Il y avait toujours cette fierté chez Robert. Celle de voir ses frères partir au combat, celle de les voir revenir triomphant. Et puis, il y avait cette peur qui tortillait ses entrailles. Celle de voir disparaître les hommes de sa famille, un à un. Robert avait mal vécu la disparition de ses parents. Mal vécu cette épidémie qui avait arrachée tant de chose à la famille Kenning.
Cette déclaration de guerre était nécessaire. Si Robert se tenait loin de cette politique puisque épargné par sa place à la naissance, il n'était pas stupide pour autant.

Une déclaration de guerre n'est pas une décision à prendre à la légère. De passage à Castral Roc, pour venir voir ses frères avant le départ. Peut-être une dernière fois si la situation dégénérait. Robert voulait éviter les regrets potentiels. Le brun ne peut que regarder cette organisation se mettre en place et espérer, prier pour que ses frères soient protégés. Robert n'avait jamais caché l'importance que sa famille avait pour lui. Quand bien même certains étaient bien moins proches que d'autres.

Robert s'arrête dans la cour de la forteresse, le regard porté sur Gareth. Gareth reste son frère. Malgré le fait que sa relation avec lui soit... complexe. Cordiale, évidemment. Contrairement à ce que d'autres pourraient penser, Robert n'est en rien jaloux de la place de Gareth. Pas jaloux de ne pas avoir été choisi des années en arrière. Au fond, il apprécie même sa place. Il s'agit bien du manque de connaissance l'un de l'autre, du manque d'opportunité d'apprendre à ce connaître et cette place de choix. Robert se doute de la complexité de se retrouver ainsi entre deux familles.
Puisque le responsable commercial se trouvait parfois à cette place aux côtés de Tybolt.

Un sourire s'installe sur le visage de Robert, content de voir son frère. Il pouvait voir aisément la détermination sur le visage de Gareth. Cette dévotion qui ne la jamais quitté, il en était persuadé.

- Oui, je voulais vous voir avant mon départ. Ou le vôtre, en l'occurrence. Je suis content de te voir aussi.

Il était difficile de se dire que cette guerre était nécessaire. Tant par cette dangerosité. Si Robert n'avait pas ses propres responsabilités à Kayce, il était évident qu'il aurait été présent durant cette guerre. C'était une fierté de faire parti de l'armée mené par l'Ouest.

- Je pense que tu as déjà entendu ce discours, probablement donné par le reste de ton entourage. Mais je tiens à le répéter autant qu'à Tybolt.

Robert était honnête, toujours. Même avec cette relation parfois complexe. Il ne voulait plus perdre un membre de sa famille. Même s'il n'avait aucun pouvoir sur ce genre de chose.

- Je sais que cette guerre est nécessaire. Et je ne remet pas en cause cette décision. Néanmoins, j'aimerai que tu fasses attention. Que tu ne perd pas la vie dans cette guerre. J'en conviens, ma demande n'est pas mon de ressort, ni du tien. Mais je regretterais de ne pas te l'avoir dit.

Robert n’espérait pas plus de la part de Gareth. De toute façon, il ne pouvait prédire l’avenir. Et s’il avait confiance en les capacités de Gareth et de Tybolt, il ne pouvait s’empêcher de penser à ce qu’il pourra se passer si ni l’un ni l’autre ne revenait en vie.  

Robert avait eu la chance, ou non dépendant des points de vue, de ne pas avoir à partir en guerre. Pas lorsqu’il doit s’occuper de Kayce le temps que Tybolt ne revienne, pas lorsqu’il doit continuer à faire prospérer sa ville natale.  

- Je ne doute pas de vos capacités et de celles des troupes pour revenir triomphant.

Robert avait un peu perdu cette relation avec Gareth. Pour ne pas dire complétement. La distance, les familles, beaucoup de détails étaient entrés en compte. Ce qui avait finalement fermé un peu cette fraternité de naissance. Et si Robert tentait toujours de ne jamais baisser sa garde, il n’en demeurait pas moins attaché à son frère.  

- Je ne compte pas rester les bras croisés. Il y a tellement de chose à faire, encore. J’ai parfois l’impression que plus nous en faisons, plus il y a de chose à faire.

Un peu comme une liste sans fin. Le monde ne s’arrêtait pas de tourner. Qu’ils soient en guerre ou non. Robert ne pouvait donc pas rester à prier sans cesse un retour dans de bonnes conditions. Les mots de son frère le font légèrement froncer les sourcils. Donnait-il l’impression d’avancer à contrecourant ? Ou peut-être était-ce juste une phrase qui n’avait pas de sens particulier. Aussi, il ne sut trop quoi répondre sur l’instant.  

- Je ne vois pas un scénario où nous... où je vous oublierais.

Robert n’est pas sûr d’avoir réellement compris sa phrase. Mais peut-être que le cadet pourra élaborer. Ou non. C’est aussi un choix probable. Quoi qu’il en soit, Robert ne voulait pas trop retarder Gareth. Il avait encore beaucoup à faire, il s’en doutait.  

- En tout cas, prend soin de toi.