Hydra Attacks Everywhere (An 1 Mois 7 Semaine 2) [Tour IX Terminé]

Hydra Attacks Everywhere

Torrhen Braenaryon & Sacha Racin

Castel de Fort-Darion, Semaine 2 du mois 7 de l’An 1 de l’Ere des Luttes

J’étais épuisé. Et nerveux. Les mauvaises nouvelles s’amoncelaient, désormais. Et il allait falloir préparer le départ vers le sud, pour accomplir notre part de la stratégie impériale. Le Conflans allait bientôt se battre contre Yoren Hoare, selon toute vraisemblance, car le temps des campagnes revenait avec le dégel qui s’annonçait. Il y avait aussi le Bief, qui menaçait plus que jamais l’Orage. L’ennemi, déjà, s’activait. Alors que Rhaenys n’avait pas accouché depuis trois mois, la voilà qui repartait déjà se battre. Une flotte prétendumment valoise avait débarqué des centaines de cavaliers mercenaires venus d’Essos, et de ce fait il y avait tout un pan sud de la Néra qui brûlait littéralement. Trop tard pour limiter la casse, selon tous les rapports ces troupes avançaient droit vers l’ouest, et Pierremoutiers. Un coup signé Hoare, sans doute, comme à chaque fois que de faux pavillons étaient hissés…

Mais cela n’empêcherait pas Rhaenys de secouer les impénitents marins qui avaient déposé la mort chez nous, Valois ou pas. Elle allait les pourchasser à dos de dragon, les brûler, et laisser son dragon se repaître du carnage. Tout juste remise, Meraxès était déjà prête à s’adonner à son passe-temps favori ; la chasse. Imaginez ce que pouvait tout un fatras de bois et de chanvre qu’on appelait « bateau » face à un monstre de la taille des murs de Fort-Darion, bien plus épais, et rapide comme un oiseau de proie. La belle que j’aimais partait non pour la guerre, mais pour une chasse qui finirait immanquablement en massacre.

Je l’attirais à moi pour une dernière étreinte, sur les murs dominant les quais de la ville, donnant sur la Baie des Crabes. Un dernier baiser, un souhait de bonne chance. Des soldats gardaient l’étendard Braenaryon, qui claquait au vent. Et la belle chevaucha le monstre qui reposait à cheval sur deux quais, avant de décoller dans une bourrasque sous le bruit des clameurs de la cour. Tout le monde réclamait vengeance pour le bon peuple de la Néra, massacré et sauvagement pillé et rançonné par ces cavaliers d’outre-détroit.

Je me détournais et remontais vers le château, quand je reconnaissais une silhouette déjà croisée d’un jeune homme, cheveux courts, portant le tabard Tully.

| Ser Racin. Vous n’êtes pas encore reparti avec le Roi du Conflans ? On m’avait dit que votre départ serait incessant, compte tenu de l’agitation autour de Noblecoeur, avec le passage en force de ces pillards fer-nés depuis Pierremoutiers. |

Je le connaissais pour l’avoir déjà vu, c’était le fils d’un des bannerets de la maison impériale, dans le Conflans

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Fire, Blood & Winter | House Braenaryon
Let it be War

I never wanted this. I never wanted to unleash my legions.
Westeros have only one chance to prosper and if you not seize it, then I will.
So let it be war ! From the skies above the Wall to the dornish sands. Let the seas boil. Let the stars burn.
Even if it takes the last drop of my blood, I will see the kingdoms freed once more.
And if i cannot save it from the felony and the dishonor, then let Westeros burns.

Guerres et massacres étaient devenues mon lot quotidien maintenant. Pas que je m’en plaignais, avant c’était presque pareil, mais c’était plus coups et menaces, de la part de mon propre père. J’avais pus voir, de très loin, le dragon et son impératrice s’envoler, entre deux taches à faire. Nous allions également partir et il fallait que tout soit prêt pour le roi du Conflans et notre départ. Entre les affaires à amener, les chevaux à préparer, les autres ordres à récupérer… Je courais partout, profitant une brève seconde de pause pour admirer l’envol du dragon. Au moins… Si je devais mourir, j’aurais été du côté du dragon. Et du bon côté. Je ne voulais même pas imaginer la terreur de voir cet être vous fondre dessus pour vous réduire en tas de cendre fumant. J’eus un frisson rien qu’à cette pensée. Oui… j’étais bien mieux du côté du roi Lyham que contre lui… Quoi que je préférasse être du côté de l’empereur et du Roi Lyham que l’inverse. Bref. Mes tâches.

Je finis de sangler les sacs de selle sur le dos de mon cheval avant de passer une main dans ma tignasse qu’il faudrait que je taille un de ces jours. Je poussais un petit soupir de soulagement avant de flatter l’encolure de Danseur et de ressortir à pas vifs. J’avais passé quinze secondes à l’intérieur, juste après le décollage de l’impératrice et j’avais bien d’autres taches à faire au château pour le roi. Et ce tabard me donnait chaud… Vivement que je n’ai plus à le porter et juste chevaucher près de mon maître. Je m’arrêtai net en voyant l’empereur et je fis une profonde révérence… avant de me figer à nouveau. Il se souvenait de mon nom ? Et merde ! Pourvu qu’il ne se souvienne pas de mon père… Est-ce que je lui en voulais pour ce qu’il avait fait ? J’avais du mal à savoir, mais j’allais dire que non. Je me redressai avec prudence, tournant sept fois ma langue dans ma bouche avant de parler.

« Non, majesté impériale, Je suis en train de finir de préparer les affaires, nous partons effectivement bientôt avec sa majesté Lyham. »

J’avalais ma salive en soutenant son regard. Non pas pour le défier, mais juste… pour montrer… que j’écoutais ce qu’il avait à dire. Je finis par regarder le ciel.

« Sa majestée l’impératrice et son dragon sont véritablement très impressionnants. »

Sacha… Pitié… Ferme-la ! Tu vas finir par dire quelque chose d’énorme et de complètement con… Mais t’en perdra peut-être que ta langue et que ta tête. Mais je n’allais pas lui dire « Au fait merci d’avoir envoyé mon père au mur, mon dos vous en remercie et ma tranquillité du côté familiale aussi. », il devait avoir oublié en plus.

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Torrhen Braenaryon & Sacha Racin

Castel de Fort-Darion, Semaine 2 du mois 7 de l’An 1 de l’Ere des Luttes

Racin. Cette famille était issue du cru, ils étaient présents dans la région depuis plusieurs générations. Riverains de naissance, mais affiliés depuis trois générations à ceux qui les avaient écrasés quand ils étaient sous bannière orageoise, un siècle plus tôt. Les Hoare avaient recouvert de leur ombre une sacrée partie du continent, quand on en faisait le compte. Et l’Empire le ferait sans doute à son tour, mais je préférais y voir une source lumineuse que des ténèbres prenant corps… On ne choisissait pas toujours, et sans doute que pour les riverains libérés de l’emprise fer-née et des injustices dont ils étaient les victimes coutumières, c’était un grand pas en avant de devenir fédérés au sein de l’Empire. Je l’espérais, du moins. Et je le présentais comme ça aussi. Dans tous les cas, c’était quelque chose que je pouvais envisager comme souhaitable pour plusieurs peuples, de rejoindre cette bannière d’unification. Pour d’autres en revanche… Qu’adviendrait-il si l’Empire faisait s’élever la bannière du Loup et du Dragon sur Villevieille, ou sur Pyk ? Seul l’avenir le dirait, si la guerre nous forçait à aller si loin de nos maisons.

Quoiqu’il en soit, les Racin étaient théoriquement sous vassalité Braenaryon, mais en tant que riverain, le jeune Sacha avait demandé à servir le Roi des Rivières et des Collines, mon ami Lyham. En arrivant près de ce qui lui servait de quartier dans la capitale, je tombais fatalement sur les hommes de troupe qui lui étaient proches, qu’ils soient nobles ou non, et le jeune homme était déjà présent et affairé à ses tâches. Je souris du titre qu’il emploie, avec un rien d’amusement mais pas de moquerie.

| Sire suffira, Ser, ne m’affublez pas de titre à rallonge… |

Il parlait de préparatifs, ce que je pouvais d’ailleurs constater par moi-même. J’avais connu bien assez de camps d’hommes en armes pour noter quand ceux-ci commençaient à s’activer. Le chevalier et aide de camp du Roi des Rivières et des Collines n’hésita pas à manifester ses sentiments à l’égard de mon épouse et de sa monture de guerre -sa sœur, selon ses mots-. Je ne souriais plus, et moi aussi, je regardais le ciel.

| Ces deux créatures n’ont pas été façonnées par les dieux de notre monde, Ser. Mais nous pouvons remercier nos dieux anciens et nouveaux d’avoir permis au destin de les mettre dans notre camp… |

Je me retourne vers lui.

| Allez-vous passer voir votre famille, sur votre trajet ? |

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Westeros have only one chance to prosper and if you not seize it, then I will.
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Even if it takes the last drop of my blood, I will see the kingdoms freed once more.
And if i cannot save it from the felony and the dishonor, then let Westeros burns.

Sire d’accord, pas de titre à rallonge. Je hochais la tête en restant silencieux de ce côté-là et en essayant de ne pas un faire de bourde, et de deux ne pas trop passer pour le dernier des crétins. Si bien que je préférais passer sur le sujet de son épouse et son dragon qui étaient… vraiment impressionnant. Et je ne les avais vu que de très loin… Je ne m’approchais pas d’un pouce. Ce n’était pas mon rôle de m’approcher… puis je préférais l’ombre à la lumière. J’avais été éduqué, si on pouvait appeler ça une éducation, ainsi. Alors j’essayais de complimenter son épouse et le dragon. Je suivis son regard dans le ciel où elle avait disparu. Ser. Je retiens une grimace. Je hochais la tête.

« Sans aucun doute Sire. Et euh… Je ne suis pas chevalier. Juste écuyer. »

Pour l’instant. Je passais une main dans mes cheveux. Voir ma famille ? Je me sentis légèrement pâlir en secouant légèrement la tête.

« Non. Je ne pense pas que nous irons voir mon frère, sire. De toute manière… »

Je haussais les épaules en passant une main dans ma tignasse.

« Je pense que pour un petit moment je vais être personna non grata. »

J’eus un sourire triste en haussant à nouveau les épaules. Lucas allait me manquer, bien sûr… Mais c’était comme ça après tout.

« Il y a plus urgent à faire, sire, que de passer voir ma famille. »

Je ne leur manquerais pas après tout, c’était autre chose. J’inclinai la tête :

« Je peux vous être utile en quelque chose, sire ? »

Autant être utile et faire d’une pierre deux coups, si je pouvais en profiter pour l’accompagner avant de remonter chercher d’autres affaires et répondre à des demandes du roi Lyham… Mais bon, il y avait encore beaucoup de boulot à faire après tout. Et je ne pouvais pas traîner plus que cela ni le retarder non plus plus que cela…

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Torrhen Braenaryon & Sacha Racin

Castel de Fort-Darion, Semaine 2 du mois 7 de l’An 1 de l’Ere des Luttes

Un peu de curiosité est toujours bienvenu et ne peut pas vraiment faire de mal. D’autant que l’homme semble répondre à mes questions mais sans forcément beaucoup s’épancher, alors cela me conforte dans cette posture de questionnements. Cela peut me permettre d’un peu mieux cerner ce fils d’un baron local qui a fait acte de fidélité depuis la formation de l’Empire, sans avoir hésité un seul instant à nous rejoindre. L’homme qui me fait face semble jeune en tout cas, mais de cette jeunesse dont il est toujours si difficile de deviner l’exacte amplitude. Ecuyer, en tout cas, est une indication un peu plus précise par rapport à ce que je peux estimer moi-même ; il ne doit pas avoir vingt ans si je me rappelle bien des usages en vigueur au sud. Donc vraiment un jeune guerrier. Mince sourire aux lèvres, sous mon visage ravagé de cicatrices.

| Je vois. Monsieur le « juste écuyer », c’est déjà un rôle plein de responsabilités, n’est-ce pas ? |

Histoire, sans ironie, de lui montrer que je ne plaisante pas à ses dépends. Et il indique ne pas penser pouvoir voir son frère et évoque même être indésirable, sans doute, aux yeux des siens ; ce qui m’étonne un rien. Je ne suis pas au courant de bisbilles à l’intérieur de cette maison mais forcément ce qu’il me dit fait sens à mes yeux et m’évoque des difficultés assez inédites au sein de terres qui sont sous mon empire, mais seulement depuis bien peu de temps.

| Et bien, vous pourriez commencer par m’expliquer pourquoi votre venue ne serait pas désirée par vos proches, écuyer Racin. Je n’aime pas savoir qu’il existe des tensions entre les maisons que je gouverne, ou plutôt, au sein de celles-ci. Surtout en période de guerre… Est-ce votre choix de carrière qui vous éloigne des vôtres ? Conflans et Trident sont proches, et votre vocation est pourtant légitime au regard de l’histoire de votre famille et de votre pays. |

J’attends sa réponse alors, même si je ne me fais pas trop sévère pour ne pas l’intimider.

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« Monsieur le juste écuyer », j’eus un sourire amusé, enfin, un rictus, j’avais du mal à sourire, c’était drôle, il fallait l’avouer ! Un rôle d’écuyer avec plein de responsabilité ? J’inclinai légèrement la tête.

« Oui Sire, il faut préparer les affaires du roi Lyham avant qu’il n’en ait besoin, s’assurer d’être toujours présent à sa demande… Ce genre de chose. »

Et rentrer chez moi ? Ah ! La bonne blague… impossible pour moi… Pour l’instant sans doute. Est-ce qu’un jour j’aurais le courage, ou l’envie surtout, d’y rentrer ? Je n’avais pas très envie d’à aller, je n’avais pas forcément beaucoup de très bon souvenir, la seule chose que j’aimais là-bas c’était mes amis des rues et Lucas. Mais Lucas je le reverrais un jour sans aucun doute… Je levai les yeux vers l’empereur quand il me posa la question et je retiens une petite grimace.

« Ma vocation plaît, sire, ce n’est pas servir le roi qui est le problème. C’est qui le sert. »

Je retiens un petit soupir, agacé par la situation alors que techniquement je n’avais rien fait de mal, à part avoir un sale caractère, je me frottais le bout du nez avant de reprendre.

« Je suis le vilain petit canard de ma famille en quelque sorte, je me suis jamais entendu avec mon père et par extension la majorité de mes frères. Même si avec Lucas cela se passe bien. Mais, à Fort Darion j’ai désobéis à mon père et il m’a fouetté en public, Ser Garlan Goldwyne est intervenu avant qu’il ne finisse le châtiment. »

Est-ce que cela allait lui revenir ? Aucune idée, je ne pensais pas, il avait d’autre chat à fouetter après tout et quelques petits évènements important depuis la condamnation de mon père. Mais j’avais eu de la chance, Ser Garlan était intervenu au début des coups, je n’avais eu qu’un coup de chat à neuf queues… mais cela avait suffi pour entailler salement une partie de la chair de mon dos, j’en avais des cicatrices… Je repris avec un détachement forcé :

« Vous l’avez appris et condamné à prendre le noir. Il est au Mur actuellement. Curieusement, ma famille me tient responsable de cela et pensent que mon père ne faisait que me punir pour lui avoir désobéis. »

Je haussais les épaules avec un sourire ironique :

« On ne peut pas plaire à tout le monde. »

C’était comme ça et j’étais mieux chez les Tully que là-bas. Au moins si je mourais cela ne serait pas des mains de mon père.

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Torrhen Braenaryon & Sacha Racin

Castel de Fort-Darion, Semaine 2 du mois 7 de l’An 1 de l’Ere des Luttes

Le jeune homme a le visage qui se tord dans un sourire qui n’a rien de forcé, mais qui semble le surprendre un rien lui-même. On ne peut pas vraiment dire que l’écuyer paraisse fier de ses tâches, en tout cas. Il les évoque comme celles d’un vulgaire passe-plats, mais ne semble pas s’attacher plus que ça au fait qu’il est diablement révélateur de simplement circonscrire ses tâches à la demande d’un souverain. Je reprends d’une voix calme, non sans une certaine douceur qui ne touchera peut être pas le garçon, mais qui a tout de même vocation à l’amener à un point de vue moins négatif.

| Et c’est pourtant essentiel. Un souverain a toujours mille soucis en tête, et cent choses à régler. Préparer ses affaires, s’assurer qu’il mange, faire le tri dans ses audiences et courriers, peut s’avérer délicat mais c’est néanmoins essentiel. Cela vous apprend, aussi, à comment mieux gérer votre vie d’adulte. |

L’écuyer du Roi du Conflans explique alors, bon gré mal gré, quelle est sa situation. Il se permet un soupir, peu conforme à n’importe quelle étiquette, et se frotte le nez comme signe d’hésitation avant de parler de ce qui concrètement le taraude. Je reste de marbre quand il évoque quelle sanction lui fut réservée lors d’une désobéissance à Fort Darion, mais un feu glacé couve dans mon cœur. Comment certains bannerets pouvaient se comporter en privé m’importait peu, tant qu’ils respectaient les Lois des Dieux et celles des Hommes. Mais en public, sur mes terres et pire, dans ma ville, cela m’interpelle. Cette fois, je me rappelle effectivement de la situation. J’ai dû gérer tant et tant de soucis, parfois disciplinaires, lors de l’établissement des Terres Impériales, qu’il est parfois difficile de démêler ce qui est de mon fait ou de celui de mes suivants, qui sont aux commandes d’un certain nombre de décisions en mon nom.

| Rappelez moi simplement à quoi vous aviez désobéi ? |

Je reporte mon regard sur la troupe, au loin.

| La famille, c’est une gestion compliquée. On place parfois le curseur du ressentiment plus loin qu’avec des inconnus, car on trouve moins d’excuses au comportement de ses proches. Il faut apprendre à pardonner, et à composer avec. Sous peine de se retrouver totalement isolé. |

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Je soutiens son regard sans rien dire pendant quelques secondes à ses propos. J’étais né adulte. Je ne pouvais pas me souvenir d’un pur moment d’insouciance typiquement enfantin. Peut-être que ce n’était pas la réponse que l’empereur attendait réellement. Je hochais simplement la tête, comprenant ce qu’il voulait dire, et surtout il n’y avait rien d’autre à dire à mes yeux. Simplement marquer que j’avais parfaitement compris ce qu’il voulait dire. Je continuais de le suivre, pour moi, je ne faisais que mon travail, quand bien même il était utile et qu’il m’apprenait bien des choses, ce n’était que mon simple devoir de faire ainsi. Et… il me fit parler du sujet que j’aimais le moins : mon père et ma famille plus généralement. Ce à quoi je désobéissais ?

« Mon père refusait que je sois seul en ville ou que je discute avec les gamins des rues. J’ai fait les deux. »

On avait jamais pu s’entendre… vraiment, entre menace et coup… C’était compliqué ma famille. J’avais commencé à me faufiler hors de la demeure de mon père autour de mes six ou sept ans. J’avais trouvé beaucoup plus de gens dehors avec qui je m’entendais qu’au sein de ma famille. Et quand le géniteur menaçait mes amis… Les bonnes relations étaient complexes. Je posais à nouveau mon regard sur lui sans rien dire. Une gestion compliquée… Pardonner ? Je n’eus aucun rictus.

« Mes frères ne m’ont rien fait, à part Lucas qui était le seul avec qui je m’entendais bien, ce n’était qu’une franche ignorance entre nous… à peu de chose près. C’est eux qui ne veulent pas me pardonner. »

N’inversons pas les rôles, merci ! Et j’avais préféré la franche ignorance de la majorité de mes frères que la violence de mon père. Placer le curseur, je fixais l’empereur, et lui ? Il le plaçait où le curseur, lui ? Je préférais ne pas vraiment poser la question. Ce n’était pas à moi de le faire, même si j’aurais aimé connaître son opinion. Est-ce qu’il y avait des choses impardonnables ?

« À vos yeux, sire, y a-t-il une chose que vous ne pourrez jamais pardonner ? »

À part la trahison. La devise du nord « Le Nord se souvient » ou quelque chose comme cela…

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J’essaie toujours de ne pas me positioner en donneur de leçons. Je ne veux pas forcément que l’on m’oppose quelque chose qui ressemble à un argument d’autorité que je serais bien en peine d’assumer, car je reste bien conscient que je ne suis pas forcément le mieux placé pour donner des conseils. Ce n’est surtout pas l’âge qui fait de moi quelqu’un de plus sage que les autres, et surtout pas plus intelligent que les autres. Il n’en reste pas moins que je me dois d’assumer aussi de ne plus vraiment être un jeune homme, et que j’ai appris des choses au fil du temps, des campagnes ou des situations. Des choses dont je peux faire profiter certains de mes congénères. Le jeune homme me regarde et semble vouloir trouver une échappatoire au sujet sur lequel nous échangeons. Je ne vais pas non plus le forcer, mais j’aimerais vraiment en savoir plus, car ça me permettrait de mieux anticiper les conflits éventuels au sein des familles dont je suis aujourd’hui le suzerain.

| Vous voulez dire, jeune homme, que votre père s’est fâché à ce point juste pour cela ? |

Je ne tolère pas moi-même que l’on remette en question mes ordres, encore moins quand il s’agit de directives partagées avec ma famille, mes proches, et je reste le chef de rang de la maison Stark, et désormais Braenaryon. Mais d’un autre côté, quelle stupidité que cette histoire, encore un chef de maison qui n’est pas capable de la moindre imagination, ni de tant de pragmatisme que cela. C’est sa faute, finalement, ce qui est arrivé avec ses fils. Je suis bien placé pour savoir que l’amour familial est parfois un leurre, mais tout de même… Cela reste crétin d’en faire autant pour si peu.

| Tant de drame pour si peu de choses… Cela nous fait relativiser, évidemment. |

Je regarde fixement le jeune homme quand il me demande ce pourquoi je suis à mon tour rancunier. Difficilement d’être honnête, sur ce genre de réponse. Et forcément, je pense à bien trop de choses différentes pour mon propre bien. Je me sens désormais bien contrit, mais reste neutre, et digne, comme toujours.

| Oui, il y a des choses que je ne pourrais peut être jamais pardonner. La rancune, toutefois, n’est pas bonne conseillère. Elle ne saurait nous guider dans tous les aspects de notre existence… |

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Je soutiens le regard de l’empereur et hochais la tête avec lenteur.

« Oui. Mon père est un homme de ce genre-là, ou il usait de menace contre d’autres de mes amis d’Herpivoie. »

Entre cela, les coups, les insultes… Il y avait une liste longue comme le bras. Je sentais aussi ses doigts se serrer ma gorge en menaçant mes amis. Entre cela et tout ce qu’il se passait à la maison… Maison… je ne pouvais même plus dire cela. Je me frottais légèrement le bout du nez. Je posais mon regard sur l’empereur en haussant les épaules.

« Parfois on est simplement incapable de s’entendre. Le problème c’est quand ces personnes sont de la même famille. »

Je lui retournais la question sans rien dire d’autre. Est-ce qu’à une époque j’avais essayé de plaire à mon père ? Peut-être. Mais je ne m’en souvenais pas vraiment. Comme je ne me souvenais pas d’un jour un geste de tendresse ou de fierté de sa part. Même lorsqu’il m’avait confié au roi… j’étais sûr qu’il voyait une simple opportunité de faire une simple bonne impression ou un beau geste politique. Quoi qu’il aurait sûrement préféré donner un autre de mes frères que moi le vilain petit canard… J’attendis la réponse de l’homme sans rien dire. Il me la donna. Je hochais la tête.

« Je comprends parfaitement… Mais parfois il est difficile de la laisser de côté. »

Est-ce que je serais capable de laisser de côté ma colère et ma rancune envers mes frères ? Sans doute. Je préférais l’ignorance, vivre de mon côté… et eux du leur. Je servais le roi, n’était-ce pas une bonne nouvelle pour ma famille ? Au pire, je mourrais au combat ! Quelle bonne nouvelle pour eux. Je ne dis de plus de ce côté-là. Mon regard revient sur le ciel puis les troupes.

« Avez-vous encore besoin de moi, sire ? »

Je craignais d’avoir encore bien des choses à faire pour le départ du roi… Et les miennes d’ailleurs à préparer ! Enfin, finir de charger et m’assurer que le roi était prêt avec son armure. Mon travail était important, je ne pouvais pas non plus, malgré l’importance de l’empereur, rester toute la journée avec lui. Le roi ne serait pas très content après tout que je tarde trop à venir faire mes devoirs d’écuyer. S’il n’avait plus besoin de moi, autant que je retourne à mon travail.

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J’interroge, malgré les circonstances, pour en savoir un peu plus sur le jeune homme et sur les circonstances qui ont fait de lui l’homme qu’il est aujourd’hui. Il n’est pas peu disert, même s’il est clair qu’il reste quelque peu avare de détails. Cet entre-deux ne fait pas réellement mon affaire mais au fond, qu’importe. L’essentiel est avant tout de pouvoir avancer et obtenir l’information que je souhaite. Je n’ai pas beaucoup de respect quoiqu’il en soit pour les hommes qui confondent éhontément la force et la cruauté. Je ne suis pas de ceux, du moins je ne l’espère pas, qui considèrent que tirer avantage de sa position est légitime et souhaitable. Il y a des choses à ne pas faire, des limites à ne pas franchir.

Et puis pour le reste, ce que le garçon riverain me dit, cela fait aussi forcément écho avec ma propre histoire personnelle et mon expérience des relations familiales, où il est très clair à tout le monde que je ne suis pas le plus talentueux du genre.

| Je vois… |

Je ne peux pas de toute façon en dire beaucoup plus devant un quasi-inconnu, devant quelqu’un qui n’a pas à savoir comment se passent les choses dans ma famille. Je hoche la tête quand nous parlons de rancune. Je sais combien le fiel peut empoisonner littéralement une existence, comment il peut nous amener à faire des bêtises et cela encore, de façon durable. Comme un cancer.

| Oh, cela, c’est l’évidence même. Au Nord nous avons un dicton, un véritable leitmotiv pour beaucoup d’entre nous. Le Nord se Souvient. Rien n’est moins vrai ; nous sommes un peuple qui aime se rappeler les vexations du passé. |

Le jeune homme finit par me demander s’il peut autre chose pour moi. Mince fantôme de sourire au coin des lèvres et hochement de tête péremptoire, faussement sec et intimidant.

| Et bien, vous avez raison, écuyer, nos devoirs respectifs nous appellent. Merci pour la conversation, et je vous souhaite toute la réussite possible dans la campagne à venir. |

Je salue, détourne les talons, et rejoins ma garde.

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