Baâl Forel a vécu aux premières loges la série d'événements tragiques ayant conduit à la situation chaotique des Sept Couronnes. Le Roi Noir a commis l'irréparable, l'innommable, et il paiera le prix. Il n'y a d'autre issue possible que celle de voir sa tête tranchée et plantée au bout d'une pique, trônant au-dessus d'Harrenhal. Et Baâl s'y emploiera personnellement. La guerre qui s'est engagée est déséquilibrée, et le Braavien en a pleinement conscience. Chacun de ses soldats est précieux et Peyredragon n'aura pas le droit à l'erreur. L'échec n'est pas une option : il faut vaincre, ou mourir en tentant d'y parvenir.

Chevalier de Peyredragon, Général des Armées du Dragon, désormais Main de Rhaenys... Qui aurait cru qu'un jour le bretteur - certes de talent - hisserait son patronyme si haut en Westeros ? Baâl doit tout à la famille Targaryen, et il ne le perdra jamais de l'esprit. Aerion était pour lui comme un second frère ; ses orphelins, il les défendra au péril de sa vie. La loyauté du Braavien envers Rhaenys Targaryen ne fait pas l'ombre d'un doute. Il est comme un père pour elle, et son plus proche conseiller. La jeune femme, meurtrie par la trahison et submergée par la mort des siens, lui accorde l'once de confiance qu'il reste au fond de son cœur. Et pour rien au monde Baâl ne la briserait.

Le conditionnel n'a pas sa place. La guerre est omniprésente, elle est le quotidien de Peyredragon depuis maintenant des mois. Les cycles du jour et de la nuit accompagnent le rythme des batailles contre les armées du Roi Noir, qui semblent toujours plus nombreuses. Mais la bannière au Dragon résiste et, contre toute attente, conquiert du territoire. Au front, Baâl Forel a hérité du titre honorifique d' "échine du Dragon". Et force est de constater qu'il porte bien ce surnom. Général légitimé par ses hommes car combattant auprès d'eux, doté d'une capacité d'analyse certaine du champ de bataille, le Braavien de quarante-huit ans jouit d'un esprit aussi fin que le maniement de ses lames.

"Harren le Noir", Baâl vomit ce nom. L'homme n'a qu'un seul regret, mais il pèse le poids d'une enclume. Celui de n'avoir pas été présent pour défendre Aegon lors de son lâche assassinat. Les Royaumes qui soutiennent Harrenhal aujourd'hui se rendent sciemment complice de l'ignominie, et ils subiront à leur tour le courroux du Dragon. Quant à lui, Baâl ne laissera à personne lui prendre sa vengeance. Le Roi Noir mourra, et ce sera de sa propre main.
     

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     Baâl Forel

       Baâl Forel est né dans la cité libre de Braavos, fils de John Forel, maître d'armes, et de Shella Waters, servante de Braavos. Cadet d'une lignée de maîtres d'armes, le garçon a passé le plus clair de sa vie à manier la lame et à en maîtriser tous les secrets. Aujourd’hui, l’homme saurait probablement vous expliquer avec une grande conviction que toute épée possède une âme, un son particulier lorsqu’elle fend l’air de son métal, une allure unique face aux éclats du soleil. Parmi les enfants des maîtres d’armes de la cité-libre, Baâl était déjà très bon. Il fit la fierté de ses parents, qui le virent grandir et s’aguerrir de jour en jour, jusqu’à ce que les récits des contrées lointaines de Westeros ne poussent le jeune homme à rêver de l’autre continent. Cet autre monde le fascinait. Il lui paraissait à la fois majestueux et cruellement en retard sur le plan politique. Mais Baâl avait aussi à l’esprit nombre de maîtres d’armes rentrés dans l’Histoire, passés à la postérité en ayant servi quelque souverain suffisamment conquérant pour couvrir de gloire l’ensemble de ceux qui les entouraient.

Baâl possède également un frère aîné qu'il n'a pas vu depuis de nombreuses années. Et pour cause, ce dernier, âgé de cinq ans de plus que lui, n'a jamais souhaité s'expatrier en dehors de la cité libre.

Baâl décida de voguer vers l’ouest à l'âge de vingt-cinq ans. Ce long voyage, duquel il ne reviendrait sans doute jamais, avait pour unique motivation sa volonté inébranlable de graver son temps d’un coup de son épée. La traversée, qui dura elle-même de longues semaines, finit par le faire accoster au port de Goëville du Val. Il ignorait alors tout de l’endroit où il était mais décida d’offrir ses services de bretteur pour gagner un peu d’argent. Le plus clair du temps, il fut chargé de l’instruction de quelques corps de garde, mandaté par des seigneurs de maisons nobles. Après quelques années à enseigner ses connaissances martiales, Baâl entreprit de se diriger plus au sud. Il s’était en effet installé depuis près de trois ans maintenant dans la région du Val et de la Montagne, mais ne pensait pas être capable d’accomplir son rêve de grandeur en ces terres.

Lorsqu'il accosta sur les côtes de Peyredragon, ses qualités de combattant hors pair lui valurent d'être rapidement repéré par le Roi des archipels, Aerion Targaryen. Baâl devint très vite l’instructeur personnel d’Aerion et lui enseigna tout ce qu’il savait. Au fil des années, le respect mutuel qui les liait devint une amitié fraternelle, et cette amitié un lien de sang à son tour. Baâl Forel de Braavos fut nommé Chevalier de Peyredragon et entra officiellement dans l'entourage très restreint d'Aerion Targaryen, en qualité de premier conseiller. Curieux, soucieux du détail et fin tacticien, Baâl avait suscité un intérêt premier de la part du Roi Dragon, lequel avait en grande estime les capacités d’analyse et de discernement du Braavien.

Bien que n'étant pas issu de leur lignée, Baâl fut porté dans son cœur par la famille des Targaryen. Outre ses responsabilités militaires et, désormais, politiques, l'homme fut ensuite chargé de l'instruction aux armes des enfants d'Aerion, Visenya, Aegon et Orys. Baâl tissa avec l’ensemble d’entre eux des liens profonds, des liens dont le Braavien ne se doutait pas à l’époque qu’ils seraient si lourds de sens dans l’avenir. Mais c'est surtout Aegon et Visenya à qui Baâl consacra le plus de temps, les rendant aussi aptes à diriger qu'à se défendre au combat.

Lorsque le Seigneur de Peyredragon trépassa, Baâl s'occupa de ses orphelins comme s'ils étaient sa propre chair. Déjà soucieux et attentionné du temps où Aerion était encore vivant, le Forel veilla sur eux plus que jamais. Jusqu’à ce que l’innommable survienne. Aegon avait hérité de l’arrogance noble du Dragon, de cette assurance charismatique d’être doté d’une destinée manifeste et supérieure à accomplir : celle de porter la Couronne des Sept Royaumes de Westeros. Cette ambition était inscrite dans son sang et dans chacun de ses gênes. Tous les enfants d’Aerion en étaient mus. Aegon et Visenya en payèrent le prix. Piégé, dupé, trahis de la manière la plus ignoble qu’il soit, Harren Hoare le fit assassiner sans lui laisser la moindre chance, en reniant toutes les valeurs d’honneur et d’éthique qui forgent pourtant la haute noblesse. Ce jour-là, Baâl ne fut pas présent.

Depuis les meurtres de Visenya et d'Aegon par le Roi Noir, Baâl est rongé par un remord permanent de n'avoir pas été capable de défendre de ses épées au moment opprtun. Grignoté par la colère et le sentiment d'impuissance, il s'est juré de vouer le restant de son existence à garantir celle de Rhaenys Targaryen, dernière de la lignée d'Aerion, Reine de Peyredragon et Prétendante légitime au trône des Sept Couronnes. Il s'est également promis qu'il ne trouverait le repos qu’en embrochant le Roi Noir de ses propres mains.

Depuis le départ d'Orys Barathéon pour Dorne, Baâl exerce la régence du titre de Main de la Reine. Bien qu'ayant un très grand sens des responsabilités et une connaissance aigüe des affaires du Royaume, cette position éminente lui garantit surtout la capacité de mettre tout en œuvre afin qu'aucune atteinte ne soit portée à la Reine. Elle lui permet aussi de mettre en branle une vengeance bien plus personnelle. Cumulant pour l’heure la double fonction de Main et de Général en chef des Armées du Dragon, Baâl mène les troupes du Royaume contre Harrenhal et marche sur les sentiers de sa revanche.

Il y a quelques mois, l’homme s’est définitivement illustré lors de sa victoire à Sombreval. Chose rare, il n’avait pas cette fois-ci participé lui-même à la mêlée mais avait su briller sur le plan stratégique. Au front, c'était Rhaenys, chevauchant Méraxès, qui avait guidé Peyredragon dans la ferveur de la guerre. L'événement resterait dans l'esprit des leurs comme une date à marquer au fer rouge. Cette victoire était d’autant plus symbolique que le combat que se livrent Peyredragon et le Roi Noir est mathématiquement déséquilibré : la balance des forces mobilisables penchant très nettement en faveur des Harren. Pourtant, sous le commandement de Baâl et la bienveillance de Rhaenys, les armées du Dragon sont parvenues à étendre le front de la bataille au Conflans, créant une percée géographique aussi notable qu’inattendue.

A compter de cet épisode, Baâl dirige personnellement le front et reste aux Epois afin de coordonner les décisions stratégiques qui s’imposent dans un temps limité. Être soi-même au contact de l’ennemi peut être un risque, mais c’est aussi le meilleur moyen de réagir au plus vite à l’information qui circule. Le Braavien a notamment permis d'éviter que soit détruits les ravitaillements de Peyredragon lors de la Bataille des Ecors.

Depuis maintenant quelques jours, les éclaireurs infiltrés dans le Conflans s’agitent. De nombreux retours préviennent de la venue d’une armée importante venue de l’Ouest. Le Roi Noir entend reprendre ce qu’il croit lui appartenir. Dix mille hommes font route vers les Epois et un choix s’impose : les laisser approcher ou mener la bataille sur leur propre territoire ? En matière militaire, Baâl ne croit qu’à une seule règle : le temps prime sur l’espace. Une armée s’adaptera à la configuration du champ de bataille. Mais le temps perdu ne se rattrape jamais. Et à l’heure qu’il est, sa décision est prise.

Dans un concert de cors et d’instruments à vents, la bannière au Dragon tricéphale flotte au gré d’une légère brise matinale. Le feu et le sang sont en marche. Ils iront faire face, et ils vaincront, car il n’y a d’autre alternative que la victoire ou la mort. Baâl vérifie ses deux épées. Elles sont aiguisées et lustrées. Dans deux jours, les rivières du Conflans se teindront de pourpre.