Je n’ai jamais été un enfant malheureux. Ni mon frère, d’ailleurs. Nous avons toujours bénéficié d’une forte attention de nos parents, qui aimaient nous raconter des histoires toutes plus intéressantes. De temps à autre, mon père venait nous raconter certaines de ses péripéties qu’il avait vécu : ces moments sont ancrés dans mon esprit, inoubliables. Malgré notre position de famille royale, nous avons toujours eu cette chance d’avoir une forte proximité, d’avoir du temps à partager ensemble, malgré que les mestres accaparaient notre temps pour parfaire notre éducation car nos parents devaient siéger sur leur trône. C’était une chose à laquelle nous étions habitués, mon frère et moi, connaissant les enjeux de notre position. Jonos et moi avons toujours été proches après tout, il venait parfois me rejoindre dans ma chambre et nous dormions ensembles, souvent lors des nuits d’orage. J’étais son grand-frère, il était normal que je sois là pour lui, que je le protège comme je pouvais du haut de mes quelques années. Tout comme la protection de notre père envers nous, envers son royaume, durant cette guerre contre l’Orage.

Mais c’est à ce moment que tout changea dans nos vies. Mon père, le roi, le héros de ce royaume revint de cette guerre. Mais sans vie, il avait été tué, vaincu, lui qui avait tant raconté d’histoires. Lui qui nous avait conté toutes ses péripéties, tous ses affrontements auxquels il avait participé. Mais nul n’était infaillible après tout. Ma mère était venu me réveiller en pleine nuit, pour me prévenir de la nouvelle. Je me souviens avoir été ébloui par la lueur de sa chandelle, s’être approché de moi le visage embrumé… Pour m’annoncer cette triste nouvelle. Je n’avais su comment réagir. C’était peut-être dû à la fatigue, mais nulle larme ne coula de mes joues alors que ma mère dévoilait sa tristesse dû à cet évènement. Je m’étais sûrement déjà fait une raison. Je me souvenais encore de ce sourire confiant qu’il m’avait fait avant de partir pour cette guerre, le dernier souvenir que j’avais de lui. Mais suite à cela, ma mère et moi avons passé la nuit à discuter, de tout et de rien mais aussi de politique. Car désormais, j’étais le Roi de la Montagne et du Val et de nombreuses responsabilités venaient de me tomber dessus. J’avais déjà commencé ma préparation pour prendre la succession de mon père, mais ça ne devait pas arriver aussi vite. Évidemment, ces évènements ne se prévoyaient pas. Je devais travailler davantage pour devenir un roi digne de ce nom et mes principales fréquentations furent des personnes hauts placées de la noblesse et le mestre de notre maison. Surtout le mestre, d’ailleurs, lui qui était davantage apte à m’inculquer ce que je devais savoir, l’art de l’érudition comme ils aimaient l’appeler. C’était lui qui me donnait les livres qui étaient nécessaires à mon apprentissage, pour me donner les connaissances obligatoires pour gérer le Val. Des histoires qui pourraient paraître chevaleresques, pourtant, c’était des récits historiques des combats que le Val avait autrefois mené. J’avais toujours aimé apprendre, ce n’était pas un problème pour moi. Mais certaines choses étaient bien moins passionnantes, telles que l’apprentissage des différentes maisons, de leur blason, ainsi que de leur devise. J’étais bercé par ces récits que le mestre aimait raconter, sur ma maison, sur mon royaume. Sur ces rois qui me précédèrent et qui pour certains fait la gloire de notre maison. « Aussi haute qu’honneur », telle était notre devise et ils l’avaient appliqué. Peut-être que j’allais moi-même pouvoir l’appliquer, me faire un nom, marquer l’histoire et ne pas simplement être Ronnel Arryn, roi de la Montagne et du Val. Je n’avais pas à me soucier du manque d’argent, de mon prochain mariage, mais je me devais de me soucier de l’image que j’allais montrer. Car c’était aussi ce qu’il m’apprenait. Bien paraître auprès des autres royaumes, auprès de mon propre peuple. Toujours être fort, souriant, un preux chevalier comme certains le diraient. Il fallait que je sache m’adapter à mon interlocuteur aussi, que j’apprenne les principes de cette société pour pouvoir converser avec n’importe qui. Et ça, ce n’était pas forcément facile. Mais grâce à ma mère, habituée à cela en tant que Reine, je pus progresser dans cette discipline si importante. J’étais doué, ça allait sans dire et je savais comprendre les intentions de ceux que je côtoyais. Assez pour expérimenter avec les gens de ma cour, sans être encore le meilleur à ce jeu. Mais plus le temps passait, plus je me montrais apte.

Et ce n'était pas le seul art où je devais me montrer apte. Car suite à la mort de mon père, je dus commencer un entraînement plus rigoureux au combat. Et c'était bien différent de ce que j'avais connu autrefois, puisque le maître d'armes des Eyriés, Ulwyck Volmarck, ne m'offrait pas une seule seconde de répit. Quand il me désarmait, je n'avais généralement pas le temps de rattraper mon épée qu'un nouveau coup venait, quand je tombais... Je devais esquiver du mieux que je pouvais pour ne pas être touché. Mais malgré ce qu'on pourrait croire, je n'avais pas été gêné par cela. Je comprenais le fait qu'on veuille m'entraîner le plus vite possible, afin que je sois un roi digne de ce royaume. Après tout, qui suivrait un roi ne sachant pas manier une arme ? Les femmes n'avaient pas à se soucier de cela, car les sujets ne s'attendaient pas à voir leur reine combattre. Mais un roi, c'était bien différent. Il devait manier l'épée comme personne, savoir encourager ses troupes, se montrer vaillant. Chose compliquée pour un enfant qui n'avait pas l'expérience derrière lui. C'était sûrement pour cette raison que je ne lâchais pas, que j'étais à fond dans mes entraînements afin de devenir le meilleur possible. Et quand mon maître d'arme ne pouvait me donner mes cours, c'était mon oncle, mon mentor attitré qui m'entraînait. Je passais beaucoup de temps libre avec lui, car il avait beaucoup de choses à m'apprendre. Il était plus précisément le frère de ma mère, un homme vaillant, sachant combattre et apte à m'apprendre ses techniques. Et il m'aidait aussi pour ce que j'avais du mal, comme monter à cheval. J'étais bien souvent tombé, mais tout le monde pouvait remarquer ma persévérance pour être meilleur. Nul ne pouvait dire que je ne faisais aucuns efforts, car j'étais prêt à tout pour réussir et être accepté le mieux possible par mon peuple. Certes, mon peuple serait pour une grande partie derrière moi. J'étais le fils de Jehan, le précédent roi. Mais je ne voulais pas être accepté que pour cela, je voulais faire mes preuves, marquer l'histoire. Mais au fil du temps, j'ai acquis une bien meilleur maîtrise de mon cheval, tout comme de mon arme. Certes, ce n'était pas évident mais je me débrouillais aussi bien que possible. Mes entraînements portaient leurs fruits, ce qui m'offrait le sourire fier de ma mère. Ma mère qui cherchait par tous les moyens à m'endurcir, à me rendre plus mature. Au point où elle décida de payer une prostituée pour m'apprendre certaines choses. Autant dire que c'est un évènement qui laissa une marque, quelque chose que je n'ai pas apprécié. Je ne l'oublie pas et je ne le cache pas.

Mais ma vie n'était pas faite que d'entraînement et d'apprentissage. J'étais jeune, facilement impressionnable et les sentiments avaient une grande facilité à apparaître dans mon esprit. Mais c'était différent, c'est ce que j'aimais dire... Ce jour, où une délégation de l'Ouest vint aux Eyriés. La famille Royale, la famille Lannister au complet. Le roi Loren, sa femme Jordane et leurs enfants. Lyman, l'aîné. Beau, charismatique. Qui pouvait bien dire le contraire ? Mais il y avait aussi leurs deux filles, Megara et Nymeria. C'est bien cette dernière, la cadette, qui retint toute mon intention. Un amour de jeunesse qui m'avait marqué, encore aujourd'hui. Nous nous étions beaucoup rapprochés à ce moment, passant de longs moments ensembles. Des moments très agréables, pour de jeunes enfants. Et à la fin, quand ils sont repartis dans leur royaume... Nous nous sommes embrassés. C'était un début, mais nous n'avons cessé de rester en contact à partir de ce moment, nous échangeons nombre de missives. J'avais fait en sorte que ma mère ne soit pas au courant, en soudoyant le Mestre. C'était bien à ce moment que je pouvais comprendre à quel point mes cours étaient utiles.

Puis les années défilèrent, jusqu'à ce que les Targaryen revendiquent le trône des Sept Couronnes, se proclamant Roi des Sept couronnes. Mais leur tentative fut chamboulée à la mort d'Aegon Targaryen et de sa soeur, Visenya Targaryen ainsi que de leurs dragons. Puis il y eut les festivités de Goëville, avec un Conclave invitant les rois à discuter autour d'une table pour parler de la situation politique tandis que chacun était invité pour participer ou regarder le tournoi qui avait lieu. Évidemment, j'étais présent à cet évènement. C'était une magnifique journée, le soleil était à son zénith et le vent était présent, apportant sa touche de douceur. Mais ce n'était pas la seule douceur de la journée. Elle était présente. Nymeria Lannister. Celle que je n'avais jamais oublié en plusieurs années, continuant de lui parler au travers de nos missives. Nous n'avons pu conserver beaucoup ensemble, mais la voir fut amplement suffisant pour moi.

Alors certes, le Conclave ne fut pas des plus concluants. Mais il avait permis de savoir les intentions de chacun et j'avais pu voir celle que j'aimais. Peu de temps après, je me rapprochais du fils du Roi du nord, nouant un semblant d'amitié avec. Nos maisons étaient alliés, bien que l'alliance soit désormais mise à mal. Mais je compte rattraper cela, car le Val venait de rompre, à cause de ma mère et des conseillers, une alliance qui pourrait être précieuse. Et ce n'est pas la seule alliance qui avait été négociée. Grâce aux efforts de ma mère pour maintenir un lien avec la maison Lannister, il avait été évoqué un mariage entre nos deux maisons. Puis j'eus le plaisir d'apprendre que finalement, j'allai épouser Nymeria... Le mariage approche à grand pas, Nymeria m'ayant rejoint aux Eyriés. Bientôt, je serai Roi de la Montagne et du Val et elle sera ma Reine. Je ne peux me plaindre d'une telle condition, car ce mariage se voit à la fois politique et d'amour.

Il est désormais tant pour moi d'être le roi qu'ils veulent tous. De régner comme un roi doit le faire. Je ne suis pas seul, j'ai mon conseil et ma mère avec moi. Mais je dois aussi être capable de prendre mes propres décisions malgré la situation dans laquelle est plongé Westeros. Le Nord et le Val sont en guerre contre le Conflans, tandis que le Bief s'est trouvé un allié précieux en la personne de Harren Hoare et son peuple. Une telle alliance ne pourra donner que davantage de guerres, leurs deux armées ensemble pourraient être dangereuses pour bien des nations. Mais le Bief n'est pas dans une position de force, car cette alliance est tout mise à mal. Le mariage entre Eren Hoare et l'héritier Kevan Gardener ne pourra avoir, suite à la désertion de ce dernier. Une aubaine, permettant d'avoir plus de temps pour préparer les éventualités. L'Ouest n'était pas aussi dans la meilleure des positions il y a peu, suite à une rébellion dans le domaine des Fallwell qui ne tarda pas à faire parler d'elle ainsi que du prince du Roc, qui se montra bon envers ses gens. Mais Westeros demeure divisé malgré les nombreuses alliances qui voient le jour. Le Val aura bien du mal à tenir sa neutralité et seule son alliance avec l'Ouest est solide. Désormais, tout se joue.