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 Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]

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MessageSujet: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptySam 21 Aoû - 10:50

Notre bateau glisse sur le fleuve calme.
Au-delà du verger qui borde la rive,
Je regarde les montagnes bleues et les nuages blancs.

Mon amie sommeille, la main dans l'eau.
Un papillon s'est glissé sur son épaule,
A battu des ailes et puis s'est envolé

Longuement je l'ai suivi des yeux.
Il se dirigeait vers les montagnes de Tchang-nân

Était-ce un papillon, ou le rêve que venait de faire mon amie ?

                              Chang Wou Kien

Depuis plusieurs jours déjà notre navire avait fait halte au port où il se laissait tranquillement bercer par la houle venant mourir contre la terre ferme du continent. Le trajet depuis les météores avait été clément et doux, notre bateau chaque nuit portée par une puissante brise montant l’orée de la nuit, la mer se faisant clémente et confortable. Pour mon pauvre corps qui n’avait jamais supporté les voyages en bateau, cette indulgence de la mer et du ciel avait été une véritable bénédiction. Le souvenir du déchainement d’une tempête sur la maigre embarcation qui m’avait emmenée à Westeros entait encore souvent mes cauchemars et l’idée de connaitre à nouveau un voyage d’une telle violence me terrifiait.

Grand heureusement, c’est sans problème que nous avions atteint le port de Lancehélion. Là, à l’ombre des imposants navires marchands, notre frégaté de transport semblait bien minuscule, passant inaperçue. Tant mieux, la discrétion était une des membres les plus importantes de notre équipage.

La discrétion se faisait aussi ma maitresse. Si les sorties au sein de la cité m’étaient autorisées, un visage comme le mien était ici trop rare pour que je puisse l’exposer sans conséquence. Mon affiliation, connue par certains, auprès de ma dame rendait aussi chacun de mes mouvements comme une indication sur ses propres décisions. J’avais, de toute manière, prit assez tôt l’habitude de cacher une partie de mes traits lorsque je me baladais dans les rues hors du palais. Les regards, bien que souvent emprunts de simple curiosité pour l’étrange bête que je représentais pour ces gens, m’étaient bien vite lourd. Les enfants, surtout, pouvaient se montrer insistant. Leur langue plus libre n’hésitait jamais à exprimer clairement la déconcertante qu’ils pouvaient ressentir en me voyant. Cependant les enfants étaient aussi ceux que j’avais découvert comme les plus compréhensif à mon égard, acceptant toujours d’un air satisfait les réponses que je donnais à leurs questions. « Je viens de Yin-Ti » j’avais un jour répondu à une vendeuse de fruit à la sauvette me demandant pourquoi je ne ressemblais pas à autres gens, elle avait hoché la tête et répété « Ah oui ! Yin-Ti" avec un air si assuré que j’aurais pu jurer que la gamine savait où se situait le majestueux empire où j’avais vu le jour. Certaines personnes s’étaient cependant déjà montrées agressives à mon égard, sans que la cause de cette animosité ne m’apparaisse jamais clairement. J’avais appris à vivre avec. Des crachats à mes pieds et des insultes crachées dans mon dos que j’avais accepté sans grande difficulté, me semblant de maigres attaques face à d’autres violences que j’avais subies au cours de ma vie.

« Ou se situe ma dame ? »

« Dans sa cabine ! »

D’un hochement de tête je remerciais le matelot. Profitant des températures plus clémentes de la fin de journée, je m’étais échappé un moment sur la terre ferme, flânant dans les rues, oubliant le nauséeux balancement de la houle. A présent de retour sur le pont du bâteau, j’abaissais le tissu dont j’avais entouré mon visage, une étoffe orange ornées de fleurs de divers couleurs coupées dans un beau tissu que j’avais acheté à Lys. Lys. L’idée que ce lieu et cette vie ne soit plus qu’un souvenir me semblait encore bien étrange, une vie qui avait trop brutalement changé, une vie agréable comme offerte par les cieux que je peinais encore à accepter.

« Dame Arianne ? »

Doucement, je poussais la porte de la cabine où se tenait ma dame. Pas ma maitresse, pas ma propriétaire. Non. Une femme face à qui je pouvais me tenir libre et fière, à côté de qui je pouvais m’asseoir sans craindre ni coup ni abus.

« J’ai trouvé sur le marché une chose qui m’a semblé pouvoir vous intéresser, vous qui me parliez l’autre soir de votre amitié pour les arts. »

A ces mots je levais ma main droite pour présenter la sitar que je tenais. L’instrument n’était pas des plus nobles ni des plus décorés mais il m’avait immédiatement semblé de bonne qualité. J’en avais manié des semblables, bien que plus décorés, lors de ma vie à Lys mais contrairement à d’autres instruments je n’avais jamais eu l’occasion d’en posséder un et n’en avais donc pas amené lors de mon périple vers Westeros.

« L’instrument est un peu différent de ceux que j’ai été habitué à jouer mais s’il vous plait je pourrais vous montrer quelques chants de Yin. »

Je fis un pas vers ma dame, prête à m’asseoir au premier geste de sa part. J’avais envie de jouer pour elle, pas en tant qu’esclave mais en tant que compagne de voyage. Jouer pour mon plaisir comme pour le siens.

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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyMer 1 Sep - 0:10

Que faire ? Je pourrais tenter de sauver la Principauté et la Maison Martell, disparaitre et me concentrer à ma compagnie, ou me convertir en tant qu’artiste de rue et vivre de mon art simplement. Or, j’avais à payer un prix très lourd pour chaque voie : ma personne pour la première option, ma loyauté pour la seconde option et, enfin, ma famille pour la dernière option. Existait-il une option où je pourrais rester fidèle à moi-même, sans avoir à trahir, à abandonner ou à me sacrifier ?

Où aller ? Les Iles de Fer n’étaient pas une option envisageable : je préférais crever que de retourner parmi ces pillards, ces violeurs et ces barbares ! Certes, leurs talents en mer étaient indéniables et il y avait surement de bonnes personnes parmi ces gens, mais il me serait impossible de les apprécier pleinement après tant de déceptions et d’expériences désastreuses avec leurs guerriers. L’Empire serait tout bonnement un acte de trahison pur, qu’importe si je suis motivée par un désir égoïste ou de vengeance. Dès l’instant où j’y mettrais les pieds, j’offre un message fort malgré moi : je pourrais tout simplement convaincre les dernières maisons à la loyauté défaillante ou hésitante à prendre le parti de la Maison Allyrion. Et, Essos … C’était la promesse de l’abandon d’un passé, d’un nom, et d’une famille. La solitude, dans sa forme la plus pure et la plus brute !

Je repensais aux paroles d’Anders. « L’exil », avait-il dit.
Je repensais aux paroles de Deria. « Toi, ici » s’était-elle exprimée avec surprise.
Il ne manquait plus que Roward, un frère qui est quelque part, à mener des combats. Que dirait-il, lui ?

Alors que toute la Principauté gronde et se déchire, je paraisse dans cette cabine de bateau, au gré des mouvements des vagues. Pour autant, malgré cette oisiveté étrange et scandaleuse dont je faisais preuve, je ne me sentais guère coupable. Certes, j’avais fait partie du conseil princier mais je n’avais jamais pris la moindre décision : dès lors, tout incombait à Deria et à nul autre. Lorsque l’on accepte cette réalité, subitement les épaules étaient plus légères, la respiration plus aisée et les nuits moins agitées.

- Dame Arianne ?

Nonchalamment, je tourne ma tête vers cette petite voix familière et si étrangère à la fois. Lin, de Yi-Ti de l’Empire Yin – tant de « i » et de « n » qu’il m’a fallu un temps considérable pour ne pas me perdre ou me confondre bêtement – était là, avec un instrument de musique. Patiemment, elle attendait un geste de ma part pour pouvoir s’asseoir et commencer à jouer ou, à l’inverse et si tel était mon désir, quitter la pièce pour que je me repose. A cet instant, je la préférais à mes côtés : sa présence était rassurante, sa voix brisait ce silence bien pesant et, surtout, ses chants dans une langue inconnue m’apaisaient.

- Fais-moi donc écouter ces chants. Penses-tu pouvoir les traduire, après ?

Je savais apprécier une chanson sans forcément en comprendre le récit. Pourtant, il n'était jamais mauvais de savoir ce que l'on écoutait ou que l'on aimait. L'ignorance n'avait jamais été de mon goût.

- Puis, tu m’apprendras. Qu’en penses-tu ? dis-je, la voix trainante, la voix mourante. J’étais faite pour vivre dans le faste ou au milieu d’un grand monde, et non dans l’ombre et dans une cabine où mes visites étaient très rares. Dans ta langue, comment appelles-tu cet instrument ?  

J’avais toujours été un esprit curieux. Lorsque j’avais découvert que cet Empire inconnu parlait une langue différente de la langue commune de Westeros ou de l’ancien Valyria d’Essos, l’étonnement avait vite laissé place à l’impatience de l’entendre, voire d’en apprendre quelques rudiments. Qu’importe que l’écriture soit différente – il n’y avait pas de « lettres » à proprement parlé, mais des « signes » - , je n’étais pas découragée pour autant. J’allais apprendre dans mon temps libre, et les Dieux savaient qu’il était nombreux par instant. C’était les hommes qui avaient une vie trop chargée, et trop courte aussi.



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Arianne Martell
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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyMar 14 Sep - 15:07

Qu’elles auraient-été les pensées de notre navire si le caprice d’un dieu y avait donné le don de l’esprit, parfois cette étrange question me traversait l’esprit. Lui bâti pour traverser les océans déchainés, bravant à chaque instant la fureur des esprits de la mer au tempérament colérique connu de tous, lui dont le seul but était de transporter son équipage jusqu’aux terres les plus lointaines et étrangères… Pauvre navire amarré à ce port, bête de liberté tenue par une chaine à son cou et forcé à se contenter du simple balancement des vagues allant mourir contre la terre, s’il était doté du don de l’esprit oh qu’il serait malheureux. Mais bientôt il voguerait à nouveau vers des terres lointaines, je n’en doutais nullement.

Lorsque l’esprit de ma maitresse se ferait sur le chemin à prendre pour sa vie alors notre voyage reprendrait. Non, pas ma maitresse j’étais à présent une femme libre, sans maitre. Mon amie ? Le mot me semblait pour l’instant trop familier bien qu’aussi doux à mes lèvres que le miel. Malgré la bonté dont elle avait toujours fait preuve envers ma personne, mon cœur, marqué par une vie de mauvais traitement et de méfiance, ne pouvait encore accepter quiconque assez proche pour que je puisse la nommer amie. Arianne Martell. Pour l’instant ma simple compagne de voyage et employeur.

Alors au signe de ma compagne, je pris place au sein de la cabine à ses côtés, une jambe relevée contre mon torse et l’autre repliée au sol, posant en même temps l’instrument contre l’écueil que formaient mes jambes. Je pinçais une première fois les cordes de l’instrument, m’habituant au son en sortant qui me semblait à la fois si proche et si lointain des sitars que j’avais connues jusqu’à présent.

« C’est avec plaisir que je vous traduirais et vous apprendrais chacune de mes vieilles chansons ma dame. » J’hochais la tête pour accompagner ses paroles, heureuse toujours de pouvoir rendre service à cette femme auprès de qui je me sentais porteuse d’une immense dette. « Xītǎ qín »

La voix de ma compagne était empreinte d’une profonde tristesse et il était impossible à quiconque croisant son chemin d’ignorer le terrible impact que cet enfermement avait sur son esprit. Moi qui pourtant pouvait à ma guise, bien que cachée, me déplacer en ville en était déjà bien ennuyé alors il m’était impossible d’imaginer ce que pouvait être sa situation, incapable de quitter ce navire.

Je pinçais une corde, hésitant quelle chanson entamer.

Arianne Martell était sans aucun doute une femme à l’esprit vif et curieux, qui semblait chaque jour apprécier les nouvelles connaissances sur le lointain royaume de Yin-Ti que lui apportait ma présence à ses côtés. Un esprit aussi bien penché vers les arts féminins que vers la tenue d’un commerce si masculin. Sa curiosité se faisait parfois impatiente lorsqu’elle ne parvenait à comprendre certaines lettres venues d’Essos et me demandait de les traduire pour elle mais j’acceptais sans problème ces moments de précipitation car jamais ces colères ne m’avaient apparu comme une menace envers ma personne. Jamais Arianne Martell n’avait levé une main ou ne serait-ce que sa voix envers ma personne même lorsque je commettais des erreurs. Aussi, il m’était difficile de voir cette femme si bonne avec moi dans une telle humeur, cette dame si empreinte de liberté et de connaissance obligée de rester à port, tournant en rond dans cette minuscule cabine. Elle aussi me semblait une bête faite pour la liberté, une chaine au cou. Simplement la clef de cette chaine se trouvait dans sa propre main, la clef de son destin quoi que ce dernier soit. Un de ces jours, il lui faudrait faire un choix de se libérer et quitter ce port, qu’importe qu’amène le lendemain de cette décision. J’attendais avec impatience ce jour, me sentant prête à suivre ma compagne durant son prochain voyage qu’il soit pour retourner en sa patrie où vers les terres lointaines d’Essos.

Une chanson… Il y avait les chansons d’amour qu’on m’avait appris dans ma jeunesse mais toutes sonnaient faux quand prononcé par mon cœur abimé par les tourments de la vie. Alors une autre chanson me vient en tête, une chanson qui rythmaient bien des soirées après des journées de dur apprentissage des arts, lorsque nous nous massions dans une chambre, si nombreuse mais si seule, chantant à la solitude d’une jeunesse arrachée. Alors ma voix s'élève, chantant dans une langue d'un royaume lointain qui ne semble aujourd'hui plus subsister que dans mes souvenirs.

Une coupe de vin, sous les arbres fleuris ;
Je bois seul, car aucun ami n'est proche.
Levant ma tasse, je fais signe à la lune brillante,
Car lui, avec mon ombre, fera trois femmes.

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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyMer 22 Sep - 21:04

Il fallait être sourd, aveugle et stupide pour ne pas entendre, voir ou ressentir la profonde reconnaissance de la demoiselle à mon égard. Pourtant, je feignais de cumuler ces trois défauts. J’étais bien indigne d’être gratifiée par de si nobles et si sincères sentiments. Ils devaient être destinés à une personne qui aurait agi sans un intérêt caché, et non à une personne égoïste qui préférait assurer sa propre survie au détriment des siens. En effet, au lieu de confier ce comptoir à la Maison Martell – et financer ainsi quelques actions à son avantage –, je l’en avais privé et je l’avais raflé à mon profit. J’essayais de justifier cet acte, notamment en me disant que sans cette compagnie commerciale, j’aurais été condamnée à jouer la mendiante ou la putain, soit auprès des Fer-nés, soit dans quelques ruelles étrangères. Malheureusement mes tentatives étaient vaines, et ce goût amer mêlant dégoût et défaite ne me quittait pas, ternissant toute la joie et la fierté que je pourrais retirer d’une compagnie qui se développait.

- Xītǎ qín, répétais-je à quelques reprises, me taisant lorsque j’entends les premières notes de son instrument.

Aussitôt, sa voix s’élève et des mots et des tonalités étrangers résonnent dans la pièce. Je me laisse emporter par l’inconnu, me perdant dans quelques doux et joyeux souvenirs. Je repensais à ce père si silencieux qui n’était jamais las de m’écouter, à cette grand-mère à la fois si sévère et si irrévérencieuse, à cette mère pleine de grâce et de talent, à ces frères turbulents et protecteurs, à cette sœur vive et volontaire, à ces amis qui avaient tantôt pleuré ou ri sur mes épaules, à ces amants qui avaient su m’arracher un rire ou un soupire, à ces guerriers qui m’avaient compté tant d’histoires drôles, à ces marchands qui m’avaient gâté à leur table, à ces enfants de rue traînant dans les parages pour m’arracher quelques pièces ou part de gâteau …  Et, enfin, l’image d’une bande ensanglantée qui se noie au large de Lancehélion s’impose en moi, m’arrachant presque une petite larme.

Tant de souvenirs qui dessinaient les contours d’une Maison. La mienne. J’y brillais, autant que d’autre. Et j’étais attendue, et aimée inconditionnellement. Ce n’était pas les Jardins Aquatiques de Lancehélion où j’avais grandi, ou le Bordel aux Joyaux des Météores où j’étais née – je n’avais été qu’une invitée, bien moins importante que Dorne ou les clients du Bordel. Cette Maison n’était sur aucune carte, n’avait ni Royaume, ni Sang, ni Titre. C’était avant tout une idée, le fruit de l’imagination d’une bâtarde qui rêvait d’Egalité et de Justice. J’étais prête à dévier à ces vieux et stupides rêves que je nourrissais secrètement, jusqu’à que la voix de Lin se tut, et que le silence vienne à s’imposer à nouveau.

- Que raconte donc cette chanson ? demandais-je, lascivement. Est-il question de Maison, des rêves d’une jeune fille ou, alors, d’un amour déçu ?

Cette dernière question était posée sur un ton amer. J’avais été bien trop souvent déçue et jouée par les hommes. Il y a bien longtemps que je n’avais plus chanté des chansons d’amour, tant j’en avais plus goût ou espoir. Maîtresse d’un homme, ou Solitaire avec la Lune, voilà les seules possibilités qui se profilaient à l’horizon pour mon avenir. Je soupirais. Les prédictions de ma Belle-mère se réalisait. Elle aimait dire, entre ses dents et tout doux que j’étais née d’une Putain et que je mourrais comme une Putain. A n’en point douter, elle ne devait pas être la seule à le penser vu que j’étais encore célibataire à cet âge, sans la moindre demande de mariage par le passé. J’avais attendu trop longtemps, et en vain. Qu’avais-je aujourd’hui ? Deux frères, et une sœur. Sauf que je n’étais pas leur parent, et je ne détenais aucune armée, flotte, espion ou alliés puissants pour les soutenir. Alors, hormis eux, que me restait-il ? Ma vie. Simplement un bout de chair et de sang.

- Je suis bien amère ce soir. Nous pourrions boire, proposais-je, consciente que je buvais plus que de raison dans ce cagibi.

Que faire d’autres, entre ces quatre murs de bois ? Je pourrais tenter de sortir, mais j’étais lasse à la simple idée de toutes ces préparations à faire pour passer inaperçue, ou à porter cette lourde armure pour me faire passer comme un écuyer – j’avais encore de douloureuses ampoules de la dernière fois. Cherchant la bouteille du regard, ce dernier s’égare sur ce nouvel instrument amené par Lin. Dans un éclair de conscience, j’ai une idée.

- J’aime les sons produits par cet instrument. Je pense connaître un air, parfait, pour chanter et pour danser dessus.

Je me relève doucement, me saisit d’un instrument ayant quelques caractéristiques communes. Je m’assis en face de l’étrangère, et je commence à pincer les cordes un à un. Je fais une pause, attendant qu’elle réplique.

- La mélodie est assez répétitive, à l'exception de quelques mesures. Je t'apprendrai les paroles plus tard.



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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyLun 4 Oct - 22:30

Un instant je fermais les yeux et me laissais emporter par les souvenirs d’un temps jadis. Je quittais la chaleur sèche de Dorne pour celle, lourde et humide régnant durant la saison des pluies de l’ile de Leng.

J’entends les voix de mes camarades s’élever à l’unisson, ces jeunes filles allant de la plus petite enfant à la jeune adolescente qui ensemble, comme une prière, chantent cette ode à la solitude. Toutes ces filles qui dorment l’une sur l’autre dans un dortoir minuscule mais toutes ces gamines arrachées à leurs familles qui se sentent si seules. Dans ce souvenir ma voix est encore faible, les paroles sortant de ma bouche avec hésitation et un léger tremblement de fatigue. Je ne dois pas être arrivé sur l’ile que depuis quelques semaines, enfant soudainement arraché au luxe et au confort dans lequel elle a toujours vécu mais surtout, enfant arraché à sa famille et tous ceux qu’elle n’a jamais aimé.

Enfin la voix d’Arianne me ramena au temps présent. Mes paupières de nouveau ouvertes, je terminais ma chanson avant de répondre à cette dernière.

« Pas une chanson d’amour non… » Je secouais vaguement la tête, ce mouvement bien que faible laissant une mèche s’échapper de mon chignon pour retomber sur mon front.

« C’est une chanson pour boire seul sous la lumière de la lune, pour les gens loin de chez eux… Je suis désolé ce n’est pas la plus heureuse des chansons mais nous la chantions ensemble avec les autres filles, c’est un beau souvenir et elle m’a semblé en accord avec l’instant. »

Je fis en sorte de lui offrir mon plus chaleureux sourire pour qu’elle se sente moins triste, le même sourire réconfortant que m’avait offert une des plus vieilles filles à mon arrivé à Leng. Une manière de me dire, ça ira, je suis là. Je voulais que ma compagne de voyage ressente la même chose que j’avais alors ressenti. Lui offrir un avenir paisible m’était impossible, promesse que seuls les dieux des uns et des autres peuvent tenir, mais je pouvais au moins lui promettre de rester à ses côtés le long du voyage.

Je ne fis aucun commentaire sur le ton amer qu’avait pris Arianne pour parler des chansons d’amours, ne voulant pas non plus aborder ce thème. Les chansons d’amour, j’en connaissais assez pour ne chanter que ça durant des jours et jours. J’en avais tout un répertoire ; des pures et des graveleuses, des poétiques comme des comédiques. Mais je ne voulais plus les chanter. On m’avait offert ma liberté et ainsi j’en faisais usage. Les chansons d’amours étaient celles de ma servitude, celle chantées aux hommes pour espérer qu’ils veuillent bien m’acheter et faire de moi leurs maitresses officielles, celles chantées à mon maitre et ses clients sur une table tachées par l’alcool, celles pour essayer d’attirer le client et avoir un peu plus à manger le soir. Alors plus jamais.

« Buvons alors. »

J’hochais la tête à l’idée. Oui, buvons pour oublier ne serait-ce qu’une soirée les blessures qui marquent nos corps comme nos cœurs. Arianne en avait bien plus besoin que moi, enfermée chaque jour dans cette pièce. Je ne pouvais la blâmer, moi-même j’avais jadis failli tomber dans la folie à ne pouvoir jamais sortir de la maison de mon maitre et la boisson était alors devenue ma douce compagne pour rendre les nuits plus floues, plus supportables.

Arianne se saisissa de l’instrument et je l’observais ses doigts pincer quelques cordes d’une manière semblable à la mienne et pourtant bien différente.

« Je n’ai jamais été la meilleure des danseuses mais ce serait un plaisir. Laissez-moi simplement vous servir avant. »

Je me rendis compte trop tard de sa phrase, « ce serait un plaisir », j’avais utilisé cette politesse plus tôt et l’utilisais encore. Alors je voulue se mordre l’intérieur de la lèvre pour de telles paroles. Ce n’était pas que je n’avais aucune joie à jouer et danser auprès de l’autre femme mais, je savais très bien que ce n’était pas pour cela que j’utilisais ses mots sans y penser. Ce serait un plaisir. C’était ainsi qu’on m’avait appris à s’exprimer auprès des hommes. Toujours les faire savoir désirer. Ne disait-on pas que la bête domestiquée ne peut jamais retourner à l’état sauvage ? Cette pensée me laissait amère alors que je me levais au son des premières notes jouée par Arianne, me dirigeant vers un petit meuble où je savais ranger de quoi nous servir à boire. Sans un mot, je tirais vers nous une petite table de sol et nous servis un verre chacune. Arianne était bonne musicienne, ses doigts moins agiles que les miens mais sa musique néanmoins agréable à entendre, assez pour laisser son esprit s’y perdre.

Alors je me levais et fermais de nouveau les yeux, laissant la musique porter mes gestes, abandonnant les chorégraphies qui jadis m’avaient été enseigné pour laisser mes sentiments guider mon corps. Danser, non pas pour elle mais pour moi. Parce que je le veux.

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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyJeu 21 Oct - 0:19

« Arianne, tu es de ceux qui vivent pour danser, et qui dansent pour vivre. Tu continueras à apprendre, et à créer tes propres danses. Je n’ai plus rien à t’enseigner. Il est temps de te confier à une nouvelle maîtresse. Elle sera aussi douce qu’une mère, et bien plus impitoyable que je l’ai été.  Ce n’est rien d’autre que la Vie ».

Telles avaient été les dernières paroles de mon maître de danse, un ancien barde qui avait sillonné tout Westeros et qui avait trainé tant dans les différents cours royaux que dans les ruelles de villes étrangères. Notre rencontre s’était déroulée dans de drôles de circonstances : grand-mère cherchait un maître de danse réputé pour sa petite-fille batarde au doux minois, et il s’était présenté parmi tant d’autre – un étranger dont on ne connaissait guère grand-chose. Là où la majorité tentait d’être compatissant ou délicat avec moi, il s’était illustré en reprenant vertement une mauvaise posture que j’adoptais. La Princesse Meria avait apprécié le ton de l’homme, il semblerait, car elle l’avait aussitôt choisi.  Dès cet instant, et chaque jour, il m’avait formé à bien des formes de danses qui se pratiquaient dans le Continent en étant un maître extrêmement exigeant et sévère. Pour autant, je ne m’étais jamais pleine de ses méthodes, de ses exercices ou encore de ses critiques. Je m’étais pliée tel un roseau, m’abreuvant de chaque leçon. Je ne l’avais plus croisé, depuis. J’avais tenté de me renseigner mais sans succès : il était parti comme il était venu, c’est-à-dire dans le mystère. Était-il un espion pour la Principauté, ou pour une Puissance Etrangère ? Était-il simplement une âme vagabonde et insaisissable ?  

Depuis, je m’étais entrainée seule, me mesurant à d’autres anonymement ou émerveillant les invités des Princesses et des Princes par des danses complexes mais mises en scène convenablement. Or, voilà des mois que je n’avais pas dansé de tout mon soûl. Une timide flamme se ravive à chaque mouvement étranger et nouveau que ma compagne d’infortune esquissait. Ses mouvements n’étaient pas très fluides, et manquaient un tantinet de précision. Elle semblait s’essayer à de nouveaux pas, ou gestes. Qu’importe. Elle dansait, car elle le voulait. Elle dansait, car elle le pouvait.

Je l’enviais. Je voulais être celle qui danse sur un air qu’on me joue, et non l’inverse. Je me rendais compte de ma situation des plus pathétiques.  

- Je te remercie, Lin. Tu m'as rappelé à quel point vivre me manque. Je ne peux plus continuer ainsi. Je dois prendre une décision. Je vais le faire, dans les prochains jours, annonçais-je.Reprends tes chants et ton instrument. J'ai besoin de réfléchir, déclarais-je. Je me mure aussitôt dans le silence, et dans la contemplation du lointain horizon.  

***

An 2 Mois 2 Semaine 3 – Lancehélion

Une semaine fut nécessaire pour que je prenne ma décision. J’avais aussitôt donné ma liste d’achats – avec des instructions extrêmement précises – à Lin et à Baldyr, sans préciser à l’un ou l’autre l’usage de tels objets, de tels textiles etc. Le Voi devait m’apporter une sorte de sabot taillé spécifiquement, et selon les dimensions que j’ai données, pourvu de sangles à la fois solides et douces – celles que les hommes portent pour soutenir leurs lourdes armures. Lin avait pour charge de récupérer les commandes faites auprès d’un couturier, principalement de lourdes ou amples capes ou encore des masques. Lorsqu’ils arrivent, je les oblige à tout déposer dans la cabine et je congédie aussitôt mon garde du corps. La suite nécessitait l’aide d’une femme, et non d’un homme.

- Il est temps que je quitte ce maudit bateau. Si je passe encore une semaine entre ces quatre murs, je me jetterai au fond de l’océan avec une pierre attachée à ma cheville, dis-je, d’un ton sincère. Lorsque Dorne a perdu la guerre, elle a signé un Traité. Celui-ci exigeait, entre autre, des otages pour assurer la paix et surtout l'alliance avec Dorne. Je fais partie de ces otages, donnée aux Iles de Fer, l'un des peuples les plus barbares et les plus violents de notre Continent. Ils ne jurent que par les pillages et les viols. J'ai pu être épargné, car le Roi donnait de la valeur à ma personne, expliquais-je. Malheureusement, la mort de ce Roi ne brise pas le Traité et je suis toujours otage, mais du nouveau Roi. Si jamais je me présente au monde comme Arianne Martell ou Arianne Sand, je me condamne aussitôt : je devrais me rendre, à nouveau, en otage auprès d'un Roi étranger. Je refuse!  

Dans trois mois, cela fera presqu’un an que je subissais tour à tour les revers de l’infortune. J’étais lasse d’attendre passivement que les événements aillent ou non à mon avantage. Je devais agir. J’avais « fui » pour agir !

- Quant à tous ces hommes et à ces femmes qui se battent pour un bout de pouvoirs, ils me dégoutent. Ils ont oublié les otages donnés, et ils s'en fichent de leur sort. De telles personnes ne méritent ni mon respect, ni ma loyauté. Si mes choix ne sont que deux grands maux, je préfère ne pas choisir alors.

J'avais grand mal à saisir la situation dornienne. Pourtant, ce profond dégout était réel. Je ne désirais pas me plonger, si tôt, dans les intrigues politiques. Je devais construire ma propre force et influence, avant de me jeter dans l'arènes des fauves à nouveau.

- Tu vas m’aider à construire une nouvelle identité, Lin. Je vais être l'opposée de ce que je suis. Le monde ne doit pas me connaître comme une belle Dornienne sans ambition et sans danger, mais comme une marchande bossue, malade et défigurée qui est prête à tout pour obtenir ce qu'elle désire et jouir de ce bien avant de crever minablement.

Mon doigt montre l'étrange sabot en bois, couvert d'un tissu doux et rembourré.

- Tu vas attacher cette sangle à mon épaule gauche. Nous la couvrirons de cette cape, qu’il faudra ajuster et qu’il faudra pourvoir de poches secrètes. Les gens doivent me croire bossue. Et si jamais je cours un quelconque danger, je dois être capable de sortir une dague pour me défendre.

Mon doigt pointe ensuite vers les masques et les gants.

- Les gens nobles atteints d’une terrible maladie de peau, ou défigurés, sont couverts de la tête aux pieds. Je vais faire de même. Que le monde me croit hideuse ou terrifiante. Moins il cherchera à me connaître, mieux je me porterais.

Je la regarde. Était-elle prête à m’habiller entièrement à plusieurs, jusqu’à ajuster toutes ces capes, ces gants et ces autres accessoires ou encore à coudre des poches secrètes pour y glisser armes ou bourses d’or ?



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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyMar 26 Oct - 21:30

C’est la mère qui avait choisi pour elle le pseudonyme de Runami, pour que son nom reflète sa beauté froide. Moi je continuais de l’appeler par son véritable nom, celui avec lequel je l’avais toujours appelé. En vérité, celui là aussi c’était la mère qui lui avait donné. Momo, parce que l’histoire racontait que son père l’avait déposé à la maison avec juste le vêtement sur son dos et un panier rempli de pèche. Bien que née au milieu d’un champs, Momo était plus belle et plus gracieuse que je n’aurais même pu oser rêver. Elle était petite et menue. De longs cheveux, noirs et soyeux, ramené en chignon et décorés de bijoux imitant les fleurs de pêcher. Des yeux noirs en amande sur une peau aussi blanche que la mienne, les pommettes hautes, un nez minuscule.

« Tu es plus magnifique que la lune elle-même. »

Comme j’aurais aimé être mauvaise comédienne, que mon doux sourire laisse transparaitre l’immense tristesse qui habitait mon cœur et que les larmes coulent le long de mes joues sans que je le veuille. Mais j’avais appris à me tenir et à tenir compagnie auprès des meilleurs et une telle insulte à mes professeurs m’était impossible.

« Il n’y a aucun doute que tous les regards seront posés sur toi et que tu amèneras grand honneur à notre maison. »
« Lin… »

Je glissais une dernière décoration au creux de sa chevelure, cette broche de perles roses que lui prêtait la mère pour sa première soirée à l’extérieur. Nous avions toutes observées cette scène avec une pointe de jalousie, sauf Rinco à qui l’envie retournait l’estomac et déformait le visage, sachant qu’aucune d’entre nous n’aurions le droit à un tel cadeau lors de notre première soirée. Momo était la plus douée d’entre nous, nous le savions toutes.

« Lin. »

Ma tâche à ses côtés était finie. Momo était magnifique, elle serait le centre de l’attention ce soir. Il ne me restait plus qu’à me retirer et continuer à travailler pour espérer un jour m’approcher de son talent et son élégance. Il ne me restait plus qu’à espérer qu’elle trouve rapidement un protecteur riche et agréable, un homme qui ferait d’elle une femme comblée et lui permettrait de rembourser au plus vite sa dette auprès de la mère.

« Lin ! »

Cette fois-ci Momo avait haussé le ton. Et sa main empoignant ardemment mon avant-bras, il était trop tard pour que j’échappe à cette situation.

« Ce n’est pas la fin petite sœur tu le sais ? Je ne pars pas à l’autre bout de l’ile et puis quelques années encore et ce sera ton tour de sortir de la maison, et ce jour-là je t’assure que je serais présente. Déjà pour éviter que tu ne me voles toutes les attentions ma petite Lin. »

Sa main était alors devenue plus tendre contre mon avant-bras, une douce caresse comme une promesse que nous pourrions à nouveau nous tenir dans les bras l’une de l’autre, que nous pourrions vivre heureuse comme les sœurs de cœur que nous avions toujours été. Momo était la plus douée de nous toutes, la plus belle, mais la plus romantique et pleine d’espoir aussi. Comme j’aurais aimé pouvoir lui dire tout ce que mon cœur portait ; mes craintes de ne plus jamais revoir la seule personne avec qui j’avais réussi à accorder ma confiance et mon amitié, celle qui avait été la chose la plus proche d’une famille après la disparition de la mienne… Mais mon faux sourire tenait bon face à mes craintes. Momo partirait libre, sans le poids de mes craintes.

***

J’hochais la tête pour montrer mon écoute assidue à ma compagne. Il le fallait bien en effet. Si je comprenais et parlais à présent la langue de Westeros sans aucune difficulté, la culture, l’histoire et les tensions de cette région me restaient encore bien étrangère. J’en traçais cependant peu à peu les grossiers brouillons. Entre ces peuples nommés les fer-nés dont les manières me semblaient si barbares et violentes qu’il m’étonnait qu’on puisse même les nommer des hommes, ces ennemis à l’est et au dieu à la fois unique et plusieurs, des traitres au sein même d’un royaume et d’une famille… Voilà bien des ennemis menaçant ma chère amie. De si petits peuples dans leurs villes aussi minuscules, se battant encore et toujours sans jamais songer à baisser les armes. Il me semblait parfois bien difficile de comprendre ce peuple pourtant, ne sachant pas encore ce qu’il allait arriver à ma personne, il me faudrait bien essayer.

Je comprenais en tout cas la détermination de ma compagne de voyage à échapper à sa situation. L’admirait même. Jamais je n’avais eu tel courage pour échapper à la situation que le destin avait fait miens. Au contraire, je m’étais contentée de docilement baisser la tête et accepter les coups de bâtons, simplement de survivre, portée par le courant comme par les tempêtes. Peut-être aurais-je dû monter le ton plus tôt au lieu d’attendre qu’une bonne dame veuille bien me donner ma liberté.  Trop tard à présent.

Sangle et sabot de bois dans un bras, cape et masque dans l’autre, je m’installais aux côtés d’Arianne Martell et me lançais dans la tache de la vêtir de cet affreux costume.

« J’ai aidé bien des compagnes à s’habiller au cours de ma vie, noué des robes, maquillé des lèvres, décoré des chevelures… Mais faire d’une dame une bossue, défigurée, voilà bien la première fois. Quelle idée originale et astucieuse… »

Comme indiquée, j’attachais la fausse bosse à l’épaule gauche de la compagne et déposais le pan de tissus par-dessus. En effet, l’épaisse structure avait tout de la bosse et une fois le doux visage de ma dame cachée derrière un masque, le subterfuge serait parfait. La cape non plus n’était pas encore celle qu’imaginait Arianne mais il suffirait de quelques coutures pour que cela soit le cas et alors elle pourrait à son aise y cacher dague ou pièces d’or.

« Vous pouvez compter sur moi pour vous aider à revêtir une telle tenue mais pour la couture… Je dois êtres honnêtes avec vous, je ne suis pas plus à l’aise avec une aiguille qu’avec une épée. »

Je retirais les deux artifices et m’asseyais plus confortablement avant de reposer les objets sur mes cuisses, le tissu replié avec soin pour ne pas le froisser.

« Comptez-vous traverser les rues de Lancehélion habillez ainsi où notre navire va-t-il reprendre le large ? »

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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyVen 5 Nov - 23:46

Lin papillonnait autour de moi, tirant et ajustant ici et là. Je remarque aisément que ses gestes manquaient d’une certaine dextérité ou d’assurance. On sentait qu’elle n’était pas accoutumée à la mode de Westeros, et qu’elle cherchait encore ses repères. Je ne pouvais pas lui en vouloir. Je l’avais employé en tant qu’interprète pour ma Compagnie, et non en tant que servante au service de mon confort personnel. Malheureusement, en l’espace de quelques petits mois, les événements les plus surprenants s’étaient succédés et je m’étais retrouvée dans la situation la plus improbable qu’il soit !
Aujourd’hui, je devais me cacher aux yeux de tous, pour un temps ou pour toujours – allez savoir ! Si jamais j’étais découverte, je risquais d’être renvoyée aux Iles de Fer, une perspective qui ne m’enchantait guère !

Qui dit cachotteries et mensonges, dit discrétions et secrets. Dès lors, il m’était impossible de faire appel à plusieurs demoiselles pour m’habiller, me coiffer, vider mon pot de chambre ou m’aider au bain :  le risque que tout le monde sache que je ne suis qu’une imposture derrière ces masques et ces lourds habits serait énorme. Si Lin acceptait de s’acquitter de quelques menus tâches, comme m’aider à placer cette maudite fausse bosse, m’aider avec quelques bandages, attacher ce masque ce masque ou ajuster quelques pans de ces vêtements, je n’avais pas cœur à lui demander plus. Heureusement, vivre parmi des milliers d’hommes aussi bruyants que sales et sans une véritable aide pendant de longs mois m’avait appris à me débrouiller seule, incluant me charger d’ingrates tâches. Je pourrais bien survivre encore quelques mois, le temps que je trouve une solution viable et astucieuse qui me permettrait d’embaucher cette servante sans pour autant me trahir.

Lin parle, complimente mon idée astucieuse.

- L’idée est surtout si dégradante, ne pus-je m’empêcher de me plaindre. En fuyant, j’espérais être libre. Or, regarde-moi ! Je dois me cacher, comme une … criminelle !

Un court instant, j’étais tentée de me raviser, de tout emballer et de mettre les voiles pour Essos ou pour ce nouvel Empire, afin de me construire une nouvelle vie où je n’aurais pas à me cacher et à mentir ! Malheureusement, aussitôt, la raison l’emporte sur les sentiments. Essos signifiait l’abandon définitif des miens. L’Empire était synonyme de trahisons. Enfin, dans les deux cas, je devais avoir de véritables et solides arguments pour ne pas être le pitoyable jouet d’un quelconque homme puissant ou femme influente. Le but de cette « vie cachée » était, précisément, de me construire mon propre « empire » ou « force », à mon échelle, afin de pouvoir me faire entendre de tous et de toutes et imposer ma vision si besoin. Autant dire, je n’étais pas prête, encore, à m’aventurer dans l’un ou l’autre de ces eaux troubles des jeux politiques. Mon seul espoir était que ma sœur et mes frères sauront éviter quelques désastreuses décisions et qu’ils seront toujours en vie, d’ici là … Cette simple éventualité, celle d’être en retard, me remplit d’acédie.  

- Pensez-vous que la bosse est exagérée ?  soufflais-je, si incertaine par cette silhouette approximative et terrible que ce miroir projetait tant bien que mal.

Si on m’avait dit qu’un jour je porterai un si affreux déguisement, j’aurais sûrement ri à la face de la personne. Jamais, ô grand jamais, je n’avais caché ce minois ou ce corps, tous deux aconchés. Il n’était pas question de fierté, ou de narcissisme, mais de « survie ». Ces atouts avaient été mes armes, et mes boucliers pendant de longues années. Voilà que je m’en privais. L’ironie était que, couverte de la tête aux pieds et ayant des coffres considérablement remplis, je ne m’étais pas sentie aussi vulnérable et à nue qu’à cet instant….



- Vous comprenez que nous ne resterons pas longtemps à Lancehélion. Selon la réussite de mes actions, nous partirons soit vers l’Ouest, soit vers le Nord, pour de longs mois… peut-être même pour quelques années , annonçais-je, le ton lourd et sinistre.

« L’Ouest » signifiait le Royaume du Bief ou le Royaume de l’Ouest.
« Le Nord » signifiait Fort-Darion.

Le choix allait dépendre tant du hasard que des opportunités. Toujours est-il qu'aucune perspective ne me plaisait. Je ne pourrais dire si je voulais hurler de rage, ou pleurer de frustration. Tant d'efforts et d'énergies gaspillés à revenir sur mes terres natales, pour au final devoir les quitter pour simplement "vivre" ...

Sauf que Westeros est en guerre depuis deux longues années, bientôt trois. Il y a tant de risques : des villes et des villages ravagés, des zones dangereuses, la famine, le risque d'être capturée ou d'être tuée, ou encore être mal traitée dans ce Royaume d'adoption, commençais-je, étudiant discrètement les traits d'expression de mon interprète. Vous avez encore une chance de demander votre démission, avec une solde suffisamment convenable pour débuter une nouvelle vie où vous désirez. Je vous jure que je ne prendrais pas ombrage, continuais-je. Je ne veux forcer personne à m'accompagner dans ces sentiers tortueux. Lorsque ce bateau quittera le port, vous devez avoir pris votre décision Lin. Si vous décidez de rester, et que nous quittons Lancehélion ensemble, avec Baldyr, je vous promets ma confiance et mon soutien infaillible.



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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyMar 16 Nov - 13:26

La liberté.

Un instant je laissais mon regard se perde sur mes propres mains. Je me perdais dans le travail que je continuais d’accomplir pour vêtir dame Arianne des sangles et autres bosses de bois qui formaient le costume de ce qui serait, à partir d’aujourd’hui sa nouvelle identité.

Surtout, cacher mon regard pour ne pas trahir mes pensées profondes, qu’elle ne se rende pas compte de ma désapprobation.  Avait-elle donc cru la liberté une chose si simple à obtenir ? Comme le fruit du pommier qui n’appartient à nul homme et que tous cueillent au bord de la rue ? Quelle déception. Moi qui avais espéré d’elle une plus grande compréhension de ce sujet après avoir été offerte à de barbares ennemis. En vérité le blâme était aussi sur moi d’avoir tant espéré. Après tout, Arianne avait vu sa liberté échangée au prix fort de tout son empire. J’avais vu la mienne passé d’un maitre à un autre pour quelques pièces d’ors, vu des gamines abandonnées à une vie de servitude à l’art pour des sommes dérisoires. Des décennies de servitudes, sa liberté dans les mains d’un autre, cela elle ne l’avait jamais connu. Comment alors pouvait-elle comprendre à quel point son horreur de cette nouvelle identité me semblait futile ?

Ma propre liberté m’était la chose la plus chère avec ma broche de jade. Enfin retrouvé après tant d’années, je m’étais promis de ne plus jamais laisser personne m’arracher cette richesse. Pour cela, j’étais certainement capable de bien plus grands sacrifices que ma beauté. Mais de cela je n’exprimais mots. Dame Arianne n’était pas mon maitre mais elle était tout de même celle me donnant toit et repas chaud, la froisser était pour mo bien trop risqué. Survivre en cette région encore bien étrangère sans son aide et son patronage m’était tout bonnement impossible.

« N’ayez aucune inquiétude, j’ai déjà croisé à Pentos des mendiants dont la bosse dépassait en largeur deux fois la vôtre. La vôtre semblerait une simple piqure de moustique à côté.»


En vérité, je ne pouvais non plus critiquer son inquiétude. Moi-même n’aurais su comment réfléchir face à une telle apparence. Il m’avait déjà semblé si difficile les premiers moi de me faire à l’idée que j’avais été acheté non pour mon corps mais bien pour esprit. Comment, après des années à avoir entrainé et perfectionné son corps jusqu’à en faire une arme, apprendre à se passer de cette dernière pour se défendre. Mais je ne doutais pas que dame Arianne sache utiliser à son avantage d’autres armes que celle de sa beauté.

« J’ai connu bien des traversés au cours de ma vie. »


Je levais les yeux vers ce ciel que je ne pouvais en ce lieu apercevoir mais qui, dans mon cœur, m’était bien visible. Ce ciel qui avait observé chacun de mes voyages et les pleurs qui les avaient accompagnés. Aussi risqué ce voyage soit-il, il était pour moi le seul choix véritablement possible. Même avec une solde convenable qu’elle vie m’attendait sans la protection d’Arianne ? Quelle choix mensonger… Non, il me faudrait ainsi rester à ses côtés et traverser les difficultés à ses côtés pour atteindre la destination qu’elle nous aurait fixé. Quelle pitoyable liberté. Bien sûr j’appréciais dame Arianne. Elle était une bonne personne, porterais je l’imaginais une certaine attention à ma sécurité au cours de ce voyage et je me sentais toujours redevable envers cette dernière pour la liberté qu’elle m’avait rendue, bien qu’encore très fragile. J’aurais simplement préféré pouvoir rembourser ma dette sans devoir mettre ma vie en danger au passage. La vie en avait, comme bien souvent, décidé autrement.  Alors j’inspirais, calmais les angoisses de mon cœur, et pris soin de choisir mes prochains mots avec justesse.

« Trouvez-moi un monde où vivent les hommes sans cause guerre, famine et destruction. Un monde où nulle femme ne connait la peur d’être un jour capturée ou tuée par un homme la pensant sienne. Si vous me trouvez ce monde alors je demanderais ma solde pour m’y installer et vivre la plus douce des existences. En attendant, vous pouvez me compter à vos côtés. »


J’hochais une dernière fois la tête pour conclure la chose. Ma décision était prise.

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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptyMer 1 Déc - 22:42

Le commentaire courtois de mon interprète vis-à-vis de la bosse me trouble, et me force à m’interroger. Etais-je peinée par une apparence superficielle, ou alors étais-je blessée par des peines profondes et cachées ? Je me rendais compte que je n’abandonnais pas simplement un joli minois mais un prénom donné par ma mère, un nom légué par notre père, une fratrie soudée par les liens du sang et surtout une existence dont je connaissais les codes, les us et les coutumes. Je pourrais bien chercher à me réconforter, en prétendant qu’un prénom n’était nullement important, que le nom Martell n’avait jamais été mien – ou mérité –, que ma fratrie était bien plus loyale au pouvoir qu’au sang, et que je pourrais toujours apprendre les codes d’un nouveau monde. En vain !

J’échangeais toutes ces choses auxquelles je tenais pour un morceau de liberté, imbibé d’égoïsme, de folie et de traîtrise. Dès cet instant, chacune de mes actions sera critiquée. Qu’importe mes arguments ou mes motivations, je serais la Dornienne qui ne s’est pas pliée au Traité signé par sa Souveraine, la chienne enragée et malade qui a mordu la main de ses maîtres, la femme vénale qui est fidèle davantage à l’or qu’au sang ou encore cette bâtarde bourrée de tous les défauts de ce monde. Je pourrais sauver les miens, au prix d’une Couronne, que je serais la traîtresse. Je pourrais préférer la Principauté à ma famille, que je serais encore la scélérate. Je pourrais sauver le Royaume comme la famille, que je serais encore et toujours ce sang mêlé qui doit tout à l’univers - sans que ce dernier ne lui doive rien.

- Ce monde est donc votre idéal. Il est simple, il doit assurément exister. J’imagine que le lieu doit être hors des frontières de ce Continent, peut-être même une petite île encore inexplorée par des pirates ou par des marins ambitieux, ne pus-je m’empêcher d’ajouter.

J’avais grand mal à imaginer un tel monde, pourtant. J’étais tant habituée à côtoyer le beau comme l’horreur et le bon comme le mal, que ces éléments contraires me semblent indissociables. Par exemple, nous ne pouvons pas apprécier la bonté d’une personne si nous ne connaissons pas la barbarie. Enfin, quel que soit la cruauté d’un monde, il existe toujours un élément surprenant et bénéfique qui ravive un espoir dans les cœurs.

- Je rêve d’un monde où les chants des hommes, des femmes et de la nature emplissent nos cœurs de joie à longueur de journée, où chacun est prêt à tout pour protéger son prochain, où le sang prime sur l’or, l’ambition et le pouvoir, où nous serons toujours la bienvenue qu’importe nos erreurs et nos défauts. Un monde où l’amour n’est pas conditionnel, soufflais-je. Peut-être que je pourrais créer un tel lieu, si j’en deviens la maîtresse incontestée …

Yoren m’avait aimé, tant que je lui étais utile.
Anders m’avait aimé, tant que j’étais cette figure idéale.

- Avez-vous déjà aimé ? lui demandais-je. Avait-elle été béni d’un véritable amour ou, comme moi, avait-elle eu droit qu’à une suite de déception ? Je sais que ma question peut être intrusive et je sais aussi que je ne peux pas m'attendre à une grande histoire d'amour. Ma mère a partagé votre destin. Jusqu'à mes sept ans, j'ai vu toute la souffrance qu'elle a eu à endurer. Puis, je l'ai vu dans ses prunelles, à chacune de mes visites. Je la vois aussi, dans les vôtres.

En somme, je n’étais pas cette naïve poupée qui pense que l’amour est au rendez-vous dans un bordel. Certaines pouvaient capturer le cœur d’un homme, mais uniquement un instant. Aussitôt que les amants s’avouent un quelconque amour, la réalité les rattrape. La courtisane doit aller dans les bras d’un autre, et l’amant se morfond dans une terrible jalousie, condamné à abandonner la première – ou à la tuer. Si Lin était encore là, c’était soit parce qu’elle n’avait jamais rencontré un tel homme, soit que ce dernier avait préféré s’éclipser que la condamner.

- Je ne vous demanderai jamais de faire quoi que ce sont contre votre gré, mais vous devez me le dire à haute voix. Je veux que l'on soit honnête envers l'une et l'autre. C'est notre seul et unique moyen pour survivre et pour surmonter tout ce qui nous attend.



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MessageSujet: Re: Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX]   Notre bateau glisse sur le fleuve calme (A2 M2 S1) [Terminé - Tour IX] EmptySam 11 Déc - 20:34

Ma tâche enfin finie je me reculais et laissais ma dame observer le résultat de ce premier essai de déguisement, la chose bien sûr était encore loin de ce qui serait bientôt son vêtement mais lui donnait au moins la possibilité d’imaginer la forme que prendrait la bosse à son épaule et le poids de la fausse déformité qu’il lui faudrait supporter. Oui, une fois la bosse ainsi que son masque terminé, la supercherie serait bien capable de cacher l’identité réelle de ma dame.

Je me dirigeais vers la table où reposait un thé et nous servit à chacune une tasse, humait le doux parfum de la boisson. Il était étrange que deux peuples si éloignés partagent le même penchant pour cette boisson et, si les feuilles d’ici rendait le thé noir et plus amer que ce que j’avais connu jusqu’alors, chaque gorgée semblait me ramener dans des souvenirs. Me saisissant à peine de nos tasses, le dos tourné à ma dame, ma position m’offrait un instant de répit où je n’avais pas à surveiller l’expression de mon visage.

« Je crains qu’il soit hors des frontières de tous les pays que j’ai eu à traverser jusqu’alors. Mais une telle ile doit exister. »

Ma voix sonnait bien plus enjouée et optimiste que la couleur véritable de mon cœur. Une telle vie pouvait-elle véritablement exister ? La chose me semblait bien impossible. Et même si cette ile de rêve se révélait réalité, il ne faudrait pas longtemps après notre installation pour que la violence et la cruauté des hommes ne vienne la tacher du sang de l’horreur. Alors que je me retournais enfin pour apporter sa tasse à dame Arianne, je me demandais si elle-même croyait réellement en ce rêve. Bien sûr, j’avais déjà remarqué que cette dernière faisait preuve de plus d’optimisme que moi-même mais elle devait tout de même connaitre la cruauté de ce monde, elle aussi en avait été victime. J’aurais aimé pouvoir croire en le monde qu’elle me décrivait et oh qu’il serait beau mais bien irréel. Toujours le mal se frayerait un chemin dans le cœur des hommes. Toujours il nous faudrait se méfier de l’autre. Méfie toi de moi comme je me méfie de moi. Car si ce monde existait même moi n’en serais pas digne. Si je pouvais aujourd’hui promettre fidélité à dame Arianne, ce n’était pas à vie. Si un jour il me fallait choisir entre elle et ma survie ce serait sans hésitation que je… Mieux valait ne pas trop y penser. Pour l’instant, je lui étais fidèle et lui servais son thé avant de m’asseoir à ses côtés.

Sa question me surpris et il me fallu porter ma tasse de thé à mes lèvres pour cacher mon expression de malaise. Au moins avait-elle la décence de reconnaitre qu’un tel amour m’était impossible à cause de l’état qui longtemps avait été le miens. Sur ce sujet, dame Arianne ne se trompait pas.

«  J’ai aimé en effet, une fois lorsque j’étais jeune, mais mon amour ne m’a pas été rendu. »

Je baissais le regard, soudainement happée dans ce souvenir du temps passé que je cherchais si souvent à oublier. Happée dans le regard de cette femme si belle et si mystérieuse, celle que nous regardions toutes avec envie, avec le rêve de trouver un riche protecteur et réussir comme elle-même avait réussi. Mais le regard que je posais sur elle était un peu différent, je le sentais bien au fond de mon cœur. Mais je guardais à jamais cet amour pour moi. Comment aurais-je pu en parler ? A qui ? Comment exprimer la jalousie qui me tiraillait l’estomac à chaque fois que je l’imaginais rentrer et se glisser dans le lit de son protecteur. Comme exprimer la joie qui m’envahissait à chacune de ses visites. Comment exprimer mon amour ? Il ne nous aurait de toute manière pas été autorisé de nous aimer, nous étions vouées à être des objets d’arts dévoués de sentiment autre que ceux que l’on joue et l’on modifie. Peut-être était-c cela que dame Arianne voyait dans mes yeux. La souffrance de la femme qu’on a fait objet et qui en a oublié ce que c’est que de respirer et de penser.

Je bus de nouveaux, me tournais vers dame Arianne. Pouvais-je vraiment être complètement honnête avec elle. Prendre le risque de froisser et de perdre ma seule source de revenue et de protection en cette terre inconnue ? Alors que je continuais de réfléchir, je me saisis de la sangle retenant la fausse bosse pour délester ma dame de sa charge.

« Je ne sais pas si je peux vous promettre d’être à partir de maintenant entièrement honnête avec vous, ni même si je peux vous promettre de l’être un jour. Mais je peux, si cela vous convient, vous promettre d’essayer, même si cela va à l’encontre de ma nature même. »

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