Il n'est guère aisé de naviguer, ce n'est un métier facile pour personne. Vents violents, vagues hautes comme des tours, récifs ou bancs de sable, sans parler du ravitaillement en mer. C'est pire au Nord. Même en plein été, il y a parfois des blocs de glace charriés depuis le Nord Véritable dans les mers du crépuscule. Les violentes tempêtes d'hiver, et parfois, la neige et même le gel. Cela ne décourage pas ceux qui, de tous temps, auront voulu envahir ses immensités. Et l'on doit au Roi Torrhen Stark, devenu Empereur, un système perfectionné de feux d'alarmes sur toute la côte nordienne. Système abondamment développé par son fils, le Roi Jon, qui comprirent l'un comme l'autre l'intérêt pour les populations locales comme pour leurs troupes de surveiller des milliers de kilomètres de côte pour éviter de se retrouver avec de larges pans de territoire perdus sans que le pouvoir central ne s'en rende compte assez vite. Des tours avaient été dressées, et chaque village ou camp de pécheurs, sollicité pour fournir une rotation de quelques hommes pour surveiller en permanence l'horizon. Evidemment, le système n'était pas infaillible... Pouce-Flint avait déjà été ravagée, un an et demi plus tôt, tout comme l'île aux Ours. Les Rus subissaient les déprédations des Fer-nés depuis des décennies, toutefois, et l'on savait déjà où surveiller. Pour se ravitailler en mer, il faut de l'eau douce, et il ne pleut ni ne neige de façon suffisamment fréquente en été. De plus, les navires sont peu faits pour la navigation hauturière... Il faut se ravitailler. Les points d'eau ou de débarquement déjà utilsiés par le passé étaient surveillés ; chaque source, crique ou rivière était surveillée. Le tout nécessitait des ressources ; un peu de bois ou d'huile de baleine pour la crémation en cas d'alerte, mais surtout des relais humains pour assurer la surveillance et la rotation des gardes. La milice fut sollicitée. Et le tout, mit bout à bout, coûta extrêmement cher en près de deux ans. Mais la couronne du Nord fermait les yeux sur ces dépenses.

Ce ne fut toutefois pas ce système de guetteurs et de feux d'alarme qui détecta en premier une flotte ennemie, composée d'élégants navires aux nefs puissantes, lourdement équipées. Battant pavillon du Lion Lannister... Ce furent deux équipages de baleiniers qui tombèrent dessus, et rentrèrent fissa à Pouce-Flint pour y sonner l'alarme. Combien de navires ? Les marins s'étaient délestés de leur précieuse cargaison, de barils de vivres et d'eau douce pour filer grand vent et vite prévenir le camp militaire le plus proche. Ils ne s'étaient pas attardés.

Simple Raid ? Flotte d'invasion ? Le Cap Kraken était franchi...

Et finalement, tous les feux d'alarme de la côte de Flint et de la péninsule de la Baie de l'Enfer s'illuminèrent en quelques heures. Les messagers à cheval eurent tôt fait de préciser ; des voiles par dizaines. Mais fer-nés, arborant les emblèmes de la Main d'Os, Poissons d'Argent sur champ vert, la Faux sur champ Noir... Cette fois pas de doute. Flotte de Raid ET d'invasion. Les fer-nés étaient de retour. Et ils n'étaient pas venus seuls. Les Ouestriens étaient arrivés les premiers, mais le commandement nordien était dans le flou, car des nappes de brume descendaient des Fjords de la Baie d'Enfer et de Piquesel, gênant la navigation adverse ou alliée, et le repérage des navires. L'on prit grand soin de ne pas s'emballer à chaque rumeur d'avance ennemie dans un secteur ou un autre, cela pourrait n'être que pour diversion ou ravitaillement. Le Nord avait eu deux ans pour se préparer. Cela serait-il suffisant ? Les nordiens avaient l'habitude de distinguer la mer du crépuscule avec une peur séculaire...

Le Roi Jon fut néanmoins informé par le fils de Lord Flint ; navires ennemis, fer-nés et lions, peut être une centaine, peut être deux centaines.

Cap inconnu.