“On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé]
Sujet: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Dim 17 Mai - 21:35
J'enroulai un nouveau parchemin qui partit rejoindre le précédent, sur le côté droit de la table. Je me pris la tête d'une main et soupirai, la plume posée sur un autre, vierge. Je n'avais pas songé un seul instant, en devenant Main de la Reine, que je me retrouverais à écrire autant de futilités. Je couchais quelques mots supplémentaires sur le papier avant de m'arrêter. Non, ça ne convenait pas. Je le déchirai avant de l'envoyer dans la cheminée et d'en reprendre un autre... Même résultat. Les formules de politesse n'avaient jamais été mon point fort. Je reposai la plume dans l'encrier et croisai les mains devant moi. Mon regard s'attarda sur le plafond qui semblait subitement prendre de l'intérêt devant la complexité de ma tâche... Je devrais confier l'écriture de ces banalités à quelqu'un qui savait y faire. Je ne comptais plus le nombre de lettres qui nous étaient parvenues pour nous adresser des condoléances en soulignant toujours une forte indignation. Ce n'était que des mots, souvent dénués de sens... Je déroulai les deux premiers parchemins et constatai rapidement que mes tournures de phrases étaient trop abruptes et inappropriées. On ne pouvait pas s'improviser scribe. J'étais un bras armé, une lame en attente de son prochain combat... Tout ce qui m'écartait de la voie sanglante que je voulais tracer au nom de cette revanche, au nom du rêve d'Aegon, n'avait plus aucune valeur à mes yeux.
Je le reposai sur la table, décidé à me lever, quand l'écho d'une dispute me parvint depuis le seuil de la porte. Je me souvins brusquement de l'existence du garde en faction. Depuis l'assassinat de mes deux ainés, la surveillance était renforcée. Je n'avais pas encore pris l'habitude que l'on se soucie de mes déplacements et commençais tout juste à comprendre le malaise de Rhaenys face à ce carcan étouffant. Pourtant, ce garde était des plus silencieux en temps normal, si bien que je m'en accommodais sans peine. Je posai la main sur la garde de mon épée et me dirigeai vers la porte d'un pas prudent avant de reconnaître une voix bien familière... Celle d'Evaenys Waters. J'ouvris la porte, mettant définitivement fin à leurs disputes, pour les observer tout deux, tour à tour. Je rendis un regard interrogateur au garde qui avait eu la ferme intention de ne pas la laisser franchir le seuil. Son statut de Waters jouait toujours en sa défaveur, bien davantage que le mien autrefois... Je secouai lentement la tête et me résignai, sans pour autant daigner croiser son regard qui risquait de mettre à mal ma conviction. Je restais la main sur la porte, ouverte à demi, sans être certain de vouloir la laisser entrer.
- Que me vaut ce plaisir, Evaenys ?
Je savais pertinemment ce qui me valait ce... Plaisir. Je ne lui avais pas accordé le moindre regard, le moindre mot, depuis que le Dragon avait été amputé de deux têtes. Je n'avais plus le moindre instant à lui accorder, ni l'envie d'ailleurs. Elle était devenue une distraction qui risquait de me détourner de mes missions. Mes pensées étaient résolument tournées vers cette promesse de mort... Daena me disait souvent, avec cette pointe de tristesse désormais familière, que je m'étais assombri. Sa demi-soeur n'avait pas encore eu l'occasion de l'expérimenter par elle-même. Je pris une courte inspiration et me décidai enfin à la fixer, attentif à sa réponse.
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Sujet: Re: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Lun 18 Mai - 1:19
Regarde moi lorsque tu me brises le cœur
La journée fut longue et éreintante, bien que je ne pus croiser que furtivement la compagnie de la Reine avant qu'elle parte pour un énième conseil. Je m'attachais donc à superviser les servantes et à faire tout ce qui était en mon pouvoir pour rendre sa vie des plus agréables lorsqu'elle pourrait enfin avoir un petit moment de libre. Parfois, et de loin, j'observais sa dragonne, si belle et terrifiante qui malgré tout semblait se morfondre terriblement de l'absence de sa maîtresse. Cette vision me brisait le cœur, mais je ne pus m'attendrir très longtemps tant mes pensées furent prises par les tâches qu'il me restait encore à accomplir. Cependant un affront vint gâcher cette journée qui aurait pu rester des plus banales, quoique légèrement chaude pour la saison.
Orys, nouvellement Baratheon, cet amant qui hantait encore mes rêves, s'était trouvé à quelques pas de moi et il m'avait dépassé dans ce couloir solitaire sans un regard pour ma silhouette, sans un mot pour me saluer, sans même la courtoisie de réagir à mon parfum enivrant. Ma première réaction fut une déception et une tristesse sans nom. Il avait été l'un de mes premiers amis à la cour, un des seuls qui pouvaient me comprendre et à qui je pouvais me confier, pourtant depuis que son nouveau statut avait pris une place prépondérante dans sa vie j'avais été jeté de la sienne comme une malpropre, sans un mot ou un regard, et je n'arrivais réellement pas à me faire à cette situation. Peut-être était-ce la part infime de sang de l'ancienne Valyria que je possédais de par mon père qui fit naître cette rage sourde et dévorante. La colère me déchirait le ventre et me rongeait la cervelle. Je bouillais littéralement et je ne pus plus faire preuve de mon détachement ou de ma gentillesse habituelle, ainsi je refusais de répondre aux gens ou écourtais tout simplement la plus petite conversation.
Sagement j'avais attendu que la nuit soit quelque peu avancée, je connaissais ma place, je n'avais aucun droit de venir faire une crise de jalousie à la porte d'un prince de Peyredragon, à la main de la Reine et à son frère bien aimé, mais je n'arrivais pas à faire comme si de rien n'était, je ne pouvais jouer aussi parfaitement la comédie que lui, j'étais trop entière, trop franche pour ne pas lui confier la souffrance de mon cœur. Et si je l'ennuyais ? Il me jetterait probablement aux fers pour quelques jours avec un sourire aux lèvres mais je n'en avais que faire, je portais sa famille en mon cœur depuis bien longtemps et j'avais servie avec dévotion sa sœur aînée. Cela ne me donnait aucun droit, je le savais parfaitement, mais en réalité j'avais envie de jeter toutes ces histoires de rangs, de sangs et de droits aux oubliettes et de lui rappeler mon bon souvenir avec autant de courtoisie qu'il avait mis à l'oublier.
Je m'étais donc présentée à sa porte, quelque peu hésitante il faut l'avouer, mais l'échauffourée avec le garde devant cette stupide pièce de bois qui me séparait de ma cible avait eu le don de me chauffer et j'étais maintenant parfaitement prête pour cracher le feu de mon énervement. On verra alors s'il est réellement un fils du Dragon et s'il est si résistant que cela aux flammes. Je me sentais clairement pousser des ailes, et je n'avais probablement pas conscience de l'insubordination énorme que je m'apprêtais à commettre, après tout je n'étais rien, et on me l'avait rappelé toute ma vie, cependant de sa part et cette fois c'était une fois de trop. Rien que l'air contrarié sur son visage eut le don de me briser le cœur, contrairement à son discours fielleux il n'était pas du tout heureux de me voir sur le pas de sa porte et cela n'allait certainement pas aller en s'améliorant.
« Bonsoir mon Seigneur. Comme je l'expliquais à votre si dévoué protecteur j'aurais véritablement grand besoin de m'entretenir avec votre personne. »
Mon ton était poli, courtois, sans émotion, presque froid et glacial, ne faisant absolument pas ressentir l'urgence que j'exprimais. Mais mes yeux par contre étaient deux billes le fusillant sur place, contenant de toute la colère qui pouvait m'animer. Il osait m'appeler par mon prénom et se comporter hautainement avec moi, ce qu'il n'avait jamais fait, après peut être que j'interprétais assez mal, après tout le voile de la fureur devant mon regard avait tendance à biaiser la situation. Sans me démonter de mon irréprochable comportement je continuais de le vouvoyer comme si de rien n'était.
« Je m'en veux terriblement de vous arracher à des tâches qui j'en suis sûr sont plus importantes que ma pauvre petite personne. Cependant je vous seriez grès de ne pas me mentir, vous n'avez aucun plaisir ni même une lueur de contentement à me voir ici. J'ai malgré tout des choses à vous dire. Celles-ci peuvent se faire en privé et dans le secret de vos appartements, ou ici sur le pas de la porte où tout le château pourrait se faire joie de colporter des rumeurs, je n'en ai pour ma part que faire, tant que je peux éclaircir la situation. M'accorderez-vous l'honneur d'une audience ? »
Je n'hésitais pas à le défier, j'en avais marre de son comportement de fuite, je voulais très clairement entendre de ses lèvres que je n'étais rien pour lui, lui signifier en des termes bien choisi mon sentiment et repartir me coucher avec la ferme intention d'avancer et de ne plus stupidement m'attacher à des êtres quel qu’ils soient. Après tout je n'avais jamais été à la hauteur pour personne, je ne voyais pas pourquoi ce serait différent en cette soirée maudite. Cependant je ne voulais pas être faible, je ne voulais pas lui laisser la satisfaction de m'avoir évincé sans que je n'ai même esquissé un geste. Il ne fallait pas la peine certes que je me mette dans un tel état de nerf, mais c'était ainsi, je ne pouvais lutter contre la colère qui me rongeait les tripes à m'en faire mourir.
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Sujet: Re: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Lun 25 Mai - 14:44
Je ne savais pas ce qui me retenait réellement de lui fermer la porte au nez et de retourner à mes affaires. Par soucis des conventions ? Je n’en avais jamais eu cure, même avec les nobles. Ca ne risquait pas d’arriver face à une servante un peu trop audacieuse. Elle mettait les formes pour dissimuler son venin, sans chercher à le ravaler. Je sentais sa colère sous la surface, presque aussi distinctement que la mienne. Elle était outrée, mais pas encore imprudente. Je ne lui devais rien, vraiment. Alors qu’est-ce qui me retenait ?
- Il est un peu tard pour réclamer une audience…
Je n’eus pas le loisir de finir ma phrase que le garde refermait déjà son bras, avec sa poigne de fer, dans l’optique de l’éconduire. Je ne devais pas être le seul à percevoir ses menaces à peine voilées… Et il existait bien une troisième alternative. Si je n’avais pas envie de l’entendre, il la forcerait à rebrousser chemin et se montrerait inflexible face à ses caprices. Je secouai la tête négativement, lui décochant un regard autoritaire qui le fit hésiter quant à la marche à suivre. Je ne comptais pas le réprimander pour un réflexe qui était le bon, mais si elle désirait si ardemment mettre les choses au clair, je lui en laisserais l’occasion.
- Ça ira, pour cette fois.
Pour cette fois seulement. J’étais dans un tel état de fatigue et d’exaspération que ma patience atteindrait rapidement ses limites avec Evaenys. Ce n’était pas un cadeau que je lui faisais. Elle avait mal choisi son heure pour se rappeler à mon bon souvenir. J’ouvris la porte en grand pour la laisser passer, jetant un regard furtif au garde, lourd de sens… Même si je craignais moins qu’il ébruite nos conversations plutôt qu’elle, si tout tournait en sa défaveur. Je refermai derrière elle, avec un soupir que je ne pris pas la peine de retenir. Un feu couvait encore dans la cheminée. Je lui fis signe de la tête de s’installer. Je préférais la voir assise qu’à trépigner debout. Je fis le net sur mon bureau, rangeant les parchemins et en jetant d’autres dans la cheminée. J’avais besoin de m’occuper les mains et de regarder ailleurs, sinon je risquais de ne pas pouvoir me retenir. Elle était sur la mauvaise pente. Je passais outre son insubordination, car j’en faisais moi-même preuve à de nombreuses reprises, mais elle devait se rappeler qui j’étais. Elle ne pouvait rien exiger de moi et avait tout intérêt à ne pas le faire, au risque de se prendre un revers au sens propre comme au figuré.
- Tu avais quelque chose à me dire ? Alors, parles. Tu en as l’occasion.
Je lui laissais une occasion de déverser son fiel avant de frapper fort… Ou d’inverser la tendance à son avantage.
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Sujet: Re: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Jeu 25 Juin - 0:58
Regarde moi lorsque tu me brises le cœur
Sincèrement je ne pensais pas qu'il aurait la patience de me laisser entrer. Malgré la forte émotion qui m'étreignait je ne pouvais que constater la grande fatigue qui tirait les traits du tout nouveau seigneur et la lassitude qui se dégageait de sa personne lorsqu'il me tourna le dos pour s'occuper de son bureau. Le lourd meuble de bois croulait presque sous les différents parchemins avant qu'il n'y mette de l'ordre. Ma curiosité naturelle aurait été ravie de pouvoir y jeter un petit coup d’œil mais je n'en avais absolument pas le droit ni l'envie vu mon état émotionnel actuel. Cependant le voir à ce point accablé eu le don de me radoucir et c'est avec une certaine docilité non feinte que je pris place là où il me l'intimait. Petit à petit la rage que j'avais entretenu et soutenu par ma folie des grandeurs fondis comme neige au soleil devant les signes de sa nouvelle ascension sociale. Il n'était plus de mon monde et la douleur de cette constatation m'emplit les yeux de larmes que je ne retenais qu'à grand peine.
« Je ne pensais pas un mot de ce que j'ai pu dire il y a quelques instants, je dois avouer que je suis étonnée que mon coup de bluff ait marché. »
Je n'avais plus aucune trace de venin dans mes paroles, certes ce revirement d'attitude allait certainement le rendre des plus perplexes mais je n'en avais cure, pour une dernière fois je décidais de ne penser qu'à moi. Reconsidérant mon statut face à lui je ne pu que me trouver énormément honteuse, comme ce fut le cas quant la Reine m'avait fait escortée hors de sa chambre par sa garde. Seule la fierté mal placée avait retenu mes larmes jusqu'au cachot. Bien entendu ma captivité n'avait pas duré bien longtemps mais j'avais réellement compris la stupidité de mon attitude et l'égoïsme de mon comportement, à ma décharge je ne souhaitais que me faire apprécier, mais je ne savais décidément pas m'y prendre.
« Ser, je me répand à vos pieds en excuses si c'est nécessaire mais je n'ai eu d'autres choix pour attirer votre attention. J'ai conscience qu'à présent je ne suis plus rien dans votre vie, et vu ma condition sociale il aurait été mal placée de m'en plaindre. Cependant s'il y a encore quelque affection pour moi en votre cœur vous pourrez prendre le temps d'écouter ce que mon cœur ne peut que hurler de désespoir. »
La colère n'avait pas disparue, mais elle n'était plus dirigée sur la mauvaise personne, je n'étais que seule responsable de ma situation, et je ne pouvais pas en vouloir à Orys pour avoir mieux réussi que moi. J'avais toujours su que nos ébats n'étaient que besoins primaires et non une de ces romances chevaleresques qui font frémir les adolescentes. Prenant une grande respiration je plongeais mon regard dans le sien qui n'était pas des plus amical.
« Je ne désire qu'être utile, même de par la petitesse de ma condition il y a bien quelque chose que je puisse faire pour vous ou la Reine pour oeuvrer à sa gloire. Vous ne pouvez pas ignorer l'incident qui s'est produit avec son Altesse, et dont la responsabilité m'incombe au plus haut point. Si j'ai présenté mes excuses et qu'elle a bien voulu par affection pour la famille de mon père me garder à son service je sais qu'elle ne me porte à présent pas du tout en son estime. Je souhaiterais qu'il en fusse autrement, je n'étais que terriblement stressée de me retrouver en son illustre compagnie et bien stupide de croire que je pourrais nouer un lien avec elle. Cependant je ne veux pas laisser les choses en l'état... Ser, vous êtes la seule personne à la cour hormis Visenya qui ait jamais vu quelque chose en ma personne et qui m'ait porté un peu de considération. Ainsi je sais que c’est beaucoup trop vous demander mais je sollicite votre clémence, et votre assistance dans cette affaire, mais aussi dans toutes autres où je pourrais vous être utile. »
C'était un retournement de situation des plus inattendus, mais je me rendais compte à présent combien ma jalousie était stupide, et surtout du peu de poids que je pouvais avoir en ce monde face à ceux qui décidaient réellement. Je ne cherchais que la rédemption, et non l'ambition d'une reconnaissance inexistante. Je m'étais tourné vers Orys en ces instants sombres tant pour l'affection profonde que je pouvais lui porter et que j'espérais réciproque mais aussi de par son ex condition de bâtard, il ne pourrait je l'espère rester insensible à la sincérité de mon cœur et à la loyauté dont je faisais preuve envers notre patrie et sa famille.
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Sujet: Re: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Sam 4 Juil - 11:43
Je terminais mon rangement, sans prononcer un mot. J'attendais encore qu'elle s'explique, même si ce silence passager était plutôt bénéfique. La tension chutait doucement, ne me laissant que cette fatigue qui mettait ma patience à rude épreuve. J'avais sorti deux verres et une bouteille de vin. Je n'en servis qu'un, marquait un temps d'arrêt à ses premières paroles, le but d'une traite. Coup de bluff ? Elle aurait mieux fait de ne pas l'ouvrir pour proférer de telles inepties. J'oscillais entre le rire dément, la déception profonde et la colère vibrante. Le verre explosa contre le mur, juste derrière elle. Une symphonie stridente et dissonante de débris cristallins qui me parlait.
- Je suis aussi le premier étonné... De ne pas t'avoir encore arraché les yeux pour ton impertinence. Vraiment, Evaenys ? Tu frappes à ma porte, profères tes menaces... Et parvient à te vanter d'avoir réussi ton coup ? Ce n'est bien que par mon affection que tu as pu franchir cette porte indemne. Tu as effectivement réussi à attirer mon attention de la pire manière qui soit. Agir de la sorte devant mon garde, je suis certain de ne pas l'oublier.
Maintenant qu'elle s'était donnée tant de peines pour entrer dans mes appartements, peut-être bien pour la dernière fois, j'espérais qu'elle avait de très bonnes raisons d'agir ainsi. Des raisons suffisantes pour racheter sa conduite. Je secouai la tête, poussai un profond soupir en l'entendant se répandre en excuses. C'était trop tard pour revenir en arrière, le mal était fait. Je l'entendais se plaindre de son statut de bâtarde, incapable de s'élever au-dessus de sa condition comme j'avais pu le faire. Elle aurait pu tellement plus, si elle s'en était donnée les moyens... Mais non, elle était ici, à me parler d'histoire de cœur. Elle pensait avoir perdu mon affection, ce qui venait de se produire en même temps que le verre s'était brisé. Pourquoi les femmes exigeaient-elles toujours autant d'attention ? Se souciait-elle vraiment d'autre chose que d'elle-même ? Si elle s'en était réellement préoccupée, elle aurait su que ce n'était pas de l'indifférence. Elle aurait été capable de comprendre ce que ces silences signifiaient. Je me sentais mort de l'intérieur. C'était tout ce qui la sauvait en cet instant.
Mon regard s'était reporté sur la porte quand elle reprit la parole. J'écoutais avec attention le motif de sa visite, celui qui aurait pu justifier un comportement pareil. Je ne sais pas à quoi je me serais attendu. Evidemment, qu'elle ne parlait pas d'affaires d'importance qui aurait requis ma présence immédiate. Non, elle me parlait de son différent avec ma sœur qui aurait bien pu attendre le lendemain. Je toussai un rire mauvais, à bout.
- Il faut croire que les cachots n'ont pas réussi à te rafraîchir les idées, pour que tu reproduises exactement les mêmes erreurs. Qu'est-ce que tu ne comprends pas, Evaenys ? Que ma sœur a un deuil à porter, tout comme moi ? Que nous n'avons clairement pas ni l'envie, ni la patience de se soucier des autres... Nous avons un royaume à maintenir à flots. Nous avons un peuple à protéger des exactions du parjure. Nous avons une conquête à mener pour restaurer la paix en Westeros. Nous devons nous soucier constamment d'une multitude de personnes aux horizons divers, de parfaits inconnus pour lesquels nous sacrifierons tout. Je suis Protecteur de Peyredragon. Je n'ai pas le loisir de me soucier de tes états d'âme, ni même des miens.
Je finis par m'assoir, face à elle. Je poussai un nouveau soupir et me passai une main sur le visage. J'étais las. C'était une épreuve du quotidien à surmonter. Ce ne serait ni la première ni la dernière fois que l'on me consulterait pour des querelles qui me semblaient sans importance. Elle aurait simplement dû s'en tenir là. Elle savait très bien que je n'avais jamais eu aucune patience.
- Reste éloignée de Rhaenys. La dragonne ne tolère plus qu'un comité très restreint dans son sillage. Je vais parler à ton père. Nous trouverons bien un moyen de t'employer intelligemment. Tout le monde doit trouver sa place en Peyredragon, participer à sa mesure à notre devenir. En attendant, prends exemple sur ta sœur. Elle est la meilleure d'entre nous.
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Sujet: Re: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Ven 10 Juil - 11:48
Regarde moi lorsque tu me brises le cœur
Décidément il ne semblait pas pouvoir y avoir de limite à ce qu'Orys pourrait infliger comme blessures à ma personne. Je le laissais déverser sa morgue sur mon humble personne sans rien dire, en vérité je n'étais que très peu surprise de sa réaction et j'aurais probablement eu la même si j'avais pu être à sa place. Une fois encore je n'étais qu'une sale gamine qui venait embêter les grandes personnes qui avaient décidément bien mieux à faire que de s'occuper de mon triste sort. Je me murais dans un silence douloureux, et je me forçais à effacer toute trace de larmes à venir sur mon visage. Je devais me montrer certes des plus respectueuses mais aussi froide et impassible que la glace. Je me permettais donc de répondre à ses accusations par une voix douce et dénuée de tout défi. Je ne souhaitais en rien l'affrontement, même si mon caractère de feu m'y avait amené. C'était à moi à présent de désamorcer la situation.
« Ce n'est en rien de la vantardise, juste une constatation. Vous ne semblez pas avoir entendu mes excuses que je réitère mais je vous en prie prenez au moins en considération que je n'avais pas d'autres choix. Vous êtes devenus hermétique à la moindre sollicitation silencieuse de ma part. Vous ne me remarquez même pas sur votre chemin, j'ai donc bien conscience de mon insignifiance, je n'avais donc que ce coup d'éclat déshonorant pour pouvoir attirer votre attention. »
Ce n'était pas la meilleure excuse du monde et elle ne m'exonérait en rien de mon comportement fautif, mais j'en appelais tout du moins à sa compréhension. Il ne fallait pas être l'être le plus intelligent des septs royaumes pour réaliser que je n'avais pas énormément d'options pour me faire remarquer de la personne qu'il était devenu. Il m'avait retiré le privilège de sa compagnie au moment même où il s'était élevé socialement et j'avais perdu un ami et un amant qui m'était cher, mais je comprenais à chaque mot qui sortait de sa bouche à quel point cette relation n'était qu'en sens unique, à quel point j'avais pu me tromper. Était-ce finalement l'apanage des Targaryen de pouvoir vous meurtrir au plus profond de votre chair avec une facilité déconcertante ? Certainement mais je n'en montrait rien, pâmée dans une fierté que je n'avais même plus. Je n'étais rien, je le savais il n'était donc pas si nécessaire de me le rappeler à chaque mot. La colère grondait à nouveau dans mon cœur mais la honte, la tristesse et le désespoir d'être rejetée à nouveau savaient museler cette émotion dangereuse.
« Je ne le comprend que trop bien, et même mieux que ce que vous semblez croire. Vous avez sûrement à raison une bien piète opinion de ma personne mais si je venais quérir des conseils je voulais également vous offrir mon soutien, si insignifiant soit-il.»
Je me refusais de le plaindre, je lui déniais la moindre compassion de ma part, s'il était si accablé il n'était en rien à plaindre comparé à la précarité de ma situation. Il était logé, cajolé et socialement accepté, il n'avait pas à s'inquiéter de sa personne ou de son devenir. Malheureusement la fermeté de la raison ne pouvait rien contre l'émotivité de mon cœur qui ne pouvait s'empêcher de vouloir me rapprocher de lui pour le consoler. Cependant faire preuve de sentimentalisme ne ferait que me perdre. L'ultime coup fut porté par ses dernières paroles. Plus que le rejet complet de ma Reine qui faillit me faire défaillir, ce fut l'évocation de la perfection qu'incarnait ma sœur qui fit naître une boule atroce dans ma gorge qui m'empêcha pendant quelques secondes de prendre la parole pour lui répondre. Encore une fois je ne faisais pas le poids, une fois encore on me préférait une autre...
« Je ferais selon ce que vous ordonnerez me concernant, et surtout selon la volonté de son Altesse. Je pourrais retourner auprès des Velaryon dissimuler l'énorme déshonneur de cette situation. Cependant je ne peux croire que vous ou la Reine soyez si insensible au repentir et aux volontés sincères de se racheter. Je suis dévouée corps et âme à sa Majesté et ce n'est en rien ma condition qui me limitera à le prouver. Je vous en prie laissez moi vous aider, confier moi une tâche qui saura vous faciliter la tâche et me permettra de prouver par des actes ce que je ne sais exprimer par les mots. Je mourais pour la gloire du Dragon... »
Je laissais mes derniers mots en suspens, je fixais à présent Orys dans les yeux avec toute l'intensité et la sincérité que je pouvais exprimer, le priant silencieusement d'avoir la patience d'examiner ma demander et d'y répondre favorablement.
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Sujet: Re: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Jeu 16 Juil - 19:42
Sa parfaite immobilité jouait en sa faveur, une froideur affichée qui était de circonstance pour espérer prendre à contrepied ma fureur naissante. Les servantes avaient vite tendance à paniquer, en terme général, à se répandre en excuses qui m'indifféraient totalement. Les gardes avaient souvent le bon sens de rester de marbre, me laissant rapidement l'impression de parler à des murs et me contraignant à changer de cibles. Mais dans cette pièce, il n'y avait bien qu'elle. Si Evaenys s'était mise à pleurer ou à m'approcher, elle savait pertinemment que je ne l'aurais pas supporté. Je ne me serais pas laissé attendrir pour si peu et l'aurait renvoyé immédiatement. Mais cette colère-là fut aussi violente que passagère. Je m'étais bien vite assis. Si la fatigue me faisait perdre patience plus aisément, elle étouffait aussi rapidement les flammes. Je voulais en finir, et le plus rapidement serait le mieux. Je poussais un profond soupir, quand elle reprit la parole.
- Une simple constatation... Facile. Je les ai entendu, mais si tu crois t'en tirer avec de simples excuses...
Je secouai la tête, dépité. Je ne m'attardais pas sur ce point précis de son discours, sinon nous n'avancerions pas. Elle n'avait pas totalement tort. C'était évident que j'avais l'esprit ailleurs et ne me souciait plus réellement de ce qui m'entourait. Evaenys en avait fait les frais, comme bien d'autres, dont certainement Rhaenys elle-même.
- Demande audience en bonne et due forme la prochaine fois, à une heure décente, et je pourrais réviser mon jugement.
J'étais magnanime, pour une fois, mais c'était bien la dernière chance que j'étais prêt à lui accorder. Si elle reproduisait encore cette erreur, je n'aurais pas de scrupules à lui fermer définitivement ma porte. Je l'avais peut-être abandonné le premier, mais il était temps pour elle de se rappeler sa place. Que nous soyons tout deux bâtard nous avait rapproché, par le passé... Sauf que j'étais un bâtard royal, chevalier qui plus est. Et maintenant ? Héritier, protecteur et Main de la Reine. C'était bien triste à dire, mais la mort de mes aînés m'avaient permis de m'élever socialement. J'aurais préféré qu'il en soit autrement, de renoncer à tous titres et prétentions et qu'on me les rende. Il m'arrivait encore d'essuyer des regards noirs et désapprobateurs mais plus personne n'osait contester mon statut à voix haute devant la dragonne. J'avais prouvé, même aux plus réticents, que j'étais un mal nécessaire pour la prospérité de Peyredragon.
Je ne répondis pas, parce qu'il ne servait à rien de nier. Je ne m'étais pas soucié d'elle, pourquoi aurais-je prétendu le contraire ? Quant à son soutien, ce n'étaient que des mots. N'importe qui sur cette vaste île aurait pu en dire autant. Il allait falloir qu'elle prouve sa valeur par les actes, comme j'avais été amené à le faire. J'avais l'impression de sentir de l'envie, voir de la jalousie, qui transparaissaient de ses propos. La même que les nobles qui m'avaient si longtemps reprochés d'être si proche d'Aegon, eux qui parvenaient à peine à attirer son attention. Je supposais qu'il en était de même pour la servante, s'agissant de Rhaenys. Etait-elle réellement venue quémander des conseils ou trouver une cible à sa colère ? Si tel était le cas, elle avait bien choisi la mauvaise. - Apprends à endurer sans broncher, Evaenys. Si tu n'arrives déjà pas à le faire, tu ne parviendras pas à t'élever au-dessus de ta condition. Il n'existe aucun secret : Ce que certains acquièrent à la naissance, nous devons sans arrêt prouver que nous en sommes dignes.
Je soupirais à nouveau, avant de me rejeter dans le fauteuil. Je fermais les yeux, me passant une main lasse sur le front. Si elle souhaitait si ardemment aider, autant la mettre à contribution. Personne ne devait être inutile à Peyredragon. J'avais reposé ma tête contre le tissu du fauteuil. Je rouvris mes iris violets pour les braquer sur elle, la voix basse et davantage placide.
- Tu viendras avec nous à Goeville. Ce sera l'occasion pour toi de fréquenter les grands de ce monde et, qui sait, montrer que tu peux te rendre utile de bien d'autres façons. Tends l'oreille et profite de ton statut pour passer inaperçue. Tu pourras toujours surprendre des bruits de couloir qui seraient révélateurs de l'opinion de tout et chacun. Savoir écouter est une qualité rare et appréciable.
On apprenait surtout à écouter, ensuite à parler si la situation l'exigeait. Le silence est d'or, la parole d'argent. J'espérais réellement qu'elle puisse me surprendre... Les cartes étaient entre ses mains. Je lui fis un signe de tête en direction de la porte. Je m'étais levé pour reprendre l'écriture de mes parchemins. Dans l'immédiat, nous avions tout deux besoin de calme pour réfléchir.
- Tu peux disposer, Evaenys.
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Sujet: Re: “On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé] Ven 7 Aoû - 14:03
Regarde moi lorsque tu me brises le cœur
Le tempérament de feu de mon interlocuteur mis quelques temps à se dissiper et c'est avec bonheur que je le regardais impassible, se détendre un peu et laisser la fatigue reprendre le dessus. Mon cœur se serrait de le voir si las mais je ne pouvais rien exprimer si ce n'est de la contrition pour mes erreurs. Je restais donc immobile et silencieuse le temps qu'il me livrerait son avis sur ma proposition. Je savais pertinemment que ni les larmes ni les suppliques à ses pieds ne marcheraient, il n'était pas homme à s'émouvoir de ces spectacles pathétiques et je m'étais suffisamment humiliée comme ça. Je ne répondis pas en premier lieu sur sa remarque quant au fait de m'en tirer avec de simples excuses, cela n'avait pas marché avec sa royale sœur, je n'en attendais pas moins de lui. Cependant ce n'était pas par mes excuses que je comptais renverser la situation mais bien par ma volonté et ma loyauté envers leur famille et la reine. Je voulais attirer l'attention par mes actes et non par des mots fielleux et perfides qui s'envoleraient bien vite et seraient facilement oubliés.
Il en devenait presque magnanime et je pouvais enfin me détendre quelque peu et relâcher la pression qui me faisait presque suffoquer, en effet depuis un petit moment je retenais ma respiration et n'osais pas respirer normalement en sa présence de peur d'accentuer la fureur du dragon. Il validait ma théorie selon laquelle son opinion de ma personne n'était guère reluisante et je ne pus qu'encaisser une nouvelle fois le coup et ne rien montrer du choc que ses phrases pouvaient me causer.
« Bien Ser, je n'y manquerais pas. »
La suite de son discours scella mon destin, j'écoutais alors avec attention me contentant de hocher la tête pour approuver ses dires et lui faire comprendre que je l'écoutais avec toute l'attention dont j'étais capable. Mon visage fermait s'illuminait cependant quelque peu lorsqu'il annonça que je pourrais accompagner l'escorte royale à Goeville, je pourrais là-bas faire mes preuves et comme il le soulignait pourquoi pas récolter quelques informations utiles à notre cause. Ne voulant toujours rien montrer je ne pouvais cependant pas cacher la reconnaissance qui m'envahissait et surtout l'excitation que ces perspectives pouvaient déclencher. Je fis une révérence impeccable pour appuyer mes mots de remerciements.
« Je n'ai pas de mots pour vous exprimer ma reconnaissance et vous le prouverez donc par mes actes. Merci infiniment de m'accorder cette seconde chance, je ne vous décevrez pas. Que le dragon veille sur vous et vous apporte sa force pour les épreuves à venir. »
Sur ces mots je m'éloignais en lui faisant face pour ne pas risquer de le blesser ou de l'offenser de nouveau, il me fallait respecter le protocole de manière irréprochable au vue de mon entrée fracassante. A son ordre je sortis de la pièce et ce n'est qu'une fois la lourde porte refermée que je pus arborer un sourire éclatant qui me redonnait courage. Le garde lui me regardait avec étonnement et un certain mécontentement, certainement pour me décourager de rester dans les parages. L'ignorant superbement je m'éloignais pour rejoindre ma petite chambre dans le quartier des servantes, il me fallait me préparer à ce voyage qui pourrait me permettre de faire évoluer mon destin.
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“On peut tout fuir, sauf sa conscience.” [Tour I - Terminé]
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