Sujet: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Dim 7 Jan 2018 - 19:47
La nuit avait été courte. Compte tenu des circonstances, Bowen avait été incapable de dormir, préférant finalement discuter avec quelques gardes Demalion jusque fort tard. Une fois absolument certain que tout paraissait résolu, il avait fini par prendre congé et se retirer dans ses quartiers, où il avait tenté de se reposer quelques heures. Il espérait en tout cas que la nuit de noces des mariés avait, elle, été paisible, et que le devoir avait été accompli. Il en allait, après tout, du futur de son royaume, et il savait que Jon ne reculerait pas devant l’obstacle. Le soleil n’était même pas encore levé, aussi il jugea qu’il était encore un peu tôt pour arracher le Jeune Loup à sa nouvelle épouse, par égard pour la damoiselle. Elle paraissait quelque peu intimidée par l’échéance, et il ne désirait point qu’une fois besognée, elle se retrouvât abandonnée par son mari. Ce n’était guère propice à une union agréable, et il ne désirait que l’entente du couple suzerain. Du reste, il lui manquait un certain nombre d’informations avant de pouvoir effectuer un compte rendu précis à son souverain.
Sortant de sa couche, le jeune Sénéchal entreprit de faire quérir une servante pour qu’on lui monte un baquet, afin qu’il se décrasse. Bientôt, une donzelle arriva, lui proposant en rougissant de l’aider à se baigner. Cela le surprit, mais il déclina la proposition, ne la jugeant guère convenable. Tout en s’immergeant dans l’eau chaude, et alors qu’il s’emparait du racloir, il ne put s’empêcher de songer qu’il avait bel et bien changé de stature. Désormais, il faisait partie de ces hommes que les filles du peuple désiraient, parce qu’il était puissant, tout simplement. Après tout, n’était-il pas, désormais, le deuxième homme du Nord ? C’était étrange, ce sentiment de pouvoir obtenir n’importe qui, en un claquement de doigt. C’en était même … vertigineux. Il comprenait mieux, soudainement, pourquoi tant d’hommes de pouvoir cédaient à la tentation. Si sa jeunesse avait été différente … Si, finalement, il avait été à la place de Jon ? N’aurait-il pas profité de cette attention, lui qui n’en avait jamais vraiment obtenu ? Enfin, si, les puterelles que Torrhen Stark payait pour son service et celui de ses proches avaient parfois pensé qu’il était inclus dans le prix de la soirée, et il était certain que le Roi n’y aurait rien trouvé à redire. A vrai dire, ce dernier n’avait jamais hésité à le taquiner sur son manque d’entrain auprès des filles de joie, sans penser à mal. Et quelques servantes, à Winterfell, lui avaient envoyé quelques œillades, à l’époque … Maintenant qu’il s’en rappelait et y faisait plus attention. Finalement, n’avait-il pas été toute sa vie aveugle ? Sa timidité s’était-elle construire sur un mensonge dû à un aveuglement coupable ? Peut-être. Sans doute était-ce pour le mieux, car il ne regrettait pas une seconde d’être cet homme courtois et fidèle.
Une fois propre, le jeune homme sortit du bain et se sécha, avant de choisir sa tenue pour la journée. Il hésita, avant de s’approcher des nouveaux insignes de sa fonction. Puis il se décida, et entreprit de se vêtir d’une façon plus martiale que d’ordinaire quand il n’était pas en campagne. Il n’était plus simplement Lord Glover, et devait montrer qu’il épousait le sénéchalat autant que possible. L’ensemble lui donnait un aspect farouche, encore plus austère que d’habitude. L’effet lui allait. Lentement, il s’examina une ultime fois … Puis sortit, refermant doucement la porte derrière lui pour se diriger vers les appartements du couple Tully, persuadé que le Roi des Rivières et des Collines devait déjà être sur le pied de guerre. Ce fait lui fut confirmé par les gardes devant la porte, et il demanda donc à être introduit. L’attente fut brève, et bientôt, il put pénétrer à l’intérieur, trouvant la Truite face à lui. Il s’inclina respectueusement, comme il en avait l’habitude, avant de prendre la parole :
« Bonjour, Votre Majesté. Pardonnez mon intrusion de si bon matin, mais j’étais persuadé que, compte tenu des circonstances, vous ne deviez, comme moi, guère sommeiller. Néanmoins, si j’ai réveillé votre épouse … J’en suis navré. Et si le moment est mal choisi, je puis revenir plus tard. »
Une fois l’autorisation de rester accordée, il explicita les raisons, bien qu’évidentes, de sa venue :
« J’ai jugé préférable de m’entretenir avec vous avant d’aller porter les nouvelles à mon Roi … et par égard pour votre fille, j’ai trouvé plus sage de leur accorder encore un peu de temps ensemble, avant que le devoir royal ne prenne le pas sur les obligations conjugales. »
Avant de conclure, attentif à montrer qu’il respectait pleinement la souveraineté du Roi des Rivières et ne cherchait qu’à lui montrer son soutien :
« Sachez en tout cas que l’ensemble des hommes sous mon commandement se tiennent à votre disposition, pour peu que vous désiriez faire appel à eux, pour exécuter toutes les mesures que le juste courroux des Rivières et des Collines appellera, peu importe leur teneur. »
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Jeu 18 Jan 2018 - 18:05
Adossé contre la fenêtre, je regarde sans plus vraiment le voir le paysage que j’ai sous les yeux. J’ai vu le soleil se lever sur Vivesaigues pour la première fois depuis bien longtemps, espérant vaguement que ce ne soit plus la dernière, Alysanne dormant profondément à quelques mètres à peine de moi. Je suppose que je devrais être satisfait. Nous avons réussi à nous sorti de ce guêpier sans trop de conséquences, si ce n’est que le peu d’espoir que je pouvais avoir envers les derniers fidèles d’Hoare s’est envolé pour de bon. Mais ma fille et son époux vont bien, le mariage a eu lieu et notre alliance s’en est sortie renforcée. C’est ce que je dois retenir, je suppose. Je soupire alors que je sens mon épouse remuer dans le lit puis se lever. Enroulée dans les couvertures, elle s’approche de moi et je la ramène contre moi, laissant filer un silence pensif. « Tu vas repartir bientôt j’imagine. En fait non, ne me dis rien. Tant que tu ne me réponds pas, ce ne sera pas vraiment réel. » Je hoche la tête, incapable de vraiment lui répondre, même si j’ai un sourire un peu triste dans sa direction. Avant de l’entrainer vers notre lit, pour profiter de ces quelques instants volés avant que je ne doive vraiment prendre la route.
Je sursaute quand les gardes finissent par frapper à la porte, pas vraiment disposé à leur dire d’entrer. Mais je suppose que je dois laisser la réalité reprendre ses droits. J’embrasse Alysanne sur le front et elle grimace légèrement alors qu’ils entrent dans la pièce, arborant un air gêné que je ne leur avais encore jamais vu. J’ai tout de même un sourire dans leur direction et, après leur avoir dit de faire entrer Bowen dans le salon, je m’habille rapidement, inspirant longuement avant de passer les portes à mon tour. "Bonjour Lord Glover. Nul besoin de vous excuser pour cette intrusion. En réalité, vous avez raison, je n’ai guère dormi cette nuit, comme la plupart d’entre nous je suppose." J’ai un mince sourire avant d’ajouter, lui désignant la table et les deux fauteuils près du feu qui vient d’être ravivé. "Quant à ma femme, je vous laisserais lui présenter vos excuses de vive voix mais je gage qu’elle ne sera pas rancunière." Je ne saurais dire à quel point le moment est mal choisi. Après tout, j’ai tout de même pu passer des moments avec ma femme, une chance que peu d’entre nous a pu avoir. Alors, je ne vais pas m’en plaindre.
Je hoche la tête au reste de ses propos et je souffle, d’une voix pensive. « Vous avez bien fait. Laissons-leur un peu de répit avant que tout ne recommence. Et puis, je suppose qu’ils n’avaient de toute façon pas été informés hier de ce qui s’est passé. J’espère que non en tout cas. D’autant que ce n’est pas à votre Roi de régler la question. » Je sais pertinemment que c’est à moi de le faire. Et si je m’écoutais, j’irais l’étrangler de mes propres mains, même si je ne suis pas sûr que cela me soulagerait suffisamment en réalité. J'inspire longuement avant de reprendre, avec un hochement de tête. "J'en prends bonne note. Et savez-vous ce que vos hommes aimeraient avoir à exécuter ?" Je sais, j'aurais pu poser plus subtilement la question sur les humeurs de nos soldats. Sont-ils déjà au courant ? Les rumeurs commencent-elles à gonfler alors que cela ne fait en réalité que quelques heures à peine que les faits ont eu lieu ? Et, pire encore, quelle justice attendent-ils tous ? Je sais que mon père aimait à faire régner l'ordre et la justice sur ses terres mais là, c'est d'un tout autre acabit. Ce que je ferais et, surtout, la façon dont je le ferais, risque de fortement impacter sur toute la suite des évènements, que je le veuille ou non.
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Mer 24 Jan 2018 - 18:50
« Non, ils ne l’ont pas vraiment été. Une fois certain qu’il n’y avait plus aucun risque, j’ai pris la liberté de signifier à Sa Majesté qu’il pouvait accomplir son devoir en sécurité, peu avant le coucher, sans me perdre en explication.
J’ai remarqué que votre fille avait noté les … absences et votre inquiétude, et je l’ai entendu le souffler à votre sœur. Tout comme j’étais certain que la disparition relativement longue de l’Empereur et de Ser Conrad, ainsi que de la prêtresse rouge, ne passerait pas inaperçue aux yeux du Roi. Sa Majesté Impériale est coutumière du fait de se retirer pour prier les Anciens Dieux lors de ce type de cérémonie, mais c’est … sur un laps de temps court.
Il m’a donc semblé préférable, après avoir eu l’assurance que rien d’autre ne se passerait, d’apaiser quelques craintes éventuelles pour que mon suzerain puisse accomplir son devoir en toute sérénité et rassure son épouse. Les nuits de noces sont déjà éprouvantes pour les dames, il n’était point nécessaire d’ajouter de l’anxiété.
Néanmoins, ils ne savent toujours rien des faits en eux-mêmes, je peux le jurer sur mon honneur. »
Pour Bowen, la mission que lui avait confiée Lyham Tully avait été accomplie. Les jeunes mariés n’étaient pas au courant des errements de Lord Frey, sachant simplement que quelque chose avait eu lieu qui n’avait pas eu de répercussions sur leur sécurité et leurs devoirs conjugaux, ce qu’ils avaient deviné par eux-mêmes.
« A vrai dire, sans assurance réelle sur les événements et leurs motivations … Il eut été délicat de prononcer des avertissements hasardeux. Je comptais d’ailleurs sur notre entrevue pour obtenir l’ensemble des informations sur les agissements de Lord Frey durant ses épousailles et en avertir convenablement Sa Majesté.
Si cela vous agrée. »
Laisser son Roi dans l’ignorance plus longtemps était impensable. Son serment de loyauté exigeait qu’il transmette ce qu’il savait, et il n’y avait plus d’obstacle à cela. L’union royale avait été consommée, ou du moins, il l’espérait pour la venue rapide d’un héritier au trône de son royaume, ce qui levait toute excuse qu’il aurait pu invoquer. Certes, châtier Frey n’était point dans les prérogatives de son suzerain. Néanmoins, il avait attenté à son mariage, et ne serait-ce que par obligation morale envers un allié, un beau-fils, un Roi fédéré de l’Empire … Mettre au courant Jon était une nécessité.
« Quant à mes hommes … Ils feront ce que vous déciderez, si vous voulez les utiliser. Comme vous l’avez dit … Cette affaire ne relève manifestement pas du Nord, sauf en cas de complicité parmi nos gens, et leur avis est donc superfétatoire. Seul le vôtre compte. »
Encore que. Techniquement, une bataille de juristes royaux aurait été amusante intellectuellement sur le sujet. Bowen était à peu près certain que, compte tenu de l’insulte faite à son honneur, le Roi du Nord aurait pu demander à siéger pour un potentiel jugement, au moins en tant que témoin. Néanmoins, il avait compris que la susceptibilité du riverain était à ménager, sans doute parce que, comme tout homme élevé trop vite, la Truite de Vivesaigues tentait de se rassurer sur l’exercice de son nouveau pouvoir, et prenait garde à conserver en permanence l’ensemble de ses attributs. C’était dans l’ordre des choses, et le Glover respectait cela.
« Néanmoins, pour vous répondre plus franchement … »
Maintenant, il s’agissait de peser soigneusement ses mots. Bowen n’était pas étranger à ce genre de situation. Son père avait de plus en plus souvent fait appel à lui au moment de juger un criminel ou un déserteur sur leurs terres, demandant son avis ou le laissant mener les échanges pendant les dernières années. Quelques fois, il lui avait délégué son pouvoir, et le Glover avait prononcé et appliqué la sentence, comme le voulait la tradition du Nord. Il savait donc intimement le poids de la décision à prendre, politiquement certes, mais aussi moralement. Tenir la vie d’un homme entre ses mains était une lourde responsabilité devant les dieux, peu importe les faits reprochés, les crimes commis. Tous ceux qui prononçaient la justice des hommes auraient un jour à en répondre devant les dieux.
« Quelques rumeurs courent. Certaines sont extravagantes … D’autres très proches de ce que je présume être la réalité. »
Plongeant son regard bleu acier dans celui du Tully, il continua :
« Les réactions ne sont guère tendres. Je doute de vous apprendre quoi que ce soit. Chaque mot incriminant Lord Frey ravive les rancœurs des vétérans de la première guerre contre Harren. Les soldats des Mormont apprécieraient vivement un exemple qui toucherait la famille du Noir et vengerait leurs morts. »
Il s’arrêta un instant, réfléchissant à ce qu’il allait dire ensuite, avant de conclure son exposé :
« Le sentiment ne pourra être que partagé dans les rangs des troupes de ma propre maison. Certains de mes hommes ont perdu le peu de de famille qu’il leur restait lors du débarquement fer-né à Castel Oyster.
Le fait est que leur envie de vengeance n’a pas directement trait aux actes de Lord Frey. Mais que ces derniers risquent de la raviver fortement. »
Doucement, il ajouta :
« Il risque de se transformer en un exutoire de la haine contre le Noir. A vous de voir si ses crimes réels méritent un sort désagréable, ou pas. »
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Mer 31 Jan 2018 - 20:07
Je hoche la tête aux propos du jeune Glover, le regard sérieux, le laissant tout raconter. Et, après quelques instant de silence, je souffle, d'une voix tranquille. "Bien. Ils sauront tout cela bien assez tôt et, surtout, ils sauront avant tout que nous avons rapidement maitrisé la situation. C'est ce qui importe le plus dans tout cela. Rien de bien étonnant à ce que nos absences aient été remarquées, d'autant que la prêtresse attisait la curiosité en plus du fait que nous étions, malgré les mariés, au centre de l'attention. Vous avez bien fait en tout cas. Et… merci d'avoir réagi de la sorte, sans poser de questions."
J'ai une ombre de sourire au reste de ses propos, même s'il ne gagne pas mes yeux et je souffle, d'un ton amusé. "Et bien, votre Roi pourra se vanter de la fidélité de son Sénéchal. Vous pourrez en effet l'avertir de tout ce que je vous raconterais, y compris de mes excuses pour ne pas l'avoir averti immédiatement. Mais, si cela devait se reproduire, j'agirais exactement de la même façon. Mais j'aimerais qu'il soit le seul averti des détails." J'inspire longuement, désignant les quelques plats qui nous ont été déposés lorsqu'il est entré et je m'installe, attrapant quelques grains de raisin. "Ce que je sais, c'est ce que le Frey nous a dit. De là à dire que c'est la vérité, c'est une autre histoire. Il y a bien trop d'enjeux pour que l'Empereur, et moi-même par voie de conséquence, se contente de cette simple version des faits."
Je laisse filer un silence avant de le fixer un instant. "La question que je me pose est si c'est une affaire qui relève simplement du Conflans ou si elle ne concerne plutôt pas tout l'Empire. Et si faire intervenir vos hommes ne ferait pas que renforcer cette cohésion que nous sommes supposés représenter. Mais la Garde de l'Empereur a déjà fort bien œuvré. Le reste risque d'être… délicat." Quel doux euphémisme en réalité. Je lève les yeux dans sa direction alors qu'il reprend, captant mon attention par les mots qu'il commence à employer. Je le laisse parler, fronçant les sourcils, sans réaliser que je me contente de jouer avec les grains de raisin au lieu de les manger. "… quelles sont les rumeurs ? Quant à faire un exemple… pensez-vous que la torture d'un homme, quel qu'il soit, pourrait apaiser les rancoeurs ? Je ne suis même pas sûr en réalité. Et vous ?"
Je me frotte la nuque avant de reprendre, d'un ton neutre, comme si le sujet n'avait pas tant d'importance. "Que penseriez-vous si vous appreniez qu'un homme, épaulé de ses plus proches soldats, a voulu empoisonner le banquet d'un mariage royal. Que son plan n'a pu être mis en échec que par la fidélité de cuisiniers, dont l'un est mort à cause de cela et que, s'il avait réussi, les conséquences auraient été désastreuses, que tout ce qui a été construit jusque-là aurait volé en éclat." Mon regard accroche le sien alors que je garde ce masque de neutralité. "Pensez-vous que ce crime mériterait un sort désagréable ?"
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Sam 17 Fév 2018 - 19:02
« Je sais où est mon devoir. J’ai suivi trop longtemps l’Empereur quand il était Roi du Nord pour ne pas savoir reconnaître les signes d’une situation qu’il ne désire pas ébruiter. »
Si, désormais, c’était sa proximité avec Jon qui attirait les jalousies, longtemps, Bowen avait été l’ombre de Torrhen, celui qui, en plus de préparer ses armes, ses armures, de veiller à ses chevaux et à sa santé, le suivait partout, à travers tout le Nord, et observait le souverain régler les problèmes de ses terres. Le jeune homme avait été trop proche de l’ex-Stark pour ne pas reconnaître ses manies, en l’occurrence sa propension à agir discrètement, avec Conrad Omble comme homme de main et âme damnée lorsque les événements l’exigeaient. Mais l’ancien suzerain nordien était un homme infiniment solitaire, un Loup qui n’aimait pas tant la meute que cela. Oh, il était proche de la troupe … Mais avait toujours veillé à maintenir une forme de distance respectueuse. Le Glover l’avait vite compris. Sous la familiarité appuyée se cachait un homme qui consultait, mais savait aussi décider seul. Son fils avait moins de volonté de tenir le monde à distance en ce qui concernait son royaume, et beaucoup plus concernant ses tourments intimes … Comme son père, pour le coup. Ils étaient plus semblables qu’ils ne le pensaient, mais la fierté avait ses raisons que la raison ignorait, tout comme le cœur.
« J’essaye de l’être en toutes choses.
Et donc … j’agirai comme vous le désirerez. Il sera donc le seul pleinement averti. »
Loyal, Bowen ? Fanatiquement dévoué, même. Mais aussi prévenant. Le jeune homme, pour s’être occupé des basses besognes du précédent souverain du Nord, avait souvent le sens du détail, et si certains pensaient que ce type de petites attentions étaient idiotes, le Poing du Nord pensait tout le contraire. L’amitié se mesurait précisément, à ses yeux, à cela. La loyauté au royaume également, car il était aisé de brâmer à tout va son désir de carnage, mais l’exercice du pouvoir demandait d’autres qualités que celles du massacre guerrier. C’était ce qui donnait de la gloire aux hommes, certes. Sauf que dans leur aveuglement, ils en oubliaient l’essentiel, et ceux qui œuvraient dans l’ombre, qui pensaient à tout ce que les autres oubliaient n’avaient guère que le sentiment du devoir accompli pour les guider. En un sens, c’était déjà amplement suffisant.
« Je ne suis pas mestre, et n’ai donc pas de connaissances de la justice en ces matières … Encore que, étant donné que rien n’a jamais été construit comme l’Empire, je doute qu’il y ait quoi que ce soit sur lequel s’appuyer. »
Bowen réfléchissait, ses sourcils froncés. L’avantage d’un pouvoir central, unifié, clair se voyait aisément dans ce genre de circonstances. L’Empire devrait vivre constamment avec d’impondérables interrogations de prérogatives. Qu’est-ce qui était sous la juridiction du seigneur, du fédéré, de l’Empire, des autres fédérés en vertu de la présence du Collège Impérial ? Il pouvait presque parier que dans quelques siècles, les querelles en la matière seraient fécondes. Mais prédire le futur ne l’aiderait guère dans le cas présent. Il devait simplement essayer de donner son avis au mieux, sans parti pris. Il avait, après tout, une opinion personnelle sur le sujet, mais ce n’était sans doute pas ce que Lyham Tully demandait, et du reste, soucieux de ses prérogatives comme il l’était, avec son pouvoir précaire, nul doute qu’il préférerait entendre des paroles aussi objectives que possibles. Heureusement, le Glover avait suffisamment d’esprit critique pour y parvenir sans trop de mal.
« Tout dépend de la manière dont vous envisagez les choses. Au sens strict, le crime ayant été perpétré par un de vos féaux sous votre toit … La main de justice vous revient. Maintenant, les offensés sont plus globaux : puisqu’il s’agit du mariage de son Roi, le Nord peut légitimement arguer d’un intérêt dans cette affaire. Je présume, suivant l’étendue des faits perpétrés, que par la présence de l’Empereur, l’ensemble du Collège Impérial peut s’estimer lésé. Mais, puisque je m’aventurerais volontiers à estimer que l’Empereur va vous laisser toute latitude pour exercer votre châtiment, afin de montrer à tous que les Tully règnent de plein droit … »
Un sourire passa sur son visage, presque contrit.
« Je le connais suffisamment pour savoir comment il fonctionne. »
Trop sans doute. Là n’était pas la question. Déjà, la Truite parlait des rumeurs, et Bowen grimaça, détestant par principe devoir relayer ce genre de racontars.
« Mon écuyer m’a rapporté quelques propos qu’il a entendu pendant la nuit. C’est un garçon qui sait se fondre dans la masse et écouté. En l’occurrence, c’est fort utile. Certains disent que Lord Frey a tenté d’empoisonner mon Roi. D’autres, votre fille.
Quelques-uns prétendent que des agents du Noir se sont introduits dans les cuisines et ont tué vos serviteurs. Que des cadavres ont été vus. »
Il avait énoncé cela avec un certain détachement, histoire de mettre de la distance entre lui et ce qu’il disait. Même si …
« Il doit y avoir un fond de vérité, et beaucoup d’inexactitude, comme toujours. »
Platitude certes, mais souvent véridique. De son expérience, il y avait toujours une forme de vérité dans tous les cancans qu’il avait pu entendre. Par exemple, il était presque certain que, conformément à la rumeur, Nelya Corbois avait bel et bien séduit Torrhen dans sa jeunesse. Du moins, sinon, il se demandait comment le Roi pouvait donner autant de détails scabreux sur la dame une fois saoul. Et ainsi de suite, des exemples de la sorte, il en avait plein dans sa besace. « Honnêtement ? J’aimerais offrir une réponse plus positive … Mais oui. Le Nord n’a jamais été aussi soudé qu’en crucifiant les sauvageons … femmes et enfants compris. Et je ne vous ferais pas l’offense d’affirmer ne pas en avoir éprouvé une morbide satisfaction. Comme beaucoup.
Cela n’empêche pas que justice doive se faire suivant les crimes commis. Sinon, nous ne sommes pas différents de ceux que nous avons puni. Les sauvageons ont massacré des femmes et des enfants innocents, sur mes terres. Leur châtiment a été à la hauteur de leur crime. »
Il n’avait pas flanché en affirmant cela. Ni cligné des yeux. Il se tenait droit, les machoires serrées, acceptant sans broncher le jugement qui viendrait. La cruauté était ce qui était le plus communément partagé. Le sang appelait le sang. La justice des vainqueurs ne connaissait que rarement la pitié. La haine était un terreau d’union plus solide, hélas. Et les passions coupables des hommes ne pouvaient être ignorées, lorsque l’on régnait. Pis, Bowen se raidit davantage en écoutant le fin mot de l’affaire, finalement, car il n’était pas assez idiot pour ne pas comprendre ce dont Lyham Tully parlait. En l’écoutant, ses dents se serrèrent un peu plus, alors que son poing se refermait mécaniquement, se faisant le miroir du blason de sa maison. Quand enfin il parvint à parler, ses yeux brûlaient d’une rage contenue, celle qu’il avait connu à la Mort-aux-loups, à la Haye-Pierre quand il n’avait pu voir Jeune … Cette colère qui le prenait parfois et l’engloutissait tout entier, donnant à son visage ordinairement si serein un aspect farouche, sanglant … barbare.
« Si cela ne tenait qu’à moi, un tel homme se verrait équarri et écartelé en place publique, et ses héritiers subiraient le même sort. »
Simple. Dur. Cruel.
« La tentative de régicide, quelle qu’elle soit, appelle la pire des morts. Et l’attentat à l’avenir d’un royaume, la fin d’une lignée criminelle. »
Bowen ajouta :
« Mais sur ce point, je suis peut-être l’incarnation du froid du Nord. Je ne connais pas la justice du Conflans. »
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Jeu 22 Fév 2018 - 15:34
J’ai un mince sourire à la réponse de Bowen, même si mon regard reste toujours aussi sérieux. La situation est plus que délicate et je n’ai pas envie que des informations dont nous n’aurions pas du tout la maitrise ou, pire encore, qu’elles soient erronées, parviennent aux oreilles du Roi du Nord ou d’autres personnalités importantes. Mais pour cela, il faut aller au-devant des difficultés et les affronter avant de se faire déborder. « Ce n’est pas que l’information ne doit pas être ébruitée. C’est surtout qu’il faut savoir comment les gens doivent l’apprendre. »
Je hoche la tête au reste de ses propos. Je sais que je n’aurais pas besoin de réitérer ma demande ou de m’assurer qu’il sera fait comme je l’entends. J’ai toute confiance en lui, surtout au vu des récents évènements. Et puis, je ne lui demande pas de cacher quoi que ce soit à son Roi ce qui, je suppose, est le plus important pour lui. Parce que j’aimerais probablement que mes proches agissent de même avec moi. J’inspire, essayant de ne pas grimacer à la pensée que je vais devoir songer à ceux à qui je vais accorder ma confiance, préférant me focaliser sur les problèmes immédiats. « La situation est pour le moins… inédite oui. Mais au vu de l’avenir qui se dessine devant nous, je gage que cela risque de se reproduire, que nous le voulions ou non. Et il faudra faire preuve de sagesse, pas simplement se laisser guider sur les premiers réflexes qui nous viendraient à l’esprit. »
Difficile de vraiment distinguer ce qui se profile à l’horizon. Si les contours de l’Empire commencent à se former doucement mais surement, j’ai encore du mal à vraiment savoir quelle sera la place des différents royaumes qui la composeront ainsi que leur marge de manœuvre. Et je suppose que je suis loin d’être le seul. Et si je demande son avis au Glover, c’est tout autant pour savoir ce que pourraient réellement penser certains sujets que pour m’inspirer, d’une façon ou d’une autre sur la décision qui s’appliquerait le mieux à la situation présente. J’ai un mince sourire à ses propos avant de hocher la tête. « Vous avez admirablement bien résumé la situation. Et je sais que l’Empereur me laissera effectivement le choix. Je le connais depuis moins longtemps que vous mais je commence à le cerner. Et que je dois me décider sans donner l’impression qu’il peut avoir eu un impact trop important dans la façon dont les choses se passeront. Il en va de ma crédibilité et de la sienne aussi. C’est lui, avec son épouse, qui a posé cette couronne sur ma tête après tout. » D’une certaine façon, je ne fais qu’énoncer des évidences. Que Bowen doit connaitre tout autant que moi.
Et je l’interroge sur les rumeurs qui, bien que les évènements soient tout récents, commencent bien évidemment à se propager dans le château. Le contraire aurait été étonnant. Je hoche la tête à ses propos et j’inspire longuement avant de lui souffler, brusquement fatigué, ce qui s’est réellement passé. Je sais que le Glover n’est pas stupide, que je ne raconte pas une hypothétique situation qui n’aurait pas eu lieu. Et j’ajoute, d’un ton pensif. « Je ne sais même pas si j’éprouverais une quelconque satisfaction, morbide ou non, à l’idée de le voir être crucifié, écartelé ou que sais-je encore. Quant à ses héritiers… je suis partagé entre l’idée de leur faire subir le sort qu’il voulait nous voir vivre ou au contraire, les garder en vie. » J’ai tout de même un sourire à ses derniers mots avant de laisser filer un silence. « Le Conflans n’a connu que la justice d’Hoare depuis bien longtemps. Et je ne suis même pas sûr qu’elle puisse porter ce nom. Je ne sais quelle image elle doit incarner en réalité. Si je m’écoutais, j’irais l’étrangler de mes propres mains. Mais je dois faire preuve de raison. Et autant dire que, dans l’immédiat, c’est un peu compliqué en vérité. »
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Mar 27 Fév 2018 - 19:26
Calmement, Bowen écoutait les constats de Lyham Tully, ses doutes également, qui faisaient en un sens écho à ceux qui pouvaient traverser le Jeune Loup au Nord. Malgré leurs différences d’âge et de statut antérieur, chacun des souverains fédérés devait tenter de trouver sa voie pour affirmer son autorité et se dégager de l’autorité pesante de l’Empereur et de son épouse, sans se détacher totalement de contours qui étaient par essence flous, car entièrement nouveaux. Il n’avait hélas pas de solution miracle : il n’avait pas étudié les droits coutumiers de Westeros à la Citadelle et ne connaissait que celui de son propre royaume. Si sa mère avait parfois évoqué quelques souvenirs d’enfance et que son propre jugement transparaissait lorsqu’elle siégeait aux côtés de son époux pour entendre les doléances de leurs gueux, la dame de Motte-la-forêt n’avait point été élevé ses fils en riverains, et à ce titre, le Glover n’avait que des savoirs parcellaires sur la mentalité du Conflans en matière de justice. Il ignorait parfaitement les précédents, alors qu’il avait appris les diverses décisions consignées par les mestres de ses ancêtres. Et il ne doutait pas que ce problème rejaillirait rapidement une fois la paix obtenue. En cela, la Truite avait parfaitement raison.
Pourtant, plus la discussion avançait, et plus le Poing du Nord avait le sentiment qu’il s’agissait là d’une question centrale. Le châtiment, finalement, était évident. Seule la mort attendait Anderan Frey. Certes, l’on pouvait discuter à loisir de la méthode pour l’administrer, mais le jeune homme ne pouvait imaginer qu’une telle tentative puisse se solder par autre chose que la peine capitale. Il en allait, pour le coup, de l’autorité même du Tully, car la sédition se devait d’être punie à la hauteur du forfait accompli. Bien sûr, il fallait réfléchir également à ce que subirait la maison Frey dans son ensemble, qui semblait impliquée au minimum par ses soldats. Mais d’une certaine façon, Bowen estimait ce genre d’interrogation secondaire. Ce qui comptait prioritairement à ses yeux, c’était de parvenir à solidifier l’emprise de chaque suzerain sur son royaume. La raison d’Etat avait plus de poids que les considérations subalternes. Il s’agissait de faire un exemple, et de le faire bien. Aussi il réfléchissait, cherchant dans sa mémoire quelque chose à transposer à une échelle inconnue désormais pour aider Lyham Tully à prendre la décision qui satisferait au mieux chaque partie, et qui agréerait également à son Roi, qui, il commençait à le connaître désormais, n’apprécierait guère d’être tenu à l’écart d’événements relatifs à son propre mariage. Caressant doucement sa barbe, le Sénéchal attendit que le souverain riverain ait fini de s’exprimer et laissa filer une minute supplémentaire, avant de finir par dire, d’une voix posée :
« Puis-je exprimer une suggestion ? Avec tout ce qui a été dit jusqu’à maintenant, une idée m’est venue. Il s’agit évidemment d’un avis purement personnel. Vous en ferez ce qu’il vous plaira. »
Par cette prudence, Bowen exprimait autant son respect hiérarchique que le souci qu’il avait de montrer qu’il ne parlait à ce moment qu’en son nom, et non en tant que Sénéchal du Nord ou représentant de Jon Stark. Il s’agissait réellement d’un échafaudage intellectuel inédit qui ne se basait que sur ses propres spéculations.
« Connaissant les méthodes d’interrogatoire de mon prédécesseur, je gage que dans l’immédiat, notre … ami … est de toute manière relativement … fatigué, n’est-ce pas ? Et que l’extraire de sa cellule pour le faire comparaître dans un état aussi … compromis ne serait peut-être pas de nature à illustrer l’image de justice que vous désirez montrer à tous.
Vous pouvez surseoir légèrement à son châtiment, le temps de vous organiser. Nous allons repartir en campagne rapidement, après tout. »
Voilà pour l’évacuation de la décision.
« Quand j’étais plus jeune, un viol a été commis sur nos terres par un homme assujetti aux Glover, mais sur une marchande de passage qui appartenait à la maison Ardoise. Lord Ardoise avait donc matière à estimer qu’il était compétent dans cette affaire, au moins en partie. Père a donc décidé de rendre la justice en présence de Lord Ardoise. Il s’agissait de le laisser interroger notre suspect et d’entendre le verdict. »
Evidemment, les enjeux étaient plus grands, le crime différent. Mais dans l’idée …
« Je me demande si ce type de précédent ne serait pas intéressant à prendre en compte. Bien sûr, nous sommes à des lieux de la justice d’un simple Lord mais … Je ne crois pas que ce type d’arrangement soit uniquement traditionnel dans le Nord, n’est-ce pas ?
Peut-être qu’un représentant pourrait être désigné en qualité de témoin ?
Ainsi, le fait que Lord Frey ait voulu souiller les noces royales du Roi du Nord, et par là-même attenter à l’unité de l’Empire, serait visible, tout en vous laissant exercer pleinement la main de justice ? »
Bowen reprit :
« Ce n’est vraiment qu’une idée qui me vient, mais peut-être qu’ainsi … Cela montrerait l’unité impériale sans attenter à vos prérogatives royales ?
Je veux dire … Nous savons tous deux qu’au fond, le cœur de la question réside davantage dans la manière dont vous organiserez les choses que dans votre verdict. »
Il inspira avant de continuer :
« Quant à ses héritiers … Une manière relativement douce de faire peut être de prendre son jeune héritier comme otage et pupille pour vous assurer de la loyauté de la maison Frey. Il n’a pas dix ans, dans mes souvenirs des Jumeaux.
Serait-ce plus conforme à … une justice apaisée, loin de celle d’Harren Hoare ?»
Avec un léger sourire, il conclut :
« J’admets ne pas vous recommander l’étranglement public à mains nues cependant. Ce serait jouissif, mais peut-être un peu … barbare. »
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Dim 4 Mar 2018 - 22:31
Je ne sais pas si me confier de la sorte au jeune Glover, de laisser mes doutes s’exprimer, est une idée particulièrement judicieuse. Et pourtant, j’ai une véritable confiance envers le nordien. Nous avons déjà beaucoup partagé et surtout, il m’a clairement fait part de ses doutes, mais aussi de sa volonté d’union entre les Conflans et le reste de l’Empire. Grâce à ses origines déjà mais aussi, par une envie que tout le monde ne partage malheureusement pas. J’essaie d’occulter le fait que mon propre gendre n’a pas vraiment fait preuve d’enthousiasme concernant son union avec ma fille ou le fait d’avoir à collaborer avec des riverains, car cela ne ferait qu’apporter de la rancoeur là où il n’y en a définitivement pas besoin. Nous devons faire front commun, même si nous ne croyons pas forcément à tout ce que nous faisons. Tant que nous sommes convaincants pour unir nos hommes, le reste importe peu dans l’immédiat.
J’arque un sourcil alors qu’il demande s’il peut faire une suggestion, donner son avis et je souffle, avec une ombre de sourire. « Si je ne voulais pas entendre votre avis, je ne suis pas sûr que nous aurions autant discuté depuis que vous avez passé cette porte, vous ne croyez pas ? Mais je vous écoute... » Et c’est bien ce que je fais, avant de secouer la tête lorsqu’il évoque les méthodes d’interrogatoire de l’ancien Sénéchal. « Il est étonnamment peu fatigué. Je gage que la présence de la… jeune femme, a impacté, d’une façon ou d’une autre. Et il est encore en état de parler. Mais il n’est pas complètement présentable, il est possible que certains de mes hommes se soient un peu énervés après le départ de l’empereur et des autres. » Je hoche la tête au reste de ses propos, l’invitant à continuer et sans l’interrompre cette fois, fronçant les sourcils à mesure qu’il parle.
Et je laisse filer un silence pensif à son histoire, sa proposition, sans bien savoir quoi penser. Avant de souffler, hésitant. « Vous pensez que nous devrions… lui donner droit à une espèce… d’audience ? Ou il pourrait s’exprimer ? Donc le représentant du Nord serait là pour l’interroger ? Quant à savoir si le Frey a voulu souiller les noces du Roi du Nord ou de ma fille… difficile à dire n’est-ce pas ? » J’inspire, pensif, avant de hocher la tête. « Nous savons pertinemment la façon dont il finira de toute façon. Je me demande juste si cette action permettra vraiment de montrer l’unité de l’empire ou sa faiblesse. Nous avons été touchés si… facilement, que c’en est presque effrayant. » Même si je sais que nous ne ferons que renforcer la sécurité. Mais je n’ai pas envie de devenir totalement paranoïaque et de ne plus faire confiance à personne. « C’est… ce que je pensais oui. Je ne sais pas combien d’enfants il y a mais il serait pertinent de faire en sorte qu’Hoare ne puisse pas mettre la main dessus. Et j’avoue que j’aimerais autant que possible m’éloigner de l’image qu’il a pu donner de la justice aux riverains. Ne serait-ce que pour rappeler que nous ne sommes pas tous comme lui et qu’une alternative est possible. Je ne veux pas qu’on parle de vengeance. »
Je lève alors un regard vers lui et je tousse un rire avant de secouer la tête. « Sage conseil lord Glover. D’autant que je ne suis pas sûr que la satisfaction que cela pourrait procurer soit à la mesure du mal subi en vérité. » D’autant que ça irait à l’encontre de tout ce que nous venons de dire, quand bien même le fait de pouvoir presque plaisanter à ce sujet aurait de quoi me détendre un peu.
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Mer 18 Avr 2018 - 16:26
« Bien sûr mais … Cela vous concerne vous, et votre royaume. Comme je ne suis point votre vassal, il me paraît toujours plus courtois d’obtenir la permission royale de m’exprimer sur d’autres affaires que celles de mon pays. »
Même les têtes couronnées pouvaient prendre ombrage de l’intervention d’un de leurs pairs. La réunion stratégique l’avait bel et bien montré, tantôt. Certes, l’Empire avait vocation à rapprocher les peuples, mais chacun gardait son indépendance, et Bowen avait conscience que le Tully avait ardemment besoin d’établir son autorité sur le Conflans et de s’affirmer comme Roi, avec tout ce que cela sous-entendait, pour ne point être considéré par certains comme un souverain fantoche entre les mains des Braenaryon … ce que beaucoup, à l’extérieur, devaient penser. Le Glover aurait été curieux d’entendre des lignées comme les Arryn ou les Lannister parler de ce nouveau venu sur l’échiquier politique de Westeros. Jalouses de leurs prérogatives, fières de leur ascendance et soucieuses de l’unité de leur pouvoir, nul doute qu’ils regarderaient tous avec circonspection la Truite. Quant aux bieffois, ce n’était pas la peine d’en parler. Même au sein de l’Empire, le désormais suzerain des Rivières et des Collines avait besoin de montrer qu’il était du même rang qu’Argella Durrandon ou Jon. Alors Bowen, qui leur était inférieur, préférait montrer qu’il respectait son titre et son royaume, et se présentait comme soucieux de ne pas outrepasser son rang ou ses fonctions. Au fond, il s’exprimait davantage comme Lord Glover que comme Sénéchal, au sens où il désirait émettre une suggestion amicale, si tant est qu’il pouvait accoler ce terme à sa relation avec l’homme en face de lui. Il éprouvait simplement du respect, et une forme de camaraderie envers celui qui avec épousé une cousine, et qu’il avait consolé, en quelque sorte, lors de leur campagne jusqu’aux Jumeaux, après la mort brutale de Kian Tully. Au fond, malgré le sang versé entre les deux peuples, le Poing du Nord se sentait une forme de camaraderie envers un homme qui avait perdu dans la barbarie un parent. Et puis, sa tête était tout autant en jeu que la leur si le Noir triomphait. Mû par le pragmatisme autant que par réel soucis de veiller à l’entente cordiale entre riverains et nordiens, Bowen essayait simplement d’être un pont entre les royaumes. Peut-être que, tout fier rejeton du Nord qu’il était, il adhérait davantage à l’idéal impérial qu’il ne l’aurait pensé de prime abord. Il hocha la tête en entendant les explications quant à l’état de Lord Frey. S’il avait été passé à tabac par les soldats Tully, il pouvait bien soigner ses ecchymoses dans sa cellule pendant un moment. Autant se concentrer sur ce qu’il évoquait. Au vu de la question du riverain, Bowen comprit néanmoins qu’il n’avait pas assez développé son idée. La question de la justice, finalement, n’était que subsidiaire dans sa réflexion. Ses ambitions étaient plus politiques … théâtrales. Il s’agissait dans son esprit de combler chacun en asseyant la prépondérance du Conflans sans que le Nord ne s’estime mis à l’écart et trouve l’affront dûment vengé. Une explication plus avant s’imposait donc.
« Non … Je vous avoue ne pas avoir eu de pensée aussi libérale … Je pensais plus à une lecture du titre d’accusation et au prononcé de la sentence en présence d’un ambassadeur … et de vos nobles. Ensuite … En effet, le billot l’attend. »
Bowen ne pensait même pas un châtiment plus douloureux. L’homme était noble. La décapitation offrait une mort propre, rapide, mais la mort tout de même. Cela convenait à cette idée de justice et non de loi du talion pure que le Tully désirait imprimer pour son règne. La prise d’un otage comme pupille ferait le reste :
« Il a au moins un fils, Sire. De cela, je suis certain. »
Bowen essaya de se souvenir de l’héritier Frey, sans grand succès. Il se remémorait un gamin qui avait un peu moins que l’âge de Leyk, son écuyer. Le pupillage pourrait même, finalement, être à l’avantage du garçon, qui aurait fort à faire pour parvenir à enterrer les forfaits de sa famille. Fils d’un parjure, neveu de la Princesse Hoare … Nul doute que beaucoup le taxeraient du sceau de l’infamie. Mais peut-être qu’en servant correctement les Tully, s’il profitait de l’opportunité pour entretenir l’amitié du jeune Brandon … Alors il parviendrait à redorer le blason de sa maison, et être vu à nouveau comme un Lord avec lequel compter. Le nordien l’espérait, à tout le moins, car un foyer de tensions et de rébellion à la frontière du Nord ne lui plaisait guère …
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Dim 6 Mai 2018 - 10:22
Je laisse filer un instant de silence avant de hocher la tête à ses propos. « Certes. A croire que je ne suis pas encore totalement habitué à ce que les gens qui s’adressent à moi pour me donner leur avis soient aussi… courtois. Et se tiennent au rang qui est désormais le mien. » Probablement parce que j’ai moi-même encore du mal à savoir exactement où fixer les limites. Le fait que le jeune Glover ne soit pas mon vassal aide, autant le dire tout de suite. Je ne me serais probablement pas montré aussi peu sûr de moi face à un des hommes que j’ai désormais sous mes ordres. Quant à savoir ce que le jeune lord fera de mes incertitudes, en réalité, je ne m’en inquiète pas. Il sait l’importance que notre solidité à tous doit avoir pour le monde extérieur et je sais qu’il n’ira pas clamer sur tous les toits que j’ai encore de nombreux doutes quant à la façon dont je dois me comporter. « Je vous remercie de me… rappeler certaines choses en tout cas. Et vous avez en tout cas toute ma permission pour donner votre avis. Un regard extérieur est parfois plus avisé qu’un point de vue bien trop concerné par la situation. »
Et voilà que nous échangeons à propos de ce qui s’est passé. Ses réflexions s’avèrent intéressantes et m’obligent moi-même à voir au-delà des premières idées que j’aurais pu avoir concernant la suite des évènements. Il m’interpelle cependant et doit développer son propos alors que je ne suis pas trop où il veut en venir au premier abord. Mais ses éclaircissements me permettent de mieux appréhender son idée et je hoche la tête. « Je vois. J’avoue que l’idée est pour le moins intéressante. Rappeler pourquoi il est là et pourquoi nous exécutons une telle sentence. Que ce n’est pas uniquement dans le but de se venger mais bien pour rendre justice. » Reste à espérer que les nobles s’en contenteront. A dire vrai, si je n’impose pas immédiatement cette vision des choses, je sais pertinemment que je risque un débordement. J’ajoute alors, plus songeur. « J’enverrais des hommes chercher ses enfants. Et je laisserais un noble de confiance à la tête des Jumeaux. J’aimerais éviter qu’ils tombent entre de mauvaises mains. » Difficile de savoir ce qu’il adviendra de tout cela dans quelques semaines, quelques mois même, mais pour l’heure, c’est effectivement le mieux à faire. Et, d’une certaine façon, je me sens soulagé d’un poids d’avoir pu discuter de la sorte avec le nouveau Sénéchal du Nord.
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Lun 7 Mai 2018 - 22:50
« Je vous en prie, Votre Majesté. Et j’apprécie cette liberté que vous m’accordez. Je n’ai pas forcément l’habitude de donner mon avis. Nous devons tous les deux bousculer notre zone de confort manifestement. »
Certes, Bowen n’avait pas reçu une couronne, néanmoins, à défaut, il avait obtenu le commandement des armées du Nord, la plus haute distinction de son royaume pour un noble, et était le seul conseiller assermenté du Roi, si l’on exemptait son propre frère. Il n’ignorait rien des obligations allant avec une position si exposée, lui qui avait vécu l’essentiel de son existence dans l’ombre, à agir discrètement. Toute sa jeunesse, il l’avait passée à observer. Les écuyers ne prenaient pas la parole, sauf lorsqu’on leur demandait explicitement leur avis. Mais ce n’était aucunement sa place de parler lorsque le Vieux Loup discutait avec ses nobles. Plus âgé, il demeurait l’héritier et non le Lord, il n’était pas habilité à parler au nom de Motte-la-forêt, et n’avait finalement guère de préséance hormis celles offertes dans l’intimité par ses amitiés forgées dans la sueur de son apprentissage. Puis il était devenu aide de camp, et là encore, se contentait de transmettre les ordres de Jon. Ses initiatives concernaient des questions techniques, et il veillait toujours à s’exprimer avec déférence. Désormais, il devait parvenir à surmonter sa timidité, à être cette force de propositions qu’on attendait de lui, et savoir s’exprimer avec assurance, tout en conservant ce respect qui ne le quittait pas. Encore avec Jon, ce n’était point trop difficile : il s’agissait de son Roi. Mais il préférait être prudent avec les autres têtes couronnées, afin de ne commettre aucun impair. Après tout, désormais, il représentait le Nord, et il était hors de question que son souverain se trouve dans l’embarras à cause d’une parole jugée déplacée. Tant mieux donc, si Lyham Tully était satisfait de sa proposition.
« Je ne doute pas que l’énoncé des crimes commis fera presque paraître la sentence comme douce. Une mort propre, sans torture, et le pupillage d’un enfant apparaîtront comme un châtiment honnête, et tous pourront comprendre que vous savez être ferme, sans excès, courtois envers vos alliés, sans leur donner la préséance. »
La forme importait toujours, même pour une exécution. Toute décision royale, par essence, imposait un certain décorum, demandait à être expliquée pour être comprise quand elle impliquait la vie ou la mort. Lorsqu’un souverain usait de ses prérogatives en convoquant le ban ou en rendant la justice, il devait montrer à son peuple qu’il n’agissait pas pour ses intérêts, mais parce qu’il était de son devoir de poser un acte en particulier. Du moins, c’était la vision de Bowen, homme pétri d’honneur et qui ne concevait la politique que comme le prolongement de l’idéal porté par une famille royale, par un royaume. Chaque décision d’un Roi engageait sa maison, mais aussi l’idée que tous se faisaient de son règne. Torrhen était exigeant avec les siens, mais avait à cœur également d’expliquer pourquoi il leur demandant tant : parce qu’ils étaient menacés, et parce qu’il était temps que le Nord ne soit plus le simple rempart que Westeros était bien aisé de trouver à chaque invasion sauvageonne. De même, il avait bousculé le pays en lui imposant plusieurs réformes, mais en travaillant pour obtenir l’adhésion des nobles en leur prouvant qu’une modernisation était nécessaire. Bien sûr, certains avaient résisté. On l’accusait d’être dépensier, avec l’argent du Trésor. Et aujourd’hui ? Il fallait bien admettre que sans cela, le Nord n’aurait pu soutenir un tel effort de guerre, ni obtenir les financements adéquats pour cela.
« J’avais laissé Ser Tallhart, le frère d’un de nos commandants de division, pour tenir les Jumeaux avec une forte garnison. C’est un homme de confiance, qui saura assurer sa mission le temps de pacifier le Conflans et en finir avec le Noir. »
Nul doute que Lyham voudrait mettre un des siens à la tête de la forteresse. Mais mieux valait, pour Bowen, qu’il conserve ses quelques fidèles le temps d’abattre définitivement son ancien suzerain. Les forces du Conflans Libre n’étaient guère étendues. Quelques milliers d’hommes, moins que ce que Peyredragon pouvait mobiliser sans les enfants et les vieillards. Et beaucoup de nobles suivaient encore Hoare. A ses yeux, il serait plus judicieux de les conserver auprès du Roi. Surtout après le précédent Frey. On n’était jamais trop prudent, finalement. Ce n’était qu’un avis, un de ceux qu’il n’énonçait pas, mais suggérait avec autant de tact qu’il en était capable.
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Sam 19 Mai 2018 - 11:12
J’ai une ombre de sourire à ses propos, laissant filer un silence avant de souffler, d’un ton amusé. « A croire que nous apprenons l’un de l’autre. Au moins, aucun de nous ne profite de la situation, je pense que nous pouvons nous estimer chanceux tous les deux. J’espère en tout cas que vous ne cesserez pas d’utiliser cette liberté, même quand je serais plus… à l’aise dans ce rôle qui est le mien. C’est appréciable d’avoir quelqu’un qui dit ce qu’il a en tête sans trop tourner autour du pot. » Si j’ai été élevé pour prendre le relai de mon père, diriger Vivesaigues, rien ne m’avait préparé à cela. Et pourtant, je dois assumer tout cela, d’une façon ou d’une autre. Et l’exercice avec le nordien n’est qu’un avant-goût de ce que je risque d’avoir à affronter. Si je survis aux prochaines batailles en tout cas ce qui, pour l’heure, est tout sauf une certitude.
Alors que nous évoquons le sort du Frey, je hoche la tête alors que je fixe le vide un instant. « Vous avez les mots pour savoir comme ménager la chèvre et le chou. Comment donner l’impression que chacun obtient ce qu’il veut dans cette histoire. Je n’ai pas envie d’éliminer les enfants Frey, ils pourront être de précieux alliés s’ils sont dirigés dans la bonne direction et s’ils ne grandissent pas dans la haine de ceux qui ont reconquis les Jumeaux. Ils pourront même aider à fédérer les réticents si nous gérons bien les choses. » J’ai une pensée pour Myria Hoare, me demandant ce qu’elle pourrait bien penser de tout cela avant d’inspirer longuement et de reporter mon attention sur le nordien. « Merci pour le conseil en tout cas, vous avez réussi à me conforter dans la direction à prendre et je n’aurais pas de doute le moment venu. »
Voilà quelque chose qu’il me faudra songer à garder à l’esprit lors des prochaines décisions que je prendrais. Ne pas avoir de doutes sur les décisions que je vais prendre, les assumer, jusqu’au bout, quoi qu’il puisse arriver. Etre ce Roi qu’Harren aurait dû être et réussir à construire le Conflans dont le peuple a cruellement besoin. Il n’a que trop saigné depuis toutes ces années et j’ai envie de songer à la paix, d’une façon ou d’une autre. « Vous avez bien fait. Il faudra que nous décidions ce qu’il adviendra des Jumeaux après la guerre et, surtout, sous quelle responsabilité seront placées ces terres. Je ne doute pas que votre Roi aura probablement un avis sur la question dans la mesure où c’est un point stratégique pour nos deux pays. A voir si un autre mariage entre le Nord et le Conflans assorti de ces terres ne serait pas une idée à creuser. » Après tout, l’endroit restera sensible encore un moment. Et je ne veux pas créer des tensions avec le Nord, surtout son Roi, alors que la situation semble déjà un peu délicate entre nous.
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Dim 10 Juin 2018 - 20:16
« J’en userai tant que Sa Majesté le désirera, alors, comme avec mon propre Roi. »
Jon laissait toute latitude à son second. Il l’avait désigné comme son Sénéchal, mais aussi comme son Poing, équivalent nordien finalement de la Main de Peyredragon. Il était le Baal Forel du Nord, en quelque sorte, et avait toujours su que sa mission, avec le temps, consisterait autant dans la conduite des troupes que dans la représentation de son Roi et des intérêts de son royaume. C’était pour cela que sa nomination avait fait l’objet d’un décret royal étendant ses prérogatives au-delà des simples affaires militaires. Bien sûr, cela amenait un poids supplémentaire sur ses épaules, car il s’exprimait désormais au nom du Nord, au nom de Jon, et pas uniquement comme général. Ce qui avait pour conséquences de le rendre prudent dans ses dires … mais également enclin à s’impliquer dans la diplomatie du Nord, à compléter son souverain aussi efficacement que possible. Sans doute avait-il plus le goût de la représentation que le Stark, ressemblant probablement plus au père qu’au fils sur ce point. Cela n’avait rien de surprenant : il était très différent du Jeune Loup, là où le Braenaryon l’avait élevé en grande partie, lui avait transmis son expérience. Bowen avait longuement observé l’ancien roi, l’avait suivi dans l’ombre. Sans doute que sa manière de faire de la politique, de mener une négociation, devait beaucoup à Torrhen. Les mots de Lyham Tully lui rappelaient avec une acuité vibrante cette filiation intellectuelle.
« L’Empereur a fait mon éducation, vous savez, et il disait souvent, quand j’étais jeune, que le principal n’était pas de prendre une décision, mais de savoir comment la présenter. A vous entendre, il n’a point échoué dans mon enseignement. »
L’idée le fit brièvement sourire, l’affection réelle dans ses dires. Toujours, Bowen conserverait une reconnaissance sincère envers son mentor, celui qui l’avait formé. Il avait façonné l’homme qu’il était. Encore aujourd’hui, alors que leurs chemins s’éloignaient à mesure que chacun était appelé à des fonctions différentes, son empreinte sur le Glover demeurait réelle, et certains faits s’amusaient à le lui rappeler. Cela ne gênait aucunement le Poing du Nord. Vivre dans l’ombre de Torrhen avait longtemps été l’un de ses grands talents, et une de ses satisfactions. Il considérait avoir énormément appris à ses côtés, être devenu meilleur, même s’il avait sa propre personnalité, qui incluait sa franchise toute nordienne. Il en avait souvent usé avec parcimonie, dans sa jeunesse, préférant se taire que de commettre un impair. Avec le temps … et l’assurance prise grâce aux responsabilités, il en avait fait davantage usage. Comme il s’apprêtait à le refaire, car la proposition de la Truite n’était pas tombée dans l’oreille d’un sourd. D’une voix douce, posée, Bowen répondit donc :
« Je suis heureux que vous considériez cette question. Parce que j’y vois un moyen fort de rapprocher définitivement le Nord et le Conflans. Et aussi, je préfère ne pas vous le cacher, parce que je sais, qu’effectivement, mon Roi est très sensible à la question des Jumeaux. Son oncle y est mort quand il était enfant. La place est … particulière, pour lui. Pour le Nord. »
Il ajouta, un sourire sur son visage :
« Si un tel geste venait à être accompli … Je crois sincèrement que l’avenir entre nos deux peuples n’en sera que plus beau. Si votre fille, par exemple, devenait celle par qui les nordiens pensaient que leur frontière a été assurée, que cette guerre les a aidés, au-delà de la fondation de l’Empire … Elle serait la reine que tous célébreront à l’envie comme la belle Pacificatrice. »
Avant de conclure, pensif : « Je présume que vos propres terres s’agrandiront avec la frontière bieffoise, quand le trône de Hautjardin sera entre les mains de Kevan Gardener. »
Le Glover s’inclina.
« Si cela vous convient, je vais à présent aller réveiller mon Roi pour lui faire parvenir toutes ces informations.
Et merci d’avoir pris le temps de m’accorder cette audience impromptue, Votre Majesté. »
Invité
Invité
Sujet: Re: Unité et Justice [Tour V - Terminé] Mer 27 Juin 2018 - 13:58
J’ai un sourire alors que je hoche la tête à sa répartie. « Usez-en donc avec toute la latitude qu’il vous plaira. Le jour où cela ne me conviendra plus, vous serez le premier informé. » Et, pour l’heure, j’ai plus besoin d’hommes comme lui qu’autre chose. Et j’avoue, son attitude a quelque chose d’inattendu, même si je sais fort bien qu’il fait ce qu’il faut pour le Nord qu’il privilégiera avant tout le reste, quelles que soient ses affinités avec les autres royaumes. Au moins, c’est une bonne chose pour ma fille, je l’espère en tout cas. Je préfère ne pas trop m’appesantir sur le sujet et, au reste des propos du nordien, je ne peux m’empêcher de laisser filer un rire. « L’Empereur a bien raison. Il faudra que je suive ses leçons aussi semble-t-il. Et de ce que j’en ai vu, j’avais déjà la certitude qu’il n’avait pas échoué dans son enseignement. »
Pour autant, la question ne sera pas si facile à gérer, à trancher. J’hésite un instant, songeant qu’il faudra que j’évoque le sujet avec Lysara, notamment pour lui demander si elle se sent de gérer les enfants Frey si je les venir au château. Je ne me vois guère imposer cela à Alysanne, pas avec tout ce qui s’est passé dernièrement. Je retiens un soupir à l’idée que je ne serais de toute façon plus sur place pour contrôler quoi que ce soit. Et je hoche la tête au reste des propos, pensif. « Le mariage entre votre Roi et ma fille ne suffira pas à nous rapprocher, j’en ai parfaitement conscience. Il en faudra plus pour effacer des années, des décennies même, de guerres et d’affrontements. Mais j’essaierais de faire au mieux, de ne pas oublier toutes les pertes que chacun a subi. Et j’en parlerais. Avec le Roi du Nord, avec notre Empereur, pour trouver la solution la plus appropriée. Il faut penser à l’avenir et essayer de ne pas garder trop de rancœur sur ce qui a pu se passer jusqu’à présent. Cette place est tout aussi particulière pour nous, mais je n’oublierais pas vos propos. »
Et je hausse les épaules à sa conclusion, tout aussi pensif que lui. « Ne présumons pas trop vite pour le moment. Il y a encore bien des obstacles avant que nous puissions songer au Bief comme autre chose qu’une terre ennemie. » Je hoche la tête à la dernière question que nous évoquons avant de souffler, toujours sur le même ton. « Je compte sur votre retour alors. L’affaire est entre vos mains. » J’incline alors brièvement la tête à son intention. « Ce sera tout oui. Merci d’être venu jusqu’à moi lord Glover. »