son tempérament à la fois doux et féroce qui l'a séduite, et non le monarque. Mais qui la croirait, quand, même quand elle ne réclame rien, on la prend pour une intrigante vénale ?

C'est bien plus difficile à faire qu'elle ne l'aurait cru, mais Shaera n'a pas le choix. Si Lyham doute, c'est à elle de faire ce qu'il faut pour chasser ces doutes, et l'aider à adopter le comportement le plus digne de ces responsabilités. Alors elle appuie un peu plus fort sur les mains de Lyham, et sépare leurs fronts, avant de glisser un index sous son menton pour l'obliger à la regarder. Si elle ne dit rien, ses yeux expriment tout de la profonde tendresse qu'il éveille en elle. « Apaiser ton royaume et tes alliés est la première des priorités... Les rois ne s'appartiennent pas. » Autant que ça lui coûte de le dire, elle le doit. « Je te promets de rester ton plus fervent soutien, et de t'être loyale... Peut-être que d'ici quelques temps... » Elle ne termine pas sa phrase, puisque cette possibilité ne peut pas devenir un espoir, sous peine de muter en torture. « Je te propose la même chose que ce que j'ai proposé au couple impérial. Je te propose de me retirer intégralement de la vie publique, de demeurer isolée, et chiche, et de te faire transmettre mes visions par missives... » Après tout, si elle n'est plus dans l'entourage de Lyham, on ne pourra plus l'accuser de se faire ensorceler... « Si jamais tu avais besoin de moi, tu n'auras qu'à me faire chercher... On ne se verrait plus en privé, pour mettre un terme aux rumeurs... » Profondément lasse de devoir renoncer au roi du Conflans à cause de la pudibonderie Westerossie, Shaera pousse un soupir, et baisse des yeux lourds de peine. « Je continuerai à t'aider du mieux que je peux, et à distance. C'est, je pense, la meilleure chose à faire pour ton règne. » Pour son règne, c'est certain. Mais pour l'homme ? Sans se jeter la moindre fleur, la prêtresse a aidé l'homme à rebondir après le décès de son épouse... Et s'il avait de nouveau besoin d'elle pour chasser les ténèbres de son cœur ?

Lyham Tully

Le Conflans étant en proie à de multiples conflits dont religieux, et le nouveau Roi étant veuf que depuis peu, la présence de Shaera intimide, effraie ou attise la curiosité. De surcroît, l'on dit que que Lyham aurait une aventure avec cette femme, alors que son épouse est morte que depuis peu. Il est temps que le Roi et la prêtresse rouge se rencontrent pour faire le point sur la position de cette dernière au sein de la Cour, et son rôle par conséquent.

Lyham n'était pas homme à réellement savoir comment gérer une relation amoureuse, une autre relation que celle qu'il avait pu connaître avec son épouse. Avec Alysanne, cela remontait à une époque bien lointaine, si lointaine même qu'il ne se souvenait plus réellement de ce qui avait été les premiers temps de leur mariage. Il avait aimé sa femme et il aimerait toujours cette dernière, quoi que l'absence et le temps puisse faire. Elle avait été une compagne de vie, elle lui avait donné trois merveilleux enfants et pour tout cela il était sincèrement reconnaissant envers sa défunte épouse, morte en couches quelques mois auparavant. C'était un pan de son existence qu'il ne pouvait pas renier, et il savait que Shaera ne le demandait pas. Sa relation avec la belle venue d'ailleurs l'avait surpris lui-même. Pendant toutes ses années de mariage, il n'avait pas une fois regardé une autre femme que la sienne, et avait été fidèle autant en paroles qu'en acte avec celle qui avait noué son destin au sien. Mais la prêtresse rouge avait su remettre certaines choses en perspective, et d'une certaine façon, elle lui avait permis de renaître d'un point de vue plus personnel, de renaître en tant qu'homme et de redécouvrir des choses qu'il avait oublié, sur lui, comme sur l'amour, sur l'envie, le désir de l'autre et l'abandon total à ce dernier. Elle était exotique, elle n'avait pas les mêmes barrières qu'on pouvait ici ériger à Westeros, et elle avait su le conquérir. Néanmoins, pour le Conflanais qu'il était, pour le Roi qu'il était devenu, le temps du deuil qui était imposé, celui du veuvage était important pour la société, et ce temps-là n'était pas terminé pour le Tully, c'était pourquoi cela avait fait tant de remue avec sa sœur, puis avec d'autres personnes au sein des Royaumes Fédérés.  Et cela le rendait fou de ne pouvoir agir pleinement sur cet aspect qui ne regardait que lui finalement. « Ici, les contraintes sont bien plus nombreuses que les libertés … Si Lysara n'avait pas … Si tout cela ne s'était pas déroulé ainsi ... » Pour autant, il savait qu'il essayait de se mentir à lui-même, car même s'il avait attendu un an pour s'afficher avec Shaera à ses côtés, il se doutait que la prêtresse n'aurait pas été vu d'un très bon œil par son entourage. Il se pencha doucement vers elle, venant à chercher ses lèvres des siennes pour goûter au met le plus exquis qui existait sur terre. Il avait besoin de se rassurer, de ne pas perdre le contact alors qu'elle s'accrochait à ses poignets avec douceur.

Mais finalement, elle vint à rompre leur proximité, venant à le repousser avec douceur et l'obligeant à croiser son regard, chose qui lui était difficile à faire, alors qu'il y lisait une tristesse certaine, faisant terriblement écho à la sienne, mais également de la tendresse, apaisant en partie son cœur meurtri. Il ne voulait pas de ça, il ne voulait pas lui faire du mal, et il ne voulait pas souffrir non plus, et la perdre, serait pour lui une grande et réelle souffrance. « Je sais que les rois ne s’appartiennent pas … Néanmoins l'homme, lui, t'appartient ... » Et il était sincère dans ses paroles, il ne disait pas cela dans le but de calmer un peu sa peine. Il choisit alors de garder le silence pendant qu'elle était en train de s'exprimer, pendant qu'elle était en train de prendre les dispositions pour eux deux, lui qui avait été bien incapable de le faire quelques instants auparavant, et d'une certaine façon, il reconnaissait le fait qu'elle serait toujours plus forte que lui ne le serait sans doute jamais. « Et je te remercie pour tout le soutien que tu m'as déjà apporté … » Murmura-t-il en réponse à ses premières paroles, car à bien des égards, il n'aurait pas pu tenir sans elle et il espérait sincèrement qu'un jour, ils pourraient se retrouver, non pas cacher mais bien aux yeux de tous, vivant leur amour malgré tout le reste. Cependant, il ne s'attendait clairement pas à la suite de ces paroles. Il ouvrit la bouche puis la referma presque aussitôt, choqué parce qu'elle était en train de lui énoncer, parce qu'elle était en train de lui proposer. Ce n'était pas ainsi qu'il voyait les choses, et il n'était pas certain de pouvoir le supporter même pour le bien de son royaume. « Ne plus te voir ? » Il avait envie de lui crier qu'elle ne pouvait pas l'abandonner ainsi. « Je ne pourrai pas le supporter ... » Il savait que c'était pour le bien du royaume, mais son cœur venait à hurler dans sa poitrine qu'il refusait qu'elle le quitte.  « Je t'aime ... » Souffla-t-il. « Je ne pourrai supporter de ne plus te voir, de te savoir enfermer, mise à l'écart, telle une paria ... »

Si, si, si... Avec des si, il est facile de mettre des cités en bouteille. Qui plus est, quand bien même tout se serait passé différemment, jamais une prêtresse rouge et un roi westerossi ne pourraient vivre quoique ce soit. A Dorne, éventuellement, ils auraient pu être amants, mais ici ? Jamais son peuple ne le pardonnerait à son roi, censé incarner toutes les valeurs qu'il défend. L'ironie là-dedans, c'est que Lyham pourrait défendre la femme qu'est Shaera, mais certainement ni son origine, ni sa foi. Au final, ce problème n'est lié qu'à leurs statuts, si incompatibles... Et incompatibles, ils le seraient restés, avec ou sans Lysara, avec ou sans tout le reste... Ce constat est douloureux, aussi la prêtresse ne répond-elle rien, se contentant d'accueillir la bouche de son amant sur la sienne, se laisse apaiser par ce contact, rien qu'un peu et aussi bref puisse-t-il être. Bref car, qu'ils le souhaitent ou non, des dispositions doivent être prises. En femme vivant dans les extrêmes, Shaera ne peut taire la solution à laquelle elle a pensé, qui, selon elle, devrait contenter tout le monde, si tant est que Lyham et elle acceptent de s'infliger le sacrifice de leur proximité, alors que rien ne les y oblige en dehors de la morale puritaine. Le couple impérial a été très clair quant à la position qu'il adoptait concernant leur idylle. Jamais la prêtresse n'a cherché à mettre à mal la crédibilité du monarque, et puisqu'il s'avère qu'elle l'a malheureusement fait, il est de son devoir de rectifier le tir.

Seulement... Seulement, Lyham rend cela tellement difficile... La promesse de lui appartenir, notamment, fait vaciller la femme du Feu. Ne pas pouvoir répondre favorablement à cet appel lui déchire les entrailles. De son mieux, la femme lutte contre ses propres prétentions, contre ses propres désirs et parvient à terminer son laïus. Toutes ces choses qu'elle a dites, elle devait les dire, même si Lyham ne peut les écouter et les entendre en même temps... Annoncer les vérités à voix haute n'est jamais simple, mais ce doit être fait pour qu'on commence à y réfléchir. Là, tout de suite, le roi réagit de façon impulsive et émotionnelle, et Shaera est flattée, touchée, de voir que son premier élan est de refuser le pragmatisme de sa décision... « Oh, Lyham... » Elle souffle, sentant bien sa détermination faiblir de façon exponentielle. La volantaine inspire profondément, hissant ses mains pour les glisser dans le cou du monarque, et caresser doucement ses joues de ses pouces. « Appartiens-toi à toi-même, mon amour, toujours, appartiens-toi à toi-même avant d'appartenir à qui que ce soit... » Elle murmure, ces mots qui ne seraient jamais que pour eux, jamais connus d'eux-seuls. « Tu es un homme excellent, Lyham. » Avec lenteur, l'une des mains de Shaera quitte le cou de l'homme fait pour venir se glisser sur son cœur, la prêtresse réprimant avec la plus grande peine l'envie de la glisser sous sa chemise de lin. « Le meilleur que j'aie jamais rencontré... Le feu de ta bonté, de ton esprit de justice, de ton abnégation, brûle comme un brasier, immense, aveuglant, dévorant... » Toutes ces métaphores peuvent sembler pompeuses mais Shaera n'a pas de meilleure façon d'imaginer ce qu'elle ressent qu'ainsi, elle qui entretient un rapport si particulier avec les flammes, avec son Maître. « Ta force ne demande qu'à s'exprimer, il suffit que tu te fasses confiance. Moi, je te fais confiance. » Elle lui sourit, avant de venir se lover dans les bras du roi, ou plutôt, dans les bras de l'homme, qu'elle enlace. Elle puise en lui ce qu'elle espère être de la force et du courage... Et puis...

Et puis, de façon inattendue, sans doute parce que c'est la première fois qu'elle se sent en sécurité, vraiment en sécurité, depuis des semaines... Elle sent la détermination de la prêtresse être totalement occultée par le besoin de la femme d'être étreinte et cajolée, ne serait-ce qu'un peu. Des mois d'hostilité lui tombent sur les épaules d'un coup, de solitude aussi, et de l'impossibilité de parler du chagrin qui avait noyé son cœur au moment de la perte de son enfant. Après tout, les femmes comme elle, les sorcières, ne méritent aucune compassion, n'est-ce pas ? Shaera veut parler encore, rassurer Lyham, lui dire qu'elle l'aime, lui promettre que l'exil ne l'effraie pas, et qu'elle sera aussi heureuse en vivant seule dans les bois qu'ici, entourée de vipères. L'un dans l'autre, elle est prête à faire ce qu'il faut pour son royaume. Et elle le fera. Dans un instant. Dès qu'elle aura retrouvé sa voix. Dès qu'elle aura puisé suffisamment de chaleur et de réconfort auprès de l'une des deux seules personnes en Westeross à apprécier sa présence pour se rasséréner... Mais la tempête, en elle-même, est déchaînée et peine à se calmer... Silencieuse, si elle est bien trop dure au mal pour pleurer, Shaera ne parvient pas pour autant à reprendre le dessus sur elle-même, et continue de se serrer contre Lyham comme s'il était le dernier rempart entre elle et le monde entier... Oh, wait...

Lyham Tully

Le Conflans étant en proie à de multiples conflits dont religieux, et le nouveau Roi étant veuf que depuis peu, la présence de Shaera intimide, effraie ou attise la curiosité. De surcroît, l'on dit que que Lyham aurait une aventure avec cette femme, alors que son épouse est morte que depuis peu. Il est temps que le Roi et la prêtresse rouge se rencontrent pour faire le point sur la position de cette dernière au sein de la Cour, et son rôle par conséquent.

Les histoires de cœur et de mariage étaient plus simples à gérer pour le peuple ? Suffisait-il d'un moment d'égarement dans les blés d'un champ, d'une folie passagère dans le foin d'une grange pour qu'il soit décidé d'unir deux personnes ou tout simplement que ces dernières puissent vivre la vie qu'ils entendaient sans préjugé ? Lyham était conscient qu'il ne faisait que de se torturer un peu plus l'esprit à penser à de telles choses et quelque soit le rang social qu'on venait à avoir lorsqu'il était venu l'heure de penser au mariage, l'entourage avait une elle envie de contrôle, un tel désir de promotion social que cela se passait de la même façon que les grands seigneurs. Il fallait avouer que pour lui, cela avait été malgré tout assez simple. Alysanne était jeune, elle était belle et quand il l'avait rencontré, il en était tombé amoureux. L'arrangement d'une union entre leurs deux familles arrangeaient autant les parents des futurs mariés que les deux jeunes gens qui allaient liés leur destin. A  l'époque, il n'était nullement question de devenir roi, il n'était même pas envisageable pour lui qu'il puisse penser à une quelconque révolte contre la maison Hoare et la vie avait suivi son cours, bien que différentes guerres, différents combats avaient jalonné cette dernière. Aux côtés de son épouse, il était devenu un seigneur respecté, il avait rempli ce que le devoir conjugal imposait et ils avaient eu trois magnifiques enfants. Certes, il n'avait eu qu'un seul héritier mâle sur les trois, mais néanmoins, chacun d'entre eux était en vie aujourd'hui, Eléanor était devenue une femme, elle était également mère à son tour à présent, et son fils était devenu un homme qui, bientôt sans doute, partirait de sa demeure pour vivre sa propre vie, pour fonder son propre foyer. Seule la petite dernière était véritablement encore sous sa protection aujourd'hui et elle grandissait à vu d’œil, prenant de plus en plus de sa mère au fil du temps.

Son épouse n'était plus, et cela avait laissé un grand vide dans son cœur et dans son existence que Shaera avait été la seule à parvenir à combler sincèrement, sans jugement, avec douceur et avec patience. Ne disait-on pas que si la première union était bien souvent imposée, la seconde pouvait permettre plus de liberté ? Il avait son héritier, pour sa maison, pour son nom, pour son royaume. Alors pourquoi désirait-on tellement contrôler cette relation qu'il avait avec la prêtresse ? L'explication était-elle parce qu'elle était plus jeune que lui, plus belle aussi il ne fallait pas se mentir, ou parce qu'elle était venue d'un autre territoire dont on ne connaissait finalement pas grand chose ou parce qu'elle était attachée à une religion qui allait à l'encontre de la Foi et que cela venait à choquer. Pourtant, le peuple avait bien d'autres sources d'angoisse que de s'occuper de ce qui se passait dans l'intimité de leur souverain. Toute cette histoire le rendait fou, fou de tristesse, rouvrant une blessure douloureuse dans son esprit et dans son cœur. Il frissonna au contact de ses pouces sur ses joues et ferma les yeux quelques instants. « Peut-être que là d'où tu viens, ceux qu'on appelle les hommes et les femmes libres peuvent réellement s'appartenir. Mais tout cela me dépasse … Quand j'ai accepté la proposition du couple impérial, je ne pensais pas l'ampleur que certaines choses pourraient prendre. » Il rouvrit lentement les yeux, posant alors sa main sur la sienne qu'elle avait déposé sur son cœur et il vint tendrement presser sa paume. « Tu me vois meilleur que je ne le suis véritablement, mais je te remercie du soutien que tu me portes aujourd'hui encore. »

Lyham laissa la belle Shaera se lover contre lui, et il referma avec délicatesse ses bras autour de la prêtresse. D'une certaine façon, elle semblait bien frêle ce soir, et il se mit à penser que l'inverse était sans doute tout aussi vrai. Ces instants de doute venaient à planer dans la pièce où ils se trouvaient, en tête à tête, et ils étaient ponctué par une tendresse et un amour bien réel que toute personne entrant ici aurait pu ressentir sans grande difficulté. Le souverain avait du mal à comprendre pourquoi on désirait tant le séparer alors que la guerre était à leurs portes et que tout le soutien du monde était bon à prendre. Il se pencha lentement vers la femme, glissant sa main sous son menton et il cueillit doucement ses lèvres des siennes, bien qu'il sentait le feu couvé à nouveau en lui. « Reste avec moi ce soir, reste avec moi cette nuit, comme si rien ne pouvait l'empêcher, comme si le monde n'était pas prêt à s'effondrer au-dehors. Demain, nous aurons le temps de discuter de l'armée que se rapproche de Vivesaigues, mais ce soir, restons un homme et une femme qui s'aiment avec douceur et passion à la fois. »

Lyham Tully

Le Conflans étant en proie à de multiples conflits dont religieux, et le nouveau Roi étant veuf que depuis peu, la présence de Shaera intimide, effraie ou attise la curiosité. De surcroît, l'on dit que que Lyham aurait une aventure avec cette femme, alors que son épouse est morte que depuis peu. Il est temps que le Roi et la prêtresse rouge se rencontrent pour faire le point sur la position de cette dernière au sein de la Cour, et son rôle par conséquent.

Il y avait deux visions de la vie, et de comment celle-ci était régi. Certains venaient à dire que le destin était déjà tout tracé et qu'on ne pouvait malheureusement s'y soustraire, que l'on devait avancer au jour le jour avec les joies et les peines qu'on voulait nous imposer mais qu'au final, il n'y avait véritablement de libre arbitre. D'autres, au contraire, venaient à estimer que le parcours que l'on faisait dans la vie n'était que le résultat des décisions que l'on avait prise à un moment donné ou un autre, et qu'on était pleinement maître de nous-mêmes et qu'il fallait se battre pour l'avenir que l'on décidait à s'offrir. Pendant longtemps, Lyham s'était cru maître de son propre destin, Lord de Vivesaigues, place centrale au cœur du Conflans, il avait été reconnu pour sa bravoure et pour son caractère. Il avait eu une épouse formidable, qui lui avait donné trois beaux enfants et même s'il avait fini par capituler face à Torrhen et Rhaenys Braenaryon, il avait mené une longue bataille pour protéger ses terres et le peuple sous sa protection, et c'était dans cette idée qu'il avait accepté l'alliance que l'Empire lui proposait, se retrouvant alors couronner Roi, et devenant l'un des opposants directs à celui qu'il avait considéré comme tel pendant longtemps. Mais aujourd'hui, il venait à douter de tout et il n'en avait jamais été aussi malheureux. Il avait perdu cette épouse qui le soutenait depuis de si nombreuses années, le Conflans était divisé, les armées de l'Ouest attaquaient Vivesaigues et le seul réconfort, la seule chose qui le rendait encore heureux en ce bas monde, il lui était à présent interdit, clairement ou par de nombreux sous-entendus, de la fréquenter dans la sphère privée, comme si elle représentait une menace pour lui, pour le royaume et par conséquent par l'Empire.

Shaera avait le sens du sacrifice pour le bien commun, et Lyham ne pouvait l'en aimer qu'encore plus après les paroles qu'elle venait de lui glisser, tout cela pour le préserver lui dans sa fonction, dans le statut qui devait être le sien. Mais le Roi des Collines et des Rivières n'était pas prêt à accepter cela, il ne pouvait quitter la chaleur de ses bras, il ne pouvait se défaire de son regard de braises, et il avait besoin d'elle tout simplement pour continuer à avancer, pas après pas, combat après combat, perte après perte. Elle avait pris une place si grande dans son existence et dans son cœur, qu'il n'aurait pas pu le prédire lui-même la première fois qu'il avait fait sa rencontre. Pour le moment, il savait parfaitement que c'était l'homme qui venait à parler mais il ne pourrait pas continuer longtemps, car le Roi devait reprendre sa place, et un Roi ne s'appartenait pas. Et il se mit à sourire lui aussi quand il vit les lèvres de Shaera s'étirer doucement. Il avait gagné pour ce soir au moins, juste pour grappiller quelques heures à ce qu'on attendait d'eux, à ce qu'on voulait qu'ils représentent et à ce qu'on voulait qu'il fasse. « Nous allons fermer cette pièce à double tour, pour les heures à venir, et nous n'allons plus nous quitter pendant ce temps que nous allons nous accorder. Que cela plaise ou non, qu'on me laisse au moins vivre encore un peu, même si l'insouciance n'y est plus. Les ennemis sont en mouvement, la mort sera dans tous les cas au bout de mon parcours sur cette terre. » Il ferma les yeux doucement aux caresses dans son cou et il se pencha alors pour pouvoir l'embrasser doucement au début puis de plus en plus passionnément, comme s'il retrouvait vie contre ses lèvres. « S'il te plaît, laisse-nous juste ce soir ... »

HRP: