Juché sur le haut de ma monture princière aussi imposante qu'un charroi et aussi sombre qu'une tache d'encre au milieu d'un parchemin craquelé à l'instar des arides paysages dans lesquels nous nous trouvions, je calai fermement un poing ganté sur ma hanche le coude nonchalamment posé sur la garde de mon sabre. Mes yeux observateurs se perdaient dans la contemplation de la vaste foule rassemblée par mes hérauts depuis quelques dizaines de minutes. Une rivière dépenaillée de femmes et d'enfants amaigris et aux expressions hagardes au plus profond desquelles se décelaient aisément la terreur autant que le dépit d'une nuit de massacre ethnique menée tambour battant. Triste tableau qu'icelui de mon peuple chassé de ses propres terres par des envahisseurs sanguinaires aux coutumes iniques ! Particulièrement détestable que celui de ces familles privées d'hommes tant les maris, les frères, les pères, les cousins ont trouvé un trépas honorable mais néanmoins injuste dans la lutte mortelle face aux Valyriens. Mes trippes se serrèrent naturellement devant le dénuement pitoyable dans lequel se trouvaient ces gens qui était devenu mon peuple suite à ma proclamation. Bien que quelque peu désappointé de ne point compter de vaillants revanchards dans les rangs qui eurent été plus que les bienvenue dans mon armée, cette considération politicienne et stratégique s'oblitéra littéralement devant la détresse de ces exilés qui avaient perdu bien davantage que leurs foyers et leurs biens dans cette tragédie. Il ne faisait pas le moindre doute qu'en sus de parents et d'amis, les enfants y avaient perdu leur innocence et les mères leur paix intérieure. Nombre de ces malheureux étaient probablement traumatisés dans leur cœur comme dans leur chair. Et contre cela aucune de mes paroles ni aucun de mes actes ne pourraient leur offrir un juste retour des choses. Tout ce que je pouvais était prendre soin d'eux à présent. Chose que ma merveilleuse et courageuse compagne s'activait d'ores et déjà à faire un peu plus loin distribuant mots doux et couvertures ainsi que soins et compréhension encadrée par une dizaine de nos chevaliers zélés. Les petites gens semblaient littéralement l'adorer tant elle dégageait une pureté sans égale dans son attitude bienveillante. Talonnant doucement Ténébreux, j'entrepris de la rejoindre au pas.