Des pétales de rose ! Ils jetterons des pétales de roses sur le chemin de mon promis. Les gardes avaient informé Myria que la Flotte de Fer était en vue. Elle était impatiente de retrouver Rodrik et son fils. Elle imaginait que si l’un des deux étaient tombé au combat, elle aurait reçu une missive ainsi, elle ne s’inquiétait pas trop depuis qu’on lui avait annoncé leur retour prochain. Elle était soulagée. Et en plus de ça, ils étaient victorieux, IL était victorieux. Il fallait fêter ça. Elle avait vu avec Annalys pour faire préparer un banquet, et à présent, elle se demandait ce que le peuple de l’Ile d’Harloi allait jeter sur le chemin du Sire de Dix-Tour et de ses hommes rentrant au bercail tout en les ovationnaient. Des pétales de roses ? Vous n’y pensez pas. Où donc vais-je trouver des roses. Et quand bien même en trouverais-je, je crois que les Fer-Nés me riraient au nez, s’ils ne m’insultent pas d’oser parsemer leur chemin de fleurs. C’est ridicule. Un tas d’autres idées lui passèrent par la tête, du sang de brebis aux cailloux et même au sel et aux poissons, jusqu’à ce qu’elle se rende à l’évidence, qu’il n’y avait pas grand chose d’autre que des cailloux à jeter et que c’était fort peu approprié de les lapider pour leur victoire. Elle hocha donc la tête et se contenta d’envoyer des hérauts clamer le retour de la Flotte de Fer et du victorieux Lord Harloi sur ses terres afin que les gens lui réservent un accueil triomphale comme il le méritait. Elle se retint d’enfourcher son cheval pour le rejoindre au port, pour la simple et bonne raison, qu’il serait trop difficile de ne pas le soustraire à ses obligations entre le quai et le château.

Plutôt que de chevaucher jusqu’au port, la Princesse mit un temps fou à choisir sa robe et choisi finalement celle de taffetas près du corps qui dénudait ses épaules avec la cape de laine brodée pour ne pas attraper la mort. Quand elle fut prête elle descendit jusqu’au perron et y retrouva Lady Harloi et le reste de la famille. Elle essaya bien de cacher son large sourire derrière un visage de circonstance quand elle l'aperçut, mais elle n’y parvint qu’à moitié et dut se mordre la lèvre pour ne pas se mettre à baver d’envie de lui sauter dessus. Évidemment, le baiser qu’ils échangèrent n'arrangera rien. Après une brève hésitation due à la gêne, elle le lui rendit avec une ardeur torride. Elle aurait bien aimé essayé de résister, mais elle ne pouvait pas, et après tout ils étaient en famille, elle espérait néanmoins qu’il se tienne un peu devant les invités, mais elle n’en était pas très sûre. Il fallait croire que toutes les femmes sel qu’il avait ramené du Conflans et toutes celles qu’il y avait violées n’avait pas suffit à calmer ses ardeurs, ni à lui faire oublier sa promise. Elle en fut ravie, mais c’était réciproque. Enfin sans homme sel ni viol. Ainsi, quand il la reposa elle se dit que de toute façon, il faisait ce qu’il voulait, on n’était plus à la cour d’Harrenhall, les mœurs étaient bien différents et la bienséance inexistante, il allait falloir s’y faire. Alors, elle rétorqua avec un sourire :

__ Qui donc pourrait t’égaler ? Il faut que tu me le présente immédiatement pour que je ne me languisse pas trop quand tu t’amuses à piller mon pays de naissance. »

La brune aux yeux céruléens n’allait tout de même pas coucher avec le palefrenier, aucun standing, ni avec Gérolt. Autant collectionner les Hoare avait été possible car ils ne se seraient avoués pour rien au monde qu’ils aimaient tous la même femme, autant, dans cette famille, c’était une chose à éviter à tout prix à son humble avis. Et puis, pour être franche, elle avait aimé Joren autant qu’Harren, mais bien qu’elle appréciait beaucoup Gérolt, il n’était pas de la même trempe qu’Harren ou Rodrik.

__ Je suis heureuse de l’entendre. J’ai toujours été fière de lui et le fait que tu sois désormais son mentor ne me donnera que plus de raisons de l’être, j’en suis persuadée. Pourquoi crois-tu que je te l’ai confié. Ce n'était pas seulement une excuse pour venir à Dix Tours afin de te mettre le grappin dessus. »

La Hoare regarda son promis du coin de l’œil avec un sourire.

__ Tout c’est bien passé, je crois que j’ai fait forte impression en saignant la mère d’Heda comme un porc avant de lui mettre le feu. Je me suis bien amusée en tout cas. Mais j’aurais préféré jouer avec les vrais coupables. »

La future Dame de Dix-Tours essayait de ne surtout pas jeter un regard embarrassé à qui que ce soit tandis que Rodrik lui caressait le derrière et tentai de garder toute sa présence malgré la gêne ainsi qu’un minimum de concentration pour pouvoir lui répondre. Mais ce n'était pas chose aisée, d’autant que niveau libido, elle n’était pas en reste. Elle frémit et soupira de désir en regardant droit devant elle et continua à marcher jusqu’à la grande salle malgré les murmures indécents du commandant de la Flotte de Fer. Mais fit mine de l’ignorer pour le moment. Puis tandis que toute la famille entrait dans la Grande Salle et allait s’installer, elle le tira par le bras pour se dérober derrière la porte.

__ Et moi, tu crois que j’ai pensé à qui tout ce temps ? Et tu crois que j’ai envie de quoi maintenant que tu es là ? Mais avant que tu ne te laisse aller à tes pulsions avec trop de brutalité, tu dois savoir... »

Myria prit la grosse main calleuse du guerrier pour la poser doucement sur son ventre et plongea ses yeux azurs dans ceux de son future époux avec un sourire. Alors, elle se hissa sur la pointe des pieds et de passa ses bras autour de son cou pour déposer un baiser sur ses lèvres. Puis, elle le libéra et prit place à table avec lui avant d’entamer un court résumé.

__ Tout sera prêt pour la fin de la semaine si cela te sied. Les invités seront nombreux, personne n’a décliné, certains n’ont pas encore répondu, mais je gage qu’ils seront là. Dame ta mère a fait le gros du travail je dois l’avouer, j’avais trop peur de faire une bêtise concernant les rituels des Îles de Fer, elle m’a tout expliqué, j’espère ne pas commettre d’impaire. Quand à ma robe, c’est l’une des filles de Lord Pindepierre qui la confectionne. J’espère qu’elle te plaira. Si tu veux quelque chose de spécial, c’est le moment de demander. »

Myria souleva un sourcil étonné et amusé à la fois d’entendre Maron lui faire ce qui ressemblait fort à un compliment. Elle était, il est vrai assez douée pour la mise en scène et elle avait longuement songé à celle-ci car sa réputation sur les Îles de Fer en dépendait. Or, les Fer-Nés ne l’aimaient pas et dans ces conditions effectivement, il valait mieux inspirer la peur que tout autre sentiment. Et puis peut-être qu’aux cotés du respecté Rodrik Harloi et à force de leur montrer qu’elle n’avait jamais intrigué que pour le bien de son Royaume, elle finirait par gagner leur respect. Certes ils avaient dans leurs veines l’idée d’obtenir tout au Fer-Prix, par la force et pas autrement, elle l’avait bien compris et d’ailleurs, si cela n’avait pas été le cas, elle n’aurait pas laissé Joren tenter son coup d’état en force ni accepté la décision d’Harren concernant ses fils, ni soutenu Yoren. Elle n’avait pas oublié ses ambitions, mais elle savait qu’assassiner Harren n’offrirait pas le trône à Beron, pas plus que s’opposer à Yoren ne donnerait la victoire au Royaume du sel et du Roc. Et si elle n’était pas d’accord avec tout ce qui était entrepris, comme durant les longues années du règne d’Harren auquel elle n’avait pas mis fin pensant que faire montre de patience était la meilleure des stratégies. A présent que sa position et le désastre de la guerre contre l’Empire ne lui donnait d’autres choix que de renoncer à sa couronne, elle pouvait enfin, peut-être se contenter de faire de son mieux pour que les Îles de Fer et la Maison Harloi en particulier sortent tous grandi de cette épreuve.

La née Frey avait demandé à Yoren de la faire son héritière, quoi qu’il valait mieux que se soit Aenarion qui hérite et qu’elle soit la régent, et par son mariage avec Rodrik, qu’il soit le principal bénéficiaire de cet accord. Elle enverrait une missive à son Roi en ce sens. Elle ignorait s’il le ferait. L’idée étant comme elle l’avait précisé avant, d'empêcher Manfred de faire main basse sur le royaume. Non seulement parce qu’elle n’aimait pas tellement l’idée que ses fils soient dépossédés de ce qui leur revenait toujours de droit si on faisait fi de la décision d’Harren de les écarter pour légitimer son bâtard, mais surtout, parce qu’elle savait que, malgré le respect que les Fer-Nés avaient pour Eren, elle était une femme et que le Hightower n’aurait aucun pouvoir sur eux. Elle craignait deux choses. D’une part que des dissensions naissent au sein des Îles de Fer, mais aussi du Conflans face à cette situation et que le Royaume ne se divise un peu plus avant de se déliter définitivement. D’autre part que le Roi du Bief utilise les Fer-Nés comme chair à canon, ce qui n’allait probablement pas plaire à Eren et encore moins permettre aux Fer-Nés de sortir vainqueur de cette succession pour le moins hasardeuse. Il fallait à tout prix éviter cela, et elle espérait que le poids d’une décision de Yoren, plus la réputation du Harloi et le nom d'Aenarion suffiraient à éviter le drame. Bref, elle n’avait pas fini d’œuvrer, ce que les Fer-Nés aimaient appeler intriguer, parce qu’ils ne voulaient pas comprendre que les temps changeaient. Elle savait depuis toujours que ce serait le plus difficile à convaincre de ses deux peuples et qu’elle devrait prendre des pincettes avec eux, et à présent elle n’avait pas le soutien des Riverains. C’était encore plus vrai aujourd’hui, mais elle ne comptait pas abandonner, qu’elle soit régente ou seulement Lady Harloi.

Quoi qu’il en soit, la Princesse n’osa pas répondre à Maron de peur de faire disparaître ce sourire satisfait et dénué de moquerie de son visage, elle lui adressa seulement un signe de tête avant de regarder Rodrik.

__ Beron est aux mains de Manfred et nous sommes sans nouvelles d’Heda, il y a des rumeurs contradictoires. Il faudra que je te parle en privé à ce sujet, je peux faire part de mes intentions devant la famille, mais je dois m’assurer qu’il n’y ait pas d'oreilles indiscrètes. Quant à la loyauté des Volmark, de ce que je sais, elle est douteuse, ils tourneront probablement casque à la moindre occasion, vers qui, telle est la question.  »

Leur disparition soudaine fit réagir de l’autre côté de l’épais mur de pierre et ils durent se hâter. Myria rendit néanmoins son baiser à Rodrik avec passion après avoir fait oui de la tête pour confirmer ce qu’il avait compris de son geste et sourit plus largement quand il avait dit que l’enfant survivrait bien à leurs ébats mouvementés. Certes oui, s’il était comme les autres, et encore plus si, comme pour ses précédentes grossesses, sa libido atteignait des sommets. Cela semblait être le cas puisque quand les doigts du Sire de Dix Tours descendirent entre ses cuisses, elle soupira en frémissant. Mais ils n’avaient pas le temps de s’attarder. Elle répondit néanmoins à ce qui n’était pas une question.

__ Bien sûr.  »

La brune aux yeux céruléens avait profité de ses entrevues avec la Volmark pour récupérer des linges ensanglantés afin de faire croire à ses servantes qu’elle avait eut ses menstrues. Mais elle ne pouvait cependant ne pas faire part de sa joie à son promis avant de lui rendre une fois de plus son baiser, trop court à son goût.

Une fois attablés, la famille Harloi discuta du mariage et offrit son soutien à sa future épouse en posant sa main sur la sienne, main qu’elle attrapa glissant ses doigts entre les siens. Ils évoquèrent les répercussions d’un outrage fait à Rodrik et la veuve du Boucher du Bois du Roi rit de bon cœur, effectivement les banquets mettaient tout le monde d’accord et, grâce aux prises de guerre du Conflans et à son habitude d’organiser les fêtes à la cour d’Harren, elle espérait contenter tout le monde et faire de ce mariage une fête qu’on oublierait pas de sitôt. Elle devait cependant prendre en compte le goût des Fer-Nés qui était probablement plus simple que celui des riverains reçus à la cour, mais elle ne comptait pas se moquer d’eux en terme de menu. Et bien sûr, il y aurait du vin et de la bière à foison. Quand à la cérémonie religieuse, elle avait suivi les directives de sa belle mère et avait rencontré le prêtre qui officiait pour demander sa bénédiction malgré le fait qu’elle n’était pas une Fer-Née. Annalys empêcha ensuite son fils aîné de faire une demande perverse à sa future femme. Peut-être qu’il n’avait pas besoin de demander pour que certaines idées concernant la nuit de noce ne lui soient venues à l’esprit. Cependant elle hésitait encore à mettre ses plans à exécution, réfléchissant sur le côté sacré de cette nuit. Peut-être que cela attendrait une autre nuit. En tout cas, elle n’ajouta rien, ce mariage était effectivement important pour elle, mais elle se fichait bien que la perversité affichée de son époux et la sienne soient affichées aux yeux de tous. Cependant, cela semblait important pour la Dame de Dix tour de respecter un peu la chose et elle ne pouvait décemment pas la contredire devant ses fils. Elle avait trop de respect pour elle et elles devaient se montrer fortes et solidaires pour tenir la Maison ensemble avec de tels énergumènes à leurs côtés. Elle aurait certainement préféré une femme Roc née sur les Îles de Fer et peut-être avec une réputation parfaite plutôt que la Hoare sur lesquelles les rumeurs allaient bon train. Mais Myria avait réussi là où toutes les autres avaient échoué, aussi, elle était bien trop contente que son fils se marie enfin pour ne pas la soutenir. La Princesse se retint néanmoins de dire à son Seigneur qu’elle aussi le préférait sans rien mais qu’ils ne pouvait pas se marier tout nus sans quoi ils ne tiendraient ni l’un ni l’autre jusqu’à la fin du banquet sans se sauter dessus. Elle se contenta de répondre au sujet des vassaux.

__ J’espère. Au moins ai-je acquis un peu de respect avec l'exécution de la Volmark.  »

La jeune femme écoutant attentivement son époux commença à manger et manqua de perdre l’appétit sur le champ. Elle prit une nouvelle buchée et la mâcha lentement en fixant son assiette. Elle avait changé de monde, celui d'Harren n'était pas tendre, loin de là, celui de Rodrik était pire, et elle allait devoir s'y faire. De toute façon, les Riverains la détestaient déjà, peut-être était-il temps d'être haïe pour quelque chose de concret. Elle n'avait pas le choix, elle devait s'adapter à tout prix à la vie et à la culture Fer-Née, sans quoi ils continueraient de la mépriser et de la détester eux aussi. C'était encore une fois une question de survie. Elle avait été rejetée par tous et avait sauver sa peau maintes fois, par elle même et par sa capacité d'adaptation. La pitié et la bonté n'avaient plus leur place. Que lui avaient rapportés son désir ardent de faire triompher la paix et la prospérité à part le mépris et la trahison ? Rien. Alors soit. La Princesse ambitieuse qui voulait gouverner avec un gant de velours n'était plus. Elle n'était plus Princesse et elle n'avait plus que l'ambition de survivre. Le gant de velours serait plein de sang, c'était le prix de la vengeance, le Fer-Prix de ces échecs.

__ Ne serait-il pas mieux de les faire travailler dans les mines afin de les endurcir et de proposer aux plus forts et aux plus fidèles de pouvoir sortir des mines et combattre ? Cela pourrait, d’une part les pousser à se dépasser, faire un premier tri sur leur force et leur capacité à sur et nous permettre de réfléchir à l’organisation de l'entraînement. vivre Nous avons besoin de main d’œuvre pour le Fer, tant pour l’extraction que pour la transformation afin d’ajouter de la valeur à nos exportations et de devenir autosuffisants en terme d’armement. De plus, nous pourrions éventuellement faire appelle à la citadelle pour développer un nouvel acier plus résistant ou réfléchir à de nouveaux débouchés. Il ne faut pas oublier que tous ses enfants et ses femmes devront être nourri en attendant de servir sur un champ de bataille, il faut donc remplir les greniers et développer le commerce afin que nous ne dépendions pas uniquement des razzias ou du Conflans. Je sais que cela est contraire à l’Antique Voie, mais je ne vois pas comment faire autrement dans le contexte actuel.  »

La brune aux yeux azur réfléchit un moment tout en mangeant et en essayant de ne pas réagir aux caresse du Harloi malgré l’envie qu’elle avait de le caresser aussi.

__ Les plus belles femmes pourraient être distribuées aux hommes de la Flotte de Fer comme femmes Sel, elles obtiendraient un vrai statut plus intéressant que leur sort en cas d'échec et cela ne saurait que les pousser à devenir dociles et loyales. Pour celles qui resteront de simples poules pondeuses autant leur enlever leur enfant tout de suite afin qu’elles puissent enfanter à nouveau le plus vite possible et faire intégrer aux bébés une famille Fer-Née contre rétribution bien sûr si tant est qu’ils ne le prennent pas mal.  »

Ce n’était pas franchement ce qu’elle avait en tête pour le Conflans, ni pour les Fer-Nés, du temps où elle était Princesse et épouse de l’héritier. Mais elle ne pouvait plus espérer de construire une paix prospère entre les Royaumes de Westeros par la simple voie diplomatique en étant plus qu’une Dame des Îles de Fer, quand bien même restait-elle l’ambassadrice de Yoren. De plus, tant que le monstre Impérial serait aussi menaçant et que leurs trop rares allié rechignent à les aider, il fallait bien qu’ils trouvent des solutions pour gagner en ne comptant que sur eux même. Elle ne pouvait pas nier l'ingéniosité retorse de son époux et que la stratégie, aussi horrible soit-elle était bien la seule qui ne présente pas l'inconvénient de dépendre des autres Royaumes plus promptes à briser leurs engagements ou à pactiser avec l’ennemi qu’à faire front commun contre le Dragon. Elle se souvint des mots échangés avec Gareth et son cœur se serra, parce qu’elle pressentait que les Fer-Nés, après tant de trahisons et de revirements, ne feraient plus aucune concession sur leur mode de vie pour obtenir des alliances qui s’étaient avérées bien fragiles et inutiles dans la dernière campagne. Et en même temps, si elle avait payé le prix fort de cette même politique du temps d’Harren, elle devait avouer qu’ils n’avaient que peu d’autres choix pour ne pas sombrer dans l’oubli. Entre deux bouchées, elle réfléchit donc à la façon d'énoncer à son époux les conséquences politiques d’un tel projet tout en comprenant parfaitement la nécessité d'agir pour former une armée digne des combats à venir. Quand à cesser de se faire passer pour un peuple civilisé aux yeux des autres Royaumes, c’était à double tranchant, mais vu que, quoi qu’ils fassent on leur reprochait d’être des sauvages, est-ce que cette image pourrait changer ? Elle en doutait, alors peut-être que jouer sur la peur était la meilleure option qu’il leur restait. Ils s’étaient suffisamment divisés, ils avaient été suffisamment trahi. A présent, ils devaient préparer leur vengeance… Mais à quel prix ?

__ J’espère que les Riverains restés royaux comprendront qu’il s’agit de disposition nécessaire et légitime contre eux qui nous ont trahi et qui les ont abandonnés dans le même temps. Néanmoins, cela risque de ne pas plaire au Grand Septon et à nos alliés du Bief, et encore moins à tous nos ennemis. Je sais que tu te fiche pas mal de ce qu’ils pensent, mais nous risquons d’en payer les conséquences à long terme sur le plan diplomatique. C’est ce qui a fait naître l’Empire, les guerres sanglantes d’Harren qui s’est mis à dos l’ensemble du continent.  »

Myria but une gorgée de vin, les serviteurs sachant à présent qu’elle ne buvait que cela et de l’hydromel, puis elle piqua un morceau de viande qu’elle venait de couper et commença à le mâcher.  

Myria écouta attentivement Maron lui expliquer l’Antique Voie. Elle était un peu au courant des choses et ce qu’il dit ne la surprit pas le moins du monde, elle était parfaitement au fait de la façon dont les Fer-Nés obtenaient ce qu’ils voulaient. Elle en avait suffisamment discuté avec Harren, Joren et Eren, tant sur les pratiques actuelles que sur les velléités de les changer, pour se faire une bonne idée de la chose, même si, probablement certains détails lui échappent encore. Elle avait ouï dire que, lorsqu’une expédition ou un raid était organisé par plusieurs capitaines, il y avait une certaine répartition du butin, elle avait donc imaginé qu’il en était de même pour les femmes et autres serfs puisqu’il s’agissait d’une part du butin non négligeable en l’occurrence. Évidemment, lorsqu’il s’agissait de la Flotte de Fer agissant au nom du Roi, il semblait logique que le Lord commandant ait la plus grosse part du gâteau, mais aussi que chaque Maison, chaque capitaine et pour finir chaque homme puisse bénéficier du raid. Le Fer-Prix n’était payé entre Fer-Nés que s’il y avait désaccord, d’où l‘importance de faire un partage équitable. D’ailleurs, elle se demandait comment s’organisaient les impôts, si tant est qu’il y en ait, elle avait oublié de poser la question à Lord Merlyn. Elle haussa donc un sourcil étonné et répondit.

__ Le Fer-Prix, il me semble, a été payé dans le Conflans par la Flotte de Fer, les femmes prises, comme le butins sont partagés entre tous les capitaines et chaque capitaine, Roi sur son navire, partage ensuite sa part entre ses hommes et lui. N’est-ce pas ainsi ? Mais peut-être que les plus belles femmes ont déjà été partagées, ou peut-être que ce n’est pas comme ça que cela se passe, je veux bien que tu m’expliques Maron. »

La future Lady Harloi se mit à rire quand Annalys expliqua que celles qui voudraient rentrer chez elles pourraient rentrer à la nage. Évidemment, les chances de survie pour la traversée de la Baie du Fer-Né à la nage étaient nulles, elle voyait donc très bien où la Dame de Dix Tour voulait en venir. D’ailleurs l’hilarité générale lui confirma que pour ses femmes, il n’y aurait pas de liberté possible. De toute façon, si elles révélaient ce qu’il se passait sur les Îles de Fer, il y avait de fortes chance que les Fer-Nés s’attirent définitivement les foudres des continentaux. C’était donc hors de question qu’elle puisse parler. Rodrik s’en fichait peut-être, mais la veuve de Joren beaucoup moins. Certes, il était indispensable de pallier aux lourdes pertes dues à la guerre et en règle générale, d’augmenter les effectifs de l’armée, et elle ne pouvait nier qu’ils passaient de toute façon, pour des sauvages et n’avaient pas d’alliés digne de ce nom jusqu’ici, donc cela ne changerait pas grand chose. Néanmoins, si cela venait à être divulgué, ils pourraient perdre le peu de soutien qu’ils avaient de la part du Bief et de l’Ouest, mais aussi être la cible d’une nouvelle coalition, encore plus large que l’Empire. C’était très ennuyeux et il faudrait tout faire pour garder le secret autour de cette entreprise.

__ Les faibles, Rodrik, seront morts bien avant d’atteindre l’âge de leur première bataille. Ainsi nous ne les nourrirons pas pour rien... »

Elle se doutait bien que les enfants qui ne tiendraient pas dans les mines, dans les champs, chez les artisans ou autre ne seraient pas ménagés pour autant. Peu importait, cela faisait une bouche bien inutile à nourrir, il seraient donc exploités jusqu’à ce que mort s’en suive et serviraient d’exemple à leurs petits camarades. Voilà ce qui arrive aux faibles, ils meurent, ce qui est mort ne saurait mourir, etc etc. En plus, leurs corps pourraient fort bien être donnés aux cochons, il ne fallait rien gâcher.

__ Bien. Je comptais me rendre dans l’Ouest après le mariage. »

Répondit la brune aux yeux céruléens à l’ordre de son promis. S’occuper de l’aspect commercial sur les Îles de Fer, ça n’allait pas être simple. La description de l’Antique Voie donnée par Maron était aux antipodes de tout développement de ce type. Évidemment les Fer-Nés commerçaient déjà, certains en tout cas, et heureusement, mais les plus fanatiques n’allaient pas aimer qu’elle vende le fer des Mines pour nourrir tout ce beau monde, entre autre chose. Peut-être, puisqu’ils étaient des serfs, pouvaient-il développer l'élevage. Des poules et des cochons n’avaient pas grand besoin de prairie et d’espace fournissaient un apport de nourriture intéressant. Les femmes, comme les enfants, pourraient s’occuper des animaux. Elle jeta un coup d’œil à Maron, mais expliqua néanmoins son idée au Sire de Dix Tours, ne sachant pas trop comment elle serait accueillie.

Le frère de Rodrik expliqua comment se passait la distribution des butins au sein de la Flotte de Fer à la future épouse de son aîné. Ce n’était pas tout à fait comme elle l’avait imaginé, mais elle était née sur le continent et avait certaines encore choses à apprendre. Elle saurait s’adapter, de toute façon, elle n’avait pas le choix. D’ailleurs, sa promptitude à donner des idées pour le plan destiné à augmenter les troupes qui n’avait à peu près rien d’humainement acceptable était la preuve qu’elle était prête à tout pour survivre ici et se faire un place. Ses beaux principes, ses idéaux, tout cela n’avait plus lieu d’être depuis qu’elle avait été trahie par son propre fils à qui, pourtant, elle pensait avoir transmis une certaine idée du pouvoir et de ses devoirs. A présent, elle ne pouvait plus rien faire contre le vent, elle n’en avait plus le pouvoir ni la notoriété, elle devait suivre, quitte à suivre les plus forts, les plus brutaux, et elle devait elle même se montrer plus cruelle et sans pitié, pour ne plus être trahie à nouveau, pour que le Royaume et elle survivent. Les mœurs Fer-Nées étaient ce qu’elles étaient et elle ne pouvait pas changer les choses et faire évoluer les mentalités d’un claquement de doigt, surtout en ces temps troublés. Il fallait du temps et du tact, et surtout, il fallait d’abord gagner leur respect, non en manipulant, en mentant ou en complotant, mais en se montrant digne d’eux et de la Maison Harloi.

__ D’accord je comprends mieux. Merci Maron. »

Répondit Myria en hochant la tête respectueusement avec un sourire. Elle écouta ensuite le Sire de Dix Tour parfaire le plan au gré des interventions de chacun, dont la sienne. Elle eut très envie de l'embrasser quand il proposa de donner des informations légèrement différentes à chaque vassal résidant sur l’ile d’Harloi afin de déterminer rapidement l’origine de la fuite. Mais elle n’en fit rien et se contenta de lui adresser un regard de braise. Mais lorsqu’elle lui glissa à l’oreille de leur faire élever des poules et des porcs, lui ne se gêna pas pour caresser sa cuisse puis l’embrasser avec passion après avoir approuvé cette idée. Elle n’était pas habituée à de telles démonstrations en public et hésita un instant, surprise et décontenancée par cet élan. Cependant, la bouche de son promis eut rapidement raison de ses réticences à s’afficher ainsi devant toute la famille et elle serra ses doigts sur le bras du Harloi en fermant les yeux. Son future époux expliqua aux autres ce qu’elle venait de suggérer, mais elle était trop occupée à se mordre la lèvre et à se cacher dans sa coupe de vin pour dissimuler ses joues écarlates pour écouter leurs réponses. Cependant, elle saisit que tous accueillent cela plutôt positivement. Elle passa le reste du repas à rire avec les autres et à discuter, essayant de rester concentrée, mais à chaque fois que Rodrik la regardait ou la touchait, elle plongeait dans son regard avec avidité et s’y noyait encore et encore, laissant son esprit divaguer sereinement sous les flots déchaînés de la guerre et de la politique, de la stratégie et des batailles à venir. Elle n’avait qu’une hâte, sentir sa peau contre la sienne, ses lèvres et tout ce qui lui avait tant manqué durant son absence. Aussi ne se fit-elle pas prier pour le suivre jusque dans leurs appartements quand ce dernier décida de quitter la grande salle.

A peine le pas de la porte franchi, ils eurent tous deux la même idée et s’embrassèrent sauvagement, leurs lèvres s’unissant soudain sans la moindre hésitation. La brune aux yeux céruléens entreprit de déshabiller son future époux avec une fébrilité et une hâte que seul un homme de retour de campagne pouvait connaître.

__ Et à moi donc. J’ai rêvé un millier de fois de ce moment, j’ai rêvé que j’étais avec toi sur la mer, j’ai rêvé de ta cabine, j’ai essayé de t’y rejoindre dans mes songes afin de te rapprocher de moi. J’ai humé chacun de tes vêtements pour sentir ton odeur. »

Des larmes s’échappèrent de ses yeux. Elle avait toujours eut peur pour les hommes qu’elle aimait quand ils partaient à la guerre, pourtant ils étaient toujours revenus, mais elle n’arrivait pas à s'empêcher de s'inquiéter pour eux. Elle avait fait tous ses rêves, c’était pure vérité, mais ce qu’elle taisait, c’est qu'elle avait aussi fait de nombreux cauchemars qui la réveillaient en sursaut. Et qu’à chaque missive elle sentait son cœur manquer quelques battements. Et malgré ce qui à la base l’unissait à Rodrik, un soupçon de politique et l’absence totale d’autre choix pour sauver ses miches, elle ne voulait pas le perdre. C’était encore plus clair à présent qu’il était rentré. Avant elle avait pu se mentir, se dire que c’était parce qu’ils n'étaient pas encore marié et qu’une telle perte achèverait pour de bon tout espoir de s’en sortir, surtout avec un polichinelle dans le tiroir. Elle pouvait se dire que c’était pour le Royaume et faire semblant qu’il n’y avait rien de personnel, qu’elle n’avait aucun sentiment pour lui et qu’elle n'avait pas vraiment peur. Mais maintenant qu’elle était dans ses bras, elle savait pourquoi elle avait eut si peur, pourquoi il lui avait tant manqué. Malgré les larmes, elle lui rendait ses baisers, et quand il la souleva, elle mit ses bras autour de son cou et une fois allongée, elle releva sa robe et remonta ses jambes contre lui. Surprise qu’il ne lui arrache pas sa robe et se montre aussi doux, elle savoura ce moment, l’observant elle aussi caressant son visage et plongeant son regard céruléen dans celui de son amant. Il repartirait, elle le savait, elle aurait peur à nouveau, mais tel était le destin de l’épouse d’un chef de guerre, et elle tiendrait.

Le désir les consumaient tous les deux, cela se voyait dans leurs yeux, sur les lèvres de la Princesse qu’elle mordait, dans sa respiration irrégulière, elle avait attendu ce moment des semaines durant tandis que le Commandant de la Flotte de Fer pillait les côtes du Conflans et violait ce qu’il voulait. Pourtant, surprenant encore une fois sa promise, Rodrik lui demanda si elle voulait parler de ce qui la contrariait avant leur partie de jambe en l’air de retrouvaille. Mais elle n’avait aucun envie de discuter pour le moment.

__ La politique attendra mon amour. »

Jamais la Hoare, née Frey, habituée à la douceur Riveraine et à la cour Royale d’Harrenhall n’aurait pensé pouvoir tomber amoureuse de cet homme qu’elle prenait pour un rustre mal dégrossi qu’elle comptait seulement manipuler pour s'offrir un nouveau statut. Mais en dehors du fait que c’était un amant remarquable, il la surprenait par sa clairvoyance et une dose très Fer-Née de finesse d’esprit. Elle se détestait de s’être une fois laissée prendre au jeu, elle n’était vraiment pas douée pour la séduction sans implication émotionnelle, elle ne savait pas jouer ce jeu là. Elle savait jouer un tas de jeu, mais pas sans risquer d’y laisser des plumes, voir de se brûler les ailes. Elle l’attrapa par le col et entreprit de lui dévorer la bouche tout en le serrant contre elle avec ses jambes.