Belanda commençait à en avoir assez. Elle avait tenu sa part du marché, et le Hoare s'était remis sur pieds, retrouvant toute sa force, sa vitalité, sa vigueur, sauf que... Sauf qu'elle avait la vague impression qu'il oubliait comme quelque chose qu'il lui avait pourtant promis. Sa liberté. Belandra n'était pas faite pour la captivité, la preuve étant qu'elle avait déjà fui une première fois. Et elle avait fait tout son possible pour que cette deuxième captivité ne soit qu'éphémère, rapide, en échangeant de bons soins contre sa libération. Libération qui ne venait pas. Et la dornienne s'inquiétait.
Elle en avait assez de tourner en rond en attendant qu'on vienne lui annoncer une bonne nouvelle qui ne se montrait définitivement pas. Et puis, elle voulait rentrer chez elle. Il y avait sa boutique qui l'attendait, ses affaires. Sûrement quelques lettres envoyées par son père, ainsi que de la marchandise qu'elle était censée récupérer, lui parvenant tout droit de Dorne, constituée d'épices et d'autres produits exotiques. Alors oui la belle était actuellement en train de perdre du temps, et de l'argent. Et cela l'agaçait.
Elle avait fini par demander à s'entretenir avec le fameux prince. Eh bien quoi ? Il n'avait plus aucun excuse pour l'éviter, maintenant qu'il avait retrouvé sa forme de jeune homme. A sa surprise, il ne rechigna pas à la voir et l’accueillit presqu'aussitôt. Mais cela ne suffisait pas à la contenter pour autant. Elle avait le visage fermé, et c'est à peine si elle disait quelques mots, encore moins bavarde que d'habitude. Elle était inquiète, elle était réellement inquiète. Belandra n'était pas née de la dernière pluie, et elle se savait désavantagée dès le départ sur ce marché. Qu'avait-elle comme preuve de sa bonne foi ? Rien. Que pouvait-elle lui contrer s'il décidait de changer d'avis ? Rien. Elle ne pouvait qu'espérer, uniquement espérer, qu'il tienne parole. Et Belandra n'était pas le genre de personne à tout fonder dans ses espoirs.
Restée dans un coin de la pièce, à le fixer sans rien dire, elle attendait. Elle attendait, lui laissant une dernière occasion de lui annoncer par lui-même – peut-être – qu'il se décidait à la laisser repartir. Mais non. A la place, la dornienne assistait plutôt à une séance de peinture improvisée, ne comprenant rien à ce qu'il faisait, strictement rien. Qu'était-ce donc ? Mais elle n'avait pas la tête à essayer de déchiffrer son comportement. Comportement qu'elle ne comprenait pas, d'ailleurs. Pourquoi lui parlait-il de tout cela, au juste ? Des sirènes ? Silencieuse, elle ne dit pas un mot, le laissant terminer. Sûrement était-il question de la guerre. Bien. « D'autant plus que maintenant vous avez retrouvé toute votre force. Très bien. Montrez-leur ce dont vous êtes capable, mais montrez-moi aussi que vous êtes un homme de parole. Nous avions convenu que vous me rendriez ma liberté, n'est-ce pas ? » Elle le fixait, droit dans les yeux. Son visage n'avait rien de rassurant avec toute cette peinture et pourtant... Belandra parvenait à rester impassible face à lui. Peut-être parce qu'elle avait déjà vu similaire. Les Fer-nés et les Dorniens n'avaient pas beaucoup de point communs, hormis un seul : ils étaient tous deux considérés comme des barbares par les peuples de Westeros, les uns comme des pirates, et les autres comme des gens aux mœurs légères. … Ce qui n'empêchait pas Belandra de considérer tous les peuples de Westeros à la différence de Dorne comme des barbares. Ethnocentrisme, quand tu nous tiens.
Lentement, elle s'avança vers lui, s'arrêtant lorsqu'elle fut à une distance correcte : ni trop loin, ni trop proche. « J'ai rempli ma part du marché. Je vous ai soigné, vous êtes de nouveau en pleine forme, et j'en suis ravie. Mais maintenant, c'est à vous de me rendre ce que vous m'avez promis. Cela fait depuis une semaine que j'attends. »