Cela faisait plusieurs semaines que les escarmouches se tassaient à la frontière.

Ils sont revenus, vêtus de capes, de mailles et de heaumes. Ils se sont abattus comme la foudre sur les villages. La cavalerie Bieffoise ne pouvait être partout, et ces cavaliers émérites choisissaient bien leurs cibles parmi les moins bien défendus.

Les premiers en ont réchappé sans trop de pertes. Le bétail fut abattu ou emmené. Les maigres richesses restantes des raids précédents, emportés. Des témoins racontèrent à Lord Kevan Gardener, en charge de l'armée de Corcolline, que les officiers des pillards hurlaient après leurs soldats dès que ceux-ci voulaient s'amuser un peu. Pas de viol, pas de meurtre. Etrange. Ces hommes, vêtus d'armures de contrées plus septentrionales, qui étaient-ils ? La rumeur se répandit bien vite. Fer-Nés.

Kevan Gardener n'y souscrivit pas une seule seconde. La ruse l'eut fait rire, si les nouveaux rapports qui s'accumulaient ne faisaient pas état de la reprise des viols, des incendies et des meurtres. A Cerfayt, trois hommes avaient été attachés ensemble et percés de flèches pour voir jusqu'à combien de temps ils tiendraient debout. A Fontayn, douze fillettes furent violées, deux d'entre elles à mort, par ces funestes cavaliers. Leurs pères et frères avaient déjà été abattus. Plusieurs d'entre elles prises sur le corps même de feu leurs protecteurs. Les exactions se répétèrent, mais restèrent cantonnées à l'échelle de petits villages.

Kevan Gardener n'était pas un abruti. Les fer-nés se battent très mal à cheval, et ils sont plutôt pathétiques à l'arc. En sus, les quelques corps retrouvés n'étaient pas particulièrement pâles comme les pirates septentrionaux. Ruse dornienne pour donner le change. Plus encore, les boutres fer-nés étaient à des milliers de lieux. Et l'autre côté de la frontière, toujours hermétiquement fermé par les soldats de Dorne. Impossible que ces pires ennemis des Martell se soient infiltrés comme ça. Et ils n'étaient pas non plus venus du sud ou de l'Orage, deux voies surveillées par les bieffois.

Le Connétable du Bief prit alors la seule décision logique ; il renforça ses patrouilles et se prépara à la guerre, alors que Lord Tarly le poussait à envahir la Principauté sans attendre. L'armée s'apprêta, se renforça, et un corbeau fut envoyé au Roi.

Maintenant, plus grand chose n'empêcherait la guerre. Les bieffois avaient vu trop de femmes ravagées, de corps pourrissant au soleil, et avaient vu trop de pauvres gens tout perdre du jour au lendemain.