La guerre commence à toucher la totalité des royaumes... Etes-vous partisan de l'unification de Westeros par l'Empire ou les Puissances Centrales, ou plutôt attaché à l'indépendance de votre Royaume? Pourquoi?
Jadis, fut un temps où les familles de Dorne régnaient indépendamment, selon leurs propres règles, leurs propres lois. Jadis, fut un temps où rois, reines, princes et princesses, tous arboraient des couronnes plus reluisantes que leurs voisins, teintées de rouge, d'or et d'argent. Car jadis, fut le sang. Chaque trône se voulait plus grand, plus imposant, plus puissant. Les Ferboys étaient alors les Grands Rois de Dorne, les Maîtres des Collines Vertes. Jusqu'au jour où les Martell s'imposèrent. Dans la violence et la hargne, l'envahisseur a écrasé les Gardiens de la Voie de Pierre.
La rancoeur des Ferboys s'est atténuée avec le temps, bien que leur loyauté envers la famille princière ait toujours été questionnée. Néanmoins, Ryanne a été élevée dans un respect sans admiration des maîtres de Lancehélion. Fidèle sans excès, elle a docilement suivi l'avis familial envers les Martell et a toujours prôné l'indépendance de Dorne comme une réalité indéfectible.
Néanmoins, sa vie à Wyl, confrontée à une nouvelle vérité, a éveillé en elle le sang Ferboys de ses ancêtres. Le doute a germé face aux années d'inaction des Soleils de Dorne quant à la situation dans les Montagnes Rouges. Doutes renforcés depuis la crise de Hautjardin et la guerre contre le Bief. Aujourd'hui, elle pense l'indépendance de Dorne perdue. Fataliste, elle ne comprend pas les actions qu'elle juge désespérées de la Princesse à chercher du soutien en Essos alors que l'Empire leur tend les bras.
Ferboys, an -16Elle n’avait pas toujours été une enfant maladive.
Enfant, avec Edan et Lohan, elle s’élançait sur les falaises de Ferboys, regardait d’un œil curieux les marchands ambulants errant sur le port et chassait les salamandres qui se cachaient des les eaux claires de la rivière qui se jetait dans la mer de Dorne. Ryanne avait faim. Faim d’aventures, de sable brulant sous ses pieds et de bourrasques tièdes dans les cheveux. Faim de vie.
Néanmoins, la fillette enjouée ne brillait pas du même éclat que ses deux frères. Dernière née de deux figures flamboyantes, Yorick Ferboys et Dalya Allyrion, comment se faisait-il qu’elle n’ait hérité que d’une figure banale ? Visage insipide face à la beauté pâle et spectrale de ses aînés et de son père, corps maigrelet comparé à la beauté sensuelle de la femme de la Grâcedieu. Tandis que sa famille aveuglait de santé et de vigueur, elle scintillait simplement, comme une étoile timide. Comme un mauvais présage qui signait le reste de sa vie.
Cette différence, Ryanne de l’avait jamais réellement sentie. Petite fille souriante à la naïveté étonnante, elle se berçait d’insouciance et probablement d’illusions, choyée dans un foyer aimant.
*
S'il y a bien une chose qu'elle détestait, c'était d’être la petite. La benjamine. La dernière née. Elle adorait ses frères. Edan, de presque dix ans son aîné qui était déjà un homme mûr et qui n'oubliait jamais de lui rapporter des cadeaux du bazar et du marché et lui parlait comme si elle était elle aussi une grande personne et Lohan, ce demi-frère qu’elle considérait comme un frère, sauvage comme un poulain et qui s’était amusé à cacher un serpent dans sa chambre alors qu’elle avait dix ans et lui treize. Mais malgré leurs personnalités opposées, ils étaient tous les deux faits du même spectre. Ryanne, elle, était prise entre eux, écartelée par deux extrêmes, étouffée par l’impression qu’ils ne lui laissaient pas assez d’air pour respirer, condamnée à vivre dans leurs ombres.
Quand elle se sentait comme ça, elle aimait se faufiler dans le bureau d’études de son père avant de se cacher sous la table de bois, comptant les rouleaux qui attendaient l'attention du Lord. Le père de famille l'ignorait au début, donnant de petits coups de pieds à sa fille sans que ses yeux ne quittent les lignes qu’il lisait, jusqu'à ce qu'elle arrête de bouder et commence à rigoler. Puis, il la soulevait et l’asseyait sur ses genoux où elle se lovait contre les tuniques brodées qui sentaient le désert, les embruns et la sueur.
Son père l’autorisait à observer tous les papiers, de consulter toutes les cartes et la benjamine aimait tracer leurs formes avec son index : les sommets déchiquetés, les rivières sinueuses, les lignes courbes qui se déroulaient jusqu’à l’horizon. Son père lui expliquait tout : la géographie, les stratégies militaires, la gestion de ses terres, pour qu’elle devienne un appui pour son frère aîné.
Un jour, des noms, des prénoms et des blasons remplacèrent les jolies cartes colorées et sous le regard interrogatif de sa fille, Yorick l’informa avec un sourire satisfait qu’il s’agissait de potentiels prétendants. Mais Ryanne, trop jeune, ne comprenait pas encore le sens de ces mots.
Ferboys, an -13Sa première floraison fut un traumatisme. Une douleur déchirante qui la laissait étourdie de douleur au milieu de ses draps ensanglantés. L’hémorragie ne semblait jamais vouloir s’arrêter, gargouillante comme une rivière joyeuse.
Chaque matin, les domestiques étaient horrifiées par l’ampleur du travail à fournir : matelas, soieries et draps devaient être systématiquement changés. L’adolescente, percluse de douleur, comme une martyre, laissait son corps amorphe s’abandonner à ces mains qui la lavait, inlassablement. Elle oubliait sa pudeur naturelle et sa réserve, poupée ensanglantée dont la peau olivâtre prenait une étrange teinte grisâtre à mesure que le temps filait.
Après deux semaines, enfin, le calvaire s’arrêtait. Mestre Sarel, jeune, mais loyal et intelligent, avait affirmé avoir rencontré un cas semblable, une fois. Ryanne endurerait chaque floraison comme une épreuve et elle aurait probablement des difficultés à enfanter. L’érudit appelait cette malédiction « le sang faible ». La jeune femme accueillit la nouvelle avec une froideur inconnue, hochant simplement la tête avant de congédier le savant.
Une fois seule, elle s’autorisa à pleurer sans un bruit, les yeux rivés vers ce ventre qu’elle ne se surprenait même pas à haïr. Terrassée de fatigue, les muscles tétanisés, elle s’endormit pour être réveillée par la main maternelle caressant ses longs cheveux sombres.
« Tu es si jolie, » murmurait pensivement sa mère. « Un jour, tu feras une charmante épouse. »
Ryanne ne répondit rien. Elle songeait avec une tristesse non feinte à la femme de son frère, Ness Poulet, splendide avec sa peau d’albâtre et ses cheveux blonds. Elle, n’était pas belle avec sa peau grise, ses mèche couleur de charbon, ses yeux comme deux châtaignes agonisantes sur un brasier et ce corps chétif. Pire, comment pourrait-on la choisir comme épouse si elle était à peine capable de donner des fils et des filles ? Elle répéta le fond de sa pensée à sa mère qui ne fit que rire.
« Je vois la force, la fierté intérieure, » murmura sa mère en souriant. « Cela te fait briller, ma fille. »
Ferboys & Wyl, an -5
Ryanne n'était jamais parvenue à pleinement accepter sa condition. Elle ne pouvait s'habituer aux faiblesses soudaines qui l'assaillaient parfois ; elle ne pouvait pas déguiser sa stature mince et chétive qui était si bizarre à Dorne, terre de sensualité et des courbes. Mais elle était parvenue à se frayer un chemin au travers de ses lacunes. Ce qu'elle manquait en santé, elle tentait de le compenser par sa personnalité et son aura ensoleillée ne venait certainement pas de sa beauté physique, mais de la force de la présence. Car elle était vive, charmante, spirituelle et consciencieuse. Ryanne était une rareté de femme à Dorne, avait un jour dit Edan. Pas à cause de son apparence mais à cause de son cœur pur.
Et c’était peut-être cela qui avait convaincu les Wyl de l’unir à l’oncle du tout jeune héritier. Waylar n’avait que trois ans de plus qu’elle, mais la Ferboys ressemblait à une petite fille à côté de lui. Ryanne accepta le mariage avec une sérénité déconcertante quoique teintée d’une légère appréhension. L’homme lui plaisait. Elle s’était renseignée sur lui, une fois informée du nom de son futur époux. Comme elle, il était le benjamin d’une fratrie de quatre frère dont deux étaient déjà pères. Comme elle, il était certain de ne jamais hériter du titre de Lord. Et c’était peut-être l’absence de l’épée de Damoclès au-dessus de leur tête, l’absence d’urgence de fournir des héritiers à chacune de leur lignée qui rendait cette union si facile.
Pourtant, malgré cette prétendue harmonie, l’amour ne naquit jamais entre les deux époux. Pour Waylar, elle était douce, exquise et d’une gentillesse rare. Dotée d’un charme discret, si l’on regardait bien et que l’on parvenait à oublier les os saillants de ses épaules, de ses hanches et de ses genoux qui lui avaient voulu le surnom de « L’Osseuse », référence mauvaise au col des Osseux que défendait sa famille depuis des générations. Pourtant, elle ne parvenait pas à combler un vide inexplicable en son cœur, un vide qui se languissait d’être comblé. Il éprouvait un mélange amer de tendresse et de pitié à son égard et leur complicité et respect mutuel ne s’apparentait en rien à de l’amour.
Ryanne, elle, s’ennuyait à Wyl. L’univers stimulant et débordant de vie de Ferboys lui manquait terriblement. Adepte du jeu de cyvosse, conseillère privilégiée de son père en stratégie et jouissant d’une gentille répartie, elle ne trouvait personne pour s’accorder à son caractère, perdue au milieu des Montagnes Rouges. Les Wyl et leurs vassaux, fatigués d’avoir à lutter contre le Bief et l’Orage, belliqueux de nature et bourrus, ne possédaient pas la fougue et le tempérament chatoyant que recherchait la brune, pour contrebalancer sa placidité et sa discrétion. Pire, née dans une famille fidèle aux Martell et élevée dans un fief puissant, riche et tranquille, elle découvrait une autre réalité faite de méfiance vis-à-vis de la famille princière, de hameaux brûlés et de soldats mourant face à des frontières instables.
Elle sentait la délicatesse forcée de son époux lorsqu’il la touchait, cette retenue insupportable lorsqu’ils tentaient de s’aimer. Craignait-il de la briser ? De l’écraser ? Croyait-il que sa femme était faite de porcelaine ? Ryanne n’était pas faible, mais ces mots maintes fois prononcés ne changeaient rien.
Ce n’était pas assez.
Wyl, an 0, mois 4La nouvelle était tombée comme un couperet. Glacée, les jambes coupées, deux domestiques accoururent pour soutenir Lady Ryanne qui défaillait. Dans un trouble flou, elle entendait l’agitation autour d’elle, les exclamations d’horreur et de colère. Elle était perdue dans ce maelström étourdissant qui manquait de la faire vomir. Elle ne fut ramenée à elle que grâce à l’odeur répugnante de la concoction d’herbes sèches qu’elle tenait toujours enfermée dans une petite bourse à son poignet.
Lord Wyl, Waylar, son père et sa mère avaient trouvé la mort dans le Bief.
Cette réalité, trop dure à accepter, elle ne pouvait s'y soumettre. Inerte, fantôme en son propre corps, ses grands yeux sombres observait son monde sans le comprendre.
Son regard se posa sur ses jambes ensanglantées. Au milieu du chaos, son enfant à naître avait décidé de crier, lui aussi.
Terrorisée, abattue de chagrin, elle tentait de ne rien laisser paraître alors qu’elle craignait que le choc n’ait tué le bébé.
Après deux jours de souffrance, elle donna naissance au dernier fils, au fils posthume, de Waylar, Dalmor. Né prématurément, il était minuscule, mais vigoureux. Instinctivement, comme une réplique naturelle, comme une tentative désespérée de combler ce nouveau vide en elle, elle aima son fils instantanément. Férocement. Elle l’aimait pour être le fils de son époux. L’élan de vie au milieu du chaos. La preuve qu’elle et lui tenaient toujours debout. Malgré tout cela.
Une semaine plus tard, elle recevait un corbeau de son frère aîné, lui demandant de revenir impérativement à Ferboys. Il craignait pour sa sécurité à Wyl, trop proche des frontières ennemies, et demandait son aide. Soucieuse de l’héritier de la famille de son époux, pourtant adolescent désormais, on lui assura néanmoins qu’elle pouvait rentrer chez elle avec ses fils, une fois ses forces retrouvées.
Ferboys, an 1, mois 3Ils étaient là. Grouillant aux portes comme des tiques assoiffées de sang. De vulgaires hommes, ridicules et cuirassés au milieu du désert. Ridicules, certes. Mais qui mettait à genoux la belle Ferboys après avoir ravagé Wyl la belliqueuse, après avoir pillé les Montagnes Rouges, ravagé Les Météores et tué les hommes et les femmes du soleil.
L’œil critique de Ryanne scrutait l’armée organisée du Bief tandis que du haut de la forteresse, les dernières marmites d’huile brûlante étaient déversées sur les têtes du nord. Horrifiée par la guerre, elle l’avait été au début du siège. Sa bonté avait été mise à mal par les exactions des deux armées, par le sang qui semblait se glisser jusque sous la porte de ses appartements. Par la mort qui rôdait dans chaque couloir.
Aujourd’hui, pourtant, son esprit cartésien avait repris le dessus. Son frère, Amiral de la flotte de Dorne, avait été appelé en urgence avant le siège de sa cité pour combattre à Boycitre contre les navires bieffois. La gestion des terres avait été laissé à Lohan, Ness, son fils et Ryanne. Stratège à l’esprit fin, la Ferboys avait dû mettre de côté sa réticence à la violence pour défendre son foyer. L’âme militaire de Lohan, le charisme de leur neveu et les capacités d’organisation de Ness avaient transformé Ferboys en véritable forteresse qu’ils auraient voulu imprenable. Si la brune avait voulu dans un premier temps secourir Wyl suite aux appels à l’aide de son neveu, elle avait été contrainte, le cœur brisé, de répondre négativement à ses lettres dès lors que l’armée verte avait été repérée, fonçant droit sur eux.
Malgré leurs efforts, cependant, malgré les discours flamboyants de l’héritier, la fatigue, la faim et les blessés empêchaient les dorniens de sortir la tête de l’eau.
La reddition fut votée conjointement et amèrement par le quatuor après un nouvel assaut du Bief. Dans le même temps, Boycitre tombait entre les mains vertes de leurs assaillants.
Au milieu de tout cela, alors que les Bieffois entraient dans la forteresse, Ryanne ne pouvait s’empêcher d’en vouloir aux Martell. Si son frère combattait fièrement à leurs côtés, elle avait le sentiment que la Princesse sacrifiait les Montagnes Rouges au nom d’un orgueil et d’une indépendance qui semblait perdue. Les nouveaux liens avec le Tigre de Volantis et les Valyriens étaient-ils la solution ? Ryanne en doutait. Car en croyant préserver l’autonomie de Dorne face au reste de Westeros, la Princesse ne se soumettait-elle pas indirectement à Essos ?
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