La campagne se poursuivait avec méthode, commandant une légion défiguré par la différence Pausanias se sentait comme le mage manipulant un colosse aux pieds d’argiles. La moindre flaque d’eau suffirait à ce que cette mécanique si bien huilée ne s’empêtre dans ses propres contradictions. Mais le fidèle serviteur des Valtigar se devait d’être à la hauteur ce n’était ni un objectif, ni une possibilité mais une nécessité. Sans quoi, avec une modestie toute relative, tout l’entreprise risquait encore une fois de s’effondrer.

Le Soleil qui bientôt serait aussi brûlant que le feu des dragons venait à peine de se lever à l’horizon. L’astre solaire laissait quelques heures de relative paix avant d’abattre sur ces maudites dunes sa fureur. Alors tous iraient se réfugier là où son courroux ne pouvait les atteindre. Ainsi était les choses, de la mer des cendres à la mer des sables rien n’avait finalement changé. Il poursuivait encore les démesurées ambitions de Tyraemarr ainsi que de sa lignée.

La rumeur de Valryon ne tarde pas à attendre les oreilles du commandant qui alla se placer pour accueillir le Prince, celui-ci multipliait les déplacements alors que Pausanias restait aussi immobile qu’un pilier. En un sens, il était la vigie auquel tout les Valtigar finissait par revenir. Le phare dans la tempête…

- Votre Altesse, dit-il protocolairement en s’inclinant juste assez pour signifier l’écart de rang entre eux. Ses yeux sombre revinrent à une hauteur normal et il se permit quelques instants de dévisager l’héritier des dragons, celui qu’il avait nourrisson, celui qu’il avait fait mordre la poussière maintes et maintes fois. Il était toujours étonnant de voir à quel point le sang pouvait modifier radicalement les anciens liens jusqu’à complètement les éclipser. Alors nous ferons, conclut-il avec une froideur toute professionnelle sachant qu’ils étaient scruté de toute part.

Il fit un pas en arrière puis l’invita à rentrer dans la tente dressée pour le haut-commandement de la légion. Un magnifique fouillis de drap aux couleurs impériales dont les gardes encombré par leurs cuirasses se muaient presque en élément décoratif.

Approbation de la fortune ou bien talent indéniable, la question ne pouvait être facilement tranché. Il n’en restait que l’ancien esclave c’était toujours arranger pour faire du succès sa compagne et la mort son rival. Comme le plus insignifiant des légionnaires ou le plus glorieux descendant des antiques valyriens, le guerrier naviguait a vu vouant une confiance béate à son intuition. Sur les flots de la gloire, il évitait les récifs et les vagues emportant trop tôt les fougueux. Car peut-être qu’au final Pausanias était tout sauf ces phénomènes éphémères, ces étoiles filantes des arcanes du pouvoir. Volontairement en retrait, il avait tout le loisir d’assoir son indispensabilité jusqu’à être la colonne vertébral grâce auquel tout l’appareil guerrier pouvait s’épanouir.

Les regards fiévreux, les effluves des hommes se pressant autour de la grande table recouverte de cartes donnaient un air en dehors du temps. Comme si tout le monde retenait son souffle, attendant que les Princes ne le mettent en branle et décide du sort de milliers d’hommes. Quel pouvoir terrifiant de décider de la destinée d’un homme en poussant quelques figurines de bois sur un parchemin. Ils pouvaient décider de mettre ces terres rachitiques à feu et à sang. D’un bout de papier griffonner, ils pouvaient se faire répandre l’insidieuse flamme de la barbarie. Personne ne peut et ne mérite de concentrer tant de possibilité entre ses mains, personne ne peut rester intègre lorsque sa simple volonté fait plier tout autour de soi. Les lois s’inclinent devant les rois, les hommes s’inclinent devant les seigneurs de guerre.

Car c’est la violence qui dicte le futur, c’est seulement la brutalité qui coupe court à toute représailles ou début d’incendie. L’ancien esclave ne voit dans le feu belliqueux qu’un outil indispensable aux intérêts de ses maîtres, ni plus ni moins.

Cet ustensile, il le tort, le pousse jusqu’à dans les retranchements de ses capacités. Cela se voit dans une campagne qui battait de l’aile avant qu’il n’intervienne directement dans les affaires. Tel un homme providentiel, il distribuait ses ordres suivant une vision presque prophétique de la campagne.

- Les populations de ces contrées ne nous sont pas acquises, s’il nous faut nous emparer au plus vite de le Voi et le Tor c’est pour palier à ce ventre mou, Pausanias désigna alors le grand espace entre ces deux cités. Une bonne connaissance du terrain suffirait à une armée bien équipé pour s’introduire et nous porter un coup au cœur même de nos nouvelles possessions, anticipa alors funestement le général qui ne se douta alors pas du tôlée qu’ils allaient subir.

Face aux interrogations de son prince, l’homme de fer se saisit d’un léger croquis exécuté par l’un de ses éclaireurs et le pose face à Aerymor complétant les quelques traits dépeignant des fortifications assez modeste.

- La seconde légion devrait suffire à les faire plier, les nobliaux doivent être resté par principe dans leurs fiefs mais je ne doute pas qu’ils aient participé à la fuite en avant des Allyrion puis des Martel à l’Ouest de Dorne. Sitôt que nous contrôlerons ce point nous ne pourrons nous y attarder de toute façon.

Pausanias ne cédait pas au désespoir ou bien au pessimisme comme tant de commandants en campagne, il n’était pas de cette espèce des rêveurs qui échafaude en permanence de magnifiques plans qui resteront pour toujours beau sans pouvoir être appliqué. Car la Guerre est un organe solitaire. Elle décide de la santé d’une dynastie, de sa chute ou de sa gloire sans subir les pressions de celle-ci.

Comme si le fait guerrier était une mélasse de chaos et d’hasard qui se répandait à toute vitesse dans des contrées bien organisé, incendiant les cœurs d’un peuple bien discipliné. Un bon général n’est pas celui cherche à donner forme à cette dangereuse coulée, non, celui qui trouvera la réussite est le militaire qui parviendra à y nager tout à son aise. Car ce n’est seulement en ne luttant pas contre le courant inéluctables des faits matériels qu’on parvient à s’adapter et répondre en conséquence. Même l’édifice de stratégie qui semble le plus robuste ne résistera pas à quelques jours dans la réalité d’une campagne, l’entropie est trop forte pour que les fondations d’un tel échafaudage de plans ne se retrouvent pas sur le toit ou bien disparaissent dans le mystère le plus total.

Pausanias était à la tête d’une machine de guerre famélique, son rouleau compresseur est comme un chat arrogant, qui ne savait que montrer les crocs sans réellement pouvoir encaisser le choc du fer. Tant mieux ou tant pis, cette situation forçait l’homme à étudier avec une attention particulière chaque mouvement et initiative d’un ennemi qui aurait dû être écrasé bien avant qu’on ne décide aussi de l’envoyer en Westeros.

Comment remporter la victoire dans des conditions aussi défavorables ? Bénéficiant de moyens limités, d’une noblesse locale encline à la sédition et surtout d’une situation géographique qui pouvait renverser l’avantage gagné à chaque moment ; son armée ne pouvait que rester sans cesse sur ses gardes. Prête à bondir au moindre faux-mouvement, prête à détaler si le danger devient trop grand. Les nobliaux et les ambitieux de Lancehélion pourront mieux continuer de rédiger cette stupide constitution, entretenir l’idée d’une Principauté qui tient sur un gouvernement solide. Car la vérité est trop crue pour la couleuvre politique, il est insupportable pour eux que tout ne repose que sur le bête et méchant rapport de force armée. Pourtant le moindre déséquilibre, plongerait tout ce beau petit monde dans l’exil ou la mort.

Le général observe le fils du Diadoque, se relever, prêt à repartir après cette inspection de circonstance. Seulement motiver par ce qu’en dira tout leurs subordonnés. Car finalement, il n’avait pas vraiment d’en parler. L’un faisait confiance à l’autre, simplement parce que le sang de Tyraemarr coulait en lui. Et l’autre ? Il devait sans doute accorder son crédit à cette esclave qui s’était depuis l’adolescence tant rendu utile.

- Ce sera tout, qu’il lui répondit d’un air atone, ne souhaitant pas plus l’importuner. L’un et l’autre n’était pas taillé pour ces rencontres formelles, dicté par des règles futiles mais scrupuleusement observé par leur public.

Sitôt que le Prince disparut derrière les plis de la tente repartant arpenter le ciel, privilégié parmi les hommes pour approcher cette puissance immémoriale. Lui, Pausanias, reporta son attention vers ses subalternes. Un amas, de capables et d’incapables, de nobliaux et d’affranchis. Mais tous des hommes, sans doute prêt à marcher jusqu’au frontière du monde.