L’agitation régnait au sein du palais. Et cette agitation n’avait rien à voir avec la flotte ennemie qui se dirigeait vers la capitale et qui menaçait une nouvelle fois ses habitants. Ou peut-être que si. Peut-être que cette angoisse, cette épreuve supplémentaire avait été suffisante pour déclencher le reste. Car si les soldats continuer de s’organiser pour suivre les ordres donnés, si les capitaines continuaient de revoir les possibilités et donnaient leurs ordres, ce sont les serviteurs et les suivantes que l’on voyait s’agiter dans cette partie du palais. C’était la sage-femme qui s’organisait et commandait ici.
Le travail avait commencé. La Princesse allait donner la vie. C’était certes un peu trop tôt, mais la grossesse s’était bien déroulée jusqu’ici, cela pouvait encore se dérouler dans de bonnes conditions.
L’accoucheuse ne s’alarmait pas, préparant soigneusement ce dont ils pourraient avoir besoin, tout en parlant calmement à la future mère qui faisait les cent pas dans la chambre. Elle savait bien que, princesse ou non, un enfantement était toujours autant effrayant et douloureux que rempli de joies et de promesses. Surtout le premier, qui s’avérait souvent plus long et épuisant pour la mère. Elle encouragea la princesse, la rassurant tout en faisant allumer un feu malgré la chaleur ambiante, pour préparer le bain de l’enfant. Les langes pour l’enfant étaient prêtes, les femmes discutaient et surveillaient l’avancée, rapportant de temps à autres les nouvelles aux hommes patientant dehors. La sage-femme s’occupait de la princesse, alternant les massages et les encouragements, les conseils et les soins.
Et ce fut long et épuisant. La princesse finit par donner la vie, après de longues heures de travail et d’épuisement, et l’accoucheuse s’empara de l’enfant, petit et chétif, pour le faire crier et s’assurer qu’il était en vie. Il poussa un cri et elle sourit avant de se charger de le baigner et de le préparer, pendant que d’autres se chargeaient de changer la mère et de la faire allonger pour qu’elle puisse enfin reprendre des forces.
L’annonce de la naissance de l’enfant, du nouveau Martell, Prince ou non, avait déjà parcouru le palais que la princesse n’avait pas encore eu son enfant dans les bras. Les murmures sur son espérances de vie allaient bon train aussi alors que chacun répétait qu’il n’était pas bien gros, trop précoce qu’il était. Mais la princesse Deria Martell put enfin le tenir contre elle, et cette petite main qui serrait son doigt était bien assez vigoureuse à ses yeux.
Mais, visiblement, pas suffisamment, pas assez pour que la Mère veille sur lui, pas assez pour que l’Etranger se tienne loin de lui. L’enfant ne survécu pas plus de quelques heures contre le sein de sa mère. Sa petite main ne tiendrait plus celle de la Princesse. Ce fils tant attendu et déjà tant aimé n’était plus, laissant la princesse gérer son deuil et sa perte.
Et les murmures reprirent aussi vite, transmettant la nouvelle encore plus rapidement que celle la précédent de quelques heures. Le nouveau Martell n’était plus. Perdre un enfant était une terrible et douloureuse épreuve. Comment la princesse allait-elle vivre et surmonter cela ? Serait-elle assez forte pour ne pas se laisser abattre et pour penser à l’avenir des siens ? Les paris étaient lancés alors que chacun s’apprêtait à soutenir si ce n’est la princesse et sa perte, tout du moins sa principauté et ses terres.
Un petit être était mort à l'intérieur des murs, un Prince. En mer, au large, des milliers de marins et de soldats mouraient pour l'indépendance de la Principauté, ou pour l'avilir. La nui tombée, Cleitos Caradreon vint visiter la Princesse Deria en ses appartements, ne se laissant arrêter ni par la garde ni par les serviteurs. Il s'assit sur le lit de la Princesse éreintée, brisée. Il lui dit qu'elle avait tenu parole. Lui aussi. Dorne souffrait, mais Dorne vivait. Il était temps maintenant, de se forger un nouveau destin.