Sujet: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Sam 11 Aoû - 13:55
Au beau milieu du morne hiverYoren & Myria
La nuit était tombée depuis plusieurs heures désormais et dans les cieux nocturnes aux allures de ténèbres à peine entredéchirés par les pales rayons d'une lune moribonde aux éclats nacrés. Le camp semblait plongé dans un état de tranquillité profond. Le banquet avait eu lieu deux jours plus tôt et la routine martiale avait repris son cours de manière impitoyable. A peine fêté mon couronnement, la mémoire de mon illustre et glorieux prédécesseur ainsi que celle de tous nos braves frères d'armes et soldats tombés au champ d'honneur à Eysines, l'avènement d'un nouveau futur pour le Conflans et les Iles de fer. A peine fini les chants en hommage à la plus grande charge de tout les temps menée par le roi des rois en personne, les hymnes guerriers gueulés comme si hurler permettait d'exorciser toutes les peurs celles de ce passé auquel on avait réchappé que de justesse et celles de demain qui s'annonçait tout aussi sanglant, les prières aux Sept comme au Dieu Noyé chantées solennellement en chœur par des milliers d'hommes et planant au dessus de nos tètes comme une mélopée funeste aussi belle que tragique. A peine tout cela achevé que la dure réalité reprenait ses droits sur le monde.
J'espérais avoir convaincu les barons riverains avec ma vision de ce que devait être l'avenir du royaume des Fleuves et du Crépuscule. Une vision articulée en plusieurs axes reposant sur un projet de réforme politique solide. Au vu de la meilleure volonté constatée chez les troupes riveraines le lendemain de la beuverie je pensais que cela avait été le cas. Le royaume de mes aïeux ne pouvait espérer se perpétuer sans de profonds changements et c'était ici au milieu de la dernière partie continentale de mon territoire que je les avais amorcé. Joren en son temps avait compris que ce que voulaient les riverains n'était ni plus ni moins que ce qui existait dans le Val. Mais, l'état d'esprit des rois Hoare avait rendu cet espoir impossible à réaliser car les rois de la noire lignée avait toujours écrasé le Conflans de leur poigne ferme parfois pour de bonnes raisons et parfois par simple cruauté. Je représentais le changement presque malgré moi car ma situation était critique et mon ascendance déshonorante mais au lieu de tenter de le réfréner je l'embrassais pleinement. Yoren le batard légitimé, Yoren le roi pirate, Yoren le requin noir, Yoren le réformateur, Yoren le bâtisseur je me demandais lequel de ces surnoms passerait à la postérité si je venais à tomber au cours de la reconquête.
Récompenser la loyauté et punir la félonie était un raisonnement logique de n'importe quel souverain dans une situation comme la mienne. La routine martiale révolutionnant l'armée avait reprise et c'était cette dernière qui fatiguait les hommes. Mais mieux valait une saine fatigue aujourd'hui pour une victoire plus aisée demain que le contraire. Quant à ma garde royale celle ci se constituait bon gré mal gré selon mes instructions. Je l'avais voulu à mon image imposante et sauvage. Si je réformais le pays au niveau politique, économique et militaire je pouvais au moins m'offrir une garde personnelle conforme à mes envies. Toute la maison Hoare se devait d'être protégée et plus particulièrement Helena. Oh, le mariage n'avait pas encore eu lieu mais cela n'était plus qu'une question de temps tant les préparatifs semblaient incessants. Cette union bénie des Sept et du Dieu Noyé et les festivités qui s'ensuivraient viendrait offrir un nouveau répit aux hommes ainsi qu'un motif de réjouissance pour mon peuple. Tandis que je quittais ma tente pour aller savourer un grand bol d'air frais emmitouflé dans une épaisse fourrure si lourde qu'elle pesait même sur mes épaules six gardes royaux en armure d'ébène, la cape grise flottant au vent, le visage tatoué, le casque nasal sur le front et la grande hache à deux mains sur l'épaule m'escortèrent jusqu'aux lieux du banquet.
Là, je m'asseyais fort cavalièrement sur l'une des tables vides et portais ma coupe de vin chaud au lait de pavot à mes lèvres le regard perdu dans le vide. J'étais là sans être là. Perdu quelque part dans ce que les hommes sages nommeraient les limbes illusoires d'un avenir rêvé. Dans la cour d'une forteresse de grande taille sans égaler celle de la maudite Harrenhall je me tiens droit et royal tandis qu'un garçonnet de cinq ans s'entraine à monter à cheval sous l'égide d'un chevalier. Le petit garçon chancelle un instant sur son poney avant de se rattraper de justesse puis d'afficher une moue rayonnante de fierté en faisant avancer sa monture à la robe de jais au pas sous le regard aiguisé de son professeur. L'enfant monte comme un centaure. Nul doute que le sang des Bracken coule dans ses veines. Un instant, le petit prince souffle pour écarter une mèche de cheveux cendrée de son visage aux yeux gris acier. Alors qu'il fait le tour de la cour intérieure, l'enfant m'adresse un signe de la main et je l'applaudis bruyamment en vantant ses talents de cavalier émérite sous le sourire du maitre d'armes et du maitre des écuries royales. Puis, une petite chose percute durement mes jambes mais je reste ferme sur mes appuis. Me tournant j'abaisse mon regard sur la petite fille qui se blottit contre mes jambes et un large sourire étire mes royales lippes. Je me penche en avant pour la prendre dans mes bras et dépose un bisou sur son front avant de la faire tournoyer au dessus de moi ce qui lui arrache des petits cris effrayés.
Ramenant ma fille dans mes bras, je remarque Helena qui s'approche de moi plus resplendissante que jamais un nourrisson dans les bras. Ma reine m'embrasse avec toute la fougue de son caractère et je lui rends son baiser avec une passion similaire. Celle-ci m'indique que le conseil des seigneurs du royaume attend ma présence et je l'embrasse une nouvelle fois avant de déposer ma princesse au sol puis de me diriger d'un pas tranquille vers la salle du conseil une douzaine de gardes royaux sur les talons. Les seigneurs fers nés et riverains s'inclinent sur mon passage tandis que je vais prendre place en bout de table avant de faire signe à l'intendant de dérouler l'ordre du jour. Les débats s'animent séance tenante et je me languis déjà de la présence d'Helena. L'exercice est ennuyant mais nécessaire. Engoncé dans une royale posture j'écoute avec attention les propositions de chacun, jaugeant, analysant et réfléchissant avant de me prononcer ou de remettre mon jugement au lendemain. Les greffiers grattent le vélin de leurs plumes acharnées. Le commerce est florissant m'apprend un échevin car l'axe Castral Roc, Beaumarché, les Eryés est une source de prospérité assurée.
Un sourire étire mes lèvres alors que je repense à la personne m'ayant soufflé cet ambitieux projet il y a désormais des années de cela. Puis, d'un geste je mets fin à l'assemblée avant de retenir auprès de moi les quatre plus grands seigneurs du royaume. Ceux des maisons étant restées loyales alors même que l'héritage de mes ancêtres n'était plus que débris. Nous parlons de l'armée et de son évolution. Le sujet me passionne fidèle à ma nature. Dans la paix, j'ai pris gout aux joutes et aux mêlées ces traditions continentales afin de canaliser ma nature guerrière. Mais, améliorer l'armée du royaume est une obsession chez moi car je ne veux plus jamais revivre les sombres jours durant lesquels ma lignée a manquée de s'éteindre. Je ne veux pas d'une belle armée comme le fut la notre dans le temps mais d'une force militaire efficace et souple comme elle l'est devenu suite à mes réformes. Demain j'écouterais les doléances et arbitrais les querelles pour l'heure, je veux revoir mon épouse et qui sait lui faire un autre enfant. Soudain, tout disparait devant mes yeux et je me vois à genoux sur un champ de bataille une nuée de corbeaux croassant autour de mon visage tandis que du sang s'écoule de mon visage et de sous mon armure de plates de jais.
Je laisse tomber mon casque d'un coup de sangle et tente de me redresser en prenant appui sur mon épée mais je m'effondre lourdement pour ne pas me relever. Revenant dans la réalité après cet élan fantasmagorique je renverse ma coupe de vin d'un geste brusque involontaire ce qui inquiète mon élite qui se place en position de combat circulaire autour de moi. L'un des gardes me demande si tout va bien et je lui réponds que oui. Reprenant peu à peu pied dans la réalité, mettant cela sur le compte du froid et de mes blessures. Je porte la main à la cicatrice courant de mon front à ma joue avant de me relever et de prendre le chemin de mon pavillon royal d'un pas raide. Arrivé devant la gigantesque tente au dessus de laquelle bat mon enseigne dans le vent nocturne, j'ai la surprise de constater la présence de la princesse Myria Hoare que j'avais gracié le soir du banquet. Que faisait elle ici ? La gracier ne suffisait il pas ? Qu'est ce que ma belle sœur attendait encore de moi ? D'une humeur soudainement mauvaise, je pénétrais dans ma tente dans laquelle régnait une chaleur accablante mais délicieusement réconfortante en comparaison à la fraicheur extérieure. Otant ma fourrure et la laissant par terre, je me resservais une coupe de vin sans lait de pavot cette fois ci et la vidais d'un trait. M'essuyant les lèvres d'un revers de main, je donnais finalement l'ordre à mes hommes de la laisser rentrer au lieu de moisir sur le pas du pavillon dans un froid glacial.
Prenant la parole d'une voix sarcastique. "Princesse Myria ? Que me vaut cette visite nocturne ? Votre trahison vous empêche t'elle de trouver le sommeil ? Ou cherchez vous quelqu'un pour réchauffer votre couche ?" Puis, m'asseyant sur mon lit de campagne je l'observais à la lueur des feux dans la pièce. Ma colère refluait peu à peu de mon esprit tandis que je m'interrogeais au sujet de ma nièce qui avait disparu suite à la bataille de Buron. Était elle morte ? En vie ? Abandonné dans un septuaire ou chez une famille de paysans ? Mais mes pensées prirent rapidement un autre chemin que la préoccupation familiale alors que je voyais la bru de feu Harren se déplacer avec grâce et sensualité dans la pièce. Sa captivité chez les Tully lui avait certes fait du mal et elle avait bien du perdre quelques kilos mais sa beauté restait intacte. Une beauté sévère mais langoureuse, attirante mais dangereuse. Une beauté ayant du s'avérer une arme redoutable par le passé mais qui ne fonctionnerait guère sur moi. Pourtant, je me surpris à lui proposer. "Servez vous donc une coupe de vin et venez me rejoindre vous avez l'air frigorifié."
Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Lun 13 Aoû - 2:25
L'eau était glaciale, mais Myria ne fit aucun commentaire à son unique servante qu’elle soupçonnait de l’espionner pour le compte du nouveau Roi du Sel et du Roc. Elle avait pris l'habitude de conditions de vies bien plus difficiles encore que celles qui lui étaient à présent offertes. Si elle n’avait point recouvré tout le confort auquel elle était habituée, et moins encore le respect de ses pairs, au moins conservait-elle son nom, son titre, ses robes et parures ainsi que la tente de Joren. De plus, elle profitait de vrais repas et de suffisamment de vin chaud pour arriver à trouver le sommeil. La jeune femme aurait pu se plaindre, mais à quoi bon. C’était amusant lorsque le Conflans était un grand et puissant Royaume dont elle serait la reine un jour, désormais ça n’avait plus de sens de jouer les précieuses Princesses. Cette eau glacée lui gelait le visage et abîmait ses mains, mais elle avait appris à serrer les dents et à survivre. Sa beauté en souffrait, mais moins que le pays avait souffert de la guerre et moins que son coeur et son honneur n’avaient soufferts des événements.
La Princesse se regarda un instant dans le miroir, face à elle même, face à ses erreurs et ses turpitudes. Il n’y avait pas de quoi être fière. Elle avait enchaîné les échecs depuis que Joren l’avait appelé auprès de lui pour lui annoncer qu’il avait trahi son père. Il lui semblait que les Dieux s’étaient joués d’elle tout ce temps, lui refusant tout succès pour lui faire toucher le fond. La seule chose qu’elle avait réussi était là pire, la seule qu’il lui arrivait de regretter, celle qui lui avait le plus coûté : tuer son bien aimé.
Survivre. À tout prix, survivre.
La Hoare ne savait plus qui elle avait trahi et à qui elle avait été loyale à force d’envisager toutes les options. Mais surtout elle ne savait plus pourquoi elle avait été loyale à Harren. Tout ça pour ça… Aucune reconnaissance. Elle prit appui sur ses mains enfonçant sa tête baissée entre ses épaules. Et pourtant, je suis en vie. Elle releva la tête et de fixa d’un oeil sévère, comme elle aurait fixé le Roi des Rois s'il était là.
__ Tu ne m’as pas donné la couronne malgré ce que j’ai fait pour toi Harren, et maintenant c’est une autre qui est destinée à la porter à ma place. Mes fils n’auront que les miettes que Yoren voudra bien leur laisser. Et moi, à quoi je sers, quel est mon destin dans tout ça ? Si je ne suis pas reine, moi qui suis née pour gouverner, pour donner une voix au Conflans, que vais-je donc bien pouvoir faire. Je pourrais me battre et encore me battre pour récupérer mon titre à n’importe quel prix. Je devrais peut être le faire parce que je ne sais faire que ça. Mais je ne le ferais pas car ça ne serait pas servir le Conflans comme j’ai toujours essayé de le faire. »
La brune eut un petit rire sarcastique.
__ Quelle ironie, pendant que je m’échine à réunir ce pays, se sont ceux qui le divisent qui me traitent de traîtresse et ceux que j’essaye de sauver qui me crachent à la figure ! »
Se disant, elle avait saisi la vasque de porcelaine et l’envoya valser à travers la tente. La camériste se précipita pour ramasser les morceaux. Une fois fait, elle aida Myria Hoare à s'habiller et à se coiffer puis cette dernière alla prendre l’air. Elle était là depuis deux jours et chacune de ses sorties était une épreuve, mais lorsqu'elle était enfermée dans cette tente, elle tournait comme un lion en cage.
La jeune femme aux yeux azur portait une robe de taffetas vert ajustée qui découvrait ses épaules et se fermait par de petits crochets sur le devant. Par dessus, une houppelande de velours vert sombre dotée de longues manches doublées de brocard doré avec de la fourrure noire aux ourlets, sur le profond col en V et en bas de la robe. Une ceinture de cuir noir fermait la houppelande. Elle était ornementée de plaques de bronze doré ciselé aux armoiries de la maison Hoare. Une lourde tresse ornée d’anneaux d’or ciselés tombait sur son épaule droite, d’imposantes boucles d’oreilles assorti à un lourd collier terminaient la parure princière. Elle jeta une cape de fourrure noire sur ses épaules pour se tenir un peu plus chaud.
La princesse s’arrêta sur la lice et observa l’entraînement avec un sourire, elle n’entendait pas grand chose aux passes d’arme à proprement parler, mais la simple vision du jeune Roi et de ses hommes à la tâche était réconfortante. Elle se souvint des oeillades que Joren lui adressait lorsqu'il s’entraînait et sentit son coeur de serrer. Que n’aurait elle pas donné pour le voir lui plutôt que son demi frère bâtard. Tu ne m’as pas laissé le choix mon amour. Alors que le visage de son Prince se dessinait sur les traits de Yoren, elle détourna ses yeux mouillés et quitta le champ d’entraînement et erra quelques temps.
Quelqu'un cracha non loin de la brune, elle savait que cela lui était adressé et préférait ne même pas savoir qui lui adressait cette marque de mépris. Elle continua donc son chemin de sa démarche altière sans broncher, ravalant sa rage et ses larmes. Plus loin, un petit groupe de soldats lui fit barrage pour l’insulter, elle se contenta de se murer dans le silence et dans la froideur d’un regard appuyé. L’un d’eux fit un mouvement vers elle, elle fit un pas en arrière prête à attraper la dague dissimulée entre ses seins. Son garde du corps, mandaté par Yoren, probablement plus pour la surveiller que pour la protéger n’avait pas levé le petit doigt sur le cracheur et elle commençait à se demander s’il comptait empêcher les soldats Fer-nés particulièrement virulents de la tuer, où pire. Si tel n’était pas le cas, elle vendrait chère sa peau et le peu d’honneur qui lui restait. Heureusement, celui-ci dégaina partiellement son épée et fit non de la tête ce qui suffit à faire reculer les hommes. Soulagée mais pas moins échaudée, elle préféra regagner sa tente pour y écrire quelques missives et ne reparut pas de la journée.
Le soir venu, Myria se dirigea vers la tente du Roi dans l’espoir de mettre les choses à plat pour pouvoir à nouveau avancer. Hélas, il dînait dehors et elle attendit donc longuement dans le froid glacial. Quand elle le vit enfin arriver, elle ne sentait plus ses pieds, ses mains étaient gelées, son nez, ses joues et ses lèvres rougis et transis de froid. Et Yoren la fit encore attendre quelques instants qui lui parurent une éternité. S’il lui refusait audience après une telle attente, elle mourrait de froid devant sa tente ! Heureusement, ce ne fut pas le cas et c’est avec un langoureux soupir de soulagement qu’elle s'engouffra dans la tente où régnait une douce chaleur réconfortante.
__ Qui ais-je donc trahi, dites moi ? »
La veuve se servit du vin et en apporta une coupe pleine à Yoren. Elle parlait d’un ton calme mais grave, plongeant son regard azur dans celui du Roi.
__ J’avais prévenu Harren que j’allais effectuer des manoeuvres politiques douteuses, que je ferais ce qu'il ne pouvait pas faire. Je pensais qu'il avait compris qu’il s’agissait de gagner la confiance de l’ennemi ! Et cet imbécile se précipite pour frapper mon nom et ma lignée d’infamie ? Comme si la trahison de Joren ne nous avait pas suffisamment divisés ! Les Hoare et leur absence totale de sang froid ! Je vous maudirai sur cent générations si je n’en était pas devenu une par la force des choses, si mes enfants n’en étaient pas. »
Le ton était monté, le regard de la princesse s’enflamma et elle se dirigea vers la table de sa démarche féline. Réchauffée, elle enleva sa cape de fourrure et la posa sur le dossier d’un fauteuil. Dégageant sa lourde tresse de sa blanche nuque d’un gracieux mouvement de la main. Elle but d'une traite la coupe de vin et se resservit, puis reprit, tournant lentement pour faire à nouveau face à Yoren.
__ J’étais partie pour convaincre le Tully de revenir dans nos rangs pour unir à nouveau tout le Conflans. Je voulais recueillir des informations sur les défenses de Vivesaigues et l’organisation des forces du Conflans Libre. Je voulais sonder l’Empereur pour trouver ses faiblesses. Je n’ai réussi qu’à me faire emprisonner et à être condamnée par Harren. Je n’étais pas là quand mon peuple et mon Roi avaient besoin de moi à Eysine et croyez bien que je le regrette. Je vous accorde que j’ai pris bien trop de risques pour bien peu de résultats, mais je pensais pouvoir compter sur l’intelligence stratégique d’Harren pour comprendre mon jeu et en tirer le meilleur parti quel que soit mon sort. N'avais-je donc pas prouvé ma loyauté en tuant l’homme que j’aimais pour le bien du Royaume ? »
La brune plongea un regard triste et désabusé au fond de sa coupe avant d’y plonger les lèvres. Il lui semblait qu'il faisait vraiment chaud dans cette tente, elle défit donc sa ceinture pour enlever la houppelande et la poser sur sa cape.
__ Qui a écrit au Grand Septon pour qu’il dirige la croisade sur les jumeaux ? Qui a essayé de convaincre Joren d’abandonner son projet dément par tous les moyens jusqu'à ce qu’il décide de ne plus jamais me parler, même après que j’ai mis nos jumeaux au monde ? Qui s’est excusé auprès de l’Ouest pour les frasques inconsidérées du Prince ? À l’heure où mon époux abandonnait ses hommes à la vengeance aveugle du Noir, qui a prit la tête de l’armée pour réunir nos forces sous l’unique bannière Hoare ? Lorsque les cavaliers d’Orys Baratheon nous faisaient face sous une pluie de traits à Buron, qui est resté avec les soldats pour éviter la débandade ? Qui a écrit à la Reine Jordane pour que les Lannister entrent en guerre suite au massacre des combattants de la foi venus de l’Ouest ? Personne dans ce foutu Royaume n’en a fait autant que moi. Personne n’a payé ses erreurs aussi cher que moi. Personne n’a été aussi acharné que moi pour que les alliances et les amitiés survivent à cette guerre ainsi que la famille et le Royaume. Je mène le vain combat d’être une femme de paix au milieu d’hommes de guerre depuis tant d’années que je ne sais plus si, une fois, une seule petite fois, mes actes ont comptés. »
La brune était tellement en colère qu’elle en avait les larmes aux yeux. Ses poings se relâchèrent doucement alors que son regard de perdait dans le vague. Elle ferma les yeux une seconde et quand elle les rouvrit, ils s’étaient à nouveau posés sur le Roi.
__ Merci d’avoir veillé sur mon fils malgré tout. »
Myria eut un sourire furtif de gratitude avant de continuer sur un ton nettement moins affable.
__ Quoi qu’il en soit, j’exige que mon nom soit lavé ainsi que celui des Frey. Je veux aussi une épée lige plus à même de défendre mon honneur… et de l’eau chaude pour ma toilette. »
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Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Lun 13 Aoû - 18:18
Au beau milieu du morne hiverYoren & Myria
Assis sur le rebord de mon lit de campagne probablement bien plus confortable que celui qui aurait pu être le mien dans le donjon de la forteresse de Pierremoutiers, j'observais Myria d'un œil terne. Bien plus terne que l'on n'aurait pu s'y attendre d'un homme comme moi. La concupiscence naturelle qui me collait d'ordinaire à la peau semblait avoir disparue pour laisser place à une mine grave et marquée par bien plus que la cicatrice traversant mon front pour aller s'achever sur ma joue droite en un sillon imparfait et irrégulier. A dire vrai ce n'était point tant le fait d'avoir manqué de perdre la vie à Eysines qui m'avait changé ou du moins amorcé ce processus inaltérable de ma personnalité. Car la mort faisait partie intégrante de ma culture de naissance et comme le répétaient si bien nos prêtres. Et encore bien plus la glorieuse mort du guerrier les armes à la main. Une telle fin était un honneur incommensurable digne de faire parvenir une âme auprès du Dieu Noyé afin de festoyer éternellement dans son maritime panthéon. Ce qui est mort ne saurait mourir mais renait plus fort et plus vigoureux à la peine. Non, ce qui expliquait cette expression désabusée et empreinte d'une gravité que l'on ne m'aurait jamais prêté en public parce qu'un souverain se devait d'être le roc sur lequel se reposait son peuple au milieu de la tempête en toutes circonstances ce n'était point d'avoir frôlé la mort et senti l'haleine putride de la faucheuse au cours de mes songes enfiévrés ou du semi coma que j'avais vécu lors de la retraite précipitée vers le Sud Conflans.
Ce qui expliquait mon attitude à l'opposée de mon caractère habituel s'avérait être la prise de conscience de la tache titanesque qui m'attendait, la révélation du poids de cette couronne que je n'avais jamais désiré mais que le Destin avait placé sur ma tète ainsi que les incertitudes et les doutes qui me rongeaient par moments comme tout un chacun. Tout roi que j'étais je n'en restais pas moins un simple mortel capable de se tromper et de faire les mauvais choix. Or désormais, tout mon peuple comptait sur moi et l'époque presque doucereuse des abordages et des pillages semblaient désormais bien lointaine. J'avais rapidement pris conscience que j'allais devoir changer radicalement afin d'acquérir la stature d'un roi pour souder autour de ma personne les plus rétifs. Mes compatriotes insulaires me vouaient une allégeance aveugle mais les riverains s'étaient montrés compliqués. Les différentes mesures que j'avais prises afin de prouver ma volonté de rupture avec un passé certes glorieux mais injuste qu'il s'agisse d'une chartre politique, d'investissements massifs, d'avantages commerciaux avaient je l'espérais tempérer leur rancœur quant au fait de voir un fils illégitime à leur tète cependant bien plus que mes actions ma manière d'être et de penser serait elle aussi jugée.
Oh une fois marié à Helena les barons seraient forcés de se montrer plus dociles ne serait ce que parce que ma promise leur tiendrait aisément la dragée haute au vu de son caractère flamboyant mais j'aspirais à mériter leur allégeance car ma vision de l'avenir du Conflans dépendait de cette union sacrée entre deux peuples antagonistes. Mon regard terne tenait probablement de cette découverte amère. Celle qu'être roi était un poids bien plus qu'une récompense, un devoir bien plus qu'un honneur, une obligation bien plus qu'un plaisir. Harren était mort bien trop tôt sans même me former un tant soit peu à sa succession et voilà que j'apprenais sur le tas, tel un autodidacte funambule louvoyant entre deux précipices. Tant d'Hoare étaient tombés d'abord ce demi-frère que j'avais toujours haï et jalousé, puis père lui même avec lequel je n'avais jamais entretenu de lien filial et enfin les derniers enfants de Myria dont on ne connaissait guère la localisation. Celle qui fut jadis la plus puissante maison de Westeros se trouvait au tournant de son histoire et moi qui n'avais jamais vraiment été porté sur la famille me surprenais à ressentir un élan protecteur envers tous ses membres qui m'avaient pourtant majoritairement rabaissé par le passé.
Mon regard ne quittait point ma belle sœur tandis qu'elle entrait dans le pavillon comme une tornade en furie, pressée par un vent glacial de s'abriter dans les flammes dignes du soleil Dornien. La camériste m'avait rapportée ses monologues sarcastiques et un peu fou face à son miroir de même que ses phases de colère soudaine. Quant au garde du corps fer né que je lui avais assigné il s'agissait d'un excellent ami à moi et vénérable compagnon d'arme qui n'était autre que le fils ainé de l'un de mes commandants. Le Timbal m'avait rapporté chaque mouvement de la princesse dans le camp sans avoir besoin d'évoquer les traitements dégradants que les fidèles du Dieu Noyé composant mon armée lui avaient réservés. Mon compagnon d'arme n'avait du tirer l'épée qu'une seule fois pour dissuader un petit groupe de fer nés de s'adonner aux pires exactions sur la toujours princesse du royaume. Le dernier cadeau empoisonné d'Harren à sa bru. Mesurait elle ce que m'avait couté ma clémence ? Mesurait elle que le fait de l'avoir gracié avait pu déplaire à mes plus fidèles guerriers ? Mesurait elle qu'en la laissant en vie je lui prouvais que j'estimais pouvoir lui faire confiance ? Mesurait elle que si je l'avais fait c'était pour la mémoire de ce demi frère avec qui j'avais partagé du sang noir en commun malgré notre détestation mutuelle ? Mesurait elle que je l'avais gracié pour marquer ma rupture politique avec mon glorieux et illustre géniteur ? Non, bien sur que non car Myria Hoare était ainsi faite qu'elle s'imaginait que tout lui revenait de droit, trait qu'elle avait partagée sans nul doute avec Joren jusqu'à la mort de ce dernier.
Aussi excédé par son expression agressive je faisais fi de ses lèvres rendues presque écarlate par le froid, ses mains et ses pieds probablement à deux doigts du gel ainsi que ses joues d'une blancheur nacrée cadavérique. Superbe même dans une telle situation, je ne perdais pas un instant pour me défouler et lui lançais sans ménagement une pique pleine de sarcasme. L'ouragan qu'était ma belle soeur allait rencontrer une autre tempète ce soir. Et, je ne savais guère comment cela pourrait finir. Sa réponse dans un premier temps mesuré me fit hausser un sourcil tandis qu'elle nous servait à chacun une coupe de vin et qu'elle m'en apporta une nouvelle coupe que je saisis doucement de ses mains glacées. L'étaient elles autant que son cœur ? Son regard azur se planta dans le gris acier qu'était le mien et tandis que je répondais la mine fermée. "Votre maison. Votre titre. Votre roi. Moi et votre fils. Une princesse ne s'enfuit pas chez l'ennemi à la veille d'une bataille décisive sans s'imaginer que l'on ne l'accuserait de trahison." Ma voix était trompeusement calme et aussi glaciale que le vent d'hiver et le cœur de la nuit. Aussi grave et mesurée que la sienne. Comme si je ne faisais qu'énoncer un constat sans la moindre once d'émotion.
Et c'était quelque part le cas car je l'avais bien gracié de cette condamnation paternelle. "Ais je l'air de manquer de sang froid princesse Myria ? Maudissez nous donc vous ne seriez que la énième d'une longue liste tant tout ce continent nous a toujours craint et méprisé ! La trahison de mon demi frère n'eut guère été d'importance si ce dernier avait eu le discernement de mieux choisir son moment. A l'issue de la victoire contre l'empire par exemple ! Joren a fragilisé une situation déjà précaire et rien que pour cela il méritait de mourir. Notre emprise sur le Conflans a toujours été plus ou moins fragile et voilà que ce bien né a eut la superbe idée de creuser un peu plus la fosse commune menaçant tous de nous engloutir. Ne traitez point mon père d'imbécile ! Vous lui devez tellement ! Quoi qu'il est vrai que sur la fin je ne le reconnaissais plus. Nul doute que la perte de Joren combinée à celle de la moitié de son armée à Buron ont du l'atteindre bien plus qu'il ne voulut bien l'admettre. Après tout il n'était qu'un homme. Comment croyiez vous qu'il allait prendre vos manœuvres alors qu'il venait juste de subir la félonie de son propre héritier ?! Pour une fois dans votre vie Myria vous auriez du vous contenter de respecter votre rang." Passant une main sur mes bandages aux cotes tandis que ma belle sœur se dirigeait vers la table de campagne de sa démarche aguicheuse, je laissais mes oreilles savourer le crépitement des buches. Celle-ci ôta son lourd manteau, le posa sur une chaise et dégagea sa lourde tresse d'un mouvement habile et séduisant.
Tandis que je retirais mes bottes la princesse vidait une coupe de vin puis finit par se retourner vers moi. Posant une main sur le collier que m'avait offert Helya sur Pyke il y avait désormais une éternité de cela, je laissais tomber ma coupe de vin vidée d'un trait sur le tapis de la tente. C'est d'une voix moins dure et agressive que je répondais cette fois ci. "Si vous aviez prouvé votre loyauté en faisant abattre Joren et croyez bien que si vous êtes encore en vie c'est en partie en raison de ce sacrifice. Mais vous avez été folle de vous imaginer capable d'un tel exploit. La trahison du Tully ne pourra être récompensée que d'une seule manière et ils vous haïssent autant qu'il me haïsse, qu'ils haïssent tout ce qui a trait au Sautoir. Vos intentions étaient donc louables à n'en point douter mais il ne m'étonnerait guère que vous aviez également tenté de vous offrir une porte de sortie satisfaisante de ce marasme sanglant ne le niez pas. Le désespoir peut nous faire faire des actions insensées mais je vous connais Myria. Si l'empire vous avait proposé quelque chose d'alléchant pour vous et vos fils vous m'auriez trahi sans ménagement. Mais vous êtes là bien vivante et donc utile."
Tandis que ma belle sœur plongeait ses yeux dans sa coupe, je continuais. "Oui, vous auriez du être là pour votre peuple car dans la victoire comme dans la défaite un dirigeant se doit d'être au devant des siens sinon c'est qu'il ne les méritent pas." Myria trempa ses lèvres pourpres dans le vin avant de se défaire de sa ceinture et de sa houppelande dévoilant des formes alléchantes dans un corsage plus léger. Pour ma part, je n'avais point si chaud mais il fallait reconnaitre que j'étais encore en convalescence de mes blessures de guerre aussi la normalité niveau température m'échappait quelque peu. A l'issue d'un monologue sincère et d'autant plus vibrant qu'il n'était qu'empreint de vérité de la princesse, je levais deux mains comme pour mettre fin au débat futile de tous les efforts qu'elle avait sacrifié pour son royaume. "Oui, oui princesse c'est vous et encore vous qui étiez derrière tout cela ! Nul besoin de me le rappeler je ne le sais que trop bien. Oh mais vos actes ont comptés puisque je vous ai gracié en pesant le fruit de vos efforts et celui de votre "trahison". Une femme de paix dites vous. Je ne sais pas si je suis un homme de paix mais je pense être un homme de guerre avec une vision de paix. Tant de braves fers nés tombés bien trop loin des mers de notre Dieu. Tant de braves riverains loyalistes tombés pour avoir choisi de servir leur souverain légitime plutôt que le traitre inféodé aux envahisseurs étrangers. Un royaume exsangue. Je n'aurais jamais cru pouvoir penser dire cela un jour mais je chéris la paix comme un homme chérit un rêve inatteignable. La guerre coule dans mes veines mais je ne veux pas qu'elle hante mes futurs enfants."
Je ne remarquais que tardivement les larmes s'écoulant silencieusement des joues de la princesse et ses poings si serrés qu'elle en aurait mal durant des jours si elle ne les desserraient pas. "Beron est également de mon sang, je n'ai fait que mon devoir d'oncle et d'Hoare." Répondais-je d'une voix laconique. Puis, sentant un soupçon de colère monter en moi, je me relevais brusquement et m'approchais de ma belle sœur d'un pas menaçant. "Que les choses soient claires princesse. Vous n'êtes guère en mesure d'exiger quoi que ce soit de moi. Je vous conseille de vous le mettre dans le crane avant que je ne vienne à changer d'avis à votre sujet. Une fois juste en face de ma ravissante belle sœur, je plantais un regard courroucé dans le sien avant de reprendre. Ce sont vos actions qui laveront votre nom ! Ne croyez pas que je vais vous offrir une rédemption juste parce que vous me le demandez. Si vous aimez tant ce royaume vous le servirez avec justesse et honneur et par ce biais vous effacerez la souillure de ce passé honteux. Quant aux Frey, ils ne sont guère des traitres à mes yeux. Harren les a laissé démuni face à une invasion nordienne aussi je comprends leur choix et peux aisément le leur pardonner. Ils ont d'ailleurs prouvé leur loyauté d'une manière bien malhabile. Votre oncle sera libéré et sera votre protecteur. Quant à l'eau chaude n'exagérez pas ! Nous sommes en guerre au cas ou vous l'auriez oublié et si votre souverain peut s'en passer vous ferez de même." Me radoucissant quelque peu, je reprenais d'une voix plus calme. "Bien vous aurez votre eau chaude. Avez vous diné ?" M'éloignant de Myria, je m'approchais d'une autre table sur laquelle avait été déposé à mon attention des plats aussi divers et variés que nous pouvions nous le permettre. Déposant ma couronne sur un coussin je saisissais le plateau et retournais m'installer sur mon lit avant de commencer à trancher une pomme d'un couteau prévu à cet effet.
Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Mer 15 Aoû - 11:57
Myria n’ignorait rien des conséquences de ce que le Roi des Rivières et du Crépuscule avait fait pour elle. Mais elle voulait rétablir la vérité, que justice soit faite, pour elle et pour que le Roi n’ait pas à se justifier de l’avoir graciée. Elle n’allait pas le remercier de sa clémence alors que la condamnation était injustifiée. D’ailleurs, elle disait merci à sa manière, elle le soutenait et était prête à le conseiller et à l’aider ainsi qu’à partager ses idées pour le Royaume et ce malgré le fait qu'elle savait pertinemment qu’elle ne serait pas Reine. Mais pas à supplier pour rester en vie, s’il voulait la tuer pour être tranquille, alors qu’il le fasse et en assume les conséquences. Plutôt mourir que de vivre à genoux.
__ C’est faux ! Je n’ai trahi personne ! J’ai servi, comme j’ai toujours servi le Conflans. Vous n’avez donc rien écouté ? Je n’ai pas fui. JE N’AI PAS FUI ! Ais-je fui à Buron ? N'étais-je pas aussi près de l’ennemi qu’une Princesse peut se permettre ? Vous pensez vraiment que je suis lâche ? Dites moi, à quel moment ais-je fait preuve de lâcheté ? Quand je vous ai soutenu face à Harren et ses généraux, contre mes intérêts personnelles et que votre père m’a menacé de mort ? Quand j’ai tenté de dissuader Joren d’agir au pire moment et qu’il m’a claqué la porte au nez le voyant nous condamner tous en essayant de réparer ses dégâts en coulisse ? Quand j’ai vu mes hommes tomber sans flancher pour laisser à Harren le temps de nous rejoindre ? Quand j’ai traversé le champ de bataille pour constater les dégâts de ma méprise et retrouver Lyle à moitié mort ? AIS-JE ÉTÉ L CHE ? Si vous me trouvez lâche alors vous ignorez ce qu’est le courage. Si vous me trouvez faible alors vous ignorez ce qu’est la force. Peut être pensez vous que le courage c'est de se jeter dans la bataille sans craindre la mort, c’est tellement Fer-né. J’ai payé mon courage plus cher qu'aucun d’entre vous et c’est toujours vous les braves. »
La jeune femme fit une courte pause le temps de se calmer un peu. Je ne savais rien pour Eysine, je savais juste que si je parvenais à convaincre ne serait-ce qu’un seul Seigneur du Conflans Libre de revenir auprès de moi, cela ferait la différence pour toutes les batailles à venir. Pour la guerre. Pour le Conflans. Je devais essayer, au péril de ma vie et malgré le risque qu’Harren se fourvoie sur mes intentions.
__ Lyham voue une admiration sans borne à l’Empereur, il est plein de doutes et manque cruellement du courage nécessaire pour gouverner. Cela me brise le coeur de le dire, il fut un ami précieux, mais il n’est plus l’homme que j’ai connu. Mais je commence à comprendre ce qui a rendu Harren fou, si on lui a donné à penser que j’avais fui en toute connaissance de cause, je comprends qu'il ait voulu ma tête, quitte à diviser une fois de plus le pays. Je ne sais pas qui lui a glisser cette idée à l’oreille, mais quoi qu'il en soit, sa décision précipitée de me faire rejoindre le camp du Conflans Libre était idiote et contre-productive. Sa promptitude à la vengeance a toujours été un fardeau pour le Royaume, comme sa vision étriquée du pouvoir. Cela nous a peut être coûté Joren, cela nous a coûté Lord Salfalaise, et maintenant moi ? Il aurait pu se servir de ma disparition pour fédérer au lieu de quoi il a répandu un peu plus le doute chez les riverains. Doute que vous devrez balayer pour souder le pays autour de votre personne. »
Allez vous, vous aussi enchaîner les conneries sans nom ? Putain de merde, on marche sur la tête, je dois sans cesse me justifier d’agir pour le bien du pays avec les armes qui me sont données et ceux qui, par pur égoïsme, le plonge un peu plus dans le désespoir, sont encensés ? Levez vos verres à Harren le Noir, le Roi des Rois !
__ Oui sire ! Pour sonder les âmes, pour négocier, pour faire de la diplomatie, pour charmer, pour jouer mes cartes, celles de la paix, de la raison, de l’empathie et de la conciliation, je dois contacter tout le monde, même nos ennemis. C’était une erreur de me rendre à Vivesaigues, mais cette erreur, je devais la commettre pour réduire à néant mes espoirs de réunifier le Royaume et d’arrêter cette guerre fratricide avant qu’il ne soit trop tard. Il est trop tard. C’est eux ou nous. »
La veuve regarda le feu d’un brasero jusqu'à ce que ses yeux pleins de larmes soient bien secs et dénoua sa gorge serrée avant de reprendre, les yeux dans le vague comme pour elle même.
__ Je n’étais pas prête à massacrer les deux tiers de mon peuple, des cousins, les frères d’arme de Joren ou de mon frère, des amis, tous Riverains, tous mes enfants. Je voulais les rassembler pour les sauver tous. Je n’ai sauvé personne. Croyez bien que je paye chacune de mes erreurs toutes les nuits, vous verrez dans quinze ans si vous parvenez encore à trouver le sommeil. Si les choix que vous avez fait et les morts que vous avez laissés sur le champ de bataille ne viennent pas vous hanter. Mais vous avez certainement déjà perdu des hommes, des amis même, peut être que cela ne vous fera rien. »
La brune ferma les yeux et chassa le souvenir des morts de Buron en secouant la tête. Puis, elle fit de nouveau face à son Roi qui lui parlait encore de trahison.
La Hoare se mit à rire, Yoren la connaissait peut être, mais pas aussi bien qu’il pensait. Elle ne cracherait pas sur une couronne, pour sûr, mais pas à n’importe quel prix.
__ Torrhen m’a proposé la couronne du Bief un peu avant Buron. Vous conviendrez que c’est plus qu’alléchant. Mais comme vous le dites, je suis là, toujours au service du Sautoir, dépouillée de la couronne qui m’a été promise et de mon honneur. Je suis ravie d’être restée loyale, vous n’avez pas idée, j’en ai été si bien récompensée. »
Myria eut un rire jaune, mais finit par reporter son attention sur le discours plein de bon sens de Yoren.
J’ai fait ce rêve aussi. Mais dans ce rêve, j’étais Reine.
__ Maintenant que vous êtes à la tête du Royaume, vous savez quel poids vous portez, l’espoir et la vie ou le renoncement et la mort. Maintenant que vous êtes roi, vous avez cessé de vous pavaner car ce n’est pas un jeu, n’est ce pas. C’est l’avenir de votre peuple qui se joue en plus du vôtre et de celui de votre lignée. »
La princesse plongea un sombre regard sur Yoren, elle avait en cet instant un visage grave qu’on aurait dit qu’elle portait le monde sur ses épaules. Elle lui sourit tristement.
Alors que Yoren s’approchait, menaçant, la brune aux yeux azurs ne bougea pas d’un pouce et encaissa ses propos sans mot dire, soutenant simplement le regard du géant. Elle s'approcha encore de Yoren, se collant presque à lui. Il la dépassait d’au moins deux bonnes têtes, et le menton levé, un regard assuré plongé dans le sien elle affirma sans détour :
__ Sachez que j’insulte qui je veux, vous y compris si vous le méritez. Mais je ne me permettrais pas de le faire en public, votre image a trop d’importance. Je lave mon linge sale en famille, face à face. »
Mais Yoren se détourna de sa belle soeur et accéda à certaines de ses demandes, pas les plus importantes hélas. Il lui proposa de dîner et alla s'asseoir sur son lit. C'était très aimable de sa part, mais elle n’avait pas faim. Elle hésita longuement avant de venir se planter devant lui, le dominant cette fois. Sans ressembler à Joren, il avait son regard et en sus, il possédait un corps puissant et la chaleur brute d’un homme comme elle n’en avait pas connu depuis des lustres. Quand il s’était approché d’elle un peu plus tôt, elle avait senti un frisson de désir la parcourir en même temps que la peur et quand elle l’avait toisé à son tour, elle avait imaginé ses lèvres brûlantes sur les siennes dans un baiser fougueux. Peut être avait elle regardé un peu trop longtemps sa bouche, peut être avait elle même entrouvert la sienne.
__ J’estime être à ma place en faisant ce que je fais le mieux dans l’intérêt du Royaume. N’attendez pas de moi que je fasse la potiche dans les banquets et que je vous suive aveuglément quand vous commettez des erreurs. Je l’ai bien trop fait en quinze ans aux côtés de Joren et d’Harren. Et voilà ce que mon incapacité à faire entendre ma voix, parfois la couardise, parfois mon ambitieuse hypocrisie, le plus souvent l’amour et le respect que je portais à feu le Roi et feu le Prince nous ont coûté. Quant à mes actions, si elles me valent la vie sauve, c’est bien peu au regard de ce que j'ai fait. Je doute que quiconque se contente de cela, tout le monde à ses limites, même la plus loyale des Princesses. C’est pourquoi j’exige, parce que mes actions ont déjà prouvé que j’étais digne de mon nom, de mon rang et de mon roi. Je ne veux plus continuer à servir qui que ce soit pour ne recevoir que du mépris et des menaces. Si tel est mon avenir, alors tuez moi maintenant. »
La brune aux yeux azurs recula d’un pas et sortit soudain son stylet affûté d’entre ses seins voluptueux en menaçant Yoren. Il la tuerait quand même, mais elle ne se laisserait pas faire.
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Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Jeu 16 Aoû - 19:16
Au beau milieu du morne hiverYoren & Myria
L'attitude de ma belle sœur alors prisonnière et brebis livrée en pâture à la voracité de la meute constituant ma cour ainsi que mon état major lors du banquet ayant eu lieu deux jours plus tôt m'avait agréablement surprise. Connaissant la réputation de celle que le Noir avait en soit condamnée à mort avant de perdre la vie à son tour dans sa charge héroïque à Eysines, je me serais attendu à autre chose. Je ne saurais exactement dire à quoi mais à bien moins de soutien de la part d'une personne dont j'avais eu le destin dans le creux de la main et l'exécution potentielle à l'esprit. Oh, par cette attitude indéfectible à mon encontre ayant également surpris parmi les nobles riverains je me doutais que Myria Hoare considérait qu'elle m'avait remerciée à sa manière de l'avoir gracié ce soir là. Elle avait quelque part raison car j'appréciais ce genre de remerciements à leur juste valeur dans une situation comme la mienne. Cependant, si je l'avais gracieusement éloigné de la perspective du billot je n'avais pas déclaré les raisons de mon choix à la modeste assemblée s'étant trouvé autour de moi ce soir là. J'avais mes raisons de sauver la vie de cette princesse qui m'avait toujours rabaissé et méprisé plutôt que de la lui ôter. Un certain nombre de raisons politiques, symboliques mais également personnelles mais bel et bien surtout parce que la veuve de feu mon demi frère était un atout dans un jeu comme le mien. Harren avait eu une certaine défiance et une peur de sa bru de même que Joren si j'en croyais ce que venait de me jeter au visage la mère de Beron concernant son attitude lors de son coup d'état pitoyablement avorté.
Ainsi, une part de défi minime mais bien réelle avait impacté mon choix. Si, je n'étais guère coutumier de sa présence je connaissais la peur comme chaque mortel et encore plus aujourd'hui que je tenais le destins de tant d'hommes entre mes mains. Cependant, aussi stupide que cela puisse paraitre je refusais de laisser celle ci me dicter ma conduite en toutes circonstances. Nulle bravoure en cela simplement un caractère affirmé et parfois borné. N'importe qui d'autre que Myria Hoare aurait rampé docilement à mes pieds pour me remercier de ma clémence. Clémence qui n'était guère d'ordinaire dans ma nature mais pas ma belle sœur. Celle ci se défendait bec et ongles et me tenait tète sans coup férir. Mon amour des femmes de caractère devait influer mon jugement mais pas suffisamment pour que je la laisse abuser de ma patience. Force était néanmoins de constater que si aucune goutte de sang noir ne coulait dans les veines de Myria, celle-ci avait néanmoins des traits inhérents à notre famille.
"Le courage a bien des formes princesse. Et celui des fers nés n'est en rien moins noble que celui qui a semble t'il été le votre au cours de cette sombre période pour notre royaume. Aussi, je vous prie de ne point insulter mes compatriotes qui ont massivement péri pour que nous puissions nous trouver ici l'un face à l'autre dans ce pavillon. Je ne vous permettrais point de mettre en doute la témérité de ces derniers car sans celle-ci Buron aurait pu rester le désastre que votre plan a causé." Marquant une courte pause, je finissais par reprendre. "Cessez donc d'énumérer vos actions comme autant de faits d'armes. Car ses actions ne sont que le corrolaire de votre rang de princesse du Conflans et des Iles de fer ! Servir le royaume qui aurait du vous échoir à la mort de mon père n'était guère un choix mais un devoir ! Je ne pense pas que vous ètes lache ! Bien peu de femmes aurait pu parvenir à avoir le courage d'accomplir tout ce que vous avez fait en ces temps de crise sans précédent. Je ne remets nullement en doute votre courage Myria mais je constate que vous attendez une récompense de chacune de vos actions là ou selon moi le seul intérèt du royaume devrait aisément vous suffir si la moitié de l'amour que vous prétendez lui porter est réel. Vous avez donc tenté de servir notre cause à votre manière. Bien, cela je puis le comprendre, l'accepter et admirer votre courage de vous ètre rendu chez l'ennemi pour tenter de le raisonner et de le rallier à la cause qu'il n'aurait jamais du trahir soit ! Quant à mon courage, j'ai une armée là dehors qui pourra vous en parler mieux que moi y compris votre propre fils mon neveu.Aussi mettez le en doute autant que cela vous chante, peu me chaut."
Me levant brusquement, je balayais l'air d'un mouvement rageur avant de poser une main sur mes bandages. Je me mis à me déplacer dans la tente sans la quitter du regard. "Il est néanmoins avéré que vous avez payé ce courage autant que chacun d'entre nous. Et que votre rétribution fut bien maigre. Cependant, si pour vous connaitre bien plus que chaque homme et chaque femme de ce camp je pense pouvoir vous affirmer que j'accepte votre version des faits. Il n'en sera pas de mème d'une bonne partie de mes hommes. L'ombre d'Harren plane encore sur nous tous." Observant la ténébreuse brune prendre le temps de se calmer je cessais de remuer comme un lion en cage au milieu de ma tente et m'immobilisais près de la table de campagne sur laquelle s'étalait des cartes et des pièces représentant mes troupes. "Je ne saurais guère me montrer abondant sur les faiblesses du Tully car je ne l'ai jamais rencontré personnellement et vous le connaissez évidemment bien mieux que moi. Ce que je sais c'est que la maison Tully a toujours été parmi les plus rétives à l'autorité de ses souverains. Ce n'était qu'une question de temps avant que celle-ci ne trahisse. L'empereur lui a fourni l'opportunité quand Harren jouait un jeu dangereux en tentant de vaincre à l'extérieur en fragilisant l'intérieur."
J'avais écouté le rapport de la bataille de Haut Brechies de Ser Walburge de sa propre bouche aussi ce que venait de me révéler ma belle soeur ne m'étonnait guère. Le roi du Conflans libre avait peut ètre encore moins l'étoffe d'un roi que le batard que j'avais été. Mais ce dernier disposait de la majorité de mes hommes et de mes terres. Et rien que pour cela, je révais de l'équarrir en personne. Inféoder le Conflans à une puissance étrangère pour se débarasser d'Harren était impardonnable en soit mais prouvait bien l'état d'esprit de mon rival. Ce dernier haissait l'union faisant la puissance et l'unicité de mon royaume car il aurait pu soutenir Joren face au père s'il aspirait à du changement. Ce n'était pas un procès de politique mais d'identité. Bien sur pour qu'il eut la possibilité de tremper dans les magouilles de Joren encore aurait il fallu qu'il ne se fasse pas capturer à Paege mais la faute en revenait autant à Harren qu'à lui mème. Plus le temps passait et plus je me rendais compte qu'Harren avait vu trop grand trop vite. La particularité culturelle de mon royaume faisait sa force autant que sa faiblesse et cela le Noir devait l'avoir oublié pour s'imaginer qu'aucun baron rancunier ne profiterait du chaos pour s'opposer à la couronne.
Pour ma part, récupérer ce qui me revenait de droit et le transformer me suffisait amplement. Mon ascendance déshonorante tempérait elle l'ambition naturelle des Hoare ou était ce simplement du réalisme pragmatique teinté d'un espoir inédit pour un membre de la noire lignée ? "Sachez que je n'ai rien à voir avec les murmures ayant causé votre condamnation ma chère. J'étais bien trop occupé à tenter de continuer de le convaincre de faire mouvement ainsi que de constituer le bataillon d'élite qu'il m'avait confié. Nul doute que les généraux fers nés et même quelques riverains ont du estimé que votre tentative de re-former le Sel et le Roc pour tourner le royaume de nouveau uni contre le seul et véritable ennemi a du leur échapper."Lançais-je d'une voix sarcastique un brin laconique. "Certes mon père a toujours eu une vision monolithique du pouvoir proche de la tyrannie comme son père et le père de ce dernier avant lui, là ou je pense que pour bien diriger il convient d'être bien entouré. Quant à son sang chaud il faut dire que les retournements de situation de l'an passé n'aurait jamais pu effleurer son esprit pourtant brillant. Je crois que mon père s'est senti dépassé vers la fin mais qu'il ne l'aurait jamais avoué pour rien au monde comme je ne le ferais jamais si tel était mon cas. Mais vous avez raison ses choix nous ont énormément coutés. C'est un fait."
La surprise dans les yeux de Myria qui s'était certainement attendu à m'entendre encenser et défendre mon royal paternel fut rafraichissante. En tant que stratège, je pouvais juger celle qu'avait mise en place mon père et force était de constater qu'elle ne fut guère aussi bonne qu'il se le figurait certainement. Myria avait l'habileté de plaider la cause de sa réhabilitation tout en me rappelant sans ménagement ma position précaire vis à vis des riverains. Je ne brulais pas de m'élever mais je brulais d'élever mon royaume pourtant mes barons continentaux n'étaient pas encore suffisamment zélés à mon gout. Alors même que le similaire projet à peu de choses près avait attiré massivement leur adhésion lorsque ce fut Joren qui le plaida ! L'injustice d'être né du ventre d'une putain ! Pour autant je ne cracherais jamais sur la mémoire de ma mère le collier autour de mon cou ne l'indiquait que trop bien.
"En effet vos aptitudes me sont essentielles princesse. Bien sur d'autres que vous pourraient s'en charger mais votre expérience me sera précieuse. Une erreur oui vous utilisez le mot adéquat, particulièrement adéquat. Vous avez néanmoins tenté le coup quand bien même pour moi il n'a jamais fait aucun doute que ce soit eux ou nous. Cela fait longtemps qu'il est déjà trop tard. Mais, je puis vous affirmer que cela sera nous." Je clamais cette dernière affirmation avec l'aplomb d'un prêtre du Dieu Noyé en plein sermon. A la vérité, je n'en savais rien et ma situation, notre situation était catastrophique mais la volonté était un outil puissant et mieux valait en avoir trop plein que trop peu. Je n'étais néanmoins pas entièrement dénué de ressources et si jamais le royaume des Fleuves et du Crépuscule tombait, son roi le ferait avec lui et les armes à la main pour défendre sa cause. Sans compter qu'un général convaincu convainquait mieux ses troupes. Revenant m'installer sur le rebord du lit je contemplais Myria d'un œil acéré tandis que celle ci séchait ses larmes silencieuses en se focalisant sur le feu d'un brasero.
"Oh, mais ma chère belle sœur. Je ne sais guère si je serais encore vivant dans un an alors m'imaginer dans quinze est un exercice impossible. Quant au poids de nos décisions croyez bien que j'en mesure pleinement le cout humain. Et que chaque vie de mon peuple m'est aussi précieuse que vos fils le sont pour vous. Oui, j'ai déjà perdu des hommes et des amis mais ma culture de naissance permet de relativiser la perte d'un brave seulement ce royaume a perdu beaucoup trop d'hommes de valeur. Mon cœur en est lourd et c'est en partie ce qui motive mes pulsions réformatrices mais sans la victoire finale face à l'ennemi tous ces sacrifices auront été vains et ce serait insulter leur mémoire que de ne pas honorer la cause pour laquelle tant de riverains et de fers nés sont tombés cote à cote comme des frères." Myria ferma les yeux se remémorant certainement la boucherie de Buron puisqu'elle n'avait point assistée à celle d'Eysines qui fut à bien des égards mille fois pire. Un rire jaune accueillit mes soupçons quant à sa nature ambitieuse et calculatrice.
La révélation de la proposition impériale me prit de court et je mesurais l'aune de l'amour de Myria pour sa patrie de naissance. Un sourire amusé étira néanmoins mes lèvres. Il était cocasse d'avoir tenté de remplacer une Hoare par une autre à la tète du Bief. Eren s'en tordrait de rire si je le lui racontais. "Votre loyauté ne sera peut être pas aussi bien récompensée qu'elle l'aurait été sans le coup de folie de Joren mais elle le sera bien plus que sous mon père soyez en assurée. Si elle m'est pleine et entière cela va de soit." Oui, j'avais ce rêve de paix dans le cœur comme un relent tenace d'un sentiment plus pur que tous ceux que j'avais pu éprouvé. Un royaume uni malgré ses différences capable d'en faire des forces, bien administré et prospère, sur et politiquement stable. Un royaume dans lequel mes enfants potentiels pourraient grandir sans devoir voir leur père partir faire la guerre tous les quatre matins contre des voisins ou contre des barons renégats. Un royaume dans lequel les fils d'orphelins pourraient parler des temps noir d'un ton détaché comme un mauvais souvenir à jamais exorcisé. Ce rêve un peu fou de trouver la paix dans une vie de guerrier, une stabilité dans une vie de maraudeur, un ancrage dans une vie de marin.
Si je pouvais évoquer ce rêve pour mon royaume avec autant de passion c'était bien parce qu'il revêtait un caractère personnel. Helena. La seule lady à avoir jamais su me captiver. La seule à ne m'avoir jamais pris de haut si l'on faisait abstraction de la Tully. La seule à embrasser pleinement ma vision d'un royaume des Fleuves et du Crépuscule dans ses moindres détails. Bien sur Myria partageait ma vision mais c'était différent. Myria avait eu sa chance et Joren l'avait gâché ou Harren cela dépendait du point de vue selon lequel on se plaçait. "Cette couronne est bien plus lourde que je me le figurais. Le Yoren dont vous parlez est mort à Eysines princesse et oui j'ai pleinement conscience que le sort de mon peuple repose entre mes mains. Si je me battais avant d'être légitimé c'était pour obéir à mon géniteur et roi mais désormais je me bats pour chacun de mes sujets et pour accomplir cette œuvre que je me suis fixé celle de la concrétisation d'une vision nouvelle. Cela pourrait m'accabler j'imagine si je n'étais pas autant soumis à une pression constante m'empêchant de trop réfléchir au sujet de ma personne." L'espace d'un instant, je laissais la lourdeur de la tache et ma lucidité à ce sujet apparaitre sur mes traits avant de la balayer d'un mouvement de la tète. Myria me fixait avec gravité et m'offrit un sourire triste qui ne la rendit que plus superbe encore.
(...)
Me redressant brusquement malgré mes blessures, je me plaçais devant Myria pour lui rappeler qu'elle n'avait aucun ordre à me donner et de ne pas outrepasser son rang ni les limites de ma clémence. Celle ci se colla presque à moi et le menton relevé fièrement, planta ses yeux dans les miens avant de continuer de me défier. Son regard assuré ne laissait aucun doute sur la véracité de ses propos et partagé entre l'envie de soupirer bruyamment, de prendre possession de ses lèvres avec fougue pour la faire taire ou de la menacer je me détournais finalement sans mot dire. Elle avait au moins le bon sens de préciser qu'elle ne se comporterait jamais ainsi en public car bien consciente que venant de la part d'une femme à la réputation souillée et au statut encore trouble cela équivaudrait à une tentative de suicide car si je n'étais pas celui qui déciderais de lui faire couper la langue ou sauter le chef, ma reine elle ne s'en priverait guère. Sans compter que fidèle à mon tempérament de fer né une bonne engueulade pouvant mettre les choses à plat n'était point une mauvaise chose. Si Joren et Harren était passé par là peut être que mon frère serait encore en vie aujourd'hui et peut être qu'il porterait cette couronne qui est à présent mienne.
Mais, la relation entre le père et le fils avait toujours été plus ou moins tendue et étrange. Accédant à certaines demandes de Myria je saisissais mon repas sur le plateau et m'installais sur mon lit avant de l'inviter à partager mon diner. Mais, l'ombrageuse princesse n'en fit rien et resta longuement à la même position tandis que m'enfilais une pomme et du fromage avec avidité. Puis, elle finit par venir se planter devant moi altière et furieuse. Soupirant pour de bon cette fois ci, je redressais lentement le regard et pu au passage admirer ce corps magnifique en dépit du passage du temps et de la maternité. Une lueur concupiscente s'alluma presque mécaniquement dans mes yeux bien malgré moi. Depuis Eysines, je n'avais pas pu céder à mes pulsions en raison de mes blessures d'abord puis de la charge royale m'accaparant à chaque instant. Ou du moins pas suffisamment par rapport à mes appétits en la matière. Or voilà que se trouvait là ma belle sœur à quelques centimètres à peine de moi presque dévêtue. Que le Dieu Noyé me pardonne mais je n'étais qu'un homme. Ecoutant son discours avec attention, j'écarquillais les yeux de surprise en la voyant faire émerger un stylet acéré de sa robe et pesta intérieurement. Il était plus que temps que se forme ma garde royale. Le travail de ces provisoires était imparfait. A moins que mon autorisation expresse ne les ait dissuadé de fouiller la princesse car il s'agissait de fers nés aussi ils ne portaient guère Myria dans leur cœur et il suffisait d'un cri de ma part pour qu'ils viennent la taillader en petits morceaux. Serein, je laissais un sourire amusé s'imprimer sur mes lèvres. Même affaibli, je parviendrais à désarmer aisément ma belle sœur.
La vue de Myria courageuse et prête à mourir pour retrouver son statut et ne plus subir le déshonneur d'être considérée comme une paria fit se dresser une partie bien précise de mon anatomie. Sans bouger d'un cil, je lui répondais d'une voix calme et mesurée. "Je ne vais pas vous tuer. Je ne veux pas que vous fassiez la potiche au cours de banquets. Je ne veux pas que vous rampiez docilement à mes pieds. Je ne veux pas que vous me suiviez aveuglément. Myria princesse des Fleuves et du Crépuscule je veux que vous m'aidiez à bâtir ce futur rayonnant pour mon royaume votre patrie de naissance. Je veux que vous m'aidiez à souder les riverains autour de ma cause autant que le fera également mon épouse afin que des cendres du Sel et du Roc s'élève une nation renforcée, unie et prospère. Je veux que vous vous teniez près de moi pour me dispenser vos conseils quant à ces barons riverains que vous avez côtoyés à la cour d'Harren des années durant. Vous ne serez jamais reine mais vous pouvez œuvrer pour votre royaume. Je ferais en sorte que votre honneur soit rétabli et de vous ma conseillère." Me levant brutalement je saisissais fermement le poignet de ma belle sœur et serrai suffisamment pour lui faire lâcher sa petite lame qui tomba sur le sol dans un choc feutré par le tapis. Puis, j'attirais fermement Myria contre moi et prenais possession de ses lèvres avec une avidité sauvage, brutale et sans concession goutant avec un plaisir non feint ses lippes princières. Mes mains ne tardèrent pas à se frayer un chemin sur le corps de la princesse. Dévoré par une décharge de désir électrique, je m'abandonnais face à corps pressé contre le mien.
Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Sam 18 Aoû - 1:28
__ Veuillez m’excuser, je me suis emportée. Vous parlez de paix et de prospérité, cela me parle à moi, parce que je suis Riveraine et parce que je suis mère. Mais vous parlez aussi aux Fer-nés, c’est ce que je ne suis jamais parvenue à faire. Je n’ai jamais compris, ou en tout cas jamais adhéré à cette vision des choses. La guerre pour la guerre, la mort et la destruction pour bien peu de bénéfices. La tyrannie Hoare sur les peuples conquis, la force brute et la vengeance comme seules valeurs. Je ne me reconnais point dans tout cela. Mais oui, je sais que les Fer-nés sont d'excellents combattants, valeureux et braves. À tout dire, j'exècre et j’envie vos manières et il y a bien des aspects de votre culture qui pourraient enrichir la nôtre, en premier lieu la place des femmes. J’aime les Fer-nés mais ils sont comme un enfant rebel, celui sur lequel on finit par crier après avoir essayé toutes les autres méthodes pour le protéger de lui même. »
Elle détourna le regard et émit un petit rire en pensant à Beron, un sourire empli de fierté et de tendresse éclaira ses traits quelques instants. Puis elle reprit sur un ton plus solennel.
__ Je suis bien d’accord, je n’ai fait que mon devoir de Princesse. Mais je n'étais déjà plus Princesse de grand chose, moi, écartée du pouvoir et mes fils déshérités. J’espère que vous êtes conscient qu’aucune loyauté n’est jamais acquise, ne faites pas la même erreur qu’Harren, ne croyez pas pouvoir tenir votre peuple par la peur éternellement. Beaucoup n’auraient pensés qu’à leurs intérêts et non à ceux d’un Royaume qui leur échappait et tombait en ruines. Ce ne fut pas mon cas, ni alors, ni maintenant, ni jamais. »
Elle planta son regard azur dans celui de Joren avant de reprendre d’une voix plus calme et douce, mais toute aussi assurée.
__ Je ne mérite peut-être pas de récompense, mais je ne mérite pas non plus d’être traitée comme une paria. Ce n’est pas la gloire ou la richesse que je demande, juste la reconnaissance et le respect qui ne manqueraient pas de m'échoir si j’étais un homme et que je portais les armes. Je vous admire pour cela, pas seulement vous, on m’a raconté vos exploits, mais tous ceux qui se jettent dans la mêlée quelle qu’en soit la raison. Je les admire et les respecte d’autant plus depuis que j’ai senti la peur et l’odeur mortelle du champ de bataille à Buron. J’admirais Harren et Joren pour cela et je priais chaque jours mes dieux qu’ils me reviennent en vie, parce que c’était là tout ce que je pouvais faire. Mais quand la plupart des femmes portent leur impuissance comme une malédiction, je me bats avec mes armes, sur mon terrain. J’ai d’autres armes car on ne m’a jamais autorisé à me former au combat. J’ignore si j’aurais eut le courage de me battre comme vous le faites si j’avais eut ce choix. Mais je ne l’ai jamais eut. Je n’ai jamais eut que mes mots, mon esprit et mon orgueil pour me protéger, et face à une main gantée de fer, cela est bien peu, croyez moi. Il faut que des hommes meurt pour protéger la vie et que les femmes vivent pour la donner. Je me souviens, votre majesté, ceux qui sont tombés au champ d’honneur, Lord Sombrelyn, Lord Volmarck, Lord Whent, Lord Brune, Lord Fengué, Ser Reyl. Mais surtout tous ceux dont les noms seront oubliés. Tant que le Royaume vivra, ils ne seront pas morts en vain. »
Elle ravala ses larmes, avec une grosse gorgée de vin chaud, comme elle avait appris à le faire depuis si longtemps. Tout lui revenait en mémoire, tout ce qu'elle avait enduré. Les doutes, le mépris, la peur, la solitude, la haine, la défiance. Elle sentit ses jambes se dérober et se rattrapa à la table sans que sa faiblesse soudaine ne soit trop visible. Elle prit une grande inspiration le temps de reprendre ses forces. Elle avait vu Yoren se toucher les côtes à plusieurs reprises, lui aussi souffrait, lui aussi avait payé le prix fort dans cette guerre. Ses blessures étaient visibles, les siennes invisibles, mais pas moins réelles. Joren. Elle se souvenait qu’elle le soignait personnellement quand il rentrait blessé d’une campagne. Elle se souvenait de l’attente, de l’angoisse, de leurs retrouvailles enflammées et bruyantes. Elle sourit les yeux rivés au sol. Ses souvenirs lui brisaient le coeur autant qu’ils lui donnaient la force de continuer. Malgré tous les malheurs qui avaient suivis, cela avait existé, leur amour passionné et peut être que quinze années de bonheur valait toutes ses larmes versées.
Le discours de Yoren sur son propre père la tira de ses pensées et elle regarda son Roi avec surprise. Plus elle l’écoutait, plus elle le trouvait intéressant, fin dans son analyse, capable de remettre beaucoup de choses en question. Ce pourrait être un véritable plaisir de discuter avec lui, ce qui, avouons le était rare pour un fer-né. Il n’avait peut être pas beaucoup d’éducation, mais il était intelligent à n’en pas douter et il apprenait vite. Il avait déjà évolué depuis leur dernière rencontre un peu après Buron. Ainsi il possédait cette qualité rare en plus de celles de combattant émérite et de meneur d’homme d’apprendre sans cesse. Si elle s'écoutait, en cet instant elle se serait jetée sur lui pour lui offrir sa vertue, mais elle préféra faire un peu d’humour pour calmer ses ardeurs.
__ Vous êtes certain que votre mère n’était pas une noble riveraine ? » Rit-elle
Elle reconnut néanmoins le Fer-né quand il avoua ne pas faire de plans pour vivre quinze ans de plus. Cela ne manqua pas de la faire rire. Leurs vies à tous étaient en suspens, impossible de faire des plans pour eux même. Le Royaume des Fleuves et du Crépuscule survivrait peut être, mais eux, comment savoir. Combien d’entre eux mourraient avant la fin de l’année ? À peine savaient ils s’ils seraient encore en train de boire et de rire le lendemain, dans une lune. Mais si les derniers temps, elle avait appris à profiter de l’instant et à se raccrocher aux bons moments, elle ne pouvait cesser d’être Myria Hoare, elle ne pouvait cesser de penser à l’avenir.
(...)
Un peu interloquée par le discours de Yoren, elle n’eut même pas le réflexe de réagir à son assaut. Aussi parvint-il à la désarmer en une fraction de seconde. Désarmée, c’est ce qu'elle était. Elle luttait depuis des années pour offrir un nouvel avenir au Conflans, en vain. Elle s’echinait depuis des mois pour que son avenir ne soit pas aussi sombre et dénué de sens que son présent. Et le voilàle roi qui allait réaliser ses rêves pour le Royaume et qui lui offrait une place à son côté ? Pas celle dont elle aurait rêvé, certes, mais une place qu'elle n’aurait pas même songé à convoiter du temps du Noir. Venait-il de dire ce qu’elle venait d’entendre ? Conseillère ? Après tout ce qu’elle avait traversé ? Elle avait tout ce qu’elle voulait ? Presque, pas de couronne. Mais elle pourrait oeuvrer pour son peuple et pour la première fois de sa putain de vie être écoutée par un Hoare ?!
Elle n’eut ni le temps de tomber dans les pommes, ni celui de jubiler, ni de réfléchir à quoi que ce soit d’ailleurs. Yoren venait de la plaquer tout contre lui et l'embrassais à pleine bouche. Tout son corps, tendu l'instant précédant, se relâcha quelques secondes dans cette étreinte et elle ne put étouffer un petit couinement de surprise et de plaisir mêlé.
Tout ce que je veux, vraiment tout ? Même la chaleur du corps de cet homme et le goût de ses lèvres. Je dois être en train de rêver. Faites que je ne me réveille jamais.
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Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Lun 20 Aoû - 20:15
Au beau milieu du morne hiverYoren & Myria
"Ne vous excusez pas. Je puis fort bien comprendre votre colère. Tous vos efforts passés condamnés ou méprisés par les personnes que vous aviez voulu aider et servir. Simplement ce n'est pas vers moi qu'elle devrait être tournée mais vers cet empire qui masque d'un voile bienveillant son désir hypocrite de domination tyrannique, non vers moi mais vers cet homme que vous appeliez votre ami et qui a embrassé sans vergogne le parti d'un envahisseur étranger ayant sur la conscience la mort de bien plus de riverains que l'on ne saurait en dénombrer."Observant Myria quelques instants avant de reprendre la parole, j'écoutais le bruit de la patrouille de gardes effectuant sa ronde autour de mon pavillon dans un cliquetis de fer et d'acier. Je parle de paix et de prospérité parce que j'estime que ce peuple qui est devenu le mien par la force des choses a bien assez souffert.
"Je parle de paix et de prospérité parce que c'est ce qui fait la puissance d'un royaume. Je parle de paix et de prospérité parce que la situation géographique du Conflans est idéale pour l'établissement d'une superpuissance commerciale alliant l'Ouest, le Conflans et le Val. Je parle de paix et de prospérité parce que j'ai sacrifié plus que quiconque dans les désirs mégalomanes de mon géniteur. Une chose voilà ce que j'ai été à ses yeux, une arme qu'il maniait comme il le voulait et quand il le voulait. De la même manière qu'il vous a utilisé selon son bon vouloir durant des années. Maintenant que je suis roi, je n'ai aucun scrupule à trahir son rêve de domination du continent. Tout ce à quoi j'aspire est de faire renaitre mon royaume de ces cendres. "Myria détourna le regard durant une poignée de secondes et je me fis la réflexion qu'elle devait penser à mon neveu qui si par certains aspects avait une vision résolument riveraine, avait à travers son comportement une attitude particulièrement fer née. Beron aurait fait un grand roi s'il avait été en âge ou alors dans un autre contexte. Un contexte de paix et de prospérité par exemple. Car la guerre était mon affaire. Harren m'avait façonné pour elle sans ménagement et cela ajouté à ma culture de naissance avaient fait de moi le roi guerrier que j'étais aujourd'hui.
Un roi guerrier aspirant au surnom de réformateur. Quelle ironie n'est ce pas ? Mes aïeux devaient être en colère là bas dans le panthéon du Dieu Noyé eux qui avaient conquis par le fer et le sang et régné par la terreur. "Si je parle aux fer nés c'est précisément parce que j'en suis un. Un ayant épousé jusqu'à la moelle épinière l'antique voie. Un batard royal s'étant élevé à la force de sa volonté et au désir de s'élever à la tète de l'une des plus dangereuses escadrilles de la flotte de fer. Notre culture glorifie les pirates alors je suis devenu l'un des meilleurs à avoir jamais foulé ce monde. Si je n'ai jamais été qu'un demi Hoare la devise de la famille a toujours brulé dans mes veines princesse. Il est vrai que notre culture est ainsi et qu'en un siècle d'existence le royaume du Conflans et des Iles de fer n'a pas eu la volonté d'évoluer. Nos marins sont les meilleurs du monde mais nous n'avons pas de flotte commerciale alors que nous aurions pu avoir des comptoirs de Braavos à Asshai les Ombres. Nous aurions pu envoyer des bêtes d'élevage du Conflans dans les Iles afin de pallier aux difficultés alimentaires, varier le régime et rendre l'alliance de deux oppositions profitables mais il n'en fut rien. La guerre est dans notre sang. C'est notre plus grande gloire et notre malédiction. Il faut avoir vécu sur ces foutus cailloux pour comprendre la haine naturelle de mon peuple. Mais là ou j'engage des réformes tout azimut alors que nous sommes au bord du gouffre ce sont mes aïeux qui sont responsables de ma situation actuelle. Pourtant, je ne les blâme pas ils ont réalisés l'impossible. Si je devais blâmer des Hoare ce serait mon père et mon demi frère l'un pour avoir été trop confiant en ses capacités et l'autre pour exactement la même raison et maintenant me voilà à devoir redresser une situation insoutenable."
Ce fut d'un ton plus solennel que ma belle sœur reprit la parole pour évoquer son devoir de princesse et mon jugement un peu âpre il fallait en convenir quant à celui-ci. "Vous dites vrai je dois bien en convenir. Harren a écarté toute la branche à cause du fruit gâté. Il était ainsi impitoyable dans chaque facette de sa vie. Oh, mais comment pourrais je oublier qu'aucune loyauté n'est jamais acquise alors même que mes barons riverains ne me le rappellent que trop bien à chaque jour qui passe ? Je ne souhaite pas tenir mon peuple par la peur Myria. Je souhaite le tenir par mes actes qui prouveront que je le considère à sa juste valeur contrairement aux félons qui ne lui vend que le désir de se débarrasser de ma lignée et de tous les insulaires de ce monde." La princesse planta son regard céruléen dans mes yeux gris acier et ne le quitta pas tandis qu'elle me répondait d'une voix plus douce mais néanmoins assurée. "La peur n'abandonne jamais vraiment un soldat qu'il soit en première ligne ou capitaine qu'il soit chef de bataillon ou simple archer qu'il soit roi ou prince. C'est l'habitude qui fait que l'on finit par l'oublier, la considérer comme une simple amie que l'on préfèrerait éviter retrouver à chaque confrontation. Mais la mentalité insulaire étant ce qu'elle est la mort au combat est un honneur plutôt qu'une peine aussi à l'instar de mes compatriotes fers nés je n'ai jamais vraiment eu peur de tomber. J'imagine que ce fut également le cas pour Joren en son temps et pour Harren à Eysines. Mon père a peut être été un tyran mais si vous aviez vu sa fin vous n'auriez jamais douté de sa bravoure."
"Chargeant à pied suivi de l'élite du Sel et du Roc, des chevaliers parmi les meilleurs de notre temps creusant un sillon sanglant au milieu d'un mur épais de fer et d'acier. Chargeant pour atteindre Orys Baratheon et le monstre de Valyria. Chargeant fièrement comme un véritable fer né en dépit de son âge avancé. Redonnant courage au passage à ses hommes sur son chemin. C'est cette image que je vais garder de mon père et non pas celle d'un vieillard paranoïaque et tyrannique. Il était un grand homme avec ses nombreux rêves et ses nombreux défauts. Mais, j'aspire à ne pas lui ressembler sauf sur ce point. Si je dois tomber au champ d'honneur je veux que ma fin soit aussi glorieuse que la sienne." Me rendant compte que de l'émotion avait traversé ma voix grave et rauque alors que je me remémorais la charge folle, téméraire mais malheureusement futile de mon géniteur à Eysines je reprenais contenance avant de répondre.
"Prierez vous pour moi Myria ? Non, vous ne méritez pas d'être traitée comme une paria je le conçois princesse mais tant que je ne trouverais pas une solution pour vous réhabiliter cela sera le cas. J'admire les femmes de votre trempe. Je l'ai toujours fait. Et je sais que vous vous êtes battu avec vos armes pour notre cause. Ne riez pas mais je pense que si vous vous détestez tant Eren et vous c'est bien parce que vous êtes plus similaires que vous ne voudriez jamais l'admettre. Mes exploits ne furent que l'expression de mon devoir vis à vis de mon royaume et ils se sont avérés insuffisants. Mais tant que vous n'oublierez pas les noms de tous les braves seigneurs tombés au champ d'honneur et que mon royaume vivra. Ils ne seront en effet pas mort en vain et peut être pourrions nous les venger avant de construire quelque chose de neuf et de meilleur pour les générations à venir de ce royaume enfin uni."Ma belle sœur ravala ses larmes et avala une gorgée de vin chaud. Pour ma part, je n'avais plus aucune soif du moins nul soif de ce genre. Cette conversation intéressante me plaisait bien plus que ce que j'aurais pu imaginé. Et je me disais qu'il m'était bien plus aisé de comprendre le ressentiment de ma belle sœur si chaque idée utile qu'elle avait pu avoir par le passé s'était vu méprisée et balayée sans ménagement par son époux ou par son roi.
(...)
"Non princesse ma mère était une putain insulaire tout ce qu'il y a de plus classique. Une catin de luxe très raffinée, réputée pour ses œuvres et très demandée mais rien de plus qu'une catin qu'Harren a littéralement adoré un temps avant de se lasser d'elle et de l'abandonner à son sort grosse d'un batard. Helya a eu la folie de penser que le roi des rois était tombé amoureux d'elle et je crois bien qu'elle a fait l'erreur de le faire. Cela ne m'a pas empêché d'adorer ma mère durant les quatre années que j'ai passé avec elle sur Pyke et de continuer de le faire à chaque instant de mon existence. Je n'oublie pas qui elle était ni ce qu'elle était parce que le monde lui n'oubliera jamais. Je le vois dans le regard de certains barons riverains, de certaines lady de ma cour comme je l'ai vu dans le votre à une certaine époque. Je ne l'oublierais pas car c'est ce qui m'a permis d'augmenter ma valeur auprès de mes compatriotes et c'est ce qui me permet de me mettre à la place d'un peuple qui n'a que trop souffert." Tapotant affectueusement le collier à mon cou représentant une sirène seul cadeau me restant d'Helya l'énième catin favorite du Noir, mère d'un Pyke de lignée royale qui devait bien savourer sa revanche sur la vie si elle pouvait me voir de là ou elle se trouvait. Elle m'avait nommé Yoren par comparaison à Joren le prince légitime mais elle n'aurait jamais pu imaginée que je prendrais la place de celui ci bien malgré moi. Qu'à cela ne tienne peut être la rejoindrais je bientôt dans les abysses mais Helya avait eu sa revanche sur le Noir et cela méritait bien une louange au Dieu Noyé.
Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Jeu 23 Aoû - 10:20
Oui. Même avant cette terrible guerre fratricide qui divisait le Conflans et les Îles de Fer, Torrhen avait massacré bien des Riverains et des Fer-nés. Myria n’était pas aux Jumeaux lorsque ceux-ci étaient tombés face aux hordes nordiennes, mais elle se souvenait. Harren était furieux, il avait repris le pont et elle n’avait pu que constater les dégâts une fois sur place. Et dire qu’elle avait failli oublier, qu’elle aurait pu pardonner pour épouser son beau projet d'unification. Mais Buron, mais Eysine, mais Lyham, le mépris, la haine et leurs incompatibles égos. Yoren avait raison, même si Harren le Noir et son insatiable soif de conquêtes y était pour beaucoup, c’était bien l’Empereur et son toutou Tully qui portaient la responsabilité des massacres perpétrés. Quand à l’Impératrice et sa dragonne qui avaient tout bonnement mis le feu aux poudres en se déclarant Reine de tout le continent avec son frère et sa soeur. C’est par elle, depuis leur petite Île, qu’était venu cette guerre infernale près de les engloutir tous. Une nouvelle Tyrannie drapée dans un honneur de façade venait donc remplacer l’ancienne. La disparition de la Maison Hoare était leur raison d’exister et elle était une Hoare, elle ne l’oublierait plus, elle ne pardonnerait pas. Elle se remémora leur conversation au Conclave de Goëville et se demanda comment elle avait pu un seul instant croire en la paix. Le Tully pensait pouvoir sauver les siens en se joignant à l’Empire, mais il leur servait de bouclier humain. Ainsi soit il.
La Princesse ne broncha pas lorsque Yoren évoqua ses projets pour l’avenir avec passion et conviction. Pourquoi avait-il fallut attendre d’être dans une situation si catastrophique pour que même un tel adepte de l'Antique Voie ait une nouvelle vision pour le Royaume. Elle oeuvrait pour cela depuis des années en vain. Parfois, souvent même, en se fourvoyant sur la marche à suivre et les pré-requis, mais sachant pertinemment que les Fer-nés devraient évoluer s’ils voulaient subsister et construire un véritable Royaume et plus un conglomérat de peuples soumis par la force. Mais il fallait, malgré ses conseils, que la Maison Hoare touche le fond pour mettre un peu d’or dans son fer, un peu d'eau douce dans son sel. Elle n'arriva pas à savoir si elle devait rire ou pleurer, alors elle préféra s’abstenir de toute réaction. Mais elle ne put dissimuler complètement son triste regard. Pourquoi maintenant ? Pourquoi si tard et si proche d’une fin tragique ? Pourquoi les Dieux, après lui avoir refusé le droit de sauver les siens, le droit de peser en tant que Princesse, lui refusaient celui d’être la Reine qu’elle aspirait à être au sein du Royaume qu’elle avait prié pour voir éclore ?
__ Nous étions tous ses pions, mais il fut un grand professeur de Cyvosse pour moi et je lui dois au moins ça. Seulement un homme qui ignore l’amour ne peut jouer que pour le sang et la gloire, le Fer-prix comme vous l’appelez et s’il l’a payé de sa vie, nous tous l’avons payé bien cher aussi. J’ai toujours su, au fond, ce que nous représentions à ses yeux. J'espérais que Joren serait différent, que mes fils seraient différents. Je pense qu'ils auraient fait de grands Rois si seulement le Noir avait su aimer son fils comme le Prince a aimé les siens. Pourtant, c’est vous qui vous dressez devant moi, Roi du pays que je voulais construire quand les hommes de ma vie, celui que j'ai aimé et celui qui fut mon mentor, n’ont fait que le détruire. Vous le bâtard Fer-né, pilleur invétéré, guerrier et pirate redouté que j’ai toujours méprisé pour son goût insatiable de l’Antique Voie, mais surtout parce que Harren vous aimait plus que Joren et qu’il en souffrait atrocement. J’aurais mieux fait d’en vouloir au Grand Roi plutôt qu'à vous, mais il me semblait plus facile de haïr un bâtard que mon propre Souverain. Vous êtes l’homme de la situation, plus que Beron, je le sais pertinemment. Malgré toutes ses qualités et tout ce que nous lui avons transmis, un si jeune homme n’ayant pas connu la gloire sur le champ de bataille ne saurait fédérer un peuple tel que les Îliens. Il est trop vert pour faire l’unanimité et ce, même chez les riverains. Sa couronne serait remise en cause, divisant encore ce qui nous reste d’hommes. »
Joren n’avait pas eut une aussi belle fin de dit la veuve alors que Yoren lui contait les derniers instants d’Harren. Elle sentit sa gorge de serrer, tant pour l’un que pour l’autre. Le Prince félon avait eut le sort qu’il méritait, mais elle l'avait vu mourir et ce souvenir la hanterait jusqu'à la fin de ses jours. Quand au Noir, il était mort comme il avait vécu, sans plier, sans trembler. Il festoyait à présent dans la demeure liquide du Dieu Noyé et libérait enfin son siège pour un nouveau jour. Peut être était-ce mieux ainsi, pour elle comme pour lui. Tuer les deux hommes qu’elle aimait aurait bien pu être trop lourd à porter pour son âme.
__ Je prierais les Sept pour vous si le fait que je ne partage pas votre foi ne vous dérange pas. »
La brune aux yeux céruléens sourit avec tendresse avant d'émettre un petit rire entre colère et dépit.
__ Ne vous méprenez pas, c’est Eren qui refuse de voir que nous nous ressemblons. Pour elle, je ne suis qu’une vile intrigante qui se sert de ses charmes pour manipuler les hommes doublée d’une Riveraine fragile et pédante. Comme beaucoup de Fer-nés, elle ne comprend pas que nous puissions être différentes et complémentaires, opposées et toutes deux aussi utiles l’une que l’autre. J’admire les guerrières au même titre, voir plus, que les guerriers, mais les guerrières ne m’admirent jamais. Elles se croient toujours supérieures à celles qui ne possèdent pas le pouvoir de l'acier, comme si devenir un homme était l'avenir de la femme. Pour ma part, je ne la déteste pas, mais je ne saurais me laisser insulter sans ciller. »
La brune ne fit aucun commentaire sur la mère de Yoren, sa plaisanterie était tombée à plat et elle aurait pu se vexer. Mais elle se dit que, vu ce qu'elle avait fait enduré de regards méprisants au bâtard devenu Roi et étant donné qu’il n’oubliait pas, mais semblait bien vouloir pardonner, elle pouvait pardonner son manque total de second degré. Peut être que le sujet était sensible, plus qu’elle ne l’aurait cru pour le fils d’une putain. Une mère compte tant, surtout en absence de père. Il lui déballait donc toute l’histoire, était-ce la première fois ? Myria était née Lady et était devenue Princesse bien trop facilement pour que le sort d’une catin fasse écho à son vécu, en revanche, l’amour d’Harren où plutôt son absence, elle en savait quelque chose. Mais évidemment, elle se garderait bien de dire au nouveau Roi qu’elle avait couché avec son géniteur et avait la fâcheuse tendance à collectionner les Hoare. Elle espérait d’ailleurs que ce terrible secret ait été enterré avec le Roi des Rois.
(...)
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Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Sam 25 Aoû - 18:33
Au beau milieu du morne hiverYoren & Myria
"Je ne saurais dire si c'est le sang de la lignée Hoare qui veut cela car nous n'avons pas été surnommé par nos propres pairs les rois au sang noir pour rien et cela même bien avant qu'Harwyn ne fasse sien le Conflans unissant par la force et sous son joug nos deux royaumes respectifs en un seul. Joren avait lui aussi cette sauvagerie dans les veines ne vous méprenez pas princesse. Ses actes dans l'Orage ne le prouvent que trop bien et je crains fort pour vous que vos fils les désormais princes des Fleuves et du Crépuscule ne soient nullement épargnés par cette brutalité sans égale capable de s'emparer de la plupart des Hoare. Cependant, vous avez raison sur un point Harren était incapable d'aimer ou du moins de le faire durablement et sans arrières pensées. Eren m'a dit qu'il avait aimé la mère de Joren avec toute la fougue de sa jeunesse. Peut être que cette perte a drainée hors de lui toute sensibilité pour ne laisser que le joueur de Cyvvose froid, calculateur, conquérant, ambitieux et obsédé par ses buts. Oui, nous n'étions tous que des pions plus ou moins utiles dans ses mains y compris et peut être surtout les membres de sa propre famille. Je crois qu'Eren et moi l'avons accepté très tôt là ou Joren a toujours renâclé en cela bien trop similaire à notre père pour accepter de plier.
J'imagine que c'est pour cela qu'Harren lui en a tant fait bavé ne supportant guère cet insolent reflet là ou ses fers nés de rejetons se sont toujours pliés à tous ses ordres avec abnégation et vénération pour le monstre sacré qu'il était à leurs yeux. Harren a probablement régné bien trop longtemps mais nous ne saurons jamais ce qu'il serait advenu si feu mon demi frère avait accédé au trône. Sa dernière action nous a en tout cas énormément coutée. Et j'ai bien peur que la postérité ne garde guère une image bien flatteuse de feu votre époux si jamais le royaume venait à résister au fléau qui menace de l'engloutir." Un large sourire étira très lentement mes lèvres en entendant le jugement de la née Frey sur ma personne mais ce fut un sourire teinté d'une certaine tristesse non pas que le dit jugement m'ait jamais blessé par le passé comme il ne me blesserait jamais pour ne l'avoir jamais fait venant de quiconque. Mais bien parce que je me faisais la réflexion qu'une maison Hoare qui aurait su s'unir aurait sans nul doute possible pu tenir tète à cet amalgame putride d'ennemis du royaume, aurait pu avoir le génie militaire suffisant pour utiliser au mieux toutes les ressources dont nous avions disposé afin de noyer de concert le loup et le dragon et les offrir en offrande au Dieu Noyé.
Mais qui avait été responsable de cette désunion chronique ? Le Noir en personne de son imposante présence tyrannique aux accents monolithique ? Joren et ses ambitions compréhensibles mais déplacées par les temps que nous vivions ? La division maladive pleine de rivalité entre Eren et Myria incarnant la lutte de la dualité insulaire et riveraine ? Ou alors le sang dans nos veines qui était autant notre force que notre malédiction ? Je n'avais nulle réponse à cette question tragique. "Oui, je suis celui qui porte cette couronne désormais Myria. Cela n'a rien d'une sinécure vous vous en doutez et je n'avais jamais osé ne serait ce qu'espérer être légitimé alors devenir roi...Si Joren avait battu Harren à son propre jeu il aurait été dans une position infiniment plus favorable que la mienne. Ce titre que je vous ai ravi n'a rien d'un plaisir ou d'une joie c'est un fardeau mais également un honneur que je mesure à sa juste valeur. N'est il point ironique que c'est précisément la raison pour laquelle Harren m'a choisi qui fut celle pour laquelle vous me détestiez d'une telle force et ne l'est il pas encore plus que ce soit cette raison qui me permette de représenter le dernier espoir de ce royaume que j'espère bâtir pour les futures générations du Conflans et des Iles de fer ?"
Cette fois un bref rire aussi puissant que rauque franchit sans hésitation mes lèvres devant ce constat digne du cynisme de feu Harren. Le Destin avait un sens de l'humeur irrémédiablement empreint d'une cruauté certaine. En tout cas j'étais persuadé que ce dernier devait bien se payer nos tètes à nous princes, princesses, rois et reines. Les vissicistudes de l'histoire n'étaient qu'une succession de caprices d'une force mystérieuse et parfois nous ne pouvions en altérer le cours malgré tous nos efforts. Voilà qui constituait un point de vue fort défaitiste et teinté de mysticisme qui n'était guère le mien. Tant que j'aurais un souffle de vie, je serais agent de mon destin et de celui de mon peuple et aucune force ne m'empêcherait de tout mettre en œuvre pour achever mes desseins. "C'est fort courtois à vous de reconnaitre que je suis bel et bien l'homme de la situation princesse. Ma future épouse ne partagera elle non plus pas ma foi et pourtant j'ose espérer que ses prières à mon égard porteront leurs fruits lorsque je serais de nouveau en campagne. Aussi, je pense pouvoir accepter les vôtres." Cette fois ce fut au tour de ma belle sœur de se fendre d'un petit rire alors qu'elle me fixait de ses yeux céruléens.
Loin de l'expression douloureuse qu'elle avait adoptée lorsque je lui avais conté la fin héroïque car le mot n'était pas trop fort du Noir. Nul doute qu'elle avait du repensé à celle déshonorante de son époux. "Eren n'aime pas avoir de rivales voilà tout. Elevé dans une forteresse par un père adepte de la suprématie. Elle l'a érigée en valeur cardinale depuis notre ascension commune. Ne lui en voulez pas. Etre une femme à la tète de la flotte de fer est une première dans l'histoire de nos Iles. N'aimez vous point intriguer Myria Hoare ? Ni séduire les hommes ? Il faut dire que toute personne armée d'une épée peu importe son sexe a la fâcheuse tendance à se sentir supérieure pour des raisons évidentes. Je crains fort que les guerrières ne le fassent jamais. Simple question de point de vue sur la vie." J'avais décidé de ne pas relever ni de compléter le trait d'humour de la princesse vis à vis de mon ascendance non pas pour me montrer complètement dépourvu de second degré. Si, j'avais voulu faire de l'humour j'aurais pu tabler sur l'Ouest au vu du contenu d'une certaine missive mais je tenais à bien lui faire comprendre que la question de mon ascendance ne m'atteignait pas et ne l'avait jamais fait. Qu'au contraire cela m'avait rendu plus fort et plus vigoureux à la peine et étonnement certainement plus subtil que Joren puisque j'avais eu l'intelligence d'attendre le baroud d'honneur du roi des rois pour révéler un autre visage que celui que l'on s'attendait à me voir afficher fièrement en permanence.
Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Lun 27 Aoû - 14:42
Myria leva un regard empli de larmes qu’elle ne put, cette fois, cacher, malgré le fait qu'elle détourna rapidement les yeux. Yoren avait raison, une fois de plus, le sang Noir de la lignée Hoare coulait dans les veines de feu son époux et de ses fils, à n’en point douter. Mais il ne connaissait pas Joren comme elle le connaissait, il ne le comprenait pas comme elle le comprenait. Bien sûr il pouvait être brutal, comme un Prince du Sel et du Roc se devait de l’être. Le Boucher n’était pas en reste lorsqu'il s’agissait de massacrer ses ennemis. Ni d’ailleurs pour se venger de ses proches lorsqu'ils le trahissaient ou le contredisaient, en cela, il ressemblait terriblement à Harren. Mais il savait aimer aussi bien qu’il savait haïr, contrairement à son géniteur. C’était ce qu’elle aimait chez lui et ce qui faisait sa force à ses yeux. Ce pourquoi malgré toute l’admiration qu’elle portait au Roi des Rois, elle ne l'avait jamais autant aimé que Joren. Ce pourquoi il ne lui manquerait pas comme son Prince lui manquait, même après l’avoir condamné à mort, même après tout ce qu’il lui avait fait, tout ce qu’ils s’étaient fait l’un l’autre. Il n’avait pas plié, même lorsqu'elle l'avait supplié de faire machine arrière. Il lui avait claqué la porte au nez et s’était barricadé dans la solitude plutôt que d’accepter de ployer le genou et de s’excuser auprès de son père. Elle comprenait. Ce qu’elle ne comprenait pas, c’est pourquoi il ne lui en avait pas parlé avant, pourquoi l’avait-il mise devant le fait accompli, pourquoi n’avait-il pas voulut de son aide, pourquoi n’avait-il pas été un tout petit peu plus patient ? Pourquoi ? Pourquoi diantre avait-il pris cette folle décision seul ? Pourquoi s’était il coupé de tout soutien ? Mais surtout, pourquoi avait-il fui. Cela ne lui ressemblait pas. Que s'était-il passé pour qu’il abandonne ses hommes ainsi. Oui, je sais, c’est ma faute, il a pensé que j’allais le trahir.
La princesse essuya ses larmes d’un revers de manche rageur avant de finir sa coupe de vin et de la poser brutalement sur la table. La coupe en argent tomba sur le côté et roula par terre. Elle la regarda, gisant sur le tapis tandis que les larmes coulaient silencieusement sur ses joues d’une blancheur presque cadavérique. Porter une couronne n’avait rien de facile, elle le savait depuis toujours, elle avait été élevée pour cela. Même en temps de paix. Là, la situation catastrophique du Royaume rendait la tâche plus difficile encore. Cela aussi elle en était consciente. Elle était consciente qu’elle avait eut son rôle à jouer dans cette tragédie et que, malgré tous ses efforts, elle l’avait bien mal joué. Elle lui sourit avec bienveillance. Si quelqu'un pouvait les sortir de ce marasme, c’était lui. Elle aurait voulu l’encourager, mais aucun son ne parvint à franchir ses lèvres. Elle ne put même pas rire de l’ironie de la situation, simplement son sourire se fit moins triste l’espace d’un instant et ses yeux rièrent le temps d’un battement de cil.
Mais cette expression furtive ne pouvait durer, la gravité des événements passés, les milliers de morts, tout cela ne prêtait pas à rire. Pas plus que l’épée pendue au dessus de leurs têtes à tous, lui en première ligne. Quel gâchis, quelle folie. Si la veuve l’avait bien cerné, il ne reculerait pas. C’était un Hoare, un Fer-Né, un Roi fier et proche de ses hommes, un combattant né. Joren non plus n’avait jamais reculé, ni Harren. Les hommes dont elle tombait amoureuse n’étaient pas de ceux qui reculent. Et ils mourraient, tous… Ils n’hésitaient pas, et ils mourraient. Elle hésitait tout le temps et il fallait bien admettre qu’elle ne pensait pas survivre jusqu’ici, mais elle vivait. Seule Heda pourrait le convaincre de préserver sa vie. Je lui parlerais. se dit elle. Elle le fixait toujours avec un doux sourire et des larmes au bord des paupières. La tête légèrement penchée, perdue dans ses pensées, immobile comme si le temps s’était arrêté, elle le dévisageait comme s’il n’était pas vraiment là. Mais elle voyait bien au delà de son visage au charme ravageur et de cette coupe de cheveux digne d’un poney des clans des Montagnes, mais qui, il fallait en convenir, n'enlèvent rien à son charme. Et ces yeux… Elle pouvait voir les yeux de Joren dans ses yeux, seulement ceux de feu son époux avaient des touches de jaune alors que ceux de Yoren étaient cerclé d’un gris acier. Ils ne tenaient pas cela d’Harren, mais elle reconnaissait là le goût du Roi des Rois pour les femmes aux yeux bleus. Hélas, trois fois hélas, elle les maudissait et les aimaient pour la même raison, pourquoi son coeur la trahissait une fois de plus, se condamnant à souffrir encore ? Elle avait envie de s’étrangler elle même tellement c’était ridicule de tomber encore dans ce piège à son âge et malgré son expérience en la matière. Mais elle n’y pouvait rien et se sentait sombrer sans pouvoir lutter, peut-être sans même en avoir vraiment envie.
La veuve prierai donc pour son roi, car même si les Dieux se fichaient éperdument de leurs prières, cela aidait ce qui ne pouvaient rien faire d’autre à supporter l’attente. Mais elle ne comptait pas se contenter de prier, pas plus qu'Helena elle n’était une potiche tout juste bonne à pondre des héritiers. Elle avait un talent certain pour s'acquitter de ce devoir envers le Royaume, mais ça n’était pas son seul talent. Quant à Eren, peut être qu'un jour, elles pourraient s’entendre, mais elle avait déjà fait beaucoup pour que leurs relations tendues se fassent plus cordiales et cela n’avait pas été très probant. Aussitôt leur mission commune dans le Bief achevée, la commandante de la Flotte de Fer avait reprit ses distance et il était fort probable qu’elle ne partage pas avec son demi-frère l’envie de grâcier sa belle-soeur. Cependant, elle allait devenir mère, peut-être que cela pourrait les rapprocher… Peut-être comprendrait elle ainsi combien une mère pouvait sacrifier pour ses enfants.
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Sujet: Re: Au beau milieu du morne hiver [Tour VI - Terminé] Mar 4 Sep - 0:06